Quatre heures de cours intensives. Une ballade. Et de nombreuses heures d'observations. Voilà ce qu'avait Kwaïgon à son actif en se présentant à Liam ce matin là. Pour son dernier cours d'apprentissage avec l'éleveur, le coréen avait fait l'effort de se lever tôt. Enfin, tôt pour lui. Donc sur les coups de huit heures. Il s'était préparé sans grand soin, comme à son habitude, et avait rejoint l'élevage de Liam avec la ferme intention de faire un bon cours. Ce dernier lui avait dit qu'ils « entreraient dans le dur » pour son dernier cours obligatoire et c'est avec une satisfaction intérieure que le jeune homme avait imaginé pouvoir enfin monter un des chevaux de l'élevage de Liam.
« Salut ! » « Ah Kwaïgon ! Bonjour ! Ça va ? » « Parfaitement bien et toi ? » « Ça va. Prêt pour ton dernier cours ? » « Oui ! » « Parfait ! Alors tu vas prendre Eurodisney. Mais je te préviens, c'est pas un conte de fée ce cheval... Call à côté c'est un chaton nouveau-né... »
Liam se redressa de son seau de granulé et lu le grand désarroi qui se dessinait dans le regard du coréen. Il sourit gentiment au brun et lui tapota amicalement l'épaule.
« Si tu tiens sur son dos toute la séance, je te promets que je te laisserais même Call les yeux fermés. Tu me rejoins ici quand tu peux avec le monstre ! Bon courage ! »
Sur ces bonnes paroles, Liam s'éloigna avec son seau vers la réserve, laissant Kwaïgon seul dans l'allée. Le coréen soupira. Si ce que Liam disait était vrai, il allait en baver avec ce cheval... Mais il relèverait le défi. Après tout, si l'éleveur lui avait attribué ce cheval, c'est qu'il pensait qu'il était capable de monter dessus. Après, y rester était une autre histoire mais bon... Pour l'instant, il lui faudrait trouver l'animal et le préparer. Ce qui risquait de ne pas être une mince affaire non plus...
Les stalles du Haras étaient désormais un endroit familier au garçon. Les chevaux, attachés au fond de leurs boîtes ouvertes, en rang d'oignons, étaient calmes dans l'ensemble. Une plaquette indiquait leurs noms au dessus de leurs têtes. C'est les yeux rivés vers elles que le garçon parcouru l'allée, jusqu'à tomber sur le fameux Eurodisney. Il resta un moment à fixer sa croupe immaculée, sans que la bestiole ne daigne lui jeter un seul regard. Il avait l'air calme finalement. Mais si Liam l'avait mis en garde, c'est qu'il y avait une bonne raison à cela. Le coréen prit une grande inspiration et s'avança vers le blanc, un peu de biais, et posa une main sur sa croupe pour le prévenir de sa présence. La réaction fut vive et instantanée. Le sabot le plus proche du garçon battit l'air un peu trop près de sa cuisse alors que l'équidé relevait la tête vivement. Le coréen eu un mouvement de recul alors que le cheval baissait de nouveau le nez pour manger sa paille. Sans contact physique, il ignorait complètement le coréen. Il commençait à comprendre en quoi il était plus terrible que Call...
« Ça commence bien... »
Réflexion faite, le garçon allait le laisser dans sa stalle pour le brosser. C'était plus sûr pour tout le monde. Et en particulier pour lui. Enfin, c'est ce qu'il pensait. Ce qu'il ne savait pas encore, c'était à quel point le cheval qu'il avait en face de lui était vicieux. Mais cela, il allait bientôt le découvrir.
Sans attendre plus longtemps, le jeune homme se dirigea vers la sellerie, et rempli un seau de tout ce dont il avait besoin. Il enfila le filet du cheval sur son épaule et coinça la selle contre sa hanche et reprit le chemin de la stalle du « monstre ». Le blanc était toujours là et l'ignorait toujours aussi royalement. Ce qui ne perturba pas plus le coréen que ça. Il déposa toutes les affaires sur leurs socles et, armé d'une étrille, pénétra de nouveau dans la stalle. Mais cette fois, loin de l'équidé. Une mains sur son épaule et la main étrillé sur son dos, il commença le ballet de ses petits ronds. Durant les premières secondes de ce début de relation, rien ne se passa. Eurodisney restait calme, un antérieur au repos. Il mangeait, en balançant sa queue derrière lui. Et puis, sans qu'il ne relève le nez pour autant, tout son poids se déporta sur Kwaïgon, qui se retrouva plaqué au mur sans savoir ce qu'il lui arrivait.
« Hey ! Eurodisney ! Bouges !! »
Le coréen se dandina sur lui-même sans succès. Il avait l'impression que plus il bougeait, plus le cheval l'écrasait. Sans aucun état d'âme en plus de cela parce que le cheval poursuivait son broutage de paille. Face à cette situation, le coréen se dit qu'il avait deux options. Soit il se fâchait vraiment, soit il se détendait et optait pour le même comportement que le blanc, c'est à dire l'ignorance. Les bras ballant au dessus du cheval, le corps contre le mur, il cessa de bouger pour réfléchir un peu. Qu'est-ce que ferait Izikel dans cette situation ? Il n'y avait aucun doute que le jeune homme ne se serait pas retrouver dans un tel état de toute façon. Le coréen soupira et opta pour la seconde option. Lui aussi allait ignoré le blanc. Arquant son bras, il poursuivit son pansage comme il pouvait. Un cavalier passa dans l'allée en le regardant étrangement, mais le coréen ne s'en soucia guère et sourit avec assurance avant de poursuivre. Ce n'était pas facile de passer une étrille sur le dos d'un cheval quand celui-ci vous plaquait au mur. Mais il persévérait. Persévérance qui fini par lasser le blanc. La bestiole se décolla du mur pour mettre au repos son autre antérieur. Laissant, accessoirement, assez de place à Kwaïgon pour respirer et poursuivre de façon plus correcte son pansage. Durant tout le temps que le garçon prit pour passer l'étrille et le bouchon, Eurodisney ne broncha pas plus. Il donnait des coups de queues vifs pour fouetter le cavalier ou le menaçait de ses sabots s'il passait à porter de tir mais rien de plus. Jusqu'à ce que le garçon en vienne au cure pied...
Le coréen décida de commencer par un antérieur. Et plus particulièrement, par celui que l'équidé présentait face en l'air. Il se positionna donc près de son épaule et attrapa l'antérieur pour commencer à le curer. Tout se passait bien, jusqu'à cette douleur aigu dans sa cuisse. Le "à porter de dent" était passer à la trappe. Le coréen étouffa un juron dans sa langue natale et termina de curer l'antérieur avant de quasiment le jeter par terre pour se redresser. Il s'éloigna des dents meurtrières en se massant la cuisse mais en se gardant bien d'enguirlander le blanc. Il voulait feindre l'ignorance, lui aussi. Il fit le tour de la bête en évitant les postérieurs et raccourcit la longe d'attache avant de faire l'autre antérieur. Cette fois, son autre cuisse était hors de portée. Ce qui sembla faire rager le blanc. Pour résultat, il fut impossible d'avoir le sabot du cheval plus de deux secondes entre les mains. Il s'échina tout de même dessus pendant cinq bonnes minutes avant de tenter les postérieurs. Mais il du faire face au même problème. En plus d'une queue qui voulait le fouetter. Il se tourna alors vers l'équidé, mains sur les hanches et sourit.
« Tant pis pour toi ! »
Sur ce, il jeta le cure pied dans le seau et attrapa le tapis et amortisseur, qu'il plaça sur le dos du cheval rapidement. Il manqua tout juste de se faire plaquer une fois de plus contre le mur. C'est qu'il fallait être leste avec ce cheval ! Il le prit à défaut en mettant la selle par la droite et sangla rapidement. Bien sûr, le cheval gonfla le ventre, mais il ressanglerait plus tard. Désormais, c'était au tour du filet. Le coréen laissa au cheval son licol, évita des coups de dents, et tenta de lui mettre le mors, sans succès. Finalement, en désespoir de cause, il plaça le mors sur son bras et le présenta comme en offrande au blanc.
« Ben vas-y, mords. »
Presque sans succès. Le cheval le bouda un instant avant de tenter de la niaquer. Opportunité qui permit au coréen de lui mettre le mors dans la bouche. Maintenant, il fallait qu'il y reste. Le licol permettait de garder la tête du cheval à bonne hauteur, ce qui lui fut très utile. Ceci fait, il lui mit un second licol en collier attaché à la longe et démonta le premier licol pour pouvoir l'enlever de la tête du blanc. Après une bataille acharné -le blanc ne lui facilitait bien sûr pas la tâche-, il recula pour admirer le tas. Il était plutôt fier de lui et un sourire se dessina sur ses lèvres. Il était en nage avant même d'avoir pu poser ses fesses dessus mais il était déjà content de lui. Il n'avait mit qu'une demi-heure pour le préparer. Il enfila sa bombe et sorti finalement le cheval de sa stalle, le laissant manger une rêne pour préserver ses bras.
Le chemin jusqu'aux élevages fut mouvementé. Plusieurs fois, le coréen sentit les dents du cheval claquées près de lui ou se retrouva face à lui. Il failli aussi se faire plaquer contre un mur et se retrouva bousculer à plusieurs reprises. Le grand jeu du blanc avait aussi été, durant un bon morceau du trajet, de viser les pieds du cavalier. Il avait souvent réussi son coup d'ailleurs, et le coréen se demandait dans quel état il allait retrouver son corps à la fin de la séance. Ou même ; s'il allait seulement ressortir de là en un seul morceau. Cela dit, c'est en homme fier qu'il se présenta devant Liam.
« Et voilà. »
Le français se releva de sa botte de paille pour voir avec un certain étonnement le coréen et sa monture.
« Bravo ! Je ne t'attendais pas si vite ! » « Ben si. » « Alors allons-y ! »
Il sourit et ouvrit la marche. A peine deux pas plus tard, il se retrouvait bousculer par la croupe d'Eurodusney qui avait fait un rapide demi-tour. Désormais face au Haras, il poussait un puissant hennissement. Le coréen en fit une grimace. C'est qu'il avait de la voix le gazier ! Cependant, Kwaïgon, qui commençait à avoir presque l'habitude, se plaqua contre le poitrail du blanc et poussa, pour le faire aller en marche arrière. Bien sûr, le hongre résista avant de se décaler lestement. Le coréen atterri dans les bras de Liam alors que le blanc se replaçait derrière eux, les oreilles en avant. Comme s'il n'avait rien fait.
« Ça promet... Je n'aurais peut-être pas du te le donner finalement... Mais bon, maintenant qu'il est prêt, on y va. »
Faible sourire du coréen, regard noir envers le cheval et ils poursuivirent tous leur route. La carrière donnant sur la plage était idéale. Trop loin de tout, elle était peu fréquenté. Et en effet, il n'y avait personne dedans à ce moment là. Par sécurité, Liam ferma bien la porte, pendant qu Kwaïgon se faisait trainer sur la piste. Le coréen voulait aller au milieu, mais Eurodisney n'avait pas l'air de cet avis. Mais après un demi tour de carrière, le cheval se rangea dans l'avis du cavalier. Sous le regard un peu désespéré de Liam, il faut bien le dire... Le coréen se mit en selle et entreprit de ressangler, alors que le hongre poursuivait ses agissements anti cavalier. Il tournait sur lui même pour essayer de choper la main du coréen et le mordre. C'est à ce moment là que Liam décida d'agir un peu. Il passa entre les barrières et fila vers son élevage.
Cinq minutes plus tard, le hongre était ressangler et marchait sur la piste, une belle muserolle croisée toute neuve sur le nez. La muserolle l'empêchait de mordre à tout va, ce qui laissait un peu le temps à son cavalier de souffler. Ce qui n'était pas sans être appréciable.
« Bon, aujourd'hui, on va voir les rudiments de quelques figures et position. Tu sais que le cavalier utilise un code pour se faire comprendre de son cheval. L'assiette déjà, puis les jambes et les mains. Tu connais la plupart de ces "codes" mais on va les revoir ensemble pour que tu ai de bonnes bases pour la suite. Et on va aussi en appliquer certains sur des exercices simples, qui t’amèneront, plus tard, à des figures de haute école. Commençons par les mains. La rêne d'ouverture, et la rêne d'appui. Connais-tu la différence entre les deux ? »
Le coréen regardait vers le ciel, la main en visière au dessus de ses yeux. La boîte contenant son Aston Martin s'éleva dans les airs avant de retomber avec presque finesse sur le quai de chargement de la soute. Elle était chargée la première. Venait ensuite le ballet des chevaux des élevages de Louna et Liam. Mais cela, le jeune homme ne le regarda pas. Une fois que la voiture eu disparu derrière la carlingue, il tourna les talons et baissa les yeux pour rouler une cigarette...
Cette fois, Liam et Louna avait vu les choses en grand. Louna avait un peu grimacer, mais Liam avait terminé de la convaincre. Ils avaient loué un avion entier pour le retour. Ils en avaient assez de faire plusieurs voyages pour les chevaux. Cette fois, c'était tous ensemble ou rien. Ce qui ne dérangeait pas outre mesure le brun. En fait, il s'en fichait tant qu'on lui foutait assez la paix et qu'on ne critiquait pas ses "coup de main". Ce qui était le cas. Il tira une taffe sur sa cigarette et leva le menton pour rejeter la fumée. Myriam et Lou étaient déjà dans l'avion. Le coréen n'attendait plus que de terminé sa cigarette pour les rejoindre. Les autres regardaient les chevaux être chargés. Ils étaient bien assez de quatre pour surveiller la manoeuvre. Ils n'avaient pas besoin de lui. A vrai dire, qui avait besoin de lui ? Ils faisaient tous en sorte de l'intégrer à l'équipe. De l'englober dans tout ce qu'ils faisaient. Mais malgré tout, il se sentait un peu à part dans ce monde. Ce n'était pas vraiment le sien en fait. Il avait fait un temps parti des courses, mais maintenant... Il n'avait pourtant pas oublier comment on s'occupait et on montait à cheval. Mais il se sentait à part. Et il ne faisait rien pour changer cela. Il aimait bien la solitude et l'indépendance que cet état lui procurait. Personne ne lui demandait de compte, alors qu'Ezra et Izikel était sans arrêt obliger de faire des résumés de leur travail. On attendait d'eux qu'ils s'occupent des chevaux des élevages, qu'ils les travaillent. Ce serait la même chose pour Logan et Lou, qui avaient tout deux de meilleurs niveaux que lui. Mais lui ? Jamais. Il ne montait jamais seul. Non pas qu'on ne lui en donne pas l'autorisation, mais c'était ainsi. Il ne montait pas non plus les chevaux des élevages, et finalement, il avait apprit à ne pas le vouloir. Il était à la fois dans l'équipe et à la fois laisser pour compte. Prit pour le petit bleu qui ne savait rien faire de ses dix doigts. Alors que pourtant... Il était tout à fait apte à faire la même chose que les autres... Les cours qu'il avait prit en cachette durant tout l'été y était pour quelque chose. Mais ça, il ne comptait le dire à personne...
Il termina sa cigarette et écrasa le mégot au sol avant de le glisser dans une boîte en métal qu'il gardait dans son paquet, à côté du briquet. D'un pas lent, il se dirigea vers la passerelle d'embarquement en adressant un léger sourire à Louna et disparu dans l'avion. Myriam et Lou étaient assise à côté et discutaient allègrement. Il leur sourit et s'enfonça jusqu'au milieu de l'appareil. Ils avaient une centaine de sièges rien que pour eux et donc l'embarra du choix ! "Au fond" par rapport aux autres, il ne serait pas déranger au moins. Il laissa basculer le dossier de son siège en position semi allongé et ferma les yeux, en attendant que ça se passe. Une demi-heure plus tard, une hôtesse lui tapotait l'épaule pour qu'il redresse son siège et s'attache. Ils allaient décoller. Comme il l'avait prévu, les autres étaient réuni en début d'allée. Il attendit la vitesse de croisière et s'allongea à nouveau, sombrant dans les limbes du sommeil...
***
Le feu crépitait doucement dans la cheminée. Il le fixait, perdu dans ses pensées. L'arrivée à Londres s'était faite sous la pluie, mais il n'y avait rien d'étonnant à cela. Il pleuvait souvent en Angleterre. Tout le monde avait débarqué dans le calme, même Lovely Alibi. A grand renfort de tranquillisants mais au moins, le trajet jusqu'au Haras s'était bien passé grâce à cela. Il avait récupéré avec joie sa voiture et avait donné un rapide coup de main pour ranger le matériel dans les différentes selleries. Désormais, le soir tombait et tout le monde s'était dispersé. Ezra et Izikel s'étaient empressés d'aller goûter à la vie nocturne londonienne, Liam et Myriam avaient retrouvés leur chambre alors que Louna devait sans doute goûter aux joies des retrouvailles avec Enzo. Lou faisait faire un tour à Logan dans le domaine et lui restait donc seul. A vrai dire, ça ne le dérangeait pas du tout. Il soupira en reprenant ses esprits et regarda de nouveau l'écran du pc posé sur ses genoux. Il parcouru une fois de plus la fiche de présentation du cheval sur lequel il louchait. Mais est-ce que c'était vraiment raisonnable ?
Il n'avait jamais voulu d'attache. La seule fois où il avait conservé une attache quelque part, elle l'avait trahi, et le résultat était qu'elle était morte devant ses yeux. Il ne voulait plus être dépendant de quelque chose. Il ne voulait pas qu'on puisse l'atteindre à cause de quelqu'un ou quelque chose. Et jusque là, il avait toujours fait en sorte de ne pas éprouver trop d'affection pour quoi que se soit ou qui que se soit. Mais là, s'il achetait ce cheval, ne serait-ce pas une forme d'attachement ? Il serait responsable de l'animal et, il le savait, à force de le fréquenter il finirait par s'y attacher. Alors, pour quelqu'un qui prenait grand soin de ne pas s'attarder sur de telles choses, est-ce que c'était vraiment raisonnable ? Il en doutait fortement.
« Il est beau. »
Le jeune homme sursauta et se retourna vivement, manquant d'avaler sa salive de travers avec cette voix venue de nulle part. Il croisa le regard de Lou-Khyan qui lui sourit, et contourna le canapé pour s'asseoir à côté de lui. Il la suivit du regard sans dire un mot, avant de tourner enfin les yeux vers son écran à nouveau. Il voulu fermé la page mais la demoiselle l'en empêcha en retenant sa main. Il fit les gros yeux et pour seule réponse, la demoiselle lui prit le pc des genoux. Cette fois, le coréen émit un son.
« Hey ! » « Tiens ! T'es pas muet ? J'avais cru à un moment. »
Il lui lança un regard mauvais alors que la demoiselle parcourait la fiche du cheval des yeux. Kwaïgon abandonna la bataille et prit son mal en patience. Accouder à l'accoudoir, le menton sur la paume, les yeux fixés dans l'âtre, il attendait. Au bout d'un moment, la voix fluette de Lou se fit de nouveau entendre.
« Il est vraiment beau... Tu voudrais le prendre ? »
Le coréen laissa retomber son bras et tourna la tête vers la demoiselle en lui lançant un regard noir, suivit d'un soupir. Cette fois la rouquine montra quelques signes d'agacements, soit une voix un peu plus agressive.
« Quoi ? C'est mal de te poser des questions maintenant ? » « Je ne sais pas. » « Tu ne sais pas quoi ? » « Si je vais le prendre. »
Lou se calma. Le jeune homme était agacé de s'être fait surprendre. Ce n'était pas spécialement un secret, mais s'il pouvait garder ça pour lui le temps de se décidé... Cela ne l'aurait pas du tout dérangé. En attendant, la demoiselle s'était de nouveau plongée dans la lecture de la fiche et elle fit une moue appréciative.
« Il est vraiment beau... Et il a l'air bien éduqué et tout... Ancien international de dressage, c'est pas mal... » « Oui. » « Pourquoi tu ne le montre pas à Liam ? » « Je ne veux pas que ça se sache. Et si tu veux bien garder ça pour toi, ça m'arrangerais grandement. Merci d'avance. »
Le coréen ferma doucement l'écran du pc portable et le prit des mains de Lou avant de se lever. La jeune femme le regarda d'un air interrogateur. Il hésita à ajouter quelque chose et finalement se ravisa. Ils se fixèrent un instant et juste quand le jeune homme allait partir, Lou se décida.
« Je ne dirais rien à Liam. » « Merci. »
Il s'éloigna, l'empêchant d'un regard de le suivre. Il préférait être seul. Il croisa Logan en chemin et se contenta de le saluer avant de disparaître dans la pénombre du dehors, en direction du parking.
***
Il avait découché. Passé la nuit dans un hôtel en centre ville de Londres. Il ne voulait croiser personne à vrai dire. Il avait reprit le chemin du Haras tôt le matin et avait retrouvé avec une certaine surprise Liam et Louna attablé pour le petit déjeuner. Louna avait ouvert de grands yeux en le voyant et lui avait fait signe de venir. Ce qu'il avait fait sans trop résister. Il avait peu dormit, et cela se remarquait à peine sur son visage. Ses traits fins l'aidait à garder un semblant de fraîcheur. Il sourit envers les deux éleveurs et s'assit à côté d'eux, en bout de table.
« Qu'est-ce que tu fais debout si tôt ? » « Un truc en ville. »
Liam lui lança un regard suspicieux sans pour autant dire un mot. Ils échangèrent un regard que Kwaï trouva des plus étrange et l'éleveur se perdit dans la contemplation de son café. C'est Louna qui reprit la parole, d'un air désinvolte et léger.
« Puisque t'es là, tu veux bien t'occuper de Nara ? Juste la panser et la mettre au pré. » « Ok. »
Le coréen se leva et prit de suite la direction des élevages, ignorant les étonnements de Louna. Il n'avait jamais réagit de la sorte à vrai dire. Il était plutôt lève tard et ne prêtait que peu main forte aux éleveurs. Mais il s'en fichait. A vrai dire, tout ce qu'il faisait était en mode automatique. Il arriva aux élevages qui étaient désert et entra dans celui de Louna. Il trouva sans mal Nara et, armé d'un bouchon et un cure pied, il entra dans le box de la pie.
Il savait la jument gentille et elle ne rechigna pas à le voir entrer dans son box pour la brosser. Elle se laissa doucement faire, le nez dans son filet de foin. Le jeune homme s'arrêta un instant de panser la jument en la fixant. C'était comme si rien ne s'était passé. Comme si Full Horse n'avait jamais fermé. Pourtant, pour lui, les choses étaient un peu différentes... Il avait grandi, équestrement parlant. Il n'était plus le cavalier chétif et débutant. Certes, il n'était pas aussi expert que les autres, mais il pouvait peut-être entrer dans la catégorie des confirmés désormais... Il soupira. Personne encore n'avait pu constater de cette évolution...
Il se reprit et poursuivit son pansage avec énergie. Il n'avait plus qu'une chose en tête, aller voir ce cheval qu'il avait repéré. Et peut-être le ramènerait-il au Haras ? C'est avec le coeur un peu plus léger et un fin sourire aux lèvres qu'il mena Nara jusqu'à un pré, une fine polaire sur son dos. Ni une ni deux, il reprit la route en direction d'une écurie en banlieue de la ville. Après tout, ça ne lui coûterait rien d'aller jeter un oeil...
Prologue Parce que l'avenir réserve de bien mauvaises surprises...
Lou-Khyan & Kwaïgon & Liam
/!\ Le début de ce résumé comporte une scène qui peut s'avérer "gore". Âmes jeunes et sensibles, s'abstenir. Les autres, vous êtes prévenus ! Merci !
♞ ♞ ♞
Dans un futur proche dans les Hamptons...
Kwaïgon se rangea sur le bas côté et coupa le contact. Il était sur une petite route au milieu de rien. Il faisait nuit et à sa droite, sous la falaise, la houle venait se briser sans grands fracas sur les rochers. L'océan était calme et il ne pleuvait pas, malgré l'hiver environnant. C'était une nuit paisible dans ce coin du monde. Personne pour le déranger. Personne pour le trouver. Mais finalement, il aurait peut-être préféré... Que quelqu'un le trouve et le dérange...
Il regardait devant lui, en tâchant de calmer sa respiration chaotique. Les mains crispées sur le volant pour arrêter les tremblements. Il voyait flou et réprima un sanglot à cause de la douleur intense qui lui traversait le corps. Il voulu prendre une grande inspiration mais la douleur était trop fulgurante et manqua de lui faire perdre connaissance de peu. Il desserra sa main droite du volant pour tenter de tourner la clé et remettre le moteur en route mais il tremblait trop pour atteindre de nouveau la clé. Il étouffa un cri de rage et de douleur entre ses dents, serrant son jean de sa main droite. Elle était couverte de sang. De son sang. Il était seul, loin de tout et de tous, et en train d'agoniser, incapable de faire quelques mètres de plus.
Il avait fini son job. Il avait lutté pour le finir mais maintenant, il était à bout de force et n'en pouvait plus. Il n'arrivait plus à se battre contre son destin, pour sa propre survie. Il se sentait partir, lentement, et ne pouvait rien faire contre cela. Le froid engourdissait peu à peu ses membres, avant de prendre possession de son corps entier. Maintenant s'il tremblait, ce n'était pas que de douleur, c'était aussi de froid. De petites étoiles se mirent à danser devant ses yeux et il fini par se laisser aller sur le siège de la voiture.
Était-ce la fin ? Il le pensait. Alors que ses dernières forces l'abandonnaient peu à peu ; que les tremblements cessaient en même temps que la douleur ; que le monde autour de lui sombrait dans le noir ; il repensa à toutes ces personnes qu'il avait connu dans sa vie. À ceux et celles qui l'avait accompagné durant des années. À ses chevaux... Qu'allaient-ils devenir sans lui ? Il ne savait pas. Il ne savait plus et n'était plus sûr de rien.
Puis ce fut le noir complet et cette nette impression de bien-être, juste avant que sa conscience ne s'évanouisse...
♞ ♞ ♞
Plusieur mois auparavant, à Full Horse...
Quatre heures de cours intensives avec Liam. Une bonne vingtaines d'heures de monte en cachette cet été. Une ballade. Et de très nombreuses heures d'observations. Voilà ce qu'avait Kwaïgon à son actif en se présentant à Liam ce matin-là. Pour son dernier cours d'apprentissage avec l'éleveur, le coréen avait fait l'effort de se lever tôt. Enfin ; tôt pour lui. Donc sur les coups de huit heures. Il s'était préparé sans grand soin, comme à son habitude, et avait rejoint l'élevage de Liam avec la ferme intention de faire un bon cours. Ce dernier lui avait dit qu'ils « entreraient dans le dur » pour son dernier cours obligatoire et c'est avec une satisfaction intérieure que le jeune homme avait imaginé pouvoir enfin monter un des chevaux de l'élevage de Liam.
— Salut ! — Ah Kwaïgon ! Bonjour ! Ça va ? — Parfaitement bien et toi ? — Ça va. Prêt pour ton dernier cours ? — Oui ! — Parfait ! Alors tu vas prendre Eurodisney. Mais je te préviens, c'est pas un conte de fée ce cheval... Call à côté c'est un chaton nouveau-né...
Liam se redressa de son seau de granulé et lu le grand désarroi qui se dessinait dans le regard du coréen. Il sourit gentiment au brun et lui tapota amicalement l'épaule.
— Si tu tiens sur son dos toute la séance, je te promets que je te laisserais même Call les yeux fermés. Tu me rejoins ici quand tu peux avec le monstre ! Bon courage !
Sur ces bonnes paroles, Liam s'éloigna avec son seau vers la réserve, laissant Kwaïgon seul dans l'allée. Le coréen soupira. Si ce que Liam disait était vrai, il allait en baver avec ce cheval... Mais il relèverait le défi. Après tout, si l'éleveur lui avait attribué ce cheval, c'est qu'il pensait qu'il était capable de monter dessus. Après, y rester était une autre histoire mais bon... Pour l'instant, il lui faudrait trouver l'animal et le préparer. Ce qui risquait de ne pas être une mince affaire non plus...
Les stalles du Haras étaient désormais un endroit familier du garçon. Les chevaux, attachés au fond de leurs boîtes ouvertes, en rang d'oignons, étaient calmes dans l'ensemble. Une plaquette indiquait leurs noms au dessus de leurs têtes. C'est les yeux rivés vers elles que le garçon parcouru l'allée, jusqu'à tomber sur le fameux Eurodisney. Il resta un moment à fixer sa croupe immaculée, sans que la bestiole ne daigne lui jeter un seul regard. Il avait l'air calme finalement. Mais si Liam l'avait mis en garde, c'est qu'il y avait une bonne raison à cela. Le coréen prit une grande inspiration et s'avança vers le blanc, un peu de biais, et posa une main sur sa croupe pour le prévenir de sa présence. La réaction fut vive et instantanée. Le sabot le plus proche du garçon battit l'air un peu trop près de sa cuisse alors que l'équidé relevait la tête vivement. Le coréen eu un mouvement de recul alors que le cheval baissait de nouveau le nez pour manger sa paille. Sans contact physique, il ignorait complètement le coréen. Il commençait à comprendre en quoi il était plus terrible que Call...
— Ça commence bien...
Réflexion faite, le garçon allait le laisser dans sa stalle pour le brosser. C'était plus sûr pour tout le monde. Et en particulier pour lui. Enfin, c'est ce qu'il pensait. Ce qu'il ne savait pas encore, c'était à quel point le cheval qu'il avait en face de lui était vicieux. Mais cela, il allait bientôt le découvrir.
Sans attendre plus longtemps, le jeune homme se dirigea vers la sellerie, et rempli un seau de tout ce dont il avait besoin. Il enfila le filet du cheval sur son épaule et coinça la selle contre sa hanche et reprit le chemin de la stalle du « monstre ». Le blanc était toujours là et l'ignorait toujours aussi royalement. Ce qui ne perturba pas plus le coréen que ça. Il déposa toutes les affaires sur leurs socles et, armé d'une étrille, pénétra de nouveau dans la stalle. Mais cette fois, loin de l'équidé. Une mains sur son épaule et la main étrillé sur son dos, il commença le ballet de ses petits ronds. Durant les premières secondes de ce début de relation, rien ne se passa. Eurodisney restait calme, un antérieur au repos. Il mangeait, en balançant sa queue derrière lui. Et puis, sans qu'il ne relève le nez pour autant, tout son poids se déporta sur Kwaïgon, qui se retrouva plaqué au mur sans savoir ce qu'il lui arrivait.
— Hey ! Eurodisney ! Bouges !!
Le coréen se dandina sur lui-même sans succès. Il avait l'impression que plus il bougeait, plus le cheval l'écrasait. Sans aucun état d'âme en plus de cela parce que le cheval poursuivait son broutage de paille. Face à cette situation, le coréen se dit qu'il avait deux options. Soit il se fâchait vraiment, soit il se détendait et optait pour le même comportement que le blanc, c'est à dire l'ignorance. Les bras ballant au dessus du cheval, le corps contre le mur, il cessa de bouger pour réfléchir un peu. Qu'est-ce que ferait Izikel dans cette situation ? Il n'y avait aucun doute que le jeune homme ne se serait pas retrouver dans un tel état de toute façon. Le coréen soupira et opta pour la seconde option. Lui aussi allait ignoré le blanc. Arquant son bras, il poursuivit son pansage comme il pouvait. Un cavalier passa dans l'allée en le regardant étrangement, mais le coréen ne s'en soucia guère et sourit avec assurance avant de poursuivre. Ce n'était pas facile de passer une étrille sur le dos d'un cheval quand celui-ci vous plaquait au mur. Mais il persévérait. Persévérance qui fini par lasser le blanc. La bestiole se décolla du mur pour mettre au repos son autre antérieur. Laissant, accessoirement, assez de place à Kwaïgon pour respirer et poursuivre de façon plus correcte son pansage. Durant tout le temps que le garçon prit pour passer l'étrille et le bouchon, Eurodisney ne broncha pas plus. Il donnait des coups de queues vifs pour fouetter le cavalier ou le menaçait de ses sabots s'il passait à porter de tir mais rien de plus. Jusqu'à ce que le garçon en vienne au cure pied...
Le coréen décida de commencer par un antérieur. Et plus particulièrement, par celui que l'équidé présentait face en l'air. Il se positionna donc près de son épaule et attrapa l'antérieur pour commencer à le curer. Tout se passait bien, jusqu'à cette douleur aigu dans sa cuisse. Le "à porter de dent" était passer à la trappe. Le coréen étouffa un juron dans sa langue natale et termina de curer l'antérieur avant de quasiment le jeter par terre pour se redresser. Il s'éloigna des dents meurtrières en se massant la cuisse mais en se gardant bien d'enguirlander le blanc. Il voulait feindre l'ignorance, lui aussi. Il fit le tour de la bête en évitant les postérieurs et raccourcit la longe d'attache avant de faire l'autre antérieur. Cette fois, son autre cuisse était hors de portée. Ce qui sembla faire rager le blanc. Pour résultat, il fut impossible d'avoir le sabot du cheval plus de deux secondes entre les mains. Il s'échina tout de même dessus pendant cinq bonnes minutes avant de tenter les postérieurs. Mais il du faire face au même problème. En plus d'une queue qui voulait le fouetter. Il se tourna alors vers l'équidé, mains sur les hanches et sourit.
— Tant pis pour toi !
Sur ce, il jeta le cure pied dans le seau et attrapa le tapis et amortisseur, qu'il plaça sur le dos du cheval rapidement. Il manqua tout juste de se faire plaquer une fois de plus contre le mur. C'est qu'il fallait être leste avec ce cheval ! Il le prit à défaut en mettant la selle par la droite et sangla rapidement. Bien sûr, le cheval gonfla le ventre, mais il re-sanglerait plus tard. Désormais, c'était au tour du filet. Le coréen laissa au cheval son licol, évita des coups de dents, et tenta de lui mettre le mors, sans succès. Finalement, en désespoir de cause, il plaça le mors sur son bras et le présenta comme en offrande au blanc.
— Ben vas-y, mords.
Presque sans succès. Le cheval le bouda un instant avant de tenter de la niaquer. Opportunité qui permit au coréen de lui mettre le mors dans la bouche. Maintenant, il fallait qu'il y reste. Le licol permettait de garder la tête du cheval à bonne hauteur, ce qui lui fut très utile. Ceci fait, il lui mit un second licol en collier attaché à la longe et démonta le premier licol pour pouvoir l'enlever de la tête du blanc. Après une bataille acharné -le blanc ne lui facilitait bien sûr pas la tâche-, il recula pour admirer le tas. Il était plutôt fier de lui et un sourire se dessina sur ses lèvres. Il était en nage avant même d'avoir pu poser ses fesses dessus mais il était déjà content de lui. Il n'avait mit qu'une demi-heure pour le préparer. Il enfila sa bombe et sorti finalement le cheval de sa stalle, le laissant manger une rêne pour préserver ses bras.
Le chemin jusqu'aux élevages fut mouvementé. Plusieurs fois, le coréen sentit les dents du cheval claquées près de lui ou se retrouva face à lui. Il failli aussi se faire plaquer contre un mur et se retrouva bousculer à plusieurs reprises. Le grand jeu du blanc avait aussi été, durant un bon morceau du trajet, de viser les pieds du cavalier. Il avait souvent réussi son coup d'ailleurs, et le coréen se demandait dans quel état il allait retrouver son corps à la fin de la séance. Ou même ; s'il allait seulement ressortir de là en un seul morceau. Cela dit, c'est en homme fier qu'il se présenta devant Liam.
— Et voilà.
Le français se releva de sa botte de paille pour voir avec un certain étonnement le coréen et sa monture.
— Bravo ! Je ne t'attendais pas si vite ! — Ben si. — Alors allons-y !
Il sourit et ouvrit la marche. A peine deux pas plus tard, il se retrouvait bousculer par la croupe d'Eurodisney qui avait fait un rapide demi-tour. Désormais face au Haras, il poussait un puissant hennissement. Le coréen en fit une grimace. C'est qu'il avait de la voix le gazier ! Cependant, Kwaïgon, qui commençait à avoir presque l'habitude, se plaqua contre le poitrail du blanc et poussa, pour le faire aller en marche arrière. Bien sûr, le hongre résista avant de se décaler lestement. Le coréen atterri dans les bras de Liam alors que le blanc se replaçait derrière eux, les oreilles en avant. Comme s'il n'avait rien fait.
— Ça promet... Je n'aurais peut-être pas du te le donner finalement... Mais bon, maintenant qu'il est prêt, on y va.
Faible sourire du coréen, regard noir envers le cheval et ils poursuivirent tous leur route. La carrière enneigée était idéale. Trop froide, elle était peu fréquenté. Et en effet, il n'y avait personne dedans à ce moment là. Par sécurité, Liam ferma bien la porte, pendant que Kwaïgon se faisait traîner sur la piste. Le coréen voulait aller au milieu, mais Eurodisney n'avait pas l'air de cet avis. Mais après un demi tour de carrière, le cheval se rangea dans l'avis du cavalier. Sous le regard un peu désespéré de Liam, il faut bien le dire... Le coréen se mit en selle et entreprit de re-sangler, alors que le hongre poursuivait ses agissements anti cavalier. Il tournait sur lui même pour essayer de choper la main du coréen et le mordre. C'est à ce moment là que Liam décida d'agir un peu. Il passa entre les barrières et fila vers son élevage.
Cinq minutes plus tard, le demi-étalon était re-sanglé et marchait sur la piste, une belle muserolle croisée toute neuve sur le nez. La muserolle l'empêchait de mordre à tout va, ce qui laissait un peu le temps à son cavalier de souffler. Et ce n'était pas sans être appréciable.
— Bon, aujourd'hui, on va voir les rudiments de quelques figures et position. Tu sais que le cavalier utilise un code pour se faire comprendre de son cheval. L'assiette déjà, puis les jambes et les mains. Tu connais la plupart de ces "codes" mais on va les revoir ensemble pour que tu ai de bonnes bases pour la suite. Et on va aussi en appliquer certains sur des exercices simples, qui t’amèneront, plus tard, à des figures de haute école. Commençons par les jambes. La jambes isolée et la jambe à la sangle. Connais-tu la différence entre les deux ?
Le coréen jeta un regard froid à l'éleveur avant de lever les yeux au ciel. Il le prenait vraiment pour un débutant en fin de compte. Il hoche de la tête et recula sa jambe intérieure.
— Isolée.
Il replaça ensuite sa jambe prêt de la sangle, juste en arrière de celle-ci et énonça.
— Sangle. — Ok... Ça tu maîtrise. Combien il existe d'effet de rêne ? Juste pour voir, par acquis de conscience. — Cinq.
Liam eu un sourire. Il avait l'air satisfait. Il se dirigea doucement vers la lice et prit un plot qui traînait là, pour le poser au centre du manège, dans un morceau de sable qui ne gênerait sans doute pas le coréen.
— Parfait ! Je te laisse faire ta détente seul, si tu as besoin je suis là et après on bossera sur la mise sur la main et les extensions et quelques bricoles du même genre.
Kwaïgon acquiesça. Il avait enfin un peu de reconnaissance ? Il l'espérait. En attendant, il se concentra un peu sur son blanc. Pour l'instant, il marchait calmement sur la piste, mais un petit quelque chose disait au coréen que ça n'allait pas durer. Il fit un tour entier de carrière au pas et il sentait son cheval frissonner par moment. Avait-il froid ? Ou prépare-t-il une connerie ? Le jeune homme se devait bien de se poser la question, avec la préparation mouvementé qu'il avait eu. En attendant, il entreprit de faire une diagonale ais lorsqu'il ouvrit sa main en rêne d'ouverture pour le faire tourner, rien ne se produisit. Le blanc continua de marcher sur la piste. Ne voulant pas se laisser faire, le jeune homme insista, et talonna un peu le blanc. Sans succès. Il utilisa donc une rêne d'appui et combina même les deux. Sans aucun succès. C'est quand abandonner lui traversa l'esprit que le blanc tourna et doubla gentiment, changeant de sens de lui même. Une vague de colère monta chez le cavalier. Il avait l'impression d'être un débutant à qui on a donné le chieur de service et qui aura beau faire, se fera avoir à chaque fois. Il se mit en arrière, resserra ses doigts sur les rênes et fit pression, quitte à arracher la bouche du blanc jusqu'à ce qu'il s'arrête. Ce que l'étalon consentit à faire une fois la tête en l'air et plus aucune autre solution. Liam ne disait rien, regardant le garçon avec un air bien étrange sur le visage. Il devait certainement hésiter sur les sentiments à exprimer.
Mais Kwaïgon ne s'en souciait pas. Il avait un autre combat à mener. Une fois le blanc à l'arrêt, il entreprit de le faire pivoter sur lui même, utilisant ses mains et ses jambes. Mais Eurodisney n'avait pas l'air du même avis. Il plaqua les oreilles en arrière et fouilla de la queue. Mauvais signe. Mais le coréen insista. Et ... Eurodisney n'attendait que ça. Un coup de talon un peu plus pressant que les autres fit partir le blanc plein pot en un galop effréné. Kwaïgon, qui ne s'y attendait pas, chuta là où il était. En somme, il était resté sur place et l'étalon poursuivait sa route. Liam se leva d'un bond et s'approcha du jeune homme qui se relevait péniblement. Il avait le souffle coupé, étant tombé plat dos. Mais il fit tout de même signe à Liam que ça allait, reprenant péniblement sa respiration.
— Je ne pensais pas qu'il était aussi terrible ce cheval... Izikel m'avait dit qu'il était reloud mais je n'avais pas vu les choses de cette façon...
Kwaïgon acquiesça, regardant Eurodisney galoper à l'autre bout de la carrière, visiblement pas content, mais avec une pointe de fierté dans le regard. Liam entreprit d'aller le chercher, attrapant une chambrière au passage et laissant le coréen reprendre ses esprits. C'est à ce moment là que Lou-Khyan s'approcha, emmitouflée dans son manteau en peau de bête. Il faisait très homme de cro-magnon mais elle n'avait pas l'air de s'en rendre compte. En même temps, c'est ce qui faisait tout son charme...
— T'es tombé ? Mince...
Elle passa sous la barrière et approcha du coréen qui n'avait fait qu'acquiescer. Il n'arrivait toujours pas à parler. Au bout d'une dizaine de minutes, Liam revenait avec Eurodisney et Kwaïgon respirait un peu mieux. Sans un mot et sans un regard au cheval, le coréen remonta sur son dos, chaussant ses étriers rageusement et reprenant ses rênes en mains. Il remit le cheval en avant sous l'oeil impressionner de Liam. Il entendit Lou qui glissait à l'éleveur.
— Promets moi de ne jamais me le donner en cours celui-là.
Liam ne répondit pas, mais il avait sans doute acquiescé. De nouveau sur la piste, le jeune entreprit de faire des cercles, plus ou moins grands. Mais Euro en avait encore une décidé autrement et décocha un ensemble de ruades à faire pâlir un cow-boy de rodéo. Mais contre toute attente, le coréen resta en selle, serrant les jambes et balançant son buste au fil des secousses. Il s'appliquait aussi à tordre la tête du blanc tantôt à droite et tantôt à gauche pour le déséquilibrer. Et ce n'est que lorsque le camarillo failli bien tomber lui aussi par terre qu'il cessa ses ruades. Il reprit posément le pas et les cercles demandés par Kwaïgon, cherchant sans doute la prochaine stratégie à adoptée pour le mettre par terre...
— Bon ! Je suis d'accord, tu as fait d'énorme progrès dans ton équitation. Ton assiette est bien meilleure et tu n'as plus les jambes flottantes ! Au vue du caractère compliqué de ta monture, on va seulement cherché à l'avoir sage même si ce n'est pas gagné. On va se cantonner à des choses très basiques et voir si ça marche. Dès que tu le sens, je pense que tu peux prendre le trot.
Kwaïgon hocha de la tête et garda le blanc au pas. Il enchaînait les courbes pour ne pas laisser au cheval l'occasion de le mettre par terre. Mais c'était sans connaître le camarillo... Qui redoublait d'imagination dans ces moments là. Après quelques minutes de pas au calme, le jeune homme reprit la piste. Tout se passa bien sur tout une longueur et le garçon voulut prendre le trot dans un angle. Mais Eurodisney se stoppa net, bien campé sur ses pieds et refusa de bouger. Kwaïgon s'agita sur son dos, s'attendant à ce que le blanc reparte dans tous les sens. Mais Eurodisney n'en fit rien. Non, le demi-étalon préféra... se coucher. Il plia les genoux d'un coup et Kwaïgon eut juste le temps de sauter par terre avant de se retrouver coincé entre la barrière et le cheval. Étendu de tout son long, tremblant de froid, le cheval attendit un certain temps avant de se relever et charger le coréen, qui n'eut d'autres choix que de se jeter par terre. Et c'est précisément ce que voulait le cheval, puisqu'une fois le cavalier au sol, il retrouva son calme.
Liam restait complètement interdit, ne sachant que faire. Il n'avait jamais vu un tel comportement chez un cheval et se demandait bien sur quoi il était tombé. Kwaïgon se redressa et s'assit, farfouillant dans la neige. Il fabriqua quelques boules et les lança rageusement sur la croupe du blanc, qui, surprit, fit volte-face pour faire face à l'attaque. Mais le coréen ne se laissa pas démonter et fonça sur le cheval en hurlant, les bras en l'air et en continuant de lancer de la neige.
— AAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHH !!!!!!!!!
Cette fois, après une brève hésitation et voyant que le cavalier continuait de lui foncer dessus malgré ses menaces, le blanc détala. Mais c'était sans compter sur la ténacité de Kwaïgon qui le poursuivit jusqu'à ce qu'il soit épuisé, reprenant son souffle de temps à autre. Après cinq bonnes minutes de courses dans la neige, le cheval ne sachant plus trop où aller, le coréen s'approcha de Liam et de Lou. La rouquine était morte de rire et pliée en deux, se tenant les côtes. Liam ne savait pas comment réagir et le regardais avec inquiétude.
— Je... Je vais... Je vais le... prendre... en...en demi... en demi... en dp...
Cette fois Liam le prenait pour un fou.
— Tu... Quoi ? Attends... Tu es certains ?
Le coréen hocha vivement de la tête et tendit sa bombe à Liam.
— On reste... On reste là dessus... aujourd'hui.
Liam hocha de la tête sans ajouter un mot, alors que Lou se calmait difficilement. Elle fini par se laisser tomber par terre, prise d'un fou rire incontrôlable. Kwaïgon n'eut pas trop de mal à rattraper l'étalon et s'employa à le ramener au box avec calme. Il marchait droit devant lui, tenant fermement sa rêne, peut importe ce que faisait le cheval. Si ce dernier se stoppait, il criait un "wrah !" qui épouvantait le cheval et le faisait marcher droit sur quelques foulées. Liam les suivit du regard un bon moment, et il ramena ensuite Lou à l'élevage. Kwaïgon quand à lui, débarrassa le cheval de son harnachement et le laissa longtemps sous le solarium avant de lui mettre une couverture épaisse. Bien sûr, il se retrouva bloquer plus d'une fois contre un mur, mais il ne réagissait plus. Il se contentait d'attendre en chantant assez fort et assez aiguë pour gêner le cheval, qui se décalait un peu.
En attendant, le coréen arborait un petit sourire en sortant du box. Au début, il avait détesté ce cheval. Mais finalement, il allait bien s'amuser avec lui...
J'ai 440 Lignes J'utilise un x2 ! Box d'Eurodisney Merci pour la correction !! ^^
/!\ Le début de ce résumé comporte une scène qui peut s'avérer "gore". Âmes jeunes et sensibles, s'abstenir. Les autres, vous êtes prévenus ! Merci !
Souvenez-vous... Il y a quelques temps, une avance rapide présentait ceci :
Spoiler:
Dans un futur proche dans les Hamptons...
Kwaïgon se rangea sur le bas côté et coupa le contact. Il était sur une petite route au milieu de rien. Il faisait nuit et à sa droite, sous la falaise, la houle venait se briser sans grands fracas sur les rochers. L'océan était calme et il ne pleuvait pas, malgré l'hiver environnant. C'était une nuit paisible dans ce coin du monde. Personne pour le déranger. Personne pour le trouver. Mais finalement, il aurait peut-être préféré... Que quelqu'un le trouve et le dérange...
Il regardait devant lui, en tâchant de calmer sa respiration chaotique. Les mains crispées sur le volant pour arrêter les tremblements. Il voyait flou et réprima un sanglot à cause de la douleur intense qui lui traversait le corps. Il voulu prendre une grande inspiration mais la douleur était trop fulgurante et manqua de lui faire perdre connaissance de peu. Il desserra sa main droite du volant pour tenter de tourner la clé et remettre le moteur en route mais il tremblait trop pour atteindre de nouveau la clé. Il étouffa un cri de rage et de douleur entre ses dents, serrant son jean de sa main droite. Elle était couverte de sang. De son sang. Il était seul, loin de tout et de tous, et en train d'agoniser, incapable de faire quelques mètres de plus.
Il avait fini son job. Il avait lutté pour le finir mais maintenant, il était à bout de force et n'en pouvait plus. Il n'arrivait plus à se battre contre son destin, pour sa propre survie. Il se sentait partir, lentement, et ne pouvait rien faire contre cela. Le froid engourdissait peu à peu ses membres, avant de prendre possession de son corps entier. Maintenant s'il tremblait, ce n'était pas que de douleur, c'était aussi de froid. De petites étoiles se mirent à danser devant ses yeux et il fini par se laisser aller sur le siège de la voiture.
Était-ce la fin ? Il le pensait. Alors que ses dernières forces l'abandonnaient peu à peu ; que les tremblements cessaient en même temps que la douleur ; que le monde autour de lui sombrait dans le noir ; il repensa à toutes ces personnes qu'il avait connu dans sa vie. À ceux et celles qui l'avait accompagné durant des années. À ses chevaux... Qu'allaient-ils devenir sans lui ? Il ne savait pas. Il ne savait plus et n'était plus sûr de rien.
Puis ce fut le noir complet et cette nette impression de bien-être, juste avant que sa conscience ne s'évanouisse...
Une situation fort... déplaisante n'est-ce pas ? Surtout sans avoir le fin mot de l'histoire... Des dizaines de questions se soulèvent dans l'esprit du lecteur. Kwaïgon va-t-il s'en sortir ? Comment en est-il arrivé là ? Quel était son "job" ? Des questions qui restaient pour l'instant sans réponses... Les réponses viendront, c'est un fait, mais un peu de patience cher lecteur... Tout vient à point qui sait attendre à ce qu'on dit...
J'ai 647 Lignes J'utilise un Résumé x2 ! Box de Kim Song Ki Merci pour la correction ! =)
note au correcteur : normalement j'ai assez de point pour remplir à 100% les 4 catés suivantes : présence humaine, marcher en main, van et longe. Merci ! =)
C'était devenu un bruit si familier. Une odeur si appréciable... Kwaïgon n'aurait jamais cru que cette vie dans l'écurie nomade lui soit devenu si rapidement aussi simple et aussi... habituelle. Il avait l'impression d'avoir vécu là toute sa vie, alors qu'en vérité, ce ne faisait que trois petites années. Désormais il était cavalier pro, alors que lors de son arrivée, ce n'était qu'un homme au bord de la mort. Il avait pour devise de ne jamais regardé en arrière. Son passé était trop tumultueux pour qu'il ne s'attarde dessus. Il en tirait des leçons, mais son analyse s'arrêtait là et jusque là, cela lui avait plutôt bien réussi. Mais pour une raison qui lui échappait complètement, alors qu'il regardait tous les cavaliers de l'équipe en action, son passé resurgi et défila devant ses yeux en un instant. La raison de cet étonnant comportement ? La vision d'Alejandro. En quelques mois, l'homme s'était étonnamment bien intégré. Mais la stricte vérité était que pour Kwaïgon, il n'y avait rien d'étonnant à cela. Ale était un tueur à gage. Il avait été formé pour se fondre dans la foule. C'était son métier. Alors s'intégrer à un groupe comme le leur, aussi tolérant et hétéroclite, c'était loin d'être une difficulté pour lui. Mais ce n'était pas la vision d'Ale qui le ramenait à son passé, pas l'homme qu'il était, mais plutôt ce qu'il représentait. Il incarnait la mort, aussi violente et froide qu'elle pouvait être. Il incarnait les morceaux les plus noirs et douloureux de sa vie. Ceux qu'il ne voulait absolument pas vivre à nouveau ; ceux qu'il voulait oublier à tout prix. Mais un sentiment grimpait en lui, de plus en plus présent, à chaque fois que son regard sombre se posait sur l'homme : un mauvais pressentiment s'emparait de lui et il avait l'intime conviction que quelque chose se passerait mal. Pas de la main d'Alejandro, mais quelque chose se passerait mal...
— Tu penses à quoi ?
La voie de la rouquine tinta joyeusement à ses oreilles. De tous, c'est elle qui gardait le plus le sourire, quelque soit la situation. Le coréen tourna la tête vers elle et sourit. Elle était belle, avec son teint clair et ses cheveux roux. Ses yeux bleu pétillaient d'une certaine joie de vivre et le soleil hawaien qui avait fait sortir quelques tâches de rousseur sur son nez. Ce jour là, elle ne montait pas, sa tenue en témoignait : short en jean et débardeur, et ce, malgré les nuages menaçant qui zébraient le ciel.
— À tout le chemin que l'on a parcouru tous ensemble...
Le coréen eu un sourire nostalgique et ses yeux se posèrent de nouveau sur les cavaliers au travail. Ezra montait Nakache. L'irlandais était concentré sur la nuque de son cheval et s'échinait à lui déplacé les hanches sur une courbe. Liam, à pied, tenait Call aux longues rênes et expliquait à Alejandro un exercice quelconque. Les deux hommes aussi étaient très concentrés. Louna était en selle sur Cara et travaillait avec Logan, en selle sur son étalon bai. Ils marchaient rênes longues en discutant, côte à côte. Myriam et Maël s’entraînaient à la marche sur deux jambes à l'ombre d'un arbre, pas très loin d'eux. Et enfin, Izikel faisait brouter Leota, sa nouvelle jument, sous le même arbre que Myriam. De temps à autre il souriait à Maël et le récupérait dans sa chute avant de le relancer vers sa mère. Les deux chiens du groupe étaient couchés près de la lice et regardaient leurs maîtres en somnolant. Seule Caïpi manquait à l'appel du joyeux groupe. Mais c'était commun avec la lynx...
— C'est vrai qu'on a fait pas mal de choses ensemble. Mais toi plus que les autres avec Louna, Liam et Izikel...
Le coréen sourit de nouveau. La rouquine n'avait pas tord, ils avaient vécu beaucoup de chose. À la fois individuellement, surtout Louna et lui, mais aussi collectivement. Leurs débuts au Haras n'avait pas été tout rose, mais d'une certaine façon, ce passé où ils n'étaient que quatre et encore un groupe soudé lui manquait un peu. Il n'affirmait pas que le groupe actuel ne l'était plus, loin de là. Il savait que tous, même Lou et Logan, lui viendraient en aide s'il en avait besoin. Mais c'était différent maintenant. Et la dégradation de la relation entre Izikel et Louna n'était pas pour rien dans le sentiment de cassure du coréen. Liam, Louna et Izikel étaient les trois piliers du groupe ; sa base. Mais si la base se fissurait, le groupe pouvait-il rester aussi solide ? Heureusement pour eux, l'intégrité de Liam et son amitié indéfectible avec Louna maintenaient tout le monde à flot, et il devait bien l'avouer, avec brio pour l'instant. Il était content de cette nouvelle famille, mais il espérait que ses "aînés" se rabibocheraient...
— C'est pas faux...
Cette fois c'est Lou qui sourit et tourna le regard vers la carrière. Liam avait passer les rênes à Alejandro, qui exécutait un piaffer avec Call. Logan et Louna mirent pied à terre et se dirigèrent vers l'écurie en saluant tout le monde. Izikel fit de même en prenant le chemin des paddocks. Ezra marchait rênes longues. La séance se terminait. Lou siffla Ome qui la rejoignit en remuant sa queue blanche. Légolas s'étira mollement et suivit son maître en coupant à travers un paddock.
— Je vais m'allonger un peu. On se retrouve tout à l'heure de toute façon ? Liam a dit qu'il voulait voir tout le monde. — Oui. On se voit tout à l'heure. Reposes-toi bien ! — Merci !
Elle sourit joyeusement et se leva pour prendre le chemin de la plage et des bungallow, Ome sur ses talons. Myriam ne tarda pas à faire de même, c'était l'heure du goûter pour le petit Maël. Liam et Ale terminait doucement leur séance et prenaient le chemin des élevages avec un Ezra au regard suspicieux sur les talons. Le métisse n'aimait toujours pas le tueur à gage... Kwaïgon soupira. Il était désormais seul. Il lança un regard rêveur au ciel qui présentait une éclaircie et fini par se lever. Autant aller jeter un oeil à Kim avant la réunion...
***
Le jeune étalon isabelle sabino releva la tête de son herbe pour voir son propriétaire arriver. Kwaïgon s'appuya contre la barrière et siffla ; la réaction ne se fit pas attendre, le petit cheval, les oreilles bien en avant et la tête en l'air, s'approcha en trottinant du coréen. Le cavalier sourit à la vue de cette image. Il était réellement content de l'acquisition de ce poulain et il avait hâte qu'il grandisse. En attendant, il s'attelait à son débourrage avec le plus d'efficacité et de douceur possible. Il puisait dans ses souvenirs et débourrait le petit tacheté comme il l'avait fait avec son père et leur cheval de course, des années auparavant. Kim avait déjà un an et il était grand temps de commencer son débourrage et d'entrée dans le dur. Il n'était pas destiné à la course, et le coréen ne voulait pas brûler d'étape, mais il voulait que le débourrage soit fait rapidement.
Le jeune étalon ne tarda pas à être devant Kwaïgon. Il ralenti doucement l'allure et tendit le nez sur le jeune homme pour sentir ses mains. Après un rapide examen, il fixa le jeune homme de ses yeux doux, attendant de savoir ce qui allait se passer. Le coréen sourit et passa sous la barrière pour aller caresser le jeune entier. Kim ne bougea pas d'un poil, alors que le coréen passait ses mains sur tout son corps et lui prenait les pieds. Il se laissait faire avec patience, regardant autour de lui en attendant. Kwaïgon lui parlait doucement et dans sa langue natale. Il ne parlait pas sans arrêt, mais seulement quand il y en avait besoin, pour féliciter l'étalon de sa patience. Une fois les quatre pieds vérifié et les mains passées partout, le garçon prit le chemin de la porte, en sifflant le jeune cheval pour qu'il le suive. Kim répondit d'un petit ronflement des naseaux et suivit, baissant le nez pour renifler le sol sous les pas de son cavalier. Ce n'est qu'une fois la porte atteinte que le coréen passa deux doigts dans l'anneau du licol du poulain pour le conduire jusqu'à l'élevage de Louna. Pas besoin de longe de cette façon ! Et au vu de la docilité du jeune entier, il ne prenait pas trop de risque...
En arrivant dans l'allée de l'élevage de Louna, le jeune homme trouva Nakache attacher dans l'allée et le derrière d'Ezra, qui faisait les antérieurs de son cheval. Il se retourna en entendant des bruits de sabots dans son dos et sourit en voyant que c'était Kwaïgon et son tout jeune protégé.
— Alors ! Il est comment ce petit jeune ?
Le coréen attacha son poulain face à Nakache et attrapa un cure pied dans le seau d'Ezra.
— Parfait pour l'instant ! Il est habitué à moi maintenant et il suit très bien en main sans faire d'histoire ! — Je suis impressionné. Tu compte faire quoi là ? — Je vais le longer un peu et lui mettre un surfaix pour qu'il découvre un peu la sangle et je pensais le mettre dans un van. Même s'il connaît déjà, je voudrais bien ancré ça chez lui. — Tu veux que je t'aide pour le van ? — Pourquoi pas ! — Parfait alors !
Kwaïgon sourit et se pencha sur les pieds de son entier. Il fit un pansage expéditif alors que Kim tendait au maximum le nez vers Nakache pour le sentir. Le grand bai faisait de même, mais les deux équidés ne purent que s'effleurer et abandonnèrent vite la chose pour rester sage à l'attache. Une fois le pansage terminé, Nakache fini dans son box et Ezra partit chercher un van alors que Kwaïgon équipait Kim d'un caveçon à sa taille et prenait avec lui surfaix et pad. La longe en huit dans la main et son matériel de l'autre, il conduisit d'un pas lent le jeune étalon jusqu'au rond de longe. Il déposa ce qui l'encombrait sur la rambarde et se mit au milieu. En quelques secondes, il avait attrapé la chambrière qui traînait au centre du rond et mettait le jeune entier sur un cercle. Avec son allure de grand poney, tout en finesse, les fesses encore un peu plus haute que le garrot, le jeune isabelle se mit en marche, les oreilles en avant et la tête haute, à regarder un peu partout, mais attentif à son cavalier. Kwaïgon le voyait à l'oreille le plus proche de lui, toujours tournée vers lui.
Kwaïgon laissa marcher le jeune entier seul un moment, restant silencieux et ne faisant que l'observer. Le coréen n'était pas comme Izikel. L'irlandais et éthologue avait tendance à beaucoup parler à ses chevaux durant le travail, les corrigeant sans cesse, les sollicitant ou pas, ou encore les félicitant. Il y avait peu de moment où il parlait. À l'inverse, Kwaïgon ne parlait que quand il avait besoin de communiquer avec le cheval, surtout dans le travail à pied. En selle, il était le plus souvent muet comme une tombe. Sauf peut-être avec son cher cheval de demi-pension, Eurodisney. Là, il râlait plus qu'il ne parlait. En attendant donc, le coréen appréciait les chevaux qui avait pas mal d'énergie et qui allait de l'avant, plutôt qu'un cheval qu'il devait soutenir dans l'allure à cause justement de ce trait de caractère. Kim était le cheval parfait pour lui. Il n'avait besoin que d'un mot ou d'un claquement de langue de temps à autre pour obtenir ce qu'il souhaitait de lui.
Après quelques tours de pas, alors que Kim commençait à se détendre un peu et baisser le nez, il releva vivement la tête et ralenti lorsqu'Ezra gara un 4x4 et un van près du rond de longe. Il coupa le contact et sortit du véhicule. Kwaïgon laissa le temps à Kim d'observer la chose et quand il estima que le yearling avait assez regardé, il donna un claquement de langue qui fit repartir le sabino au pas. Un dernier tour et il reprit la parole, sous l'oeil attentif d'Ezra.
— Kim, Trotter !
Le jeune ne se fit pas prier et parti dans un trot rapide et aérien. En l'espace de trois mois, il avait inculqué toutes les bases au cheval et désormais il allait bientôt arrivé au moment fatidique de la selle et du filet. Mais il comptait aussi laisser au jeune cheval sa part de jeunesse et une fois son débourrage terminé, il n'entamerait pas pour autant le travail intensif de suite. Il comptait bien laissé l'entier au pré avec les autres poulains de l'élevage pour qu'il puisse aussi vivre sa vie de poulain. Il laissa trotter le yearling durant cinq petites minutes avant de le faire revenir à lui au pas. Il le fit changer de sens en l'accompagnant dans les règles de l'art et refit la même chose à l'autre main. Du pas et du trot. Tant que le poulain gardait une allure régulière, il le laissait faire. Il ne voulait pas lui en demander trop à cet âge là, même s'il voulait que les choses aillent vite. Au bout de dix nouvelles minutes, il stoppa le jeune entier et le ramena au milieu. Il le mena ensuite en douceur vers le surfaix et le tapis et lui présenta le tout. L'examen dura cinq petites minutes, après lesquelles le coréen lui frotta le tapis sur l'encolure et lui posa sur le dos, voyant qu'il ne bougeait pas plus que cela. Il fit la même chose avec le surfaix et sangla un peu. Kim coucha les oreilles en arrière mais ne bougea pas. Kwaïgon ne s'en formalisa pas et sangla de façon à ce que le surfaix ne glisse pas mais sans le serrer avant de le caresser et le félicité chaudement. Kim y était sensible : pour un cavalier aussi avare en parole, se voir félicité de la voie signifiait pour lui qu'il avait vraiment bien fait les choses. Et le poulain le savait, malgré qu'il ne connaissait Kwaïgon que depuis si peu de temps. Il le fit ensuite marcher au deux mains pour qu'il se fasse à la sangle, et lui enleva le tout. Il caressa encore un peu le yearling et se dirigea doucement vers la porte du rond. Pour la première fois Ezra ouvrit la bouche.
— Et bien ! C'est un brave garçon dis moi ! Il n'a pas bougé d'une oreille ! — Oui ! Il est très brave... Presque parfait même.
Le métisse sourit.
— Presque parfait ? — Il est juste un peu jeune en fait...
Cette fois, le métisse rit en tenant la porte du rond ouverte. Il précéda ensuite Kwaïgon au van pour ouvrir les ponts. Comme à son habitude, l'entier isabelle releva le nez et pointa ses oreilles en avant en observant le van sous toutes ses coutures. Le coréen ralenti le pas mais ne s'arrêta pas pour autant. Il ne voulait pas faire tout un plat du camion alors que le poulain le connaissait déjà. Il lui laissa du mou dans la longe et poursuivit sa route en douceur, regardant lui aussi partout autour de lui, mais surtout pas le poulain. Kim renifla un instant le pont en caoutchouc mais poursuivit sa route d'un pas lent, levant bien les sabots et suivant le coréen. Une fois dedans il reçu sa caresse habituelle et souffla des naseaux. Le coréen l'attacha et sorti pour refermer sa petite portière de service.
— Et voilà ! — Et bien ! Je suis impressionné ! Je ne savais pas que tu étais aussi doué pour le débourrage des jeunes chevaux !
Le coréen sourit. Personne ne pensait qu'il savait débourré un cheval. À vrai dire, tous avait été sceptiques quand il avait annoncé qu'il allait acquérir un poulain non débourrer. Mais au final, il soufflait tout le monde avec son jeune cheval. Liam était même prêt à le laisser plus faire avec son jeune poulain ! Et de la part de l'éleveur, c'était un assez grand pas en avant. Kwaïgon avait toujours été considéré comme un cavalier débutant. Mais tous oubliait qu'il avait tout de même grandi avec des chevaux, jusqu'à son adolescence. Débourrer un seul cheval ne lui donnait certes pas une expérience hors du commun, mais assez pour pouvoir se débrouiller avec le sien. En attendant, il avait pas mal trimer pour être reconnu en tant que cavalier confirmé mais il l'avait en silence et dans l'ombre, comme à son habitude.
— On rentre en van ? — Aller ! Je te suis !
Les deux hommes grimpèrent dans le 4x4 et Ezra reprit le volant. En quelques minutes ils avaient rejoint l'élevage de Louna. Kwaïgon débarqua Kim pour le mettre dans son box et Ezra parti ranger le véhicule et sa remorque. Une fois dans son box, le pur-sang se roula allègrement, arrachant un sourire à Kwaïgon. avant de partir il lui servit sa ration et une caresse et se dirigea vers les bungalows des éleveurs. Liam avait organisé une petite réunion et il se devait d'y être...
***
Le vent s'était levé et la traversé des pontons jusqu'au bungalow de Liam et Myriam ne se fit pas sans difficulté. Une rafale plaqua le jeune homme contre une rambarde mais il corrigea vite sa trajectoire et accéléra le pas. Le ciel s'assombrissait assez rapidement et devenait même menaçant. Il était rentré à temps ! Arrivé au bungalow du couple d'éleveur il frappa à la porte. À peine quelques secondes plus tard il était au chaud et à l'abri à l'intérieur. Louna, Ezra et Lou étaient déjà là. Bien sûr, Ale et Myriam également. Il ne manquait plus que les deux moniteurs et ils seraient au complet.
Louna était assise près de la fenêtre et discutait avec Ezra à voix basse. Myriam était dans la pièce voisine et couchait le petit Maël. Lou et Ale semblaient flirter -en tout cas, c'est ce que Kwaïgon déduit aux joues rosés de la demoiselle et au sourire enjôleur du garçon. Ils n'avaient pas tord après tout... S'ils se plaisaient et que les deux jeunes gens y trouvaient leur compte... Le coréen détourna les yeux du binôme pour rencontrer le visage souriant de Liam. L'éleveur était rayonnant et semblait absolument ravi de cette petite réunion. C'était devenu presque habituel dans l'équipe que de temps à autre, ils mettent les choses au point ensemble et décident des compétitions. Mais cela concernait souvent les chevaux seulement et ils partageaient les avancés des entraînements et projetaient la saison de concours. Mais cette fois, Liam avait entendu dire qu'il voulait absolument tout le monde et qu'il fallait parler d'un sujet important. Le coréen avait déjà sa petite idée du sujet et ce mauvais pressentiment qu'il avait eu dans l'après-midi resurgi d'un seul coup. Malgré tout, le jeune homme n'en laissa rien paraître et répondit au sourire de son ami.
— Salut Kwai ! Qu'est-ce que tu veux que je te serve ? — Qu'as-tu à me proposer ? — Martini, Rhum, Whisky... Ce que tu veux. — Soju ?
L'éleveur eu un temps d'arrêt, et fit une grimace désolée. Kwaïgon en rit. Peu de gens avaient cet alcool typiquement coréen dans leurs bars.
— Une bière m'ira très bien. — Parfait ! J'en ai au frais...
Le trentenaire fit demi tour et se dirigea vers le petit frigo dans un coin du salon. À peine était il revenu que l'on frappait à la porte. Izikel et Logan arrivaient en même temps. Liam se montra l'hôte parfait avec eux aussi et une fois que Myriam eu repointé le bout de son nez, tous s'installèrent. Louna et Ezra conservèrent leur place sur des poufs, dos à la baie vitrée. Izikel, Logan et Myriam se postèrent sur le premier canapé du salon privé du couple. Liam, Lou et Ale sur l'autre canapé. Kwaïgon resta debout dans un angle du la baie vitrée, le regard perdu sur l'océan mais l'oreille attentive. Personne ne l'incita à s’asseoir, ils avaient l'habitude maintenant. En attendant, une fois tout le monde installé, c'est Liam qui prit la parole. Il y avait dans sa voix un quelque chose de grave. On sentait qu'il avait mûrement réfléchi son discours et que ce qu'il était sur le point de leur exposé n'allait sans doute pas plaire à tout le monde... Mais c'était un passage obligé, le coréen le savait. Et très vite, il fut fixer. Son pressentiment était juste...
— Bon... Merci à tous d'être venu. Si je vous ai demandé de venir, c'est parce que j'estime qu'il est temps que l'on parle d'une chose importante. Autant entrer tout de suite dans le vif du sujet et ne pas vous faire attendre... -il soupire- Comme vous le savez tous, on doit la présence d'Alejandro dans le groupe à Christine Reg, la mère de Louna. Mais même si Ale est désormais connu de nous tous et sous notre surveillance, il n'empêche qu'il peut y en avoir d'autres comme lui et que donc Louna n'est pas en sécurité. — On est tous d'accord là dessus... — Oui... En plus de ça, Ale a reçu un appel de son... employeuse. Tu veux bien nous faire partager Ale s'il te plaît ?
Alejandro soupira et acquiesça avant de se passer les mains sur le visages. Tout le monde restait silencieux. Myriam avait le regard dans le vide, tout comme Louna. Izikel fixait avec une certaine intensité son verre. Ezra le regardait lui, cherchant son regard alors que l'éthologue s'acharnait à le fuir. Liam regardait ses pieds, Logan à travers la baie vitrée et Lou fixait ses mains d'un air gêné. Seul Kwaïgon conservait cet air détaché qui ne le quittait presque jamais.
— Et bien, Mme Reg m'a contacté par téléphone, pour savoir si j'avais enfin exécuté le contrat. Je lui ai dit la stricte vérité, soit que je n'avais pas encore eu l'occasion de le faire. Je lui ai seulement omis que j'avais non seulement échoué, mais aussi que je ne souhaitais définitivement plus exécuté le contrat demandé.
Un silence s'ensuivit. Liam ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais il se ravisa. Quelques secondes qui parurent interminables à Kwaïgon passèrent. Personne ne voulait le dire. Personne ne voulait mettre des mots sur ce qu'ils pensaient tous. Après une interminable minute de silence, le coréen soupira et prit la parole d'une voix rauque.
— Et je suppose donc que vous voulez faire quelque chose ? — En effet. J'en ai discuté avec Liam et un peu Ezra et... En fait je ne dirais pas quelque chose mais...
Le coréen leva les yeux au ciel. Quel hypocrite il faisait ! Le coréen s'énervait de voir que personne à part lui n'avait l'air de vouloir dire les choses en face.
— Je sais. Tu dirais l'éliminer. Qu'elle ne soit plus nuisible à Louna et au monde entier ! J'avais compris le sous-entendu, comme tout le monde ici. Mais ce n'était pas vraiment là peine d'en faire un ! Projeter un meurtre est un acte déjà assez grave en tant que tel, alors autant ne pas le taire entre nous. — Certes...
Le tueur à gage s'éclaircit la gorge et acquiesça, sans pour autant ajouter un mot.
— Alors maintenant qu'on est tous d'accord, parlons-en. — Parfait ! — Ok... C'est... C'est ce qu'on voulait dire. Merci Kwaïgon. Bien... Est-ce que... Enfin je...
Liam s'arrêta là, laissant sa phrase en suspens. Cette fois c'est Lou-Khyan qui brisa le silence.
— Hum... Et bien je ne sais pas si vous avez l'habitude de tuer des gens... enfin, je ne parle pas de toi Ale... Mais personnellement... Ce n'est pas dans mes habitudes... — Ce n'est pas une question d'habitude... Mais vous le faites exprès tous ou c'est moi qui ai un problème ce soir ?
Kwaïgon regarda tout le monde tour à tour, presque excédé. Seul Alejandro avait l'air de partager son avis, ce qui était plutôt un comble. Mais avant que le coréen ne désespère totalement, Izikel prit la parole.
— Ce n'est pas une question d'habitude ou pas Lou... On ne prend jamais réellement l'habitude. Je pense que même Alejandro dont c'est le métier ne l'a pas prise. — Non en effet... — Non... La question c'est : est-ce qu'on décide de prendre la défense de notre amie ou pas. Parce que ça ne va pas s'arrêter là. Il y en aura d'autres des tueurs et ce n'est pas en donnant un pichenette sur le nez de Mme Reg que ça va régler l'affaire. On joue dans une cours infiniment plus grande que nous et contrairement à des gens lambda, notre solution à nous, c'est de nous rendre justice nous-même. Nous n'avons jamais choisi la voie normale. Nous avons toujours été autonome. Ça, nous en avons prit l'habitude... Ce que nous demande donc Liam, c'est de savoir si nous décidons, une fois de plus, de la jouer entre nous ou pas... — Je pense que je n'aurai pas dit mieux...
Kwaïgon se calma instantanément. Izikel avait éclaircit et fixé les choses sans mal. Pour la première fois, il sentait qu'une troisième personne pensait comme lui. Mais quelque chose dans le ton de l'irlandais lui disait qu'il n'était pas tout à fait partant...
— Alors c'est comme ça que vous faisiez aussi les autres fois ? Une concertation et vous décidiez de qui tuer ou non ?
Le ton d'Ezra avait quelque chose d'accusateur mais personne ne le releva vraiment.
— Non Ezra... Enfin tu le comprends mieux que personne ! On ne tue pas par plaisir crois moi... Et d'ailleurs, on a pas tué grand monde... — Ne l'accuse pas Ezra. De tous c'est Ale et moi les hors la loi. Aucun autre. Si t'as des comptes à régler c'est avec nous. — Je ne vous accusais pas. Je cherchais à comprendre... — Il n'y a rien à comprendre. On s'est toujours aidé et soutenu voilà tout.
S'en suivi un silence pesant. Louna avait les yeux brillant de larmes mais elle le cachait du mieux qu'elle le pouvait. Myriam ne disait rien, ainsi que Logan.
— Je suis désolé. Je ne sais pas ce que vous avez vécu en fin de compte... Mais de ce que tu m'as raconté, je suppose que les choses n'étaient pas facile. — En réalité, je trouve que la situations actuelle est la plus difficile que nous ayons eu à affronter.
Ale eu un léger sourire, et Lou releva des yeux interloqués sur Liam. Cette fois c'est elle qui prit la parole, avec cette voix légère qui lui était propre quand elle ne comprenait pas une chose capitale.
— Pourquoi ça ? Enfin... Vous avez été pris en otage et torturés, vous êtes retrouvé face à des tueurs qui ne voulaient que votre peau et tu trouve qu'abattre une femme de la haute sans doute pas ou peu entraîné est plus compliqué ? J'ai du mal à saisir la difficulté... — C'est plus compliqué à cause de notre situation... Avant, nous n'étions que trois ou quatre. Nous n'avions ni femme, ni fiancé, ni enfant. Seulement nos chevaux qui pouvaient repartir sans problèmes chez Peter. Nous n'avions pas d'engagement, ni obligations, ni biens... Nous étions libres et peu nombreux. Aujourd'hui les choses ont changés. Louna est fiancée, je le suis aussi et père en plus de ça. Les risques sont plus grands qu'avant... — Et ça rend la situation plus délicate. — Ah... Oui en effet... Je comprends mieux...
De nouveau le silence reprit sa place dans le petit salon alors qu'au dehors, les premières gouttes de pluie tombaient en silence sur l'eau agité de l'océan. Kwaïgon bu une gorgée de sa bière et soupira, pour finalement la poser sur la table basse. Finalement elle ne lui disait pas grand chose cette bière...
— Je vous aiderais à régler le problème, quel qu’en soit l'issue.
Louna releva vers lui un regard reconnaissant bien qu'humide de larme. Elle lui adressa un faible sourire, auquel le coréen répondit par un pincement de lèvre et un soupir lourd. Il ne le sentait pas. Rien que cette réunion, il ne la sentait pas. Un mauvais pressentiment grandissait en lui et il n'aimait pas cela. Le temps au dehors ne l'aidait pas à se rassurer, ni l'espèce d'embargo qu'il y avait sur leur île... Lui qui pensait avoir gagné le droit de vivre une vie enfin tranquille, il fallait croire que le sort s'acharnait un peu...
— Évidemment, je serais aussi de la partie. Je connais bien Mme Reg maintenant, avant de commencer j'ai fait une longue enquête sur elle que j'ai encore fourni ces dernières semaines.
Cette fois c'est Kwaïgon qui adressa un regard reconnaissant au tueur à gage. Contrairement aux autres, il appréciait Alejandro. Peut-être parce qu'ils étaient un peu de la même trempe tous les deux... Le coréen pouvait affirmer aussi sans se tromper que c'était une affection à double-sens. Seul point qui le rassurait dans cette soirée.
— Moi aussi. Je pense pouvoir vous être utile... — Moi également... — Liam !
C'était la première fois que Myriam sortait de son silence. Les regards convergèrent vers elle. Sa voix était pleine d'une détresse palpable.
— Myriam, je dois le faire. Je ne peux pas laisser Louna dans ce pétrin. — Et si tu ne revenais pas ? — Et si les autres ne revenaient pas ?
La jeune femme ne sut quoi répondre. Elle se renfonça dans son siège, les lèvres tremblante et se mura dans une bulle imperméable. Liam n'insista pas auprès d'elle, il savait que quoi qu'il dise, cela ne l'atteindrait plus. Il soupira donc, en promenant son regard sur l’assistance avant de s'arrêter sur Louna. Elle secoua doucement de la tête, négativement, mais Liam poursuivit.
— Je suis d'avis que Louna reste ici. On prendrait trop de risque à la faire venir avec nous. — Je suis du même avis. — Je veux bien vous aidez aussi. Je sais manier une arme et je pourrais être utile. — Euh... Et bien... Je veux bien aussi mais je ne pense pas vous être très utile...
Liam lui sourit, comme attendrit par le ton timide du moniteur de saut. C'était la première fois qu'il ouvrait la bouche lui aussi.
— On aura besoin de gens sur place au cas où, on ne peux pas tous partir et laisser Louna et Myriam seules ici de toute façon. — Il a raison. Je suis certain qu'Ezra sera ravi de t'apprendre quelques ficelles pour que tu puisse la défendre ici au cas où. — Oui, ce n'est pas une mauvaise idée... — Tu dois aussi rester ici Liam...
La voix brisé de Louna surprit tout le monde et les regards se tournèrent vers elle cette fois-ci. Même le coréen décolla ses yeux de l'océan pour la regarder.
— Tu l'a dis toi-même, tous ne peuvent pas partir. Et Myriam a raison... Ce n'est plus pour toi toutes ces histoires... Tu es père maintenant. Tu as trop à risquer dans cette histoire là...
Une larme coula sur la joue de Myriam alors qu'elle fixait Liam d'un regard suppliant. Ce dernier jeta un oeil à Ezra, Ale et Kwaïgon avant de regarder sa chère et tendre et de se raisonner.
— Très bien... Je resterais...
Il ne restait plus que l'avis d'Izikel à avoir. Quelques regards se fixèrent sur sa silhouette. Le jeune homme jouait avec ses glaçons, à la surface de son whisky. Il avait l'air plongé dans une profonde réflexion... Personne n'ignorait que les choses entre lui et Louna n'étaient plus ce qu'elles étaient. Mais il restait encore à savoir si le jeune homme avait réellement toucher le fond ou non... Louna prit une inspiration avant de s'adresser à lui, sa voix se brisant au fil de ses paroles.
— Je comprendrais... Izikel... Si... Si tu... Si tu ne veux pas...
Le regard bleu et froid du jeune homme foudroya celui de Louna en même temps qu'il suspendait son geste. Il reposa froidement son verre et croisa les mains devant lui, les coudes appuyés sur ses genoux.
— Je ne sais en effet pas si j'ai envie de le faire ou pas. Si j'ai envie de risquer ma vie pour toi. Est-ce que ça en vaut vraiment la peine ? Peut-être pas... Après tout, tu ne dois plus m'apprécier avec tout ce que tu m'as fait endurer alors pourquoi devrais-je me décarcasser et risquer ma vie pour toi ?
Un silence gêné s'en suivit. L'irlandais gardait son regard dur fixer sur celui de la jeune femme alors que les larmes se faisait de plus en plus nombreuses sur ses joues, jusqu'à devenir un flot continu. Elle détourna les yeux un instant et étouffa un sanglot, avant de revenir sur le jeune homme. Sur le toit de chaume, les gouttes de pluie se faisaient plus dru et plus bruyante et le vent sifflait par rafale entre les lattes du plancher. Tout le monde retenait son souffle.
— Ce n'est pas vrai ! — Quoi donc ? — Que je ne t'apprécie pas ! — Ah bon ? Et bien je n'en ai pas vraiment eu l'impression. — Je t'aime Izikel, autant que j'aime Liam. Mais tu crois que c'est... Que c'était facile toute cette période pour moi ? ... Tout... Tout ce que j'ai dut endurer psychologiquement ? Je n'en peux plus de cette situation ! Je m'en veux de m'être acharnée sur toi de la sorte... — Alors pourquoi tu ne m'as rien dit ? — Comment voulais-tu que je le fasse ? — Avec des mots. J'ai des oreilles et je suis pas idiot. Il suffisait de venir me parler. — Je ne savais pas comment te le dire...
Le jeune irlandais soupira alors que la demoiselle laissait échapper un nouveau sanglot. Le coach soupira et leva les yeux vers Ezra et Liam, évitant soigneusement celui de Louna.
— J'en serais...
Une approbation générale s'en suivit. Mais le jeune homme ne laissa personne enchaîner.
— On a fini pour ce soir ? — Alors bonne soirée à tous.
Sans autre forme de procès il se leva, ignora les regards et appels de Louna et prit la porte, bravant la pluie extérieure. Sa chambre n'était pas très loin de toute façon. En attendant, son départ initia l'hémorragie et fit redoubler les sanglots de Louna. Lou et Logan prirent congé à leur tour, ainsi qu'Ezra, qui parti à la suite d'Izikel. Liam s'attela à consoler Louna alors que Myriam les saluait timidement pour aller dans sa chambre. Il ne restait plus qu'Ale et Kwaïgon.
— Je te raccompagne ? — De toute façon, j'ai bien l'impression que tu vas devoir finir avec moi cette nuit... — Je crois aussi...
Les deux hommes saluèrent Liam et Louna d'un signe de tête poli et sortirent eux aussi. Au dehors, l'orage s'était un peu calmé, ce qui ne les empêcha pas de courir jusqu'à la nouvelle chambre du cavalier pro. En attendant, le coréen ne se fit pas plus bavard une fois seul avec Ale. Il prêta un t-shirt sec au blondinet qui se coucha rapidement dans le lit. Kwaïgon s'attarda un peu, un verre de soju à la main et le regard perdu sur les vagues. Dans quoi s'était-il encore embarqué ... ?
NYC - 9:07 am } Le soleil éclairait doucement la pièce, passant entre les épais rideaux entre-ouvert. Les voilages ondulaient faiblement sous le courant d'air frais qui passait par la baie vitrée ouverte de quelques centimètres. Elle laissait entrer le faible ronronnement de la ville, quelques dizaines d'étages plus bas. A l'intérieur de la pièce, tout était calme. Le coréen dormait encore, quelque peu emmêlé dans les draps de son lit. La chambre était faiblement décorée : un très grand lit, avec une tête en cuir matelassé, une commode en bois sombre sur laquelle était posée une coupelle de verre granité bleuté et son smartphone en charge, un fauteuil style club du même cuir gris foncé que la tête de lit, deux petites étagères blanches en guise de table de chevet, les rideaux lourd et sombre et les voilages blancs. Trois murs étaient blanc et le dernier, face au lit, gris foncé. La pièce était loin d'être petite, mais elle restait tout de même peu meublée. Attenant à la chambre, il y avait une salle de bain à l'italienne, dans les tons de beige et marron, avec des touches de turquoise. Un dressing simple et carré, moderne, très clair. La chambre donnait ensuite sur un hall d'entrée complètement ouvert et communiquant avec le salon, puis la salle à manger et la cuisine. Tous les murs étaient blancs, à l'exception de celui de la cuisine, pourpre. Les meubles de la cuisine était gris clair, tout comme la table basse du salon. Le tout en une matière laquée. Le sol était en parquet bois clair, à l'exception de quelques lattes parsemées, anthracites. La table de la salle à manger, en bois clair également, était sur une estrade. Six chaise du même bois l'entourait. La cuisine était délimitée par un îlot central contenant plaque de cuisson et plan de travail surélevé. Deux chaises de bar bois et blanche se tenaient devant. Un pc portable de la célèbre marque à la pomme était posé sur le plan de travail, ouvert mais en veille. Le mur de gauche de la cuisine n'en était pas vraiment un. C'était un enchevêtrement de poutres en bois formant des étagères de temps à autre. Ce "mur" délimitait l'entrée et la cuisine. L'appartement formait un L et les seuls murs pleins étaient ceux de la cuisine et la délimitation avec la chambre. Le reste se composait de baie vitrée. Un fauteuil en tissu blanc à mi chemin entre la chaise longue et le rocking-chair était d'ailleurs tourné vers la baie vitrée. Le canapé blanc était à la perpendiculaire de la baie, parallèle à la salle à manger, face à un très grand écran plat accroché au mur de la chambre. Un pouf carré du même tissu que le reste "fermait" l'espace salon et un petit meuble console se trouvait sous la télévision. Encore une fois, l'appartement était très épuré, meublé mais peu décoré. Il y avait simplement quelques livres sur les étagères du mur en poutre, un tableau dans l'entrée -une peinture traditionnelle japonaise occupant tout le mur de l'entrée- une coupelle du même verre granité que dans la chambre mais plus petite, contenant des clés. Quelques magazines sur la table basse, un vase en terre cuite d'origine japonaise au centre de la table de la salle à manger et un tapis poilu blanc sous les meubles du salon. Seule la cuisine paraissait plus "décorée" avec les équipements qui la composait. La salle de bain était du même genre mais plus "minérale" avec des mosaïques au mur et des dalles en pierre au sol. Le lavabo était en verre et il y avait un unique meuble sous le-dit lavabo en tek.
En soi, l'appartement n'avait rien d'extraordinaire. Mais il était tout de même extrêmement bien placé, juste sous le toit de l'immeuble, et offrait une vue sur Manhattan sans précédent. Quelques rues plus loin on pouvait croisé Times Square, ce qui rendait l'emplacement fort plaisant. Et aussi haut, ils étaient à l'abri du bruit de la rue, n'en entendant que la rumeur. Dans la cuisine, une led s'alluma discrètement, en douceur, alors que la machine à café se mettait en route. Il était neuf heures passée de quelques minutes. Moïra, occupée à lire dans le fauteuil du salon, New York à ses pieds, tourna la tête pour tendre l'oreille et sourit, à l'odeur familière et si plaisante du café frais et chaud. Elle se leva d'un bond souple et abandonna son magazine sur la table avant de sautiller jusqu'à la chambre de Kwaïgon. Elle ouvrit la porte doucement et entra à pas de loup. Elle était pieds nus, et portait une simple nuisette de soie noire. Elle portait les cheveux courts, à la garçonne et brun. Son visage était parsemé de tâches de rousseur, ce qui mettait en valeur ses traits fins. Elle s'approcha du lit et s'assit à côté du coréen, le fixant intensément, se mordant doucement la lèvre inférieure. Il se passa seulement une dizaine de seconde avant que le coréen ne prenne la parole d'une voix un peu rauque, encore endormi, les yeux toujours clos.
« Ça ne sert à rien tu sais, je gagnerais toujours à ce jeu là. »
La demoiselle eut une réaction de surprise avant de donné un léger coup de poing dans l'épaule du jeune homme qui se redressa en souriant.
« Mais comment tu fais ! Je n'ai pas fais de bruit cette fois ! »
Le coréen repoussa les draps et s'assit au bord du lit en grimaçant. Il portait un simple caleçon gris, mais son torse portait encore deux pansements, souvenir de Reg... Souvenir qui durait un peu trop longtemps...
« Ça c'est ce que tu crois ! »
Moïra sourit avant de grimacer un peu en voyant le jeune homme se relever avec quelques difficultés.
« Tu ne crois pas que ça aurait du guérir depuis le temps ? » « C'est quasiment guéri tu sais. » « Certes... »
Cela faisait un mois maintenant que les autres étaient rentrés. Un mois qu'il était à New York, en compagnie de Moïra. Elle soignait ses blessures et il enquêtait sur le fils de Christine Reg. Le garçon n'avait pas été si difficile que cela à trouver. Et encore moins à filer à travers les rues de Manhattan. Ce qui était un peu plus compliqué en revanche, c'était de lui trouver une sacrément bonne excuse pour qu'il n'entre pas à Full Horse, qu'il n'entende jamais parlé de sa soeur et qu'en plus de cela, Kwaïgon ne lui parle jamais de vive voix. Il devait faire jouer bon nombre de ses contacts ainsi que ceux de Moïra pour parvenir à cela. Mais malgré toutes ses tentatives, il n'avait pas pu éviter l'inévitable : le jeune Kam était aller à Full Horse. Mais... Par un heureux hasard, il n'avait fait qu'y mettre les pieds et en faire le tour, avant de revenir à New York illico. La raison à cela ? Un décès dans la famille de l'un de ses deux pères... Au moins, le coréen avait un peu de répit avant le nouveau départ du jeune homme...
Kam Gilroy Peak, le demi frère de Louna, était, sur le papier, plus qu'inoffensif. Un nouveau-né était même bien plus menaçant que lui. Il avait été abandonné à la naissance, et avait été placé dans un orphelinat de la ville. Quelques années plus tard, alors qu'il avait trois ans, un couple d'homme homosexuels avait adopté l'enfant. Il n'avait jamais rien su de sa mère biologique, et encore moins de son père biologique, dont l'identité avait été engloutie avec la mort de feu sa mère. Ce qui, pour Kwaïgon et le reste du monde, était une bien jolie idée. Kam avait grandi normalement, bien que raillé par les enfants de son âge. Les enfants sont méchants entre eux, et Kam n'échappait pas à la règle. Bien qu'il fut tout ce qu'il y a de plus banal comme enfant, il n'avait pas de maman mais deux papas, et cela, c'était une sujet de moquerie fort plaisant pour la marmaille de base. Il était très sportif, et très artistique. L'un de ses parents étant comédien et l'autre musicien, il n'avait guère de choix. Le manque de finance de sa famille et ses facilités en sport lui permirent d'obtenir diverses bourses pour diverses écoles en tout genre. A son adolescence se présenta le fantôme de son passé qu'il n'avait jamais connu : sa mère biologique. En mal de progéniture à torturer, Christine Reg avait retrouvé la trace de son garçon et avait commencé à le courtiser, au cas où son plan initial avec la grande sœur tombe à l'eau. Elle avait mit le garçon à l'équitation et lui avait fait miroiter la belle vie dans les beaux quartiers, au grand dam des deux pères du jeune homme. Elle avait aussi promis de payer ses études à l'académie de Full Horse. Mais son tragique décès fit voler en éclat ses belles paroles... Grâce à la folle intervention de Moïra auprès du banquier de feu Christine Reg ainsi que quelques faux papiers, les virements vers l'école avaient cessé, et l'inscription du garçon, également. Le Haras est cependant plus que tolérant et Kam était tout de même le bienvenue. Mais cette fois, c'est Kwaïgon qui réussit à intervenir, en interceptant des courriers et en falsifiant d'autres, répondant à la place de Kam au Haras, et à la place du Haras à Kam. Résultat : le jeune homme resterait donc à New York et entrerait à Juilliard, où une bourse juteuse l'attendait.
La manœuvre n'avait pas été simple. Mais le résultat était là. Désormais il ne lui restait plus qu'une petite chose à faire : être certain que Kam ne savait rien à propos de sa demi-sœur. Et c'est là que Moïra intervenait le plus. Elle devait jouer le rôle d'une élève de Juilliard, s'approcher de lui, sympathiser et tirer le max d'infos qu'elle pourrait sur le sujet qui les intéressait, avant de s'éclipser de la vie du jeune homme. Moïra avait un physique à mi chemin entre le passe partout et l'extravagant. Elle faisait plus jeune que son âge et était très belle. Mais sa beauté restait assez subjective pour qu'elle n'attire pas les regards du plus grand nombre. Elle savait être discrète et passait sans mal pour une ado entrant tout juste dans le supérieur. Il suffisait de l'habiller en conséquence. Cette manoeuvre prendrait quelques mois et il fallait agir vite. Kam entrant en milieu d'année, il n'aurait aucune connaissances. Moïra entrant en même temps que lui, elle serait dans le même cas et -grâce à Kwaïgon- dans la même classe. Cela donnerait une excellente excuse de rapprochement initial. Moïra étant ensuite d'une adaptabilité et d'une sociabilité exceptionnelle, le reste se ferait facilement et, le coréen l'espérait, pas trop lentement. En attendant, aujourd'hui c'était le premier jour de la demoiselle et il n'était pas question qu'elle se loupe. Elle commençait à dix heures, et ils vivaient à quelques pâté de maison de l'école. Ils avaient un appartement leurre dans le bloc d'à côté. Un studio aux allures étudiantes, sous les toits, parfait pour corroborer la situation de la demoiselle. Si tout se passait bien, elle pourrait y emmener Kam au besoin.
« Prête à reprendre les cours ? » « Oui chef ! »
Elle sourit et sauta sur ses pieds avant d'enlever sa nuisette et aller prendre une douche. Le coréen se contenta de sourire avant de se lever pour aller préparer le petit déjeuner. Durant les prochaines semaines voir mois, sa routine serait celle-ci. Petit déjeuner, journée entière seul, puis dîner et nuit avec la demoiselle. Il était convenu qu'elle passe au moins une nuit dans l'appartement leurre par semaine, histoire qu'il ai l'air habité. Kwaïgon y passerait en journée, pour remplir le frigo ou le vider selon le besoin. Exaltant ? ennuyeux à mourir, mais nécessaire....
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Dernière édition par Oror le Dim 27 Sep - 13:34, édité 1 fois
NYC - 11:00 am } Cela faisait quelques mois maintenant qu'il était à New York en compagnie de Moïra. Il s'était complètement remit de ses blessures de l'automne et le plan qu'ils avaient mit en place avec la brunette marchait à merveille. Elle s'était mise Kam dans la poche et avait apprit pas mal de choses à son sujet. Elle avait même été jusqu'à l'amener à se confier à elle... Si seulement il savait... Il n'en dirait certainement pas autant ! Mais Moïra avait cette aura extraordinaire qui faisait que tout le monde lui ferait confiance. On lui confierait sa vie sans hésiter. Mais en la connaissant un peu mieux, en sachant quel métier elle exerçait en dehors de son temps libre, on la fuirait.
Kwaïgon, assit en tailleur devant la grande baie vitrée de son salon, attendait patiemment le retour de Moïra. C'était les vacances d'été. Elle ne reverrait plus Kam après ce jour là. Le coréen respira profondément, les yeux clos. L'appartement était entièrement vide, baigné dans une lumière éclatante. Il entendit la porte de l'ascenseur, la clé dans la porte, mais ne bougea pas pour autant, gardant les yeux clos. La porte s'ouvrit sur Moïra et se referma. Il l'entendit jeter son sac à main par terre, s'avancer lourdement et se laisser tomber dans le canapé, juste derrière le coréen, avec un soupir las. Le silence se prolongea quelques instants, durant lesquels le jeune homme sentit le regard lourd de la brunette sur sa nuque. Finalement, elle brisa le silence d'une voix joyeuse.
« Tu serais fier de moi ! »
Le coréen ne put s'empêcher d'étouffer un petit rire en ouvrant doucement les yeux. Il resta quelques secondes immobile, le temps que ses pupilles se fassent à la luminosité puis il se leva en douceur, se dépliant avec attention.
« Pourquoi je "serais" ? Pourquoi pas "tu vas être fier de moi !" ? »
Il se retourna pour faire face à la jeune femme souriante. Mais son sourire à lui disparu. A côté du canapé, timidement, se tenait Kam. Il avait les mains dans son jean, et les joues rougissantes. Ses cheveux bruns en bataille et les yeux un peu gonflés. Avait-il pleuré ? Le coréen ne vit aucune trace humide sur son t-shirt kaki. Ils restèrent là à se toiser un moment, Moïra souriant toujours sur le canapé.
« Parce que j'ai failli suivre ton conseil ! Vraiment hein, j'ai essayé ! »
Elle avait la voix désolée d'une gamine de quinze ans en train d'essayer de convaincre son grand frère qu'elle avait vraiment tout fait pour suivre ses ordres, mais que, manifestement, elle n'avait pas pu. Ce qui était le cas à vrai dire. Ils avaient envisagé la possibilité que Kam et Kwaï' se retrouvent face à face. Dans ces cas là, le coréen serait présenté comme le grand frère adoptif de Moïra, pour rester dans l'esprit du plan de base. Mais ce n'était qu'une éventualité bien peu envisageable au vue des circonstances. Kwaïgon n'était pas censé rencontrer Kam. Il expira profondément et desserra ses poings avant d'afficher un sourire que l'on pourrait qualifier d'aimable, sans trop insister. Sa voix froide répondit à Moïra avec une teinte de menace en fond.
« Je vois cela... »
Il ne quittait pas Kam des yeux, qui rougit plus encore. Il était face au grand frère pas content. Le sourire de la brunette se transforma en une moue un peu déçue et elle reprit la parole, voyant que Kam n'arrivait pas à trouver ses mots.
« Oh s'teuplaid ! Kwaï, c'est juste... » « C'est de ma faute ! Ne lui en voulez pas. »
Il avait interrompue Moïra et cherchait de nouveau ses mots. Le regard intense de Kwaïgon lui fit baisser le regard, le déviant vers Moïra, implorant son aide. Au moins, la première impression de Kwaïgon était bel et bien celle qu'il voulait donner. Cette fois, le sourire de Moïra disparu également. Elle fini par se lever et s'accrocher à Kwaïgon, implorante. D'un oeil extérieur, elle était parfaite dans son rôle. Une merveilleuse actrice. Pourquoi n'avait-elle pas choisi la voie cinématographique ? Elle aurait décroché pas mal de contrats... Mais le coréen ne devait pas penser à cela. Il devait rester concentré, jouer son rôle à lui aussi.
« C'est notre dernière journée ensemble... Je voulais juste te demander si je pouvais l'emmener au resto... »
Le coréen ne quittait pas Kam des yeux qui hésitait entre le regarder lui ou elle ou contempler ses chaussures. La voix suppliante de Moïra reprit.
« S'il te plait... »
Après quelques interminables secondes, le coréen posa enfin ses yeux sur Moïra et soupira. Il leva finalement le regard au ciel avant d'accepter.
« Ok... Et vous êtes monté pour ? »
Le sourire rayonnant de la jeune femme revint sur ses lèvres, illuminant tout son visage. Kam sembla se détendre un peu.
« Ta carte bleue et la méga vue de ton appart. »
Kwaïgon eut un mouvement de surprise. Mais il fini par soupirer et se diriger vers sa chambre sans un mot. Il en revint quelques minutes plus tard avec sa carte bleue en main. Kam et Moïra étaient devant la fenêtre, enlacés. Le coréen s'éclaircit la gorge et les deux jeunes gens lui firent face. Moïra lui arriva dessus en sautillant et déposa un baiser sur sa joue avant d'attraper la carte qu'il tenait entre ses doigts. Ils se dirent au revoir et les deux étudiants disparurent dans l'ascenseur alors que Kwaïgon leur criait de faire attention-de ne rentrer pas trop tard- et tout ce qu'il pouvait leur recommander d'utile en tant que grand frère...
NYC - 11:07 pm } La journée avait été riche en réflexion. Après le départ de Kam et Moïra, le coréen était aller prendre une douche et se changer. Il avait enfilé un jean noir, ainsi qu'un polo gris perle. Il s'était fait à déjeuner avant de déguster son plat face à la vue qu'offrait ses baies vitrées. Il avait ensuite passé son après-midi entre lecture et ordinateur. Il se renseignait, prenait des nouvelles du monde ou apprenait encore et toujours sur le monde du cheval.
Mais il n'avait pas fait que cela durant les nombreux mois qu'il avait passé seul ici, à attendre que Moïra ne revienne le soir pour lui faire un rapport et passé invariablement la nuit dans son lit. Il avait reprit contact avec quelques uns de ses anciens amis. Prenant des nouvelles du côté obscur du monde, celui dont les journalistes ne parlaient pas. Il restait malgré tout en retrait de tout, prenant des nouvelles, se faisant une idée simple de la situation.
D'après ce que lui rapportait Moïra, leur plan initial évoluait. Lentement, mais sûrement. Malgré tout, la jeune femme avait commis une erreur, et il en avait prit la pleine mesure ce matin là. Elle avait laissé Kam tomber amoureux d'elle... Avait-elle voulu rendre leur année dramatique ? La comédie tragique des amoureux obligés de se séparer en fin d'année à cause de destins divergent ? Il n'en savait rien. Mais il comptait bien le demander à la jeune femme quand elle remonterait. Ce qu'elle ne tarda pas à faire...
Quand la porte de l'ascenseur s'ouvrit dans un faible grincement et que la clé tourna dans la serrure, le jeune homme était assit sur le canapé et regardait les infos américaines. Moïra savait qu'après les sujets qui l'intéressait, il passerait à une chaîne d'info étrangère. Elle posa donc son sac en soupirant et se dirigea vers la chambre d'un pas lourd, sans adresser ni un regard ni une parole au coréen. Elle alla vers la salle de bain et à peine le seuil passé, elle sentit le coréen dans son dos. En une poignée de seconde elle était plaquée contre le mur carrelé de la salle de bain, une main dans celle de Kwaïgon, dans le bras lui était en travers de la gorge, et l'autre main immobilisée. Il pesait de tout son poids contre elle, de sorte que ses jambes se retrouvent aussi immobiles. La jeune femme fut surprise avant qu'un éclair de frayeur ne traverse son regard. Elle savait, tout comme le coréen, qu'il pouvait la tuer en quelques interminables minutes. Il était furieux. Et c'était cette rage au fond de son regard noir qui effrayait la demoiselle plus qu'autre chose.
« Ah quoi tu joue ? »
Il avait siffler entre ses dents. Moïra essaya de répondre, mais la pression du bras sur sa gorge était trop grande. Le coréen donna un à coup lui coupant le souffle avant de la lâcher et la laisser s'effondrer à ses pieds. Il s'assit ensuite négligemment sur le rebord du meuble vasque et croisa les bras sur son torse. Il fallu quelques minutes à Moïra pour se remettre de cette attaque soudaine. Finalement, elle se releva tant bien que mal, s'accrochant comme elle pouvait aux carreaux glissants et fit face au coréen, respirant encore difficilement. Cette fois, elle était elle aussi en colère, mais au fond, désolée.
« Je sais ! J'ai merdé... Mais il commençait à avoir des doutes. Il voulait une preuve de ce que j'avançais... » « Qu'est-ce que tu avançais ? » « Que mon grand frère existait bel et bien et qu'il m'avait trouvé une place dans une grande école japonaise... »
Elle toussa, ce qui l'empêcha d'en dire plus. Mais Kwaïgon devinait sans peine. Rien que le fait de voir ce grand frère dont elle parlait tant dans un appartement ainsi placé ne pouvait que confirmer ses dires. Il soupira et se leva, enlaçant Moïra qui s'accrocha à lui et enfouit sa tête au creux de son cou.
« Je suis désolé... » « C'est rien. J'aurais fait la même chose. »
Elle toussota encore un peu mais se calma. Elle se détacha finalement de lui et lui sourit. Il le lui rendit avant de déposé un léger baiser sur sa joue.
« Je te laisse faire... Ce que tu venais faire ici. »
Elle rit doucement avant d'allumer le jet de la douche pour laisser venir l'eau chaude.
« Je venais prendre une douche. Tu m'accompagne ? » « Pas ce soir. »
Il sourit avant de quitter la pièce. Il alla doucement préparer deux infusions à la menthe et aux épices en attendant Moïra. Ils avaient un briefing de fin à faire et la levée de camp à préparer. Maintenant, leur mission prenait officiellement fin !
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Dernière édition par Oror le Sam 3 Oct - 11:12, édité 1 fois
NYC - 20:42 pm } Le milieu de l'été approchait. Moïra était parti au Japon, non seulement pour coller à ce qu'elle avait dit à Kam, mais également parce qu'elle y avait un contrat. Kwaïgon avait passé l'été dans la grosse pomme. D'une part pour terminer la surveillance de Kam, et d'autre part parce que Alejandro lui avait demandé d'y rester. Un personne de son passé, un certain Pierce, avait refait surface d'une façon bien inattendu et il voulait que Kwaïgon enquête un peu sur ce retournement de situation. Il avait accepté le tout de bonne grâce. Non pas qu'il ne veuille pas rentrer au Haras, mais il avait tout de même pas mal d'occupation sur place.
Ce soir là, ils avaient une conf-call avec tout le monde. Moïra à Kyoto, la troupe du Haras à Rio et Kwaïgon à New York. Ils allaient enfin pouvoir faire le point tous ensemble sur l'année qui venait de s'écouler. Cette petite réunion soulageait un peu Kwaïgon. Cela mettait un terme à sa mission et clôturait une année de galère pour l'équipe. Une longue année. Jamais, dans son souvenir, ils n'avaient eu à affronter une affaire aussi complexe et aussi étalée dans le temps. Mais finalement, cela avait été beaucoup de travail passif et d'observation la grande majorité du temps. Ce qui n'était pas spécialement fatiguant, mais cela avait permit à Kwaïgon de se soigner et de récupérer toutes ses capacités physiques sans avoir la pression de la reprise du travail des chevaux. Son seul regret était d'avoir loupé presque une année dans le travail et la relation avec son cheval, Kim Song Ki. Ezra et Liam lui donnait des nouvelles régulièrement mais c'était loin d'être assez pour lui...
Il était prêt une demi heure avant l'heure décidée. Il avait branché son pc à la télévision et positionner une caméra dessus, de façon à pouvoir rester tranquillement sur le canapé. Il avait laissé le tout branché pour aller se préparer un bol de phô, une soupe complète très répandu au Vietnam et pays alentours. Il découpait ses derniers morceau de piment quand la sonnerie caractéristique de la messagerie en ligne retenti. Il jeta ses morceaux de piment dans le bol fumant, prit le tout et s'installa sur le canapé avant de répondre. De l'autre côté de l'écran se pressait Liam, Ezra et Ale. Liam avait des cernes sous les yeux et le teint pâle. Ale et Ezra était aussi un peu grave mais ils avaient l'air plus en forme que l'éleveur. Quelques secondes plus tard Moïra apparu dans un autre petit carré, souriante.
« Salut tous ! » « Salut ! » « Salut ! » « Hey ! » « Bonsoir à tous ! »
Quelque chose dans la voix de Liam paru bizarre au coréen mais il ne releva pas. C'est l'éleveur qui poursuivit avec calme.
« Vous allez bien tous les deux ? » « Tout va bien. » « Nickel ! Vous par contre ça a pas l'air d'être la grande forme !? »
Liam soupira et c'est Ezra qui répondit.
« Une mauvaise nouvelle. Mais on en parlera à la fin. Commençons. »
Le coeur de Kwaïgon se serre. Une mauvaise nouvelle ? De quel genre ? Malgré tout, si cela avait été très important, ils l'auraient mit au courant. Il n'y avait donc pas mort d'homme. Il prit une légère inspiration avant de commencer.
« Ok. Alors, je vais récapituler. L'année dernière, en automne, je suis donc resté à New York avec Moïra pour me soigner, mais aussi neutraliser Kam, la menace qu'il représentait. Notre plan d'action s'est dessiné assez vite et il était assez simple. »
Tout naturellement, Moïra reprit la suite de Kwaïgon, avec le même sérieux et la même pédagogie.
« On a choisi la méthode douce, parce qu'on ne savait pas ce dont il était au courant ou pas. Le plan était simple, Kwaï lui a obtenu un ticket d'entrée pour l'école de ses rêves en plein New York, en cours d'année, et je suis rentrée en même temps que lui. Je devais donc devenir la bonne copine, arrivée en même temps que lui à l'école. » « Ce qui a plutôt bien fonctionné ? » « Ce qui a très bien fonctionné. Les choses sont aller très lentement, mais ils sont devenus amis et subtilement, Moïra a pu faire le tri entre ce qu'il savait et ce qu'il ignorait totalement. »
Il fit une pause, le temps pour tout le monde de s'imaginer les choses, avant de reprendre d'une voix toujours aussi calme.
« Il s'est assez vite avéré qu'il ne savait rien des complots de sa mère et qu'il n'était pas au courant de l'existence de sa demie soeur, Louna. Il est jeune et insouciant, simplement un gamin influençable... Il a été élevé par deux pères adoptifs. L'un est producteur de musique et professeur à Juilliard alors que l'autre est acteur de théâtre. Il a grandit sans savoir qui était sa mère et a été adopté très tôt. Christine est arrivée dans sa vie il y a seulement un an et demi. Elle lui a servit des promesses sur un plateau d'argent sans pour autant lui dire quoi que se soit de son père biologique ni de sa soeur. Je pense qu'elle voulait qu'il se retrouve face à Louna, qu'il s'attache à elle, qu'ils se rapprochent pour finalement faire pression sur le gosse qui ferait lui pression sur sa soeur ou même qu'il lui rapporte des choses sur Louna. Mais elle voulait aller petit à petit dans les révélations, histoire d'être crédible. Quand vous arrivez dans la vie d'un gosse, même s'il sait qu'il a été adopté, c'est compliqué de tout lui déballer sans qu'il n'ai des soupçons... En attendant, la disparition soudaine de Christine a refroidit ses ardeurs de rapprochement et il est revenu dare dare avec ses pères. Deux hommes très prévenants d'ailleurs, qui ont l'air adorables. Enfin... Donc finalement, on a pu commencer la phase trois. » « La phase de séparation. Je ne pouvais pas disparaître de sa vie d'un coup, cela aurait été trop suspect. Là encore, il fallait faire les choses en douceur... »
Elle avait terminé sa phrase en un murmure. De l'autre côté de l'écran, Ezra fronça les sourcils. Et la tête d'Ale apparaissant entre l'éleveur et le cavalier également. C'est d'ailleurs l'américain qui devança tout le monde en prenant la parole d'un ton soupçonneux.
« Mais ... ? »
Kwaïgon soupira et Moïra se contenta de se mordre la lèvre, les joues rosissantes. Elle pouvait feindre la honte autant qu'elle le voudrait, personne ne la croyait.
« Mais Moïra n'est pas si fine que cela et le jeune homme est tombé amoureux d'elle. Donc la séparation est un peu dure et elle a du se faire avec plus de brutalité qu'on l'aurait voulu. » « D'où ton départ précipité à Kyoto ma belle ? » « C'est ça. »
Un soupir parcouru l'assistance du Haras. Ale explosa de rire et disparu de l'écran. Ezra se contenta de pincé les lèvres et Liam de secouer la tête.
« Bon... Ceci dit, ça, c'est devenu le problème de Moïra ? Donc il n'y a plus de danger concernant Kam ? » « Effectivement. Ce chapitre de notre histoire est terminé. Kam n'est plus une menace, Christine Reg non plus. C'est enfin fini... »
Un moment de silence accueilli cette conclusion. Ils étaient libres, en quelque sorte.
« Très bien... Merci Moïra... Sincèrement merci. Je ne te retiens pas plus longtemps. J'ai encore un peu besoin de toi Kwaïgon pour qu'on planifie ton retour... » « Ok. » « D'accord ! Bonne soirée messieurs ! A très bientôt ! Et merci à vous, c'était une année de césure intéressante ! »
Ezra sourit, tout comme le coréen. Ils ne doutaient pas de revoir Moïra un jour, c'était devenue une amie désormais...
« A bientôt ma belle ! »
Un dernier sourire et la jeune femme disparu de l'écran. Liam ne perdit pas de temps cependant et s'adressa d'une voix grave à Kwaïgon, qui ne plaisait guère au coréen.
« J'ai besoin que tu reste encore un peu à New York Kwaï... Myriam et Maël vont venir te rejoindre ainsi que... Louna. »
Le coréen ne dit rien, mais il su, à la façon dont Liam avait prononcé le nom de l'éleveuse, que quelque chose n'allait pas.
« Louna a eu un accident de voiture... Elle est dans le coma. Elle va être déplacé dans un hôpital New Yorkais en fin de semaine si tout se passe bien. Myriam et Enzo l'accompagneront... Est-ce que tu peux te charger de les accueillir ? »
La gorge du coréen se noua. Un accident de voiture ? Mais comment ? Quand ? Un millier de questions se bousculaient dans son esprit. Son regard se perdit un instant avant qu'Ezra qui prononce son nom ne le fasse revenir à la réalité.
« Oui. Bien sûr. Envoi-moi leurs dates et heures d'arrivée. J'irai les chercher à l'aéroport. » « Merci... Myriam te racontera tout... Il faut qu'on te laisse... » « Ok... Bonne nuit les gars... » « Bonne nuit, Kwaï. » « Salut ! »
Liam lui adressa un geste de la main et l'image se coupa. Le coréen resta un moment face à l'écran de son ordinateur, perdu dans ses pensées. Louna dans le coma... Mais quand est-ce que le sort allait cesser de s'acharner sur elle ?
Le Haras... Le coréen n'aurait jamais pensé que retrouver ces murs, ces odeurs, ces visages, serait aussi réconfortant et ressourçant. Ils avaient retrouvé Liam dans son élevage et les retrouvailles avec son fils avaient été émouvantes. Kwaïgon et Myriam, d'un commun accord, n'avait pas prévenu l'éleveur du retour au Haras de son fils et du coréen, pour lui faire une surprise. Ezra les avait mit au courant de l'état inquiétant de Liam et ils s'étaient dit que ce petit retour ne lui serait que bénéfique. Et ils étaient très loin d'avoir tord...
La journée touchait presque à sa fin quand Kwaïgon et Maël avait posé les pieds au Haras. Ils avaient monté leurs valises dans la chambre de Kwaïgon, et s'était mit en quête de l'équipe, se gardant de passer un coup de fil. La recherche était plus amusante pour le petit garçon. En sortant du Haras, ils étaient tombés sur Lou et Ezra qui discutaient dans l'herbe. La suite n'avait pas été très difficile. Désormais, les chevaux étaient nourris, les hommes étaient nourris et douchés et Maël était couché. Il devait être près de onze heure quand Kwaïgon se laissa tomber dans l'un des sofas moelleux du salon. Il en sourit de plaisir, s'enfonçant dans les coussins comme un enfant. Mais lorsqu'Ezra et Ale entrèrent dans la pièce, il se redressa et leur adressa un sourire aimable. Les deux hommes prirent place en face de lui.
« Alors ? Qu'est-ce qui a fait que tu es revenu ? Tu as abandonné les recherche sur Pierce ? » « Au contraire ! Tu vas voir, j'attends que tout le monde soit là. » « Lou ne viendra pas, elle avait un rendez-vous ce soir. »
Ale posa un regard étonné sur le métis. Depuis la veille, il n'avait pas vraiment eu l'occasion de savoir si Ezra et Lou avait finalement parlé... Bien qu'il se doute que se soit le cas puisqu'ils étaient ensemble quand ils avaient trouvé Liam...
« T'en sais une peu plus alors ? » « Toi aussi je suppose ? »
Ale hocha positivement de la tête. Kwaïgon lui ne comprenait strictement rien à ce qui s'échangeait.
« Vous pouvez éclairer ma lanterne ? » « Lou a un nouveau petit copain. » « Oh... ? »
Le coréen haussa un sourcil mais sans en ajouté plus. Ceci explique cela ! En attendant, ils n'eurent pas vraiment le temps d'approfondir le sujet, Liam et Izikel entraient dans la pièce, refermant soigneusement la porte derrière eux. A cette heure là, le salon était vide et les élèves étaient soit en ville, soit dans leurs chambres. Ils ne risquaient donc pas trop de voir quelqu'un venir les déranger... Liam et Izikel s'installèrent dans les fauteuils et canapés, et tout les regards se tournèrent vers Kwaïgon. Cependant, c'est Liam qui prit la parole le premier.
« Alors, si ça ne vous embête pas, j'aimerais qu'on revienne au début... Que quelqu'un m'explique tout depuis le début. » « Je ne suis pas contre aussi... »
Ale et Ezra échangèrent un regard. Finalement c'est Ezra qui prit la parole pour faire un rapide résumé à Liam.
« Pierce Finnegan est une véritable légende dans le milieu militaire et policier. Au début de sa carrière, c'était un brillant sniper d'élite dans l'armée américaine. Il a été amené à travailler avec Interpol sur différentes affaires et il est devenu un des principaux interlocuteurs de l'agence… A la fin de sa carrière, il a changé de camp et a été déclaré mort dans une énorme fusillade qui a fini en explosion lors d'une descente d'Interpol dans une de ses bases de l'époque. Après quoi, plus personne n'a entendu parlé de lui… » « Sauf moi apparemment. Lorsque j'ai débuté en tant que tueur à gage, Pierce avait déjà passé le cap des cinquante piges. Malgré tout il m'a fait suivre une formation quasi militaire et bien à lui pour que je devienne un tueur infaillible... Mais c'était bien après qu'il ne soit déclaré mort. Désormais il approche grandement des quatre-vingt-dix ans et vit retiré du monde. » « Tu n'avais pas dit que c'était avant ta naissance Ezra ? » « Je me suis un peu avancé... »
Le jeune éthologue sourit. Malgré tout, les autres gardèrent leur sérieux, ce qui fit soupirer le petit blondinet.
« Bon, et en quoi ça nous concerne de ce fait ? » « En réalité, ça ne concerne que moi finalement. Lorsque l'on était à Rio, un homme m'a approché pour un contrat, en me disant que Pierce Finnegan m'avait chaudement recommandé à lui. Mais je savais très bien que j'étais le seul à le savoir en vie. Quelque chose cloche dans cette histoire et j'ai peur qu'il arrive quelque chose à Pierce. » « Ok... Mais nous on ne le connait pas ? » « Où est-ce que tu veux en venir Liam à la fin !? »
Izikel s'énervait. Liam avait plutôt l'air fatigué et dépassé. Ezra pinçait les lèvres et Ale regardait ses pieds. Tout comme Kwaïgon, ils savaient où Liam voulait en venir. Izikel aussi sans doute, mais il voulait l'entendre dire de la bouche de l'éleveur. Liam soupira.
« Si ça ne nous concerne pas à nous, je ne vois pas pourquoi on se pencherait sur le sujet. Ça nous fait perdre du temps, de l'argent... Et c'est encore un coup à risquer nos vies pour pas grand chose. C'est vrai, de ce que tu en dis, c'est un vieux monsieur non ? Qu'est-ce qu'il pourrait lui arriver à son âge ? »
Liam haussa les épaules, son regard errant sur les visages autour de lui. Ezra acquiesçait doucement. Ale le regardait sans expression. Izikel bouillonnait.
« Tu as raison... » « Mais ! ... »
Ale interrompit Izikel en levant une paume vers lui. L'éthologue se tut mais son regard était noir.
« Tu as raison Liam, cela ne vous concerne pas. Ezra et Kwaïgon connaissent l'histoire de cet homme, que je suis venu complété. J'ai demandé un coup de main à Kwaïgon parce que je m'inquiète pour ce vieil homme qui m'a tout apprit, et qui m'a recueillit quand j'étais gosse. Mais je comprendrais que tu ne veuilles pas prendre part à ... ça. » « Et qu'est-ce que tu fais du coup de main à un ami ?! C'est pas toi qui nous rabâches sans arrêt qu'il faut qu'on se serre les coudes ?! »
L'éthologue s'était levé de son siège et serrait les poings, plongeant son regard droit dans celui d'un Liam impassible, juste un peu las. L'éleveur ne dit rien, se contentant de soupirer. Encore une fois c'est Ale, d'une voix calme, qui reprit la parole.
« Izikel... S'il te plait... »
L'éthologue se rassit, bien que toujours bouillonnant de colère.
« Je ne suis pas un ami Izikel... Mais... J'apprécie que tu me considère comme tel. »
Liam soupira cette fois et se décida à intervenir.
« Ne dis pas n'importe quoi Ale... Tu fais parti de l'équipe et l'équipe c'est la famille. A ce titre tu es même plus qu'un ami... »
L'américain eut un rire narquois.
« Liam, s'il te plait... Ta famille c'est Myriam et Maël et chacun ici en est conscient. Ou en tout cas, je le suis... Je suis arrivé pour tuer l'un des vôtres, pas pour une ballade de santé. Je sais que vous ne me faites pas complètement confiance, même si vous essayez. Mais ce n'est pas grave, je fais avec. Je ne mérite pas mieux de toute façon. »
L'américain et l'éleveur échangèrent un regard. Izikel bouillonnait toujours mais il le montrait moins. Par contre, Ezra s'agaçait. Et il brisa le silence qui s'était installé avec un peu de brutalité.
« Bon, ça suffit les niaiseries. Personnellement, retrouver ce "vieux monsieur" m’intéresse, même si je ne fais plus parti du bureau. Liam, on comprend tous très bien que tu n'as pas envie de te plonger dans une histoire aussi compliqué et on ne t'en voudra pas. N'est-ce pas Izikel ? »
L'éthologue envoya un regard colérique à son ami mais il acquiesça doucement.
« Mais seulement Liam, décide toi, qu'on puisse avancer. Je suis exténué, j'aimerais aller me coucher moi aussi. »
L'éleveur soupira et se laissa tomber dans son fauteuil, faisant un signe de la main à Kwaïgon pour qu'il poursuivre. Ils avaient fait le tour des présentations désormais...
« Bon... Du coup j'ai profité du temps que j'ai passé à New York pour faire quelques recherches. Et je suis tombé sur le début d'une piste. Ne me demandais pas comment, je serais incapable de vous l'expliquer ! C'était dans un dossier que j'ai piraté du FBI... En tout cas, c'était des coordonnées GPS qui menaient ici, à Singapour. Plus précisément, à la gare du centre ville, et encore plus précisément, devant des casiers publics. Et sur l'un d'eux, il y a de gravé dans le métal "MFRD"... » « Mon tatouage... C'était quel numéro de casier ? » « Le quatre-vingt-quinze. » « L'année durant laquelle j'ai fait sa connaissance... C'est forcément Pierce qui a laissé ce casier. » « Je ne l'ai pas ouvert mais ça vaudrait le coup d'aller jeté un oeil... Autrement, je n'ai rien d'autre... J'espère que le casier nous en dira plus. »
Un silence empli de réflexions s'installa. Ils ne pouvaient faire que de simples spéculations pour le moment. Ils n'auraient rien de concret tant que le casier ne serait pas ouvert avec un nouvel indice dedans... En espérant qu'il y ai un nouvel indice...
« Bon... Très bien. Dans ce cas là on ira demain. En espérant que le FBI ne soit pas passé avant nous. » « Je ne pense pas. Ils ne savaient pas où allait ces coordonnées. Elles étaient cryptées, il a fallu que je décode pour pouvoir les trouvé. » « Ils ont du le faire aussi... »
Le coréen haussa les épaules avec un petit sourire. Pierce n'était pas une priorité puisque mort. Et l'agence américaine avait bien mieux à faire que de partir sur une chasse au trésor lancé par un homme mort. Mais Kwaïgon tut cette conclusion. Les esprits étaient fatigués, il ne voulait pas lancer un débat stérile.
« Bien... alors en attendant demain, je vous propose d'aller se coucher. Et n'oubliez pas, demain matin c'est vaccins ! Le véto viendra jusqu'aux élevages, il y aurait trop de chevaux à déplacer. Mais j'aurais besoin de tout le monde. » « Ce sera le fameux ? » « Le fameux quoi ? » « Le fameux véto de Lou ? » « Ah ! Oui ! C'est pour ça que je veux voir tout le monde demain. Je veux que vous me disiez ce que vous en pensez... Aller, bonne nuit les enfants ! »
Une salve de "bonne nuit" lui répondit et l'éleveur quitta la pièce, rapidement suivi par les autres. Seul Izikel descendit l'escalier au lieu de rejoindre sa chambre. Quand Ezra l'interpella, il lui servit un regard colérique sans un mot. Mais cette fois, le métis ne suivit pas son ami d'enfance. A son regard, Kwaïgon devina qu'en son absence, les relations entre les membres de l'équipe n'avaient pas été de tout repos... Mais il se pencherait sur la question demain. Il était trop tard pour interroger tout le monde désormais...
Singapour. Le coréen avait toujours aimé cette cité, même si revenir en Asie était toujours quelque chose de délicat pour lui. Ses vieux démons n'étaient pas encore envolés et il y connaissait forcément du monde. Un monde pas forcément fréquentable non plus d'ailleurs... Mais tant qu'il ne sortait pas -ou pas trop- du Haras, tout se passait pour le mieux. Son retour à Full Horse s'était fait dans le calme. Il avait été beaucoup prit par le départ d'Izikel et toute l'organisation qui en découlait, mais il avait eu le temps de reprendre ses marques dans le quotidien des élevages et il remontait à cheval avec application. La première semaine avait été compliquée : se retrouver à cheval après une année entière d'arrêt avait des conséquences sur ses muscles. Il avait passer la semaine à souffrir de courbatures, sans pour autant que Liam ne le laisse au repos une seule journée. Il avait donc serré les dents et avait reposer ses fesses dans une selle le lendemain, puis aider à faire les box et remonter, encore et encore. Myriam lui avait conseiller quelques étirements, qui l'avaient bien aidé. Il était donc complètement remit.
Lorsqu'il descendit au petit déjeuner habituel ce matin là, il n'y avait que Dean et Liam. Le maréchal semblait s'être beaucoup rapproché de l'éleveur et lui redonnait un peu de joie de vivre, ce qui n'était pas sans déplaire à tout le monde. Liam en avait besoin et Dean avait su trouver quelque chose pour faire revivre Liam, alors personne ne l'en blâmait. Myriam l'avait même remercié. Dean semblait s'intégrer facilement et être d'un naturel sociable, ce qui était une bonne chose. Siobhan lui, semblait plus timide. Sûrement à cause du fait qu'ils ne le voyaient pas aussi souvent, le vétérinaire ayant pas mal d'obligations avec le centre de soins. Mais Lou leur en parlait avec enthousiasme. Maintenant que les choses étaient officielles et que le vétérinaire avait été approuvé par l'équipe -ou du moins une partie- elle était un peu plus confiante dans sa relation. Le coréen ignorait combien de temps cela allait durer mais il ne disait rien, ne voulant surtout pas s’immiscer là dedans. Il se glissa sur le banc en face de Dean, Liam étant en bout de table comme à son habitude, avec le maréchal à sa droite. Les deux hommes parlaient avec animation d'un cheval dont le coréen n'avait jamais entendu parler. Mais il ne les coupa pas, se contentant de se servir un café en attendant qu'ils terminent. Ce qui ne tarda pas.
« Bonjour Kwaï ! Tu es bien matinal ce matin. » « Oui. J'ai été réveillé un peu tôt par Izikel. » « Oh... -le regard de Liam s'assombrit un peu- Et... Il va bien ? » « Très bien ! Mais ne parlons pas de ça maintenant, c'est inutile. »
Il sourit doucement, espérant faire retrouver à Liam le sourire qu'il vient de perdre, et cela fonctionne assez bien. Dean le salut avec une certaine réserve et le coréen fait de même. A vrai dire, ils ne se connaissent pas vraiment et Kwaïgon est connu pour son caractère taciturne. Il sirote son café pendant que les deux hommes reprennent leur conversation. Le coréen comprend qu'il s'agit d'un cheval que Liam aimerait récupérer mais qui demanderait beaucoup de travail. Dean a l'air de vouloir faire parti de l'aventure. Le coréen ne dit rien.
Alejandro les rejoint peut de temps après et se glisse à côté de Kwaïgon, se servant en même temps un café. Il est de bonne humeur mais un quelque chose dans son regard fait tiquer le coréen. Quelque chose ne lui plait pas et il y aurait à parier que ce quelque chose se trouve assit en face du coréen.
« Salut tout le monde ! Bien matinaux dis donc vous deux... »
Envers Kwaïgon, le regard était admiratif. Mais envers Dean, le ton était piquant. Liam releva et jeta un regard noir à Ale qui sourit de façon on ne peut plus cynique à l'éleveur.
« C'est une habitude chez moi. » « Je n'en doute pas ! Les messies se sont toujours lever tôt pour rassembler les brebis. »
Contrairement à Dean qui dévisagea Ale, Liam comprit l'allusion et se tendit, fixant Ale d'un regard plein de reproches. Un silence glacial s'installa avant que Liam ne siffle entre ses dents.
« Tu sais que si tu veux partir je ne te retiens pas. »
Ale se détendit et eu un sourire un peu plus chaleureux qu'il adressa à Liam mais aussi à Dean.
« Oh ça va papounet ! Si on ne peut plus rigoler un peu. » « Elle n'était pas de très bon goût celle-là. » « J'avoue, j'en ai eu de meilleures... »
La table se détendit un peu et Louna arriva à se moment là. La jeune femme avait les cheveux nattés dans le dos et portait un jean et un pull fin, ainsi qu'un châle en laine sur les épaules. Elle n'était pas encore très assurée de ses pas et avançait avec précautions. C'était la première fois depuis son retour au Haras qu'elle venait au petit déjeuner matinal. Elle s'arrêta à côté de Dean près de la table et leur sourit faiblement.
« Je peux ? » « Oui bien sûr ! Mais tu ne devrais pas rester au lit ? » « Si... Mais j'étais réveillée et je n'en pouvais plus de rester là haut... Et puis, ça me manque de tous vous voir. » « Tu remontes après le petit dej' ! Enzo va nous tuer sinon. » « C'est promis. »
La demoiselle sourit et se laissa tomber sur le banc à côté de Dean qui lui proposa un café. Elle accepta et se laissa servir, s'enroulant dans son châle. Il est clair que ce n'était plus vraiment la même Louna désormais. L'accident l'avait changé, mais quoi de plus normal en même temps ? Elle regarda Dean verser le café avec attention, le remerciant doucement une fois la tasse devant elle.
« Comment te sens tu ? » « Ça va. Mais... J'aimerais vous parler. »
Elle avait haussé les épaules puis avait croiser le regard d'Ale et Kwaïgon, indiquant que c'était à eux qu'elle voulait parler et non pas aux autres. Ale lui servit un regard doux mais son sourire s'effaça. Comme Kwaïgon, il savait très bien de quoi la jeune femme voulait leur parler. Tout le monde prenait des pincettes à ce sujet et évitait de simplement l'évoquer devant elle. Tout le monde sauf Kwaïgon et Alejandro, qui s'enfermaient dans une bulle face au déni des autres. Ils n'étaient clairement pas d'accord mais, comme à leur habitude, respectaient le souhait de plus grand nombre.
« Es-tu sûre de toi ? » « Certaine. » « Très bien. Quand alors ? » « Maintenant. » « Non. Nous avons une journée de travail devant nous, il nous faudra du temps pour parler que nous n'avons pas maintenant. Ce soir ? » « Ce soir. » « Seulement les deux affreux ou je pourrais venir ? » « Tout ceux qui le souhaite peuvent venir. Vous ferez passer le mot ? »
Ale acquiesça avec un fin sourire et Louna le remercia d'un regard.
« Moi aussi je pourrais venir ? » « Oui, si tu veux. »
Louna lui avait sourit avec chaleur, ce qui avait arrêter Ale dans son élan. Au vue de son regard, Kwaï était certain qu'il était sur le point de faire une remarque. Mais il ne fit rien, devancé par Louna. Le reste du petit déjeuner se passa sans encombre et ils furent vite rejoint par le reste de la troupe.
*** *** *** ***
Ce matin là, ils étaient divisés en deux groupes. Neyla, Ezra, Ale, Logan et Kwaïgon pour une séance de saut avec les chevaux de Louna, alors que les autres -Lou, Myriam, Dean et Liam- étaient à l'élevage d'ibériques pour une séance de dressage. Siobhan allait rejoindre le groupe dressage alors qu'Inna et son cheval Kaiser se joindraient à eux pour la séance de saut. Logan serait à pied et donnerait le cours. En tant que moniteur de saut, c'était aussi en parti son job. Mais il avait distribué les chevaux : Neyla serait en selle sur Chuwbaka. Il était un peu vif mais elle avait fait de sacré progrès et Logan était certain qu'elle s'en sortirait. Ezra serait en selle sur Katynka, la nouvelle jument de Logan. Kwaïgon serait sur son cheval, Kim et Ale également, avec Invictus. Tous se mirent donc joyeusement à préparer leurs montures sous le regard attentif de Logan. Ale profita de ce moment pour faire passer le message de Louna.
« Au fait tout le monde, Louna voudrait nous parler de Walig ce soir. Elle s'adressait à Kwaïgon et moi mais tous ceux qui souhaitent venir avec nous sont les bienvenues. Je pense qu'il y aura Liam déjà et Dean. J'en parlerais à Myriam et Lou tout à l'heure. »
Il eu un retour positif d'emblée en la personne d'Ezra. Inna, qui était entré juste à ce moment là, s'était timidement immiscer également. Logan hésitait autant que Neyla. Mais au moins, le jeune homme avait fait son boulot et personne ne pourrait le lui reprocher.
« Qu'est-ce que tu allais dire quand Dean a demandé s'il pouvait venir ? Louna t'as devancé mais tu étais sur le point de faire un commentaire. » « Je voulais connaître ses motivations... » « Il a l'air de bien s'intégrer ce petit maréchal ! Il est toujours comme ça Logan ? A s'investir autant ? »
Logan prit quelques minutes pour réfléchir avant de répondre d'une voix sûre.
« Oui... Et puis il se sent redevable envers Louna et Liam donc il essaie de faire son possible pour s'investir dans l'équipe et participer à un maximum de choses. » « Redevable de quoi ? » « Parce que Liam et Louna prennent en charge toutes les dépenses de l'équipe... Ils ne se connaissent pas et ils le soutiennent quand même financièrement avant même qu'il ne pose un pied au sein de l'académie. Il se sent redevable de ça et de l'accueil qu'on lui a fait. »
Inna eut un "oh" de compréhension alors que les autres semblèrent se renfrognés un peu. Tous avaient conscience d'une chose : Dean avait raison. Et ce petit maréchal les ferait presque culpabiliser. Le reste de la préparation se fit en silence et bientôt, les cavaliers se retrouvèrent tous dans la carrière que Logan avait réservée. Pendant que le moniteur installait son exercice du jour, chacun détendait son cheval dans son coin, concentré sur son travail. Le coréen grimaçait un peu de temps en temps mais dans l'ensemble, les chevaux restèrent calmes. Logan leur donnait quelques conseils de temps à autre et rassurait Neyla sur sa monte. Inna connaissait bien son cheval et savait comment le gérer. Il en allait de même pour Ale et Kwaï. Mais Ezra avait un peu de mal à trouver les bons boutons avec Katy. Une fois prêt, Logan les prit un par un pour passer un petit croisillon. Une fois que la détente fut terminer pour tous, il rassembla ses cavaliers pour leur parler de l'exercice du jour.
« Aujourd'hui c'est saut sur le cercle. Vous avez trois croisillons étroits sur la ligne du milieu. Un en X et deux en G et D. Au niveau de R, S, P et V vous avez des barres au sol. On va commencer par des cercles au galop. Le but étant que vous passiez sur bien au milieu des croix et gardiez la cadence et le cercle pour passer la barre au sol, puis la seconde croix, la seconde barre et revenir sur la croix de départ. La même cadence sur tout le cercle, des beaux tracés, une belle incurvation. le cercle côté A pour la main droite, le C pour la main gauche, commencez par la main difficile de votre cheval et mettez vous en quinconce pour ne pas vous téléscoper sur la croix centrale bien sûr... Ezra, tu commence à gauche, Neyla aussi. Les autres, vous connaissez vos chevaux. »
Tous se mirent plus ou moins en route alors que Logan prenait place au niveau de B. Les cercles restaient en piste intérieure mais faisait bien vingt mètres de diamètres, la piste restait donc libre pour ceux qui ne souhaitaient pas s'y mettre de suite. Ezra prit le premier le galop et se lança en passant d'abord par une barre au sol pour arriver sur la croix face à Logan. Neyla lui laissa un demi tour d'avance et se lança à sa suite. Sur l'autre cercle, Ale s'intégra un quart de tour après Neyla et Kwaïgon suivit avec Inna. Ils restèrent sur leurs cercles respectifs jusqu'à ce que Logan leur dise de souffler, ce qui équivalait à un certain nombre de passage pour chacun. Au bout de trois tours, Kwaïgon n'en pouvait déjà plus. Inna était concentré, tout comme Ezra. Ale devait se battre un peu avec son cheval et rompit son cercle plusieurs fois pour une remise aux ordres sur la piste. Neyla avait tendance à se faire un peu embarquée mais elle tenait et s'efforçait d'aider le jeune tacheté dans son exercice. Une fois la pause effectuée, ils changèrent de main. Cette fois l'exercice fut un peu plus court étant donné que les mains faciles étaient plus agréables pour les chevaux. Mais Ezra avait tout de même pas mal de difficultés. Il devait pallier les écarts de sa jument du jour et être toujours avec elle au risque de la voir partir en vrille.
De nouveau, une fois satisfait, Logan les rappela à lui. C'est ce moment là que choisi Katynka pour faire un bond sur le côté, les quatre fers en l'air. Elle atterrit sur un chandelier qu'elle n'avait manifestement pas vu et, surprise, refit un bond de l'autre côté, éjectant Ezra qui s'était à peine remit du premier bond. Paniquée, elle rejoignit le groupe au galop et percuta Kim qui resta cependant immobile. Les autres s'agitèrent mais chaque cavalier reprit vite sa monture. Logan courut voir Ezra, toujours allongé au sol. Il était tombé plat dos et devait sans doute avoir la respiration coupée. En voyant approché Logan il leva un pouce en l'air. Il avait effectivement la respiration coupée mais tentait avec calme de reprendre un rythme normal. Logan le laissa faire et en profita pour remonter son obstacle et le changer en droit de même hauteur que sa croix de départ. Il ne dépasserait pas les soixante centimètres.
« Ça va aller ? »
La voix inquiète d'Inna retentit au dessus de lui. Ezra hocha doucement de la tête en relevant son pouce en l'air à l'attention de la demoiselle. Kaiser piétinait à côté d'eux et elle fini par l'éloigner, pour ne pas risquer de marcher sur Ezra. Kwaïgon avait mit pied à terre pour tenir Katy, qui tremblait comme une feuille. Logan prit la bombe d'Ezra et grimpa en selle, expliquant la suite de l'exercice en même temps.
« Bon, cette fois c'est un par un. Un cercle complet à gauche, puis vertical du milieu, changement de pied sur le vertical et un cercle complet à droite. Je vous montre. »
Sans prendre garde aux tremblements de Katy, il mit la jument au galop à gauche et fit l'exercice. Il dû s'y reprendre à deux fois pour le changement de main et la jument failli refuser le droit à côté duquel Ezra était maintenant assit mais Logan ne lui laissa pas le choix. Lorsqu'il revint au niveau de ses élèves au centre du premier cercle, Ezra se levait doucement et les rejoignait. Sa respiration était encore sifflante et il avait la voix enrouée, mais il se remit à cheval. Il passa le premier, pour ne pas qu'il gamberge et cette fois, le passage de Katy fut moins chaotique.
« C'était bien ça ! Je veux de beaux tracés ! Un beau changement de pied en l'air ! Si votre cheval n'a pas changé de pied, gardez votre cercle de base, n'allez pas à faux sur l'autre ! »
Ale fut le suivant. Invictus refusa le premier droit mais un bon coup de cravache derrière le mollet de son cavalier lui fit passer la barre d'un bond depuis l'arrêt. Pour la suite, il ne tenta même pas d'embêter son cavalier. La timide Neyla s'élança après Ale. Chuwbaka faisait de son mieux pour garder la même cadence mais on sentait qu'il avait envie d'avaler les barres toutes crues. Il était rapide, mais restait constant et Logan le laissa sur son bon passage malgré sa rapidité. Il était encore jeune et devait se faire la main et pour l'instant, le moniteur le laissa ainsi. C'est avec l'expérience qu'il prendrait un peu de technique. Inna suivi. Kaiser connaissait son boulot et la cavalière également. Ils faisaient un sacré bon duo. Logan corrigea un abord hasardeux en leur demandant de refaire un cercle mais rien de plus. Il y avait un il ne savait quoi dans la façon de monter d'Inna qui lui faisait penser à Izikel. Et il adorait la monte d'Izikel. C'était aussi simple que cela : il n'avait jamais rien eu à reprocher au cavalier dans ses cours, le prenant d'ailleurs souvent comme exemple et le mettant sur le dos des jeunes. Et personne ne viendrait le contredire... Sauf peut-être Louna. Enfin... Avant son amnésie... Kwaïgon suivit avec Kim. Le pie faisait de son mieux, tout comme Chuwbaka, mais il manquait cruellement d'équilibre. Cependant les sauts étaient propres, la cadence juste. Le tracé était plus approximatif mais Logan n'insista pas. Il avait changer de pied alors qu'il n'avait pas travailler cela de l'année et c'était déjà une très belle avancée. Lui aussi était jeune et manquait de travail. Il n'avait qu'une seule année de boulot dans les jambes depuis son débourrage et cet exercice était plus qu'exigent. Il devait s'adapter au profil de ses montures et c'est pour cette raison qu'il se montrait indulgent avec les plus jeunes du groupe. Une fois le coréen au pas, il rappela les cavaliers à lui.
« C'était bien ! Les jeunes il va falloir travailler l'équilibre. Les vieux, répéter encore et encore les gammes. Il n'y a pas de secrets de toute façon. C'était tout de même une bonne séance pour tout le monde. Je vous laisse les marcher, cherchez à avoir le nez en bas pour les détendre. Je veux les entendre soupirer pour relâcher la pression ! Je vais ranger mais si vous avez des questions, je reste disponible. »
Les cavaliers le remercièrent avant d'aller marcher leurs chevaux. Inna et Ezra se mirent naturellement l'un à côté de l'autre. Ale se mit avec Neyla et Kwaïgon quitta la carrière pour aller marcher dehors. La dernière chose que vit le coréen c'était Inna et Ezra qui se chamaillaient et Neyla qui souriait à Ale.
*** *** *** ***
Le moteur vrombissant de son Aston Martin s'arrêta alors qu'il coupait le contact. Que ce bruit lui avait manqué ! Le contact du volant, l'odeur du cuir de sellerie des sièges... Un fin sourire passa sur ses lèvres alors qu'il passait la main sur le cuir gris du volant. Sa très chère DB9 lui était aussi précieuse -si ce n'est plus- que son cheval. C'était le premier caprice de sa vie. Le premier objet qu'il s'était acheté de lui-même. Avant même d'avoir un toit au dessus de sa tête, il avait une voiture et un garage pour la mettre dedans -hors de question qu'elle dorme dehors. Il ne laissait les clés qu'à très peu de gens, et ces gens là étaient, à ses yeux, les plus digne de confiance. Maintenant que son Aston était de retour au Haras, il se sentait vraiment de retour chez lui. La dernière pièce du puzzle était là. Il pouvait se passer n'importe quoi maintenant, peu lui importait. Il ouvrit la portière et sortit, effaçant le sourire qu'il avait sur le visage pour retrouver son air neutre et impassible. Il avait raté le dîner pour aller chercher sa voiture de retour de New York, mais ce n'était pas très grave. Une toute autre réunion l'attendait désormais...
Il devait bien avouer qu'il redoutait ce moment. Depuis que Louna était revenu, ils ne l'avaient pas beaucoup vu. Elle venait les saluer de temps à autre, les voir travailler, mais elle était encore trop faible pour prendre part au quotidien de son élevage. Enzo et Myriam le lui interdisait formellement. Elle n'avait même pas le droit de prendre une brosse. Mais outre sa fragilité physique, elle était aussi fragile psychologiquement parlant. L'amnésie partielle dont elle était victime la plongeait dans une profonde perplexité. Et maintenant que la panique était passé, elle cherchait des réponses. Et les seuls qui pouvaient les lui donner, c'était eux. Jusque là, seul Ale et Kwaï ne se montraient pas réticent à lui parler d'Izikel. C'était donc logique qu'elle veuille que se soit eux deux qui lui parle du jeune homme. Le coréen n'y voyait pas d'inconvénient : il en avait marre de voir les autres prendre des pincettes et éviter le sujet. Il n'y avait rien de tabou la dedans et il ne comprenait pas ce déni soudain de l'équipe. Mais maintenant qu'il était face au fait et qu'il allait devoir parler, il comprenait. Personne ne voulait froisser Louna. Personne ne voulait lui faire du mal. Pas après tout ce qu'elle avait vécu. Finalement, qu'elle ai oublié Izikel n'était pas un mal. Peut-être que quand le jeune homme reviendrait, il serait plus serein et ils pourraient reprendre leur relation du début. Se reconstruire une amitié... C'est l'espoir qui animait tout le groupe et malheureusement, il ne le comprenait que maintenant. Si seulement quelqu'un l'avait mit au courant ! Mais personne n'avait encore mit consciemment de mot sur ce qu'il venait de comprendre clairement. Il ne pouvait en vouloir à personne...
Il prit une grande inspiration et grimpa les marches du perron du manoir. Il devait retrouver tout le monde dans le salon. Et il savait qu'il y aurait foule ce soir. Louna, Ale et lui, bien sûr, mais il y aurait également Liam et Dean. Logan avait finalement décidé de venir, et Neyla l'accompagnait. Ezra était une évidence, de même qu'Inna désormais. Ils connaissaient mieux que personne l'éthologue. Siobhan et Lou se joignait à la troupe. La rouquine pensait que se serait une bonne chose pour le vétérinaire, qu'il puisse mieux connaître l'équipe. Et Myriam serait là, après avoir couché Maël. En somme, toute l'équipe serait là, hormis le sujet de conversation principal... Le coréen regarda sa montre en grimpant doucement l'escalier menant aux pièces communes du premier étage, soit la bibliothèque et le salon. Quand il entra dans la pièce, tout le monde était déjà là. Ils avaient rassemblé des canapés autour d'une table basse. Caïpirigna -la lynx rousse de Louna- et Légolas -le berger australien de Logan- dormaient devant un feu de cheminée, roulé en boule l'un contre l'autre. Il restait une place sur un fauteuil, le plus proche du feu, pour lui. La place d'honneur... Clairement, se serait lui qui présiderait la séance... Et il n'aimait pas trop cela...
Heureusement cependant, l'ambiance avait l'air sereine. Il voyait quelques sourires. Inna était pelotonnée dans les bras d'Ezra et Lou dans ceux de Siobhan. Myriam était à côté de Liam et lui tenait une main, alors que l'éleveur tenait celle de Louna, de l'autre côté de lui. Ale était sur un pouf, un peu plus bas que tout le monde. Dean, Neyla et Logan se partageaient un petit canapé. Lorsqu'il entra, les conversations cessèrent et tout les yeux se pointèrent sur lui. Il marqua un temps d'arrêt avant de fermer la porte et prendre place sur celle qui lui était réservée. Il prit une inspiration et la parole, d'un ton calme, comme celui des conteurs d'histoire. Neutre, sans prendre parti, impassible, tout en étant captivant.
« Alors... Par quoi veux tu commencer ? »
Louna semblait déterminée. Elle plongea un regard dur dans celui du coréen, prête à entendre le pire semble-t-il. Une chose est claire, elle se souviens de ce qu'elle a vécu, mais pas d'Izikel. De sa personne et de sa présence au fil de leurs années d'amitié. Au moins, il aura une chose de moins à expliquer...
« Du début. Comment on s'est rencontré, comment il est lui, d'où il vient... Les petites choses. »
Le coréen hoche la tête et jette un regard alentour. Personne ne semble vouloir se lancer et tout le monde attend de lui qu'il prenne la parole. Ce qu'il fait, avec le même ton que celui de départ.
« Très bien. Alors pour commencer, je ne suis pas spécialement le mieux placer pour te parler de lui. Ses deux plus proches amis sont Inna et Ezra. Et il est arrivé au Haras avant moi, se serait donc à Liam de te raconter votre rencontre... Mais... Je vais commencer par ce que je sais de lui. De façon formelle, pour poser les bases, et j'espère que les autres suivront ensuite mon exemple pour te parler de ce qu'il est et ce qu'il représente pour nous tous. »
Louna eut un bref hochement de tête et certains autres également. Ils semblaient de son avis et c'est ce qui décida le coréen à se lancer.
« Izikel Walig Todd. Il est irlandais. Orphelin et abandonné à sa naissance, il a été élevé dans un couvent de sœurs bénédictine, au dessus de Galway, dans le Connemara. Il a cependant vécu une enfance plutôt simple et normale, si le terme est acceptable... Depuis tout gosse il monte à cheval et son premier cheval, il l'a eu poulain, au couvent. C'était aussi un orphelin... Il a été récupéré par le couvent pour Walig justement. Pour le responsabilisé... Un apprentissage essentiel de la vie. Il a apprit à monter sans selle ni filet et est passionné par le cheval. Il est même passionné par tout ce qu'il entreprend. » « C'est ce qui le rend si attachant ! Outre son corps de rêve bien sûr... »
Les têtes se tournent vers Inna, qui affiche un sourire espiègle. Elle s'est prise au jeu et à ouvert la brèche. Kwaïgon lui en est reconnaissant. Ezra sourit face à la remarque de celle qui est blottie dans ses bras et reprend d'un ton doucereux.
« C'est vrai qu'il est bien foutu ! » « Mais ce n'est pas la seule chose qui le caractérise... Si je devais donner un mot pour le qualifier, le premier qui me viendrait c'est « loyauté ». » « Sensibilité aussi. Pas sensibilité dans le sens où il passerait du rire aux larmes et se vexerait tout le temps... Mais sensibilité des choses et des gens. » « C'est vrai. Il a toujours été très sensible aux personnes qui l'entoure. Il a un sacré oeil et saurait lire en chacun d'entre nous mieux que personne... » « Mieux que toi ? » « Mieux que moi et de loin... »
Ale leur sert un petit sourire. Il a sur le visage quelque chose d'admiratif, comme s'il avait toujours rechigné à avouer qu'il y avait meilleur que lui mais qu'il devait bien le reconnaître désormais.
« Il est timide aussi. Il est toujours mieux avec un cheval qu'avec un homme. » « Ça c'est bien vrai ! » « On est très peu nombreux à le connaître tel qu'il est réellement... Ou tel qu'il peut être. » « En fait il n'y a qu'eux deux. Nous autres ne connaissons qu'une partie de Walig. » « Nous connaissons surtout l'homme qui aurait donné, et donne encore sa vie pour toi en réalité. » « Et l'homme de cheval ! Je ne connais pas meilleur cavalier que lui... Il est, pour moi, au même niveau ou rang que les grands maîtres d'écoles... Je déplore chaque jour qu'il ne fasse plus parti réellement de l'équipe... Il ferait des merveilles sur un terrain de concours ! »
Des hochements de tête confirment les paroles du moniteur de saut.
« Pourquoi est-ce qu'il ne fait plus parti de l'équipe ? »
Liam soupire et baisse les yeux sur ses pieds. C'est à Kwaïgon de prendre le relais, il le sent.
« Vous vous êtes disputé et il a préféré quitter l'équipe. Officiellement en tout cas. Officieusement, il est toujours là pour donner un coup de main et travailler les chevaux. » « Mais de ce que vous en dites, il est... Pratiquement parfait ! Alors pourquoi est-ce que je me disputais avec lui ? »
Des soupirs parcourent cette fois l'assemblée. Mais c'est Ezra qui prend la parole, plongeant son regard sombre dans celui de Louna.
« Seuls vous deux le saviez. Souvent ce n'était pour pas grand chose et cela prenait des proportions gigantesques. Mais... Il t'aimait sincèrement... Profondément... Et il ne supportait pas de te voir en danger ou te mettre en danger. Alors il se mettait en colère, puis prenait sur lui face à nous. Pour que ça ne nous affecte pas. » « Quand nous nous sommes rencontré, tous les trois, il s'est tout de suite passé quelque chose qui nous a beaucoup lié... » « Paris ? » « Oui, Paris... Izikel et toi étiez très proche. Et en revenant au Haras, tu as rencontré Enzo. Izikel était très amoureux de toi et il avait mal prit déjà de te voir avec Enzo. C'est à ce moment là que votre relation s'est dégradé, et a été une succession de dents de scie... » « Mais il a su faire face et prendre sur lui. » « A tel point qu'il a même accepté d'être ton témoin de mariage. »
Cette fois c'est un mélange d'incrédulité et de confusion qui se lit sur le visage de la demoiselle.
« Il a fait ça ? »
Seul un silence gêné lui répondit. Eux même n'avaient pas prit, jusque là, l'ampleur du sacrifice qu'avait fait le garçon. Et c'était sans compter sur toutes les fois où il s'était porté volontaire, au péril de sa vie, pour protéger la sienne. C'est finalement Ezra qui brisa le silence après un soupir un peu rageur.
« Il est comme ça. Entier. Il ferait n'importe quoi pour toi. Ces derniers temps, il en a seulement marre de ne rien avoir en retour, pas même un peu de reconnaissance. » « Dis comme ça j'ai l'impression d'être un monstre... » « Mais tu ne l'es pas. C'est seulement la période qui est dure pour tout le monde. »
Le silence revint, mais plus léger cette fois. Chacun étant perdu dans ses pensées. C'est finalement Siobhan qui brisa le silence d'un ton léger.
« Il semble être quelqu'un de bien. » « Il l'est. Je ne le connais pas beaucoup mais bon... »
Quelques sourires répondent à l'intervention de Neyla. Personne n'irait la contredire.
« Il est parti à cause de moi ? » « Non, il est parti à ma demande. Une personne qui m'est chère semble avoir disparu, et il est parti à sa recherche. » « Et aussi un peu par volontariat. » « Il avait besoin de prendre un peu de recul sur la situation. C'est pour revenir plus en forme et mieux dans ses basckets ! »
Le métis sourit mais certains gardaient une mine sombre : ils savent que le voyage d'Izikel n'est pas sans risques. Mais ils se gardèrent bien de le dire. Louna quand à elle semblait abasourdie et dépitée.
« Il ne faut pas que tu t'en veuille pour tout ça. Vous êtes deux caractères forts alors ça fait des étincelles. Mais c'est tout. D'accord ? »
La jeune femme hocha de la tête et se laissa tomber dans le dossier du canapé, lâchant la main de Liam pour se prendre les coudes et s'enfermer dans sa bulle, en pleine réflexion. Se souvenait-elle ? Personne sauf elle ne pourrait le dire.
« Et... Pourquoi Walig ? C'est son second prénom si j'ai tout compris... »
Les regards se tournèrent vers Dean, qui n'avait pas encore dit un mot de la soirée, se contentant d'écouter les autres.
« C'est plus facile à dire, plus rapide. Moins accrocheur à l'oreille que « Izikel »... Du coup c'est resté. »
Dean hocha doucement de la tête. L'explication était valable.
« Tu as eu des nouvelles Kwaïgon ? » « Hier seulement, les prochaines sont pour demain. » « Comment allait-il ? » « Bien. »
Le coréen lui servit un sourire un peu niais. En réalité, il ignorait comment allait Izikel, mais il ne l'avait dit à personne. Il agirait s'il n'avait pas le coup de fil du lendemain, qu'il attendait avec une certaine anxiété. Mais il ne fallait pas que cela se sache. Pas encore. Et surtout pas maintenant.
« Et si on allait se coucher maintenant ? Il commence à se faire tard et on a tous une longue journée demain. »
Myriam sourit de façon amicale et encourageante à chacun et tout le monde se leva avec plus ou moins de vitesse. Seul le coréen resta dans son fauteuil et salua tout le monde, prétextant attendre que le feu s'éteigne pour monter. Inna et Ezra traînèrent plus que de raison, rangeant les canapés du salon.
« Kwaïgon... Comment allait-il ? » « Ne t'inquiète pas Inna. Je suis certain qu'il va bien. »
Cette fois il sourit plus franchement et la jeune femme se laissa entraîner par Ezra. Le coréen soupira. Oui... Le lendemain allait être une longue journée...
Le métis tambourinant à sa porte fit lever les yeux au ciel au coréen. Il était déjà debout depuis un moment. Il termina d'ajuster le bracelet de sa montre et ouvrit la porte de sa chambre à Ezra. L'irlandais était tout sourire et surexcité. Le coréen attrapa sa veste, ses clés et son sac de voyage avant de sortir de sa chambre sans un mot et fermé à clé. Dans la pièce commune de leur bloc, Inna tambourinait à la porte d'Ale avec la même ferveur qu'Ezra à la sienne. Le coréen retint un soupir. Pourquoi Ale et Ezra avaient échangé de chambre déjà ?
« Vous avez été voir Izikel aussi ? » « Il est déjà en bas sur le parking. » « On a un taxi alors ? Il a réussi à trouver ? » « Oui. »
Le métis sourit alors que le coréen acquiesce. La journée commence plutôt bien finalement ! Alejandro apparaît à la porte, portant simplement un jean, son sac et un polo noir dans une main, les cheveux ébouriffés et les yeux passablement ensommeillés. Ce n'est pas dans ses habitudes ! Kwaïgon se retient de tout commentaire, laissant à Inna et Ezra le soin de taquiné le coach d'élevage sur son laxisme de la nuit...
« Qu'est qui t'es arrivé Ale ?! -rire amusé- Pff t'es toujours beau gosse malgré tout, c'est injuste ! »
Ale lui servit un regard enjôleur et poussa un petit grognement, à la manière d'un gros chat, ce qui lui valu le regard noir de l'irlandais. Inna était revenu près d'Ezra et il l'entoura de ses bras musclés alors que tous se mirent en route vers le parking. La jeune femme était surexcité à l'idée d'aller voir un match, surtout en si bonne compagnie. Ils avaient tous besoin de se changer les idées et quoi de mieux qu'un week-end de match ! Inna ne connaissait pas encore des deux irlandais en action mais quelque chose lui disait qu'elle ne serait pas déçu. Quand ils arrivèrent sur le parking, Izikel était bel et bien là, un t-shirt noir sous une veste en cuir sur le dos et un jean bleu des plus basique. Les mains dans les poches, nonchalamment appuyé contre le capot d'un mini bus. Liam attendait lui aussi, appuyé sur la voiture, mais il avait les bras croisés. Il portait un polo noir et blanc à manches longues, à l'effigie des All Blacks, l'équipe nationale. Ale enfila son t-shirt un fois son sac posé dans le coffre et tous grimpèrent pêle-mêle dans le mini bus, direction l'aéroport. Ils avaient un poil plus d'une heure de vol et toute la journée pour visiter Wellington avant d'aller voir le match, en fin d'après midi. Le lendemain, ils pourraient profiter un peu de la journée également, le vol du retour n'étant que le soir. Le voyage jusqu'à l'aéroport se fit relativement dans le calme, ainsi que le vol. Liam arrivait à garder ses troupes assez disciplinées. Seuls Inna, Ezra et Izikel se chamaillaient un peu mais on ne pouvait pas s'étonner de cela. Le coréen profita du vol pour dormir. Il était de toute façon à côté de Liam qui n'était pas très bavard, plongé dans un dossier de financement d'un projet. Quand il rouvrit les yeux une heure plus tard, ils allaient atterrir.
Comme ils n'avaient aucun bagage en soute et qu'ils voyageaient en première -merci Liam, encore une fois- ils furent rapidement sorti de l'appareil et se dénichèrent deux taxis. Rendez-vous à l'hôtel, pour poser les sacs. Inna, Ezra et Izikel partagèrent bien évidemment une voiture, alors que les trois derniers se retrouvèrent ensemble. Ce n'est qu'une fois à l'intérieur de l'habitacle de la voiture que l'américain leur arracha un sourire par sa remarque, presque innocente.
« Vous croyez qu'ils font un ménage à trois ? » « -rire- Je serais pas étonné qu'Ezra aime bien ce genre de plan mais je crois pas que se soit le cas de Walig... »
*** *** ***
Après s'être retrouvé dans le hall, ils partirent en exploration dans les rues de Wellington. Walig avait un plan papier là où les autres avaient sorti leurs smartphones mais dans l'ensemble, ils étaient tous paré pour le soir. Tous vêtu de noir et blanc, mais surtout de noir. Les rues de Wellington étaient très animées en ce jour de match et ils croisaient déjà des supporter venus de loin pour voir cette rencontre. Partout l'esprit était bon enfant, qu'ils croisent des australiens ou des néo-zélandais. Peu après midi, Ale se stoppa net et sautilla sur place comme un enfant, pointant du doigt une échoppe que tous connaissaient.
« Un Starbuck !!! S'il vous plait !! On y va !!! Alllerrrrrr !!! Dites ouiiiiiii !!! » « Toi t'aime le Starbuck ? » « Carrément ! C'est le seul endroit au monde où tu peux changer d'identité et personne te diras rien ! »
Liam se mit à rire. A vrai dire, il ne s'attendait ni à cette réaction débridée ni à cette réponse. Mais tous se mirent en route, Ezra attrapant la main d'Inna et lui servant un regard un peu lascif. Le coréen fermait la marche, observant ses compagnons, calme et discret, comme à son habitude. Izikel souriait enfin, comme libéré d'un poids qu'il avait sur les épaules depuis trop longtemps.
Ce Starbuck ci ne dérogeait pas à la règle de tout ceux du monde entier. Il était empli de monde. Malgré tout, chacun semblait connaître le principe, même si Ale se mit en tête de file, souriant comme un gamin et sautillant sur place. Liam les prévint qu'il fermait la marche et payait pour tout le monde : une délicate attention. Le coréen se retrouvait donc juste devant Liam et derrière le trio infernal. Quand on demanda son nom à Ale, c'est avec un grand sourire qu'il répondit :
« Bond. James Bond. »
La serveuse rougit sous son sourire ravageur et passa le gobelet de l'américain à son collègue mais celui-ci ne bougea pas pour autant, fixant la jeune femme -mignonne- encore un peu. Ce n'est que le coup d'épaule d'Ezra qui le poussa vers le fond.
« Je vais vous filer son numéro, se sera plus simple. Je prendrais un Mocha Blanc, grand s'il vous plait. Et je m'appelle Clint Hawkeyes. »
Fier de lui, il se tourna vers Inna pour qu'elle passe commande en même temps que lui. Tous semblait jouer le jeu ! Il allait falloir qu'il trouve une idée... Inna était tout excitée à l'idée de ce week-end et qu'importe leur programme, son sourire ne faiblissait pas. C'est donc avec un regard perçant à l'attention de la serveuse qu'elle prit commande.
« Un Caramel Macchiato, s'il vous plait pour Black Widow »
Elle esquissa un sourire qui se voulait mystérieux qu'elle retourna vers Ale et Ezra. Quand le tour d'Izikel arriva, elle ne s'était pas privé pour le déconcentrer, appréciant de le voir se dérider. Le jeune homme commanda la même chose qu'Inna, un supplément caramel en plus et se décida pour Sherlock Holmes. Kwaïgon joua le jeu également en se présentant sous le nom de Moriarti, le plus grand ennemi de Sherlock Holmes. Liam rejoignit Ale dans son délire pour s'appeler M, grand patron de l'agence au double zéro. Quand ils furent tous à table, attendant leurs boissons Inna reprit la parole avec entrain.
« Il faudra penser à se maquiller avant d'y aller. Perso je veux un moitié-moitié » mimant de ses mains la délimitation. « Et un fougère noire sur le côté blanc, ça fait pas trop ?! »
Elle avait rit en ajoutant ça. Autant faire ça bien et tant pis pour la séance démaquillage ce soir à l’hôtel. Rien ne pouvait entamer sa bonne humeur. Inna était comme ça, insouciante. Elle arrivait à balayer ses problèmes, ses doutes et ses tourments d'un battement de cils. Même lors de l'absence de Walig, elle était resté positive. Et maintenant qu'ils étaient à nouveau réuni, elle était comblée.
« Non c'est parfait ! » « Je veux bien vous maquiller ! » « Toi ? Un artiste ? Je n'aurais jamais cru ça possible ! » « J'ai plein de talents cachés, c'est pour ça ! »
Il haussa mystérieusement des sourcils en provoquant les rires. Kwaïgon les rejoignit avec un plateau et leurs boissons alors que les discussions repartait bon train.
*** *** ***
Il ne leur fallu pas longtemps pour trouver du maquillage noir et blanc et c'est devant la file d'attente à l'entrée du stade que l'atelier maquillage pu commencer. Même Liam se prêta au jeu avec le sourire. Inna n'avait pas pu s'empêcher de taquiner le métis quand elle lui peignait la moitié du visage en noire. Alors qu'il lui peignait l'autre moitié en blanc. Quand ils eurent tous une tête convenable, Ale se mit en tête de dessiner la fougère sur la joue d'Inna.
« Attention à ce que tu vas me dessiner, Monsieur Bond ! » « Mmmh... Je sais pas hein ! »
Elle avait accompagné sa phrase d'un sourire en coin et Ale y avait répondu d'un même sourire taquin. En réalité, elle avait confiance en Ale, comme en tous les membres de l'équipe. Si Ezra leur faisait confiance, elle aussi, les yeux fermées. Ale n'était peut être pas le meilleure artiste du groupe mais en sortant un petit miroir, la cavalière était satisfaite.
« Oh viiiii, c'est trop classe ! Merciii »
Inne n'avait pas pu s'empêcher d'enlacer Ale pour le remercier. Elle ne pouvait pas lui embrasser la joue vu son maquillage. Elle releva ses cheveux en chignon rapide, enfila une écharpe des all blacks et grogna en tirant la langue comme pour les impressionner. Elle, fluette, face à cette bande de mâle bourré d'hormones. L'ambiance de la file d'attente était festive et son petit spectacle fit sourire quelques voisins. Les gens commençait à rentrer et bientôt les choses allaient s'accélérer.
« A qui le tour ? »
Izikel, la tête entièrement noire s'approcha d'Inna avec un sourire.
« Moi ! Je voudrais deux fougères ! » « Oky, tu me fais confiances hein ? » « Tardez pas trop les enfants on va bientôt rentrer ! »
Les sourires fusèrent sur les visages noir et blanc. Kwaïgon aussi s'était fait peindre les joues. Ils s'insérèrent doucement dans le queue pour entrer finalement dans le chaudron qu'était le Westpac Stadium. Bordant la mer d'un côté, isolé du vent à l'intérieur, chaque son se répercutait sur les gradins d'en face avec force, rendant l'ambiance exceptionnelle. Le petit groupe était installé sur deux rangs, pour facilité les échanges dans le bruit ambiant. Inna, entre Ezra et Izikel, avait derrière elle Liam, qui était entouré de Kwaïgon et Ale. Le coréen et le chef partirent directement chercher à boire après avoir repéré leurs places, se dépêchant de revenir avant le début du Haka. Izikel, dont voir un match comme celui-ci était un rêve de gosse, était surexcité. Ezra essayait de garder son calme mais c'était peine perdu vu l'état de son ami.Quand à Inna, elle ne pouvait pas être plus heureuse de retrouver ses deux Irlandais d'amour. Ale riait doucement de leurs comportements. Quand tout le monde eu une bière dans la main, ils trinquèrent en riant.
« A nous ! » Tous en choeur - « A nous ! »
Les équipes ne tardèrent pas à arriver, une fois l'annonce des compositions faites. Il y eu ensuite les hymnes - et Kwaïgon fut étonné de voir qu'Izikel et Ezra chantaient tous les deux l'hymne néo-zélandais - et le haka. Inna suivait leur joie de vivre, sautillant entre eux comme une enfant. Les garçon vibraient déjà à l'annonce des compos mais désormais, ils tremblaient. Liam était aussi complètement dedans -natif du sud-ouest, il connaissait bien ce sport et l'avait même un peu pratiquer plus jeune- et Ale n'avait aucun effort à faire pour se prêter au jeu également. Le coréen se laissa donc porter par la vague, attentif au terrain. Pendant le haka des Blacks, il n'y avait pas un bruit dans les gradins et on n'avait aucun mal à s'imaginer que durant un instant, ces joueurs devenaient les guerriers dont ils parlaient dans leur chant, prêt à arracher la gorge de leur adversaire pour gagner la guerre. Ils les avaient en face d'eux et Kwaïgon en avait des frissons. A la suite de ça, les supporter explosèrent en cris, en tambour et en chants, lançant le début de ce match de folie...
« Aller les All Blacks !!! Youhouuuuu »
*** *** ***
C'est la voix rauque qu'Izikel ressorti de ce match, à force d'avoir trop crié. Mais il était souriant et détendu. Ezra, un bras par dessus les épaules d'Inna, souriait bêtement lui aussi alors qu'Ale et Liam leur mimaient une magnifique action du match.
« Tu le fais vachement bien Ale ! On pourrait croire que t'as déjà joué ! » « Ben... En fait c'est le cas. J'ai fait du rugby à sept un peu plus jeune. »
Un moment de silence s'installa, durant lequel ils le dévisagèrent tous, interloqués. Le principal intéressé se contenta de hausser des épaules avec un petit sourire en coin avant qu'Inna ne reprenne la parole pour mettre un peu de dynamique dans le groupe, sa joie de vivre habituelle ne la quittant pas.
« Waou c'était génial !! Tous ces mâles et cette ambiance ! C'était grisant, faut qu'on fête ça ?! »
Inna affichait aussi un large sourire, même si ses jambes commençaient à fatiguer. Elle avait tellement sauter, bouger, esquiver en même temps que les joueurs. Mais elle n'était pas prête à rentrer car après tout match, il faut fêter ça, surtout lorsque c'est une victoire.
« Bien sûr qu'on va fêter ça ! Y'a pas de victoires sans troisième mi-temps digne de ce nom ! » « Une idée du lieu ? » « Euh... » « Moi oui ! »
Cette fois, les regards se tournèrent vers Kwaïgon. Le coréen marchait un peu en retrait mais il les étonnait toujours. Et s'il proposait un lieu, c'est que c'était une bonne adresse, qu'elle quelle soit.
« Alors on te suis beau gosse ! »
Sous les rires, ils prirent la navette au milieu des supporter tout aussi souriant pour rejoindre le centre ville...
*** *** ***
Le coréen les conduit dans un pub néo-zélandais, décorés aux couleurs de l'équipe nationale. A l'intérieur déjà les supporter ayant regardé le match sur les écrans mettaient l'ambiance. Très rapidement, Ale et Ezra se portèrent volontaire pour aller chercher à boire alors que les autres cherchaient une table. Ils en trouvèrent une, à partager avec un autre groupe de supporter venant du stade. Mais c'était aussi cela l'esprit rugby ! Ale revint avec un plateau rempli de pintes noires alors qu'Ezra suivait avec une bouteille de champagne ouverte et un shooter.
« Et voilà ! » « Oh ! On est au Black Velvet ce soir ! » « Je me suis dit qu'il fallait fêter ça ! »
Ale s'appliqua à aligner les pintes alors qu'Ezra laissait faire Izikel, bien plus rompu à cet exercice que lui. L'irlandais versa tranquillement un shooter de champagne dans chaque pinte alors que Kwaïgon fit passer le tout à chacun. Une fois que tout le monde eu son verre, Izikel lança le toast, tout sourire. Inna avait rit en voyant les hommes s'organiser. Lorsqu'il s'agissait d'alcool, aucun doute qu'ils étaient méticuleux et efficaces. La seule femme de la soirée s'émerveillait de les voir aussi heureux. C'était bien la première fois qu'elle voyait un groupe aussi soudé.
« A la victoire et à nous ! » Tous en choeur - « A la victoire et à nous ! »
Chacun porta son verre à ses lèvres, avec le sourire. Izikel en ferma même un instant les yeux, savourant sa bière avec autant de passion que l'on attendait d'un irlandais qui boit une Guinness, même de l'autre côté de la planète. Ale ne put s'empêcher de se moquer un peu, façon étude du comportement animalier.
« Admirons l'irlandais pur souche loin de chez lui. La pinte de Guinness est sa drogue. On peut le reconnaître à ses petits yeux fermés de plaisir. »
Ezra éclata de rire, faillissant bien renversé la moitié de sa pinte sur Inna. Celle-ci évita son amant, habitué à garder un oeil sur lui. Bientôt, le rire fut contagieux et ils se prirent même au jeu de chanter avec les autres supporter, l'alcool aidant à dérider Liam et Kwaïgon... Elle n'avait pas la descente facile, surtout lorsqu'il s'agissait d'une pinte. Contrairement à Walig elle était bien incapable de vider son verre d'une traite.
« Je ne pourrais jamais boire aussi vite ! Walig tu m'avais caché ça ! »
Ale éclata de rire cette fois et Liam se contenta d'un sourire, imité par Kwaïgon.
« Vous moquez pas ! J'ai été bien habitué c'est tout ! » « Ah ça ! Pour être bien habitué ! On est quand même tous les deux du pays de la bière et du whisky ! » « C'est qu'on en oublierait presque vos origines ! » « Mais je croyais que tu venais d'un couvent Walig ? » « Parce que tu crois que ça m'empêchais de boire ? »
L'éthologue rit de plus belle et s'éloigne avec le plateau, pour aller chercher une autre tournée. Surtout une pinte pour lui ! Tant qu'il n'est pas là, Ezra en profite pour se confier aux autres avec un peu plus de sérieux.
« Ça fait du bien de le voir comme ça... Ça faisait longtemps... » « Oui... Toujours pas de nouvelles de Moïra, Kwaï ? »
Le coréen, le nez dans son verre, se contente de secouer négativement de la tête et tous soupirent. Mais rapidement, Izikel revient et recommence son manège avec sa bouteille de champagne, tout sourire. Rien ne pourra entamer sa bonne humeur ! Et elle est fort contagieuse... Bientôt, le pub s'éclaircie un peu pour ne laisser plus qu'une poignée de privilégiés. Une piste de danse est aménagée au centre du pub, les tables ayant été repoussées contre les murs. Des musiques aux accents celtiques et tribaux glissent des enceintes et Ezra invite Inna pour la première danse de la soirée. Izikel, encore une fois, dévoile l'un de ses nombreux talents caché en entamant une chorégraphie de danse à la fois contemporaine et classique, avec des claquettes. Il en ressort apparemment sur les rotules mais sous une foule d'applaudissements plutôt bien nourrie.
La soirée s'écoule et s'éternise. Ale fini par faire un concours de shooter avec un local, qu'il gagne on ne sait trop comment, montrant lui aussi qu'il a quelques talents cachés ! Kwaïgon reste plutôt calme, il sait qu'il va devoir ramener tout le monde. Quand à Liam, il se lâche également mais différemment. Un de ses vieux démons reprend le dessus et il entame un tournoi de poker avec quelques pratiquant. Chaque tour voit le perdant s'enfiler cinq shooter d'alcool locaux différents. Heureusement pour eux, Liam est excellent au poker et il perd peu. Ezra et Izikel, en compagnie d'Inna qu'il invite à plusieurs reprises, enflamment toujours la piste de danse, sous les rires et les encouragements. C'est sur les coups de cinq heures du matin que le gérant est contraint de les mettre dehors, lui aussi voudrait aller se coucher. Ils regagnent l'hôtel à pied, sous les rires, dans le frais petit matin de Wellington...
*** *** ***
Le lendemain, c'est sur les coup de quinze heures que le groupe se retrouve enfin au complet. Ale ayant un peu la gueule de bois, tout comme Liam, ils sont d'humeur un peu morose. Ezra semble un peu ballonné, tout comme Inna, qui ne semble pas très en forme malgré sa bonne humeur toujours bien présente. Kwaïgon s'occupe de la distribution des aspirines et des verres d'eau, mais contre toute attente, Izikel est en parfaite santé. Ale ouvrit des yeux ronds comme des billes en le voyant les rejoindre tout sourire, fraîchement douché et détendu, une assiette copieusement remplie dans les mains là où les autres se contentaient d'un bol de céréales ou d'une salade.
« Mais comment tu fais Walig ? »
Le principal intéressé hausse des épaules en attaquant son assiette.
« Je sais pas. Je supportes bien c'est tout. » « Toi non plus t'es pas humain... Tu sais encaisser trop de choses. »
Cette fois c'est Liam qui regarde Ale avec étonnement.
« Qui d'autre n'est pas humain ? »
L'américain pointe son couteau sur Kwaïgon avec une certaine désinvolture.
« Lui là... C'est un robot j'en suis certain. »
Un rire général éclate et Ale se joint même à eux, conscient du ridicule de son accusation. Ils terminent tranquillement leur brunch avant d'aller faire un dernier tour sur la jetée, profitant de leurs dernières heures de liberté loin du Haras. Le groupe se délite un peu dans ce moment de calme. Izikel s'éloigne, les devançant de quelques mètres et marchant seul, le regard sur la mer, les chaussures dans une main et l'autre dans la poche, les pieds dans l'eau. Ezra, la main d'Inna dans la sienne, marche également isolé du groupe, en tête à tête avec la belle brune. Celle ci avait passé un week-end mémorable, elle avait mal aux zygomatiques à force de sourire. Rien ne pouvait plus la combler d'être avec les deux irlandais. Liam et Ale évitent l'eau et discutent tranquillement de tout sauf des élevages et Kwaïgon, fermant la marche à quelques mètres derrière eux, sur la promenade goudronnée -évitant le sable- les suis du regard, veillant sur tout ce petit monde avec sagesse.
Le voyage en avion est calme et chacun rattrape un peu des heures de sommeil qu'il a perdu, sauf Izikel, qui reste plongé dans ses pensées tout le long du vol et dont la mine se fait de plus en plus sombre au fil des minutes. Ils reprennent deux taxis pour rejoindre le Haras et referment cette douce parenthèse...
« Peu importe à quelle vitesse voyage la lumière, l'obscurité la dépasse toujours, et elle l'attend. » Terry Pratchet
Un rapide coup d'oeil à mon téléphone portable m'annonce qu'il est cinq heures du matin. C'est à peu de choses près l'heure à laquelle Alejandro se lève pour aller courir. Je soupire et fixe de nouveau mon regard sur l'écran de l'ordinateur face à moi. Les lignes de code vertes s'enchaînaient sur l'écran noir, s'écrivant seules à une vitesse folle. J'y étais presque. Je le sentais. Inconsciemment, je portais mes ongles à mes lèvres pour les mordiller et serrais mes doigts de l'autre main autour de mon genou pour l'empêcher de tressauter. Mon cœur bondissait dans ma poitrine sans que je n'y puisse rien. L'attente était insoutenable. Cela faisait six heures que le programme que j'avais mit six mois à coder et peaufiner tournait seul. Il était proche de la réussite. Je me levais et m'approchais de la fenêtre de la bibliothèque. En dessous, Alejandro passait en courant à petites foulées et rejoignait une jeune femme brune : Madison. Je les regardais s'éloigner en s'échangeant sans doute quelques taquineries quand un bruit électronique attira mon attention. Il avait fini ! Je retint mon souffle en m'installant de nouveau derrière l'écran. Une ligne me demandait un mot de passe. On y était. Je tapais fébrilement le code, en le vérifiant plusieurs fois avant de valider, le souffle court. Instantanément mon écran se mua en la page d'accueil de la base de donnée interne aux services secrets américains. J'y étais enfin. J'avais piraté le gouvernement américain…
Je regagnais ma chambre après avoir lancé une courte recherche et récolté quelques unes des informations dont j'avais besoin. Il était à peine six heures et Alejandro n'était pas encore revenu de son jogging matinal. Quelque part dans le Haras, Logan et Lou-Khyan se levaient pour prendre la route en direction du club de la banlieue de Dunedin avec lequel ils faisaient un échange. Le réveil de Liam sonnait pour la première fois de la matinée et Siobhan prenait le chemin du centre de soin. Bien que… Mardi matin ; non, il revenait du centre de soin à cette heure là après une nuit complète d'astreinte. Dans une heure, Liam et Ale reviendraient des élevages et se retrouveraient en cuisine pour le petit déjeuner. Et l'équipe les rejoindrait au compte goûte. En attendant, j'avais une heure devant moi et comme tous les matins, je m’astreignis à une séance de Hapkido : il était indispensable que je conserve mon état de forme physique et mon niveau de combat…
Après m'être douché et habillé, je descendis rejoindre l'équipe pour le petit déjeuner. En ce moment, nous étions en effectifs réduits. Ezra passant beaucoup de temps avec Inna et Lou et Logan n'étant pas là, il avait fallu redistribué les tâches dans les élevages. Ça ne me gênait pas spécialement, dans le sens où je conservais une certaine liberté. En l'absence d'Ezra et Logan, nous n'avions plus de cours collectifs et nous étions partagé les chevaux à travailler. C'était, comme disait Liam, de « l'entretien » pur et dur. Pas de nouveauté, pas d'approfondissement. Sauf pour les nouveaux arrivants mais je n'étais pas concerné par eux. Je m'installais à la table du petit déjeuner avec la discrétion qui était mienne. Voilà deux jours que j'étais revenu du Texas avec Alejandro et je le trouvais changé. Il était un peu plus serein et souriant. Un changement positif donc, ce qui me fit intérieurement sourire. A table, le débat était animé : Izikel et Liam échangeaient leurs points de vue sur les élevages et évidemment, ils étaient différents. Tout le monde voulait protéger Izikel mais lui semblait ne pas le vouloir. Tout dans son comportement était toujours agressif sans qu'il ne s'en rende compte. Il était sans arrêt sur la défensive. En particulier quand Louna était là et désormais, il commençait à l'être quand Ezra était également dans les parages. Il souffrait de la « perte » de Moïra mais je ne pouvais rien lui dire. A cette pensée, ma gorge se noua et je bu instinctivement une gorgée de café, en espérant que la chaleur du liquide me dénoue la gorge. Dean n'avait pas l'air très réveillé mais il suivait le débat en silence, en tartinant à la chaîne des bagels. Enfin, en essayant en tout cas, voilà plus de deux minutes qu'il tenait en suspend son couteau de cream cheese au dessus de son bagel sans le tartiner. Izikel et Liam avaient haussé le ton. Alejandro fini par soupirer et intervenir, trouvant un consensus entre les deux partis. Liam ne pu cependant s'empêcher de décocher un regard sévère à Izikel qui souriait de sa courte victoire. Le reste du petit déjeuner se déroula sans accroc et même dans les rires. Neyla et Ezra passèrent rapidement et la journée commença enfin.
Toutes mes journées commençaient de la même façon, ou presque. J'accompagnais Ale à l'élevage de Louna et sortais Kim en paddock. Qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, je le sortais, avec ou sans chemise selon le temps au dehors. Un rituel que la prunelle de mes yeux avait bien comprit et attendait avec impatience chaque matin. Quand j'entrais dans l'élevage, il sortait la tête de son box et me saluait d'un ronflement chaleureux. Au début, Alejandro était impressionné. Désormais il avait tendance à se moquer un peu de nous. L'équipe au complet avait toujours eu du mal à comprendre mes motivations et connaître vraiment l'étendue de mes compétences. Et je ne faisais rien pour les éclairer. Moins ils en savaient, mieux c'était pour moi ! Un vieux réflexe d'auto-défense qui ne me quittait plus. Malgré tout, ils m'avaient accepté tel que je suis et avaient enfin accepté également que je pouvais être aussi compétent qu'eux en matière de chevaux -entre autres choses. J'avais patienté très longtemps avant d'obtenir cette sorte de reconnaissance mais maintenant qu'elle était là, je l'appréciais pleinement. Comme chaque matin, Kim sorti donc la tête de son box dès que je fis un pas dans l'allée. Je n'avais pas besoin de l'interpeller. Un sourire éclaira mon visage alors que j'approchais du box pour passer la main sur la grande joue de mon poulain. Enfin… Ce n'était plus un poulain désormais mais je le considérais toujours un peu comme tel. Sans un mot, dès que ma main se posa sur le loquet, il recula respectueusement pour me laisser entrer dans le box. Je faisais rapidement le tour de ma monture, le palpant à la recherche d'une éventuelle blessure, mais n'en trouvant pas, je ressortais pour lui passer son licol et l'emmener au dehors. Il me suivait docilement, regardant en même temps autour de lui. Une fois au paddock, il attendit que je referme la porte et lui donne l'autorisation d'un simple geste pour partir en saut de mouton dans tout le paddock. Un amour ce poulain… cheval…
Je n'étais pas franchement bavard, tout le monde le savait. Je n'étais pas différent avec les chevaux, qu'ils m'appartiennent ou non. Mes journées n'étaient pas pour autant silencieuses : le Haras était empli de bruits très différents. Et les membres de l'équipe parlaient souvent pour moi, ce qui m'arrangeais beaucoup. En attendant, après avoir sorti Kim, je retournais à l'élevage pour longer Gestuga. Le pie, qui désormais m'appartenais, était un peu différent de Kim. Je ne l'avais pas élever moi-même. Mais une certaine harmonie s'était installée entre nous. Il pouvait être imprévisible, mais je m'y étais fait. Je l'équipais de son filet, bandes et prenais une corde avec moi pour prendre le chemin du rond de longe le plus proche. Je n'avais pas besoin de chambrière avec lui, il était assez réactif pour ça. J'allais jusqu'au milieu du rond et y restais alors qu'il poursuivais sa route pour rejoindre la piste. Je le longeais tout les deux jours, en alternant les enrênements. Les autres jours, il était au paddock. C'était indispensable avec lui, trop de jus sinon et il devenait ingérable sous la selle. Je le laissais au pas quelques instants avant de lui demander le trot d'un claquement de langue sonore. Il s'exécuta avec entrain. Un peu de galop, puis même manège à l'autre main avant que je ne fixe la longue corde sur son dos. Elle passait sur le garrot puis entre les antérieurs pour venir se fixer sur le mors avec un élastique. Je travaillais ensuite le pie une demi heure ainsi, aux deux mains, en variant les allures. Il se prêtait au jeu avec sérieux et entrain. Une fois la séance terminée, je le mettais directement au paddock pour qu'il se détende. Il s'y donna à cœur joie en se roulant dès la porte refermée ! Je soupirais : j'aurais droit à un bon pansage au retour au box !
Après Getsuga, je devais me charger de longer Bill en l'absence de Logan. Il eu droit à la même séance que Gestuga et une mise au paddock ensuite. J'aimais bien Bill. Le grand étalon bai se faisait vieux mais il était agréable à travailler. Un peu plus passif que le pie. Quand je revins à l'élevage, il était près de dix heures et demi. J'aidais Alejandro qui revenait d'une séance montée avec Invictus et sortais Priam et Cara au paddock. Je rejoignis ensuite Liam dans son élevage pour longer Mériador, l'étalon d'Ezra. Liam avait déjà sorti ses juments et était sans doute en selle ou en longe avec Call. Le gris d'Ezra eu droit au même traitement que les deux autres. Après tout, pas de jaloux ! Le gris était un peu plus compliqué et contraignant que les deux autres mais je m'adaptais. Quand je revins du paddock, je croisais Liam qui déposait la selle de Call dans la sellerie.
« Ça été ce matin ? » « Parfait ! De la longe pour tout le monde. » « Super ! J'ai fait Call, Orcanta et Volantae ce matin. Il restera Unfor, Sinok et Great cet après midi. Un trotting ça te tente ? » « Pourquoi pas ! » « Je proposerais à Ale et Neyla aussi. Et Dean. Tu voudras qui ? » « Unfor ! Je te laisse les autres. »
L'éleveur sourit en refermant la porte de la sellerie.
« Faudra que tu négocie avec Myriam alors ! »
Je répondis par un fin sourire à mon tour et le suivait au dehors. La matinée était presque terminée. Liam devait rejoindre Myriam au centre de soin. Ale et Neyla s'occupaient des Narita's et Dean était en selle sur son cheval. J'avais donc une petite heure de temps libre devant moi avant le déjeuner et je rejoignis ma chambre au manoir. Mon ordinateur tournait toujours, en place sur mon coin bureau. Je vérifiais les informations collectées et, satisfait, je m'accordais vingt minutes de sieste. Je n'avais pas fermer l'oeil de la nuit et une certaine fatigue s'emparait de moi. Malgré mon habitude de dormir seulement quelques heures par jour, je n'échappais pas à la langueur familière qui accompagne la fatigue après une matinée de travail avec les chevaux.
Je regardais au dehors avec une attention toute particulière. En dessous, dans la cours, Alejandro et Izikel semblaient en pleine discussion. Chose commune ces derniers temps, Izikel était contrarié et Ale était désespéré. Je n'espérais qu'une seule chose, que l'américain ne craque pas et ne lâche pas le morceau à propos de Moïra. Il fallait qu'il garde le secret. C'était essentiel. Vital même. Izikel se pinça l'arrête du nez, signe chez lui qu'il lâchait l'affaire et faisait une concession avant de soupirer et acquiescer face à Ale. Aussitôt, l'américain se détendit. Je le voyais à l'inclinaison de ses épaules et son langage corporel entier. Je soupirais de soulagement et tournais la tête vers mon pc. Il continuait sa collecte d'information et les stockait sur un serveur privé que j'avais créé. Une chose qui se déroulait sans accrocs ! C'était déjà pas mal… J'ouvrais ma messagerie pour y trouver plusieurs mails. L'un d'eux me serra la poitrine et me figea. Il était de Moïra…
J'avais mit plus d'une semaine pour retrouver sa trace et voilà bien un mois et demi que je l'avais contacté et attendais -presque en vain- une réponse. Je commençais à m'inquiéter. Quelques temps après son départ et le retour d'Izikel, elle m'avait expliqué sa situation et m'avait demandé de chercher des informations sur un groupe mafieux qui cherchait sa trace. Je l'avais fait, lui envoyant mes résultats mais c'était il y a un mois de cela. Depuis, c'était silence radio de sa part. Je continuais ma collecte d'informations et lui faisait des rapports régulier mais je désespérais d'avoir de ses nouvelles désormais. Voir donc sa réponse dans ma boîte mail eu l'effet d'une douche froide pour moi. Je pris une grande inspiration et m'assit pour lire sa réponse.
« Kwaïgon,
Je te suis infiniment reconnaissante pour tout ce que tu fais pour moi. Je t'en prie, je t'en supplie, ne dis rien à Walig. Et je t'en conjures, fais attention à vous tous. Ceux qui sont à mes trousses commencent à s'intéresser à vous également. Il ne faut surtout pas qu'ils fassent le lien… Autrement, je me porte bien et Naïg aussi. Je l'ai laissé avec Pierce pour changer de logement, pour sa propre sécurité. J'espère que cela suffira… Je comptes déménager dans peu de temps et conserver une certaine distance avec les ukrainiens. C'est ma seule option pour garantir ma sécurité. Je comptes sur toi pour garantir celle d'Izikel et des autres…
Merci encore Kwaï'… Moïra. »
Une mise en garde et très peu d'informations. C'était du grand Moïra ! Je n'avais plus qu'une chose à faire : démêler tout ça et partir à la pêche aux infos !
Après le déjeuner, j'étais parti en trotting avec Liam, Neyla, Ale et Dean. Unfor' mit au pré après cela, je n'avais plus rien à faire. En théorie en tout cas. Malgré tout, au lieu de partir m'enfermer dans ma chambre, je restais auprès de l'équipe. Assis à l'ombre d'un arbre, au bord de la carrière, je regardais Izikel et Liam travailler. Liam était à pied et Izikel en selle sur Insane Boy, la nouvelle recrue de Liam. L'étalon palomino, après s'être remit de son voyage, commençait à montrer son véritable caractère, qui n'était pas des plus facile. Mais Izikel suivait le mouvement et s'adaptait à sa monture. Cette contemplation silencieuse me permettait de réfléchir un peu, ce qui était essentiel en ce moment. J'avais besoin d'un plan. D'une stratégie. Ce qui m'imposait d'y réfléchir, au moins un minimum. Feindre de regarder la séance des garçons me donnait une excellente excuse. Bien qu'en réalité, j'observais tout de même réellement le travail d'Izikel et écoutais les consignes de Liam…
Je soupirais, soudain un peu las. Qu'allais-je faire ? Par où commencer ? Il fallait que je conserve l'ignorance et l'innocence des autres intactes. Il ne fallait surtout pas qu'ils s'inquiètent et prennent les devant. Éliminer le potentiel danger avant qu'il ne soit une réelle menace n'était plus une solution viable. Ils ne pouvaient plus partir à l'aventure comme ils le faisaient avant. Leur équipée avait subit les conséquences du temps et ils n'étaient plus aussi aguerri qu'avant. Il suffisait de lever les yeux et les regarder pour comprendre : Louna, bien qu'elle ai retrouvé sa vivacité d'esprit, n'était plus que l'ombre d'elle même physiquement parlant. Izikel se remettait à peine de ce qu'il avait subit avec Moïra, bien qu'il soit plus stable mentalement. Ezra était éprit d'Inna et s'attachait de plus en plus à elle. Liam avait un fils dont il ne pouvait pas risquer l'avenir. Je m'interdisais de faire subir à Lou-Khyan un autre traumatisme et il était hors de question que Logan, Siobhan, Dean ou encore Neyla ne prenne part à l'horreur qui nous unissait tous… Je pouvais peut-être compter sur Alejandro, mais lui aussi essayait de se reconstruire au Haras. Je ne voulais pas le faire replonger. J'étais seul. Et je me devais de le rester.
Dans un premier temps, il fallait que je connaisse mon ennemi. Si Moïra m'avait dit qu'ils commençaient à s'intéresser à nous, cela signifiait qu'ils avaient au moins nos noms. Maintenant, comment mettre la main sur eux ? Moïra m'en avait dit plus dans son précédent mail… La mafia ukrainienne, les frères Iakimov. Alexei et Sergei. D'origine russe en réalité mais exilé en Ukraine par les parrains russes. Leurs pratiques déplaisaient. Ils étaient fous et dangereux. Les recherches que j'avais déjà faite pour Moïra m'en avait apprit un peu sur eux, mais pas suffisamment. En tout cas, pas s'ils s'intéressaient à nous. Il me fallait absolument une longueur d'avance sur eux. Je me répétais tout ce que je savais sur eux quand Ale s'assit à côté de moi avec un soupir las. La journée touchait presque à sa fin. Il prenait sans doute une pause avant de rentrer les chevaux et donner les rations du soir. Sans préambule, il m'adressa la parole, murmurant presque.
« T'as eu des nouvelles de Moïra ? »
Mais à quoi est-ce qu'il joue? Mon sang ne fit qu'un tour mais je restais impassible, conservant mon regard perdu sur le couple au travail. Je ne trahissais aucune émotion et je savais que c'était une de mes forces.
« Non. Tu sais, je n'en ai que très rarement de ses nouvelles. » « Ah bon ? »
Je me contentais de hocher de la tête. Après tout, ce n'était pas vraiment un mensonge. Seulement une demie-vérité. Avant qu'il ne puisse revenir à la charge, je le questionnais à mon tour.
« De quoi vous parliez avec Izikel ce matin ? Il avait l'air contrarié. »
L'américain me jeta un regard soupçonneux mais je ne bougea pas, encore une fois. Je savais mon impassibilité très efficace sur les gens comme lui. J'étais désespérant au possible.
« Il voulait que je commence des recherches sur Moïra… Je lui ai dit que je ne pourrais pas obtenir plus que toi. Que j'avais pas ton réseau. »
Je hochais de nouveau de la tête. C'est ce qu'il fallait répondre. Il avait eu raison. Je sentis mon téléphone vibrer dans ma poche et y jetais un œil. C'était Ezra. Il voulait que je passe le voir. Avant de partir, il fallait tout de même que je réponde à Ale. Il fallait qu'il garde le moral et qu'il ne craque pas face à la pression que pouvait lui mettre l'irlandais. Et je savais que quand il s'y mettait l'irlandais pouvait se transformer en un harceleur qui ne vous laissait aucun répit. J'en avais fait l'amère expérience. La colère et la tristesse le rendaient agressif.
« Tu as bien fait avec Walig. Renvoie moi le à chaque fois qu'il revient à la charge et ne te laisse surtout pas faire. Je sais qu'il peut être très agaçant. » « Tu crois que je ne peux pas encaisser ses sautes d'humeur ? »
Le ton était légèrement agressif mais je ne prenais pas la peine de répondre et le fixais, impassible. Ses traits se radoucirent instantanément.
« Pardon je... » « Je dois y aller. Tu veux que je te rejoigne pour les rations à dix-huit heures ? » « Non c'est bon, Dean sera avec moi. »
Je hochais de la tête et me relevais, lui donnant une brève tape sur l'épaule avant de m'éloigner. Je ne lui tenais pas rigueur de tout ce qu'il pouvait me dire, à quoi bon de toute façon ? Je n'étais pas de nature très rancunière, à quelques exceptions près. Je faisais confiance à Alejandro pour une simple raison : il était du même acabit que moi. Nous avions tous les deux des valeurs de fond communes et une façon de fonctionner identique. Former à la même école, ou presque. En outre, je lui rendais sans arrêt des services qu'il ne pouvait s'empêcher de prendre comme des dettes à me rembourser, ce qui m'arrangeais, dans une certaine mesure. Je pressais le pas pour rejoindre Ezra devant le Manoir. Cette fois, il n'était pas avec Inna. Il avait cependant les traits tirés et le teint un peu pâle. Il s'inquiétait beaucoup pour la cavalière malgré la bonne marche de sa convalescence. Le métis faisait les cent pas devant le perron, les mains sur les hanches, jouant avec les graviers du bout de ses chaussures.
« Tu voulais me voir ? »
Il releva la tête et me sourit, laissant ses bras retomber brièvement le long de son corps avant de joindre les mains en prière devant lui.
« J'ai besoin de toi ! Est-ce que tu peux me rendre un petit service ? »
Je hochais de la tête sans vraiment prendre la peine de répondre. Curieux au fond de savoir ce qu'il voulait que je fasse.
« Je voudrais faire un cadeau à Inna. »
Il souriait fièrement et même un peu bêtement mais il ne dit rien d'autre. Je restais perplexe un instant, mais je finis par hocher la tête pour l'inciter à poursuivre.
« Je voudrais que tu me trouves une perle rare. Un Kim bis. »
Cette fois je haussais un sourcil. Où voulait-il en venir ?
« Tu veux te débarrasser de Kaiser ? »
Il eu l'air offusqué mais je n'y réagis pas, restant neutre.
« Quoi ? Non ! Bien sûr que non ! C'est son cheval, elle l'adore, je ne lui ferais jamais ça ! Mais je voudrais que quand elle reprenne, elle reprenne avec un cheval de confiance, stable, bien dans sa tête. Le travail avec Kaiser risque d'être plus long que sa convalescence à elle... Et puis elle approche de la fin de son cycle à l'académie et il est temps aussi qu'elle ai un autre cheval dans son piquet... »
Il n'avait pas tout à fait tord. Un bon cavalier de concours qui se respecte avait plusieurs cordes à son arc et donc plusieurs montures... Même si chez eux, ils avaient les chevaux d'élevage, chaque cavalier pro pratiquement avait au moins deux chevaux à sa charge, que se soit en temps que propriétaire qu'en temps que demi pensionnaire... Moi même j'en avait deux à mon nom et une dp...
« Très bien, je vais voir ce que je peux faire. » « Merci ! Merci Kwaï ! Je te revaudrais ça ! Faut que je remonte ! »
Je lui souriais alors qu'il remontait vers le Manoir à petites foulées. Mais dès qu'il eu passé les portes, je retrouvais mon air neutre et impassible. Où allais-je donc trouvé une perle rare ? J'avais quelques idées en tête. Il ne me restait plus qu'à les mettre en application !
*** *** ***
J'avais consacré ma fin d'après midi à la recherche de la perle rare d'Ezra ainsi qu'à mes recherches personnelles. J'avais rejoint Izikel pour le dîner et lui parler du projet d'Ezra. Je voulais qu'il teste mes perles rares pour les valider ou les invalider. Il accepta avec plaisir, ce qui m'étonna quelque peu. Il avait eu l'air d'être d'une humeur massacrante toute la journée et là, il était de bonne humeur. Devais-je me méfier ? Ou s'était il tout simplement fait une raison ? Je n'en savais rien, mais je me gardais de lui poser la question. Inutile de jeter de l'huile sur le feu. Je le quittais sur les coups de vingt-deux heures pour rejoindre ma chambre et étudier plus en profondeur mes infos.
J'y apprit pas mal de choses... Notamment que le nouveau problème qui s'imposait à nous n'en était pas un petit, et cela m'inquiétais. Alexei et Sergei Iakimov étaient tous les deux rechercher par le gouvernement américain et d'autres plutôt européens pour des crimes assez variés : corruption, meurtres, blanchiment d'argent, détournement de fond, divers vols et menus larcins, trafics de drogues, d'organes, d'enfants et de femmes, ainsi que tentatives d'homicides -ou en d'autres termes, passages à tabacs. Une liste bien trop longue à mon goût défilait sous mes yeux. La plupart de leurs collaborateurs étaient basés en Amérique du sud ou en Europe de l'est et la plus grosse part de leur réseau était soupçonnée de ne pas avoir été découverte à l'heure actuelle. Que de réjouissances ! Ils étaient d'origine russe et avaient tous les deux travaillé pour le gouvernement russe, avant de commettre quelques impers : la torture dans les prisons comme forme d'interrogatoire, oui, mais pas à leur manière. Apparemment, leur méthode dérangeait. Mais pour l'instant, je ne savais pas en quoi elle consistait, l'info n'ayant pas été déniché par mon petit programme collecteur. Mais pour qu'ils soient finalement expulsé du pays, c'est qu'ils ne devaient pas y aller avec le dos de la cuillère... Imaginez le pire et vous commencerez à saisir de quoi ils sont capable à l'échauffement...
Je passais une main sur mes yeux et jetais un regard à l'heure : une heure du matin. J'en connaissais désormais plus sur le sujet et je savais à qui demander quoi. Maintenant, il fallait que je lance la procédure. Je me décidais à dénicher mon autre ordinateur portable -le crypté- et le mettais en route péniblement. Je commençais par contacter mon maître d'arme, Mr. Tanaka, ainsi que d'autres connaissances de moindre envergure dans les réseaux illégaux asiatiques. Si les frères Iakimov étaient toujours sur le marché, quelqu'un devait forcément les connaître. Les mafieux se connaissaient tous, c'était vital pour eux. Et je m'étonnais moi même de ne pas avoir entendu leur nom plus tôt d'ailleurs ! Voilà bien trop longtemps que je ne faisais plus parti du réseau... Cela me jouais parfois des tours, comme aujourd'hui.
Une heure plus tard, j'avais enfin terminé et je fermais mon ordinateur pour quelques heures de sommeil. Dans trois heures, je serais de nouveau debout pour une nouvelle journée partagée entre recherche et cheval... J'espérais seulement arrivé à fermer l'oeil et avoir au moins une heure de vrai repos... Le poids du secret était bien plus pesant qu'on ne pouvait l'imaginer. Mais je le leur devais...
« Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important. » Terry Pratchett
La Corvette Stingray noire s'approcha lentement du bâtiment dans la nuit fraîche de ce tout petit matin d'automne. Le V8 qu'elle avait sous le capot ronronnait doucement. Lui seul venait déranger la tranquillité du pôle des éleveurs... La blonde, emmitouflée dans un manteau en laine gris, descendit les marches du perron et s'approcha de la voiture, son petit sac de voyage à l'épaule. Le coréen descendit de sa voiture pour venir ouvrir le coffre à la jeune femme et la saluer. Myriam s'approcha de lui et déposa une bise sur l'une de ses joues avant de l'accompagner jusqu'au coffre pour déposa son sac. Le coréen lui ouvrit la porte avant de se glisser derrière le volant et repartir au pas vers la sortie.
« T'as changé de voiture ? Fini Aston chérie ? »
La jeune femme lui servit un sourire espiègle auquel il répondit avec malice.
« Il était temps que je change. Je voulais essayer une Corvette depuis un moment alors... »
De nouveau ils échangèrent un sourire et la toute nouvelle Corvette du coréen quitta le domaine pour s'engager sur la nationale, en direction de Paris. Ils avaient quelques heures de route devant eux mais quand ils arriveraient dans la capitale française, le Haras commencerait sa journée...
***
Un bon paquet d'heure de vol plus tard et quelques fuseaux horaires de traversés, Myriam et Kwaïgon sortaient de l'aéroport de Great Falls passablement fatigués. Le coréen avait cependant eu la présence d'esprit de les faire voyager sur un vol privé. Il avait laissé sa voiture à Paris mais une jeep les attendait à la sortie du terminal. Ils embarquèrent et prirent la route de l'hôtel pour y laisser leurs bagages. Ils n'échangèrent pas un mot, ou le strict nécessaire pour la bonne marche de leur début de voyage. Le coréen était soucieux et cela se lisait dans son regard, quand il se perdait dans ses pensées. Ce qui n'arrivait pas souvent... La blonde elle, suivait le mouvement en tentant de rester calme et sereine. A vrai dire, elle ne savait pas à quoi s'attendre et ce qu'ils feraient de ce qu'ils découvriraient alors elle se laissait porter par le coréen.
Après un rapide passage à l'hôtel, ils prirent la route de l'hôpital. Kwaïgon gara la jeep dans le parking et étrangement, il ne sorti pas immédiatement du véhicule et resta immobile, les yeux rivés sur le tableau de bord. Il prit une grande inspiration silencieuse et croisa le regard de la jeune femme, qui lui sourit chaleureusement. Ou tout du moins, aussi chaleureusement que son état de fatigue et la situation le lui permettait.
« Ça va aller ? » « Oui... »
Sans d'autre préambule, il sorti de la voiture et Myriam en fit autant. La blonde se laissa ensuite portée, laissant le coréen faire à chacune des étapes. La réception, l'attente, puis enfin, la venue d'information. Un charmant interne vint les chercher pour les conduire à la chambre de l'inconnue. Ils s'étaient présentés comme sa seule famille proche, ce qui n'était pas tout à fait faux. Pour l'instant, ils n'en étaient qu'au stade de la reconnaissance. Et pour l'instant, ils étaient les seuls à s'être présentés. L'interne les devança dans la chambre et dès que le coréen entra, il se tendit. L'interne ne vit rien mais Myriam, habituée désormais aux habitudes du coréen, le ressenti. Elle sut alors immédiatement que la femme qu'ils avaient devant eux était bien Moïra Abraams...
***
Kwaïgon, debout devant la fenêtre de leur chambre d'hôtel, bras croisé sur son torse, restait résolument immobile. Il avait été chamboulé par ce qu'il avait vu, c'était indéniable. Même Myriam, qui ne connaissait la jeune femme que de nom, avait été affectée par son état. Ce n'était pas très beau à voir. Le visage de la jeune femme était encore tuméfié et elle avait un bras dans le plâtre. Son gros ventre de femme enceinte surprenait et choquait. Ce n'était pas ce qu'on s'attendait à voir sur une comateuse. Myriam aussi était perdue dans ses pensées, assise dans un fauteuil. Un silence empli d'une tension étrange entourait la chambre. La blonde ne se rendit même pas compte que le coréen sortait de son mutisme pour répondre au téléphone. La conversation ne dura que quelques secondes avant qu'il ne s'approche de la jeune femme et dépose une couverture sur ses épaules. La jeune maman sorti alors à son tour de sa torpeur pour lever les yeux sur le coréen, lui servant un faible sourire.
« Je suis désolée... » « Merci. » « Qu'est-ce qu'à dit le médecin alors ? » « Et bien... Si le bébé est en danger, ils feront une césarienne... Sinon ils attendront jusqu'au terme. Mais il y a des chances pour que Moïra ne se réveille jamais... »
Un court temps de réflexion s'ensuivit avant que la blonde ne reprenne la parole.
« Et qu'est-ce qu'il se passera pour le bébé ? » « Et bien... Si Moïra ne se réveille pas, se sera à nous de le déclarer. Et soit on le déclare orphelin, sans père, soit... »
La jeune femme ne le laissa pas finir sa phrase et se leva d'un bond, indignée, tremblante.
« C'est une blague j'espère !? On ne peut pas lui faire ça Kwaïgon. Izikel est son père et je refuse d'ignorer ce fait. On lui cache déjà bien assez de choses comme ça. » « Soit on déclare Izikel. Et dans ce cas là, le bébé sera quelques semaines entre les mains de l'administration, le temps qu'ils retrouvent Izikel et le lui annonce. » « Parce que tu comptes ne rien lui dire toi même ? » « Tu veux être celle qui lui annoncera la mort de Moïra ? »
Sans le vouloir vraiment, le coréen avait haussé le ton. Cette histoire le dépassait. Cette situation les dépassait tous. Le regard de la blonde se durcit.
« S'il le faut, bien sûr que je le ferais. » « Je le sais... » « Et je sais que tu ferais la même chose. »
Le coréen ne répondit pas et laissa le silence les envelopper de nouveau. Un silence qui apaisa les tensions. Bien sûr, elle avait raison. Elle avait toujours raison. Mais le coréen se garda de le lui dire. Il se contenta d'un faible hochement de tête et croisa de nouveau les bras sur son torse et se posta devant la fenêtre, avec délicatesse. Myriam se laissa retomber dans son fauteuil d'un geste las. Elle était fatiguée et dépassée. Mais ils savaient l'un comme l'autre qu'ils allaient devoir faire face et soutenir Izikel plus que jamais.
« Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? » « On attend... Parce qu'il ne nous reste que cela à faire... »
Il avait raison, elle le savait. Un long silence les enveloppa, insipide. Le doute les encerclait, s'insinuait en eux et les rongeait. Quand la jeune femme prit la parole, sa voix n'était qu'un murmure.
« Et qu'est-ce qu'il se passera ? » « Dans un monde idéal ? Cet enfant permettra à Izikel de se battre et refaire surface. Ou mieux même, Moïra se réveillera, on mettra fin à ses problèmes et tout le monde vivra heureux au Haras. »
Mais ils n'étaient pas dans un monde idéal. Et l'un comme l'autre ne le savait que trop bien...
Banlieue d'Osaka - 10:46 pm } Un brise fraîche soufflait sur le parc, faisant vaciller avec légèreté les branches des sakuras qui s'étendaient en forêt épaisse et désordonnée à l'arrière de la minka, maison traditionnelle japonaise. Le soleil était couché depuis longtemps et la fraîcheur de la nuit avait envahit l'espace, mais cela n'empêchait pas le coréen de rester là, assit en tailleur sur la terrasse, face à l'immensité, surplombant la vallée illuminée au delà des sakuras nus. Des guirlandes de lumières parcouraient les sakuras, rendant le parc féérique. Dans son dos, la paroi de papier diffusait une lumière douce, éclairant faiblement le sol de bois sur lequel il était assit. Le dos droit, les mains sur les genoux, le coréen n'avait pas bougé depuis des heures, tantôt les yeux clos, tantôt à observer le monde, plongé dans ses pensées, les yeux perdu sur les lumières dansantes parcourant les branches de sakuras, telles des lucioles dans la nuit sombre. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas méditer ainsi, ou comme il préférait le dire "réfléchit au futur de son monde". Mais c'était primordial pour lui de faire le point sur les derniers événements. Tout c'était passé tellement vite...
[FLASH BACK : ON]
Lorsque le jeune homme était entré dans cette chambre, il avait eu un instant d'arrêt. Une seconde pendant laquelle il s'était laissé submergé par la panique. Une seconde de pure horreur durant laquelle il avait été incapable de bouger ou de formuler une pensée intelligente. Une seconde qui lui était encore aujourd'hui douloureuse. Puis il avait inspiré profondément, soufflé, et réorganisé ses pensées. Il était redevenu presque lui-même. Bien qu'au fond, cette vision étrange le chamboulait un peu. Le premier choc passé, il y avait ensuite eu l'attente. Longue et fastidieuse. Il avait libéré Myriam pour rester des nuits entières auprès de Moïra, à guetter le moindre signe d'un réveil imminent. Quatre jours étaient ainsi passé. Les médecins avaient stoppé la morphine en espérant que la douleur provoque le réveil. Au début en vain et puis...
Il était deux heures du matin quand la jeune femme avait ouvert les yeux. Le coréen ne dormait pas et travaillait sur son ordinateur portable. Seul le bruit de ses doigts parcourant le clavier venait déranger le silence de la chambre, plongé dans une obscurité relative. Il était concentré sur ce qu'il lisait quand un faible murmure l'avait interpellé. C'était Moïra qui l'appelait. Il avait mit quelques secondes avant de se rendre compte de ce qu'il se passait.
« Moïra... » « Kwaï... »
Une grimace de douleur avait tordu ses traits, avant qu'un gémissement rauque ne déchire l'air.
« Un médecin ! ... »
Il ne s'était pas fait prié. La douleur avait bien réveillé la jeune femme, mais pas celle conséquente à ses blessures. C'était son accouchement. Elle était en travail depuis quelques heures déjà et en demi sommeil depuis ce moment là. Désormais, elle était bel et bien réveillé et elle se tordait de douleur. Tout c'était ensuite passé très vite. Elle avait été emmené au bloc et après quatre heures d'une interminable attente, on lui avait ramené Moïra, ainsi qu'un berceau contenant une petite crevette rose endormie. Il avait laissé la jeune femme se reposer, donnant ses premiers biberons à la future "Cathleen" quand elle se réveillait. Au petit matin, la toute jeune mère avait rouvert les yeux et avait fondu en larme. Le coréen l'avait consoler comme il l'avait pu pour pouvoir connaître la raison de ces pleurs et elle lui avait expliqué sans détours.
« Je ne peux pas la garder... Je... Ils vont toujours me chercher... Comment est-ce que je vais faire ? ... Kwaïgon je t'en prie... Je t'en supplie... Aides-moi... »
Ce sur quoi elle avait de nouveau fondu en larme et plongé le coréen dans une intense réflexion...
« Et bien ça ne va pas être facile et ça fera un choc à Izikel mais la petite peut aller avec lui au Haras et toi chez mon maître au Japon... Mais il faut que tu parles à Izikel, tu ne peux plus l'ignorer Moïra... » « Non ! Non surtout pas... Non... Dis lui... Dis lui que je suis morte... Je t'en prie ! Je t'en supplie Kwaïgon... » « Je ne peux pas lui faire ça Moïra. » « Si ! Tu peux et tu vas le faire ! C'est le seul moyen ! Kwaïgon ! » « NON ! »
Il avait crié sans le vouloir. Cathleen s'était réveillé et sursaut et s'était mise à pleurer. Moïra avait également fondu en larme, en gros sanglots. L'heure suivante, la jeune femme avait argumenté en sa faveur en vain. Le coréen ne voulait pas cacher cela à l'irlandais, et encore moins lui mentir. Il pouvait éviter de leur parler à tous de sujet fâcheux et les garder pour lui, mais il se refusait à leur mentir ouvertement. Se serait les trahir. Trahir leur confiance et leur amitié. Et il était absolument hors de question qu'il fasse une chose pareille. Il avait fini par quitté la pièce pour aller fumer une cigarette, chose qu'il n'avait pas fait depuis des mois également. A son retour dans la chambre, le personnel était affolé et Moïra avait disparu. Il reçu un sms peu après de la jeune femme le suppliant de l'aider. Elle le mettait en porte à faux. Et il l'a haït pour ça. Peu importait les neuf mois durant lesquels ils avaient vécu ensemble. Peu importait tout le reste...
[FLASH BACK : OFF]
« Kwaïgon-san ? »
Le jeune homme ouvrit les yeux et souffla lentement avant de déplier ses longues jambes et se relever. Il se retourna avant de s'incliner respectueusement, mains jointes, devant son hôte.
« Tanaka-Sensei. » « Le dîner est servi. » « Très bien, j'arrive. »
Ils échangèrent un sourire et Maître Tanaka s'éclipsa après qu'ils se soient mutuellement salué. Ils avaient atterrit dans l'après midi à Tokyo avant qu'un des hommes de Tanaka ne vienne les chercher pour les emmener à Osaka en hélicopter. Ils avaient finalement rejoint l'une de ses demeures de campagne pour y trouver un peu de repos.
Le coréen rejoignit la salle à manger. Sur l'estrade de bois sombre sur laquelle se trouvait la table basse du repas, Nobu était déjà installé et l'attendait. Une femme d'un certain âge disposait les plats sur la petite table. Au vue de disposition des assiettes, Moïra ne se joindrait pas à eux. Ce qui n'étonnait guère le jeune homme. Elle était toujours convalescente et plongé dans un chagrin sans borne. Nobu Tanaka vivait de nouveau en centre ville de Tokyo, mais il conservait ses maisons au pied du Mont Asahi, celle-ci et une autre sur la côte, au sud de l'île. Son marché était toujours aussi florissant et il avait décidé, depuis peu, d'investir dans une entreprise un peu plus légale : un laboratoire de recherche et d'innovation pour les outils utilisé en médecine. Un projet un peu plus honorable que ce qu'il pratiquait jusque là, même s'il n'abandonnait pas la plus grosse source de ses revenus : le marché noir. Kwaïgon s'installa en face de Nobu et attendit en silence qu'on leur apporte les oshibori, ces serviettes chaude et humide servant à se laver les mains. Une fois qu'ils les ai rendu, ils attrapèrent leurs baguettes, les placèrent à l'horizontale entre leurs pouces et leurs index, mains jointes et saluèrent en murmurant « itadakimasu ». Ce après quoi Nobu commença à servir le saké et le coréen à remplir son bol de riz.
« Il est drôle de voir qu'à chaque fois que l'on se retrouve après un long temps, c'est autour d'un repas. » « Je crois, mon cher Nobu, que c'est à cause de notre mutuelle amour pour la bonne nourriture japonaise. »
Le maître et mentor du coréen rit doucement en levant son verre de saké avant d'en boire une gorgée. Kwaïgon l'imita et ils poursuivirent leur repas. La tradition voulait que l'on se serve dans les plats pour remplir son assiette, indépendamment de leur ordre ou leur contenance. Ils avaient devant eux six plats assez divers, chaud et froid. Le coréen, bien qu'accoutumé au mode de repas à l'occidentale, n'en avait pas pour autant oublier la façon de se servir de ses baguettes. Après tout, il avait grandi et mangé des années durant avec des baguettes, cela ne s'oubliait pas en quelques années à la fourchette.
« Alors, raconte moi ta vie au Haras ! Se passe-t-elle toujours aussi paisiblement ? Pas vraiment à ce que je vois... »
Le coréen eut un sourire en coin avant de répondre. Nobu avait raison et soulevait un point assez important en plus d'être évident.
« J'essaie de les protéger des ombres qui grandissent dans le noir. » « Parce que se sont des enfants ? » « Parce qu'ils ne méritent pas de mourir à cause des cauchemars des autres... » « Les tiens ? » « Les miens, je les aurais supprimer seul... »
Le maître japonais sourit.
« De cela, je ne douterais jamais ! C'est grâce à toi que je suis de nouveau libre et je ne l'oublierai pas. » « Merci, Tanaka-sensei... »
Ils poursuivirent leur repas en parlant de leurs quotidiens respectifs, omettant pour un repas, de parler des cauchemars qui peuplaient leurs ombres...
Banlieue d'Osaka - 6:34 pm } Le vent de novembre, froid, passait sur son torse nu sans y provoquer aucune réaction. La douleur, le froid, la brûlure... Tout ça n'était qu'une conception de l'esprit. Ou du moins, c'est ce dont il essayait de se persuader depuis des années, avec plus ou moins de succès. Dans certains cas, cela lui avait sauvé la vie. Dans d'autres, la morsure du froid ou de la douleur avait été trop grande. Mais ce leitmotiv lui avait permis de ne pas perdre son sang froid dans de nombreux cas critiques. Tout cela tenait à la concentration. Sa concentration ne devait être en aucun cas perturbée pour qu'il puisse conserver son sang froid. Et pour qu'elle ne soit pas perturbée, il devait faire abstraction de tout autour de lui. Le paradoxe était que malgré le fait qu'il doive faire abstraction de tout autour de lui, il devait aussi y être extrêmement attentif, pour ne jamais se laisser surprendre. Une gymnastique de l'esprit dont il commençait à avoir l'habitude. Mais pour arriver à son niveau, il fallait un entraînement rigoureux. Autant physique que mental. Un entraînement dont il aurait grandement besoin dans peu de temps... Il le sentait. Et son instinct ne le trompait jamais. Le yeux fixé dans ceux de son mentor, son jyo à l'horizontale dans les mains, il bougeait lentement, en cercles réguliers. Dès que Tanaka attaquait, il paraît les coups et ripostait. Cela faisait des années -que disait-il, des siècles!- qu'il n'avait pas fait un entraînement de ce type mais il n'avait rien oublié. Et il avait encore assez de réflexes pour tenir tête à Nobu. Il reprit sa position de base, bras à demi-plié, une paume vers le ciel et une paume vers la terre, tenant fermement son jyo devant lui à l'horizontale, le corps tendu, prêt à contre-attaquer et se défendre. Mais l'attaque ne venait pas. Malgré tout, il patienta. Ignorant la morsure du froid sur son torse et ses pieds nus. Ignorant le vent dans ses cheveux. Finalement, l'attaque vint. Nobu tenta de lui fauché les jambes. Aussitôt, dans le quart de seconde, le coréen abaissa son jyo. Le claquement du bois était sec, violent, mais le coréen ne l'entendait pas. Il fit un pas en avant et feinta un dégagement. Nobu fut surprit et recula, mais il ne baissa pas sa garde. Kwaïgon attaqua sur son côté gauche et feinta sur le côté droit, ce qui lui laissa enfin une ouverture. Son jyo claqua contre le genou de Nobu, le déséquilibrant de nouveau et cette fois, il ne se reprit pas assez vite pour parer à nouveau Kwaïgon qui stoppa net son jyo à quelques centimètres à peine de sa tempe. Contrôler ses gestes, au centimètre près. Les deux hommes restèrent un instant immobiles avant que Tanaka ne sourit. Les deux hommes reculèrent d'un pas, leurs jyo le long de leurs corps, et se saluèrent avec respect.
« Bravo ! Je ne pensais pas que tu arriverais à me battre un jour ! »
Le coréen sourit. Il n'avait encore jamais battu son maître d'arme.
« Et moi donc ! A croire que vous avez perdu la main. » « Oh non... Tu es seulement parvenu à mon niveau. Maintenant, tu peux dire sans rougir que tu es maître. Maître Jeong. »
De nouveau, Nobu sourit. Il donna son jyo à une apprentie qui les attendait et salua le coréen avec respect, ce que Kwaïgon lui rendit. Il donna également son jyo à un apprenti et se retourna pour faire face au parc. Il devait certainement être splendide avec les sakuras en fleurs... Il était plus féérique la nuit qu'en journée. Mais en plein soleil en cet hiver froid, il restait tout de même agréable. Il enfila le samue blanc que lui ramena l'apprenti et se replongea dans la contemplation du parc, immobile, les bras croisés, laissant le vent faire voleté les pans de tissu qui lui couvraient les épaules...
[FLASH BACK ON]
La panique dans l'hôpital était réelle. On le questionna, mais il ne savait pas ce qui s'était passé. Tout du moins, c'est ce qu'il s'obligea à dire. Il savait ce qui s'était passé et il savait ce qui allait se passé. Moïra l'avait pris en traître. Elle lui avait planté un couteau dans le dos pour l'obligé à l'aider. Et il la détestait pour cela. Moïra n'avait eu besoin que d'une heure pour simuler sa mort. Avec sans doute l'aide de quelques amis... Un corps sans vie fut retrouvé et identifié comme étant Moïra Abraams. Une heure... Le coréen n'en revenait toujours pas. La colère était monté en lui à tel point qu'il avait failli explosé face à Myriam. Mais il avait gardé son sang froid. Comme toujours. Myriam était arrivé à l'hôpital peut après que l'inconnu ait été identifiée comme étant Moïra. Kwaïgon avait prit les devants et soulagé les infirmières débordées. Il avait sagement raconter à Myriam une version un peu différente de la réalité : Moïra était décédée des suites de son accouchement. Il la ferait incinérée, il n'avait besoin de rien... Si ce n'est que Myriam s'occupe de la petite fille tout juste née. Et c'était ce que l'éleveuse avait fait. Elle avait tenu son rôle à merveille... Elle y avait cru... Et le coréen se détestait pour cela également. Le soir venu, il avait prétexté vouloir être un peu seul pour retrouver Moïra. Ce qui n'avait pas était très compliqué au final...
Il lui avait fallu presque une heure, à faire les cent pas dans la rue, pour retrouver son calme avant d'entrer dans la chambre d'hôtel de Moïra. Une heure qui lui avait aussi permise de prendre ses décisions et de réfléchir à un plan. Quand il avait fait face à la jeune femme, plusieurs de ses sutures avaient sautés. Son plâtre avait disparu et remplacé par une écharpe. Elle avait les yeux rougies et les joues encore humides. Mais Kwaïgon ne le voyait pas. Il ne voulait pas le voir. Il ne voyait plus que la trahison, à son sommet le plus haut. Il voyait un être détestable qu'il aurait étranglé de ses propres mains s'il n'avait pas été conscient que cela ferait plus de mal encore à Izikel que ce qu'il voyait sur le moment. Il avait refermé la porte derrière lui et tiré les rideaux. Il avait regardé autour de lui avant de s'appuyer sur la commode, croisant les bras. Il avait ensuite fixé Moïra et attendu. Qu'attendait-il ? Des excuses ? C'était trop tard. Qu'elle change de décision ? Impensable de sa part. Le mal était fait. De se réveiller et trouver que tout cela était un rêve ? Non... Il n'y croyait pas. Ses cauchemars étaient bien plus réels que cela. Moins absurdes. Il était impossible que se soit un cauchemar. C'était la réalité, et elle était hideuse. Hideuse et détestable...
« Je suis désolée Kwaïgon... Tellement désolée... Je t'en prie, ne me déteste pas ! Je n'ai pas le choix... Je n'ai aucune autre solution si je veux qu'ils restent en vie... Il faut que je les éloigne. Il faut que... »
L'index levé du coréen la fit taire. La jeune femme se laissa retombé sur le lit, retenant difficilement ses larmes. Quand le coréen prit la parole, sa voix était glacée, implacable. Elle devait le suivre, ou elle mourrait. De sa main à lui. Pour la première fois de sa vie, le coréen put voir de la peur dans les yeux de la jeune femme. Jusque là, il y avait vu la panique, la colère, la supplication. Maintenant c'était la peur. La frayeur à l'état brut. Et c'était lui qui la lui inspirait.
« Je ne vais le dire qu'une seule fois, alors tu as intérêt à bien écouter. Premièrement : je me fiche complètement de ta misérable vie. Elle n'est pas importante pour moi et elle ne représente rien, si ce n'est le bonheur de mon ami. Retiens bien que c'est seulement et uniquement pour lui que tu es encore en vie. Sinon, je t'aurais moi même logé une balle dans le crâne il y a bien longtemps. Deuxièmement : je te déteste. Je te hais Moïra et rien, absolument rien de ce que tu diras et feras ne changera ce fait. Je me fiche de tes excuses. Je. Ne. Te. Pardonnerais. Jamais. Troisièmement : à partir de maintenant tu vas faire ce que moi je te dis de faire. Que ça te plaise ou pas m'est complètement égal. J'en suis et j'en serai absolument indifférent. Je ne veux pas t'entendre te plaindre. Je ne veux pas t'entendre me supplier. Je ne veux pas t'entendre demander quoi que se soit. Je ne veux pas t'entendre pleurer. Est-ce que c'est bien clair ? »
Serrant les lèvres, la jeune femme se contenta d'acquiescer.
« Je ne sais pas ce que tu as fais pour être poursuivie par les frères ukrainiens et je ne veux pas le savoir. Tu nous as tous mit dans une merde noire. Au lieu de demander de l'aide, tu es partie en vendetta seule contre tous, en ayant failli faire tuer Izikel au passage et maintenant, ils réclament vengeance. Je suis à seulement deux misérables doigts de te livrer à eux avec un ruban rouge autour du cou. Mais comme je ne supporterais pas de voir Izikel sombrer encore plus profondément qu'il ne l'est, je vais te sortir de ce bourbier dans lequel tu es plongée. Et j'espère qu'après ça Izikel arrivera à me pardonner cette trahison infâme que je suis en train de commettre. Et même si c'est bien le cas, ce dont je me permets de douter, je ne veux plus jamais entendre parler de toi en terme tel que : morte, en fuite, en cavale, malade, en taule ou tout ce qui est différent de « file le parfait amour avec Izikel et sa fille ». Est-ce que je me suis fais bien comprendre ? »
De nouveau, Moïra se contenta d'acquiescer en serrant les dents pour retenir un sanglot.
« Je vais te faire envoyer un médecin. Avec Myriam, on va rentrer au Haras, parce qu'il faut annoncer la nouvelle de ta mort à Izikel. Après ça, je reviendrais te chercher et on partira au Japon. Tu iras chez Maître Tanaka en attendant que les choses se calment. Si tu disparais entre maintenant et le moment où je reviens te chercher, je te jure Moïra que je te retrouverais et que je te tuerais. »
Il avait soutenu son regard un instant et avait quitté la chambre pour rejoindre Myriam. Quelques jours plus tard, il revenait la chercher, faisant croire aux autres qu'il partait pour le Chili voir Naïg...
[FLASH BACK OFF]
Les lumières de la ville, en contre-bas, s'allumèrent au moment où le soleil passa derrière la montagne. Les guirlandes des sakuras s'illuminèrent peu après, rendant sa majesté au parc centenaire. Dans le dos du jeune homme, une voix familière se fit entendre.
« Il paraîtrait que je suis devant le nouveau sensei... Toutes mes félicitations. »
Le coréen sourit et se retourna pour faire face à cette vieille connaissance.
« Calum Heredit... Pas encore mort ? Je suis déçu. » « Et moi donc ! J'espérais recevoir une invitation à tes funérailles cette année ! Tu n'imagines pas à quel point je suis surpris ! » « Ne le sois pas... Tu sais comme tout le monde que je suis immortel. »
Le coréen s'approcha de l'homme aux yeux verts et lui tapota amicalement l'épaule. Ils échangèrent un sourire avant une accolade amicale et chaleureuse.
« Vieille rascasse ! Viens donc boire un verre de saké ! Tu as plein de choses à me raconter ! » « Oh oui ! L'immortalité est pleine de rebondissements... »
Cette fois, ils éclatèrent de rire en entrant dans la maison de bois. Avec Calum à ses côtés, la nuit risquait d'être courte...
J'ai 249 Lignes J'utilise un résumé x3 de Louna J'utilise aussi autant de seau de carotte qu'il faut pour que chaque jument soit à 2 mois restant. Faut donc piocher dans mes PB, un seau = 100PB. Box de Leota ; Orcanta ; Volantae ; Katynka & Lady Butternut Merci pour la correction ! =)
« Ce que nous faisons pour nous même disparaît avec nous. Ce que nous faisons pour les autres et monde est immortel et demeure » Albert Pine
La trêve hivernale... Un moment que le coréen aimait tout particulièrement dans l'année pour une seule et bonne raison : le Haras se vidait et le calme régnait en maître sur les lieux. Le coréen ralenti, enclencha son clignotant et laissa passé une véhicule avant de s'engager dans l'allée des cerisiers. Il venait de faire un dernier aller - retour pour Paris afin de déposer Siobhan à l'aéroport. Malgré qu'il y ait encore un peu d'eau dans le gaz entre lui et Lou-Khyan, il passait tout de même les fêtes de fin d'année dans la famille de la rouquine au Canada. Louna et Enzo étaient parti quelques jours plus tôt à Chicago. Neyla était parti la veille pour l'Australie. Dean devait encore être dans l'avion pour Austin au Texas, Ezra et Inna étaient parti la veille pour New York, chez la mère du métis et enfin, Logan avait fait route vers St Jean de Luz en début de semaine pour rejoindre la maison de sa famille maternelle et y passer les fêtes également. Liam et Myriam aurait pu joindre Biarritz et passé les fêtes chez la grand-mère de la jeune ostéopathe mais elle s'y était refusé, préférant que toute la petite famille reste au Haras. Elle avait avancé l'argument du peu de cavalier restant mais le coréen n'y croyait pas et à raison. Ils restaient pour Izikel et Cathleen. Et ce n'est pas Kwaïgon qui leur en tiendrait rigueur, au contraire. Il gara la Corvette dans un abri du parking et sorti, se dirigeant vers le Pavillon nord du Manoir et ses salles communes. A cette heure-ci, tout le monde devrait être au petit déjeuner, plus tardif en période de vacances que d'ordinaire... Et cela ne loupa pas ! Liam, en bout de table, lisait un journal. Myriam tenait Cathy dans ses bras et lui donnait un biberon alors qu'Izikel apprenait le fameux "pierre-feuille-ciseaux" à Maël. Alejandro était plongé dans une légère somnolence, observant le tout avec calme, installé à l'autre bout de la table. Le coréen prit place à côté de Myriam alors que Liam repliait son journal.
« Salut ! Ça y est t'as déposé Sio' ? » « Oui ! Ça y est, il n'y a plus que nous ! »
Liam lui sourit et lui tendit une tasse qu'il avait remplie de café, refermé par une coupelle pour qu'elle reste au chaud.
« Merci. » « Avec plaisir ! »
Ils échangèrent un sourire alors que le coréen entamait sa tasse de café. En face, Izikel et Maël poursuivait leur jeu. Cathleen avait fini de téter et s'endormait dans les bras de Myriam et Ale reprenait doucement vit et mouvement.
« Bon, vous savez que je ne compte pas vous embêter vraiment pendant les vacances mais je vais avoir besoin de tout le monde pour un petit trotting... Sauf Myriam qui va rester avec Cathleen. »
L'éleveur sourit et tout le monde releva les yeux vers lui.
« Même moi ? » « Même toi Maël ! » « Quand le chef a une idée derrière la tête... »
Cette fois, Ale et Izikel sourirent doucement, attentif à ce que Liam allait dire. Ce dernier hocha doucement de la tête.
« Oui ! En fait j'aimerais qu'on sorte les poulinières en trotting. Pour les maintenir en forme... Du coup Maël tu monteras à cheval exceptionnellement... »
Le petit garçon ouvrit de grand yeux et fit un « Oh ! » enthousiaste et admiratif.
« Je peux le mettre sur Leota à cru. » « Et en cordelette !!! » « Euh... Je pensais le mettre sur Orcanta mais... » « Allez !!! Papa !!! Dis oui !!! » « Par contre la cordelette... »
Il leva les yeux vers Izikel qui paraissait confiant.
« Elle ne bouge pas » « Testé et approuvé par maman. »
Liam et Myriam échangèrent un long regard et l'éleveur céda.
« Bon ok ! Mais bombe et protège-dos ! Et ça ce n'est pas négociable ! »
Le petit homme sauta de sa chaise et poussa un « Hi ! » étouffer pour ne pas réveiller Cathy avant de sauter au cou de son père. Après ce câlin improvisé il regagna sa place et Liam s'adressa aux autres hommes de sa cavalerie réduite.
« Alors dites-moi, qui voulez-vous prendre ? »
Les trois cavaliers échangèrent un regard entendu et Izikel prit la parole en premier.
« Je prends Katy. » « Je prends Lady. » « Et moi Orcanta. » « Parfait ! Voly pour moi. On se retrouve dans une demi-heure à l'allée ? »
Les cavaliers acquiescèrent et se dispersèrent doucement à la fin du petit déjeuner...
***
Quand le coréen entra dans l'allée une demi-heure plus tard en tenue d'équitation, Leota était attachée au milieu du couloir. Maël, perché sur un tabouret, lui brossait le dos avec attention. La grullo pointa les oreilles vers le coréen en relevant le nez, curieuse. Kwaïgon s'approcha d'elle avec un sourire et lui grattouilla le nez alors que Kim sortait la tête de son box et l'accueillait d'un ronflement chaleureux. Le cavalier délaissa la jument pour aller voir son petit protégé et lui flatta la joue pour le saluer.
« Salut bébé ! On sort ? »
Il attrapa le licol qui pendait à la porte et le sabino recula respectueusement. Il savait ce que ces mots signifiait. Il se laissa faire quand le coréen entra dans le box et lui enfila le licol et il le suivit sagement hors de l'allée. Kwaïgon le lâcha dans un grand paddock et laissa le licol à la porte avant de retourner dans l'allée. Il y croisa Liam qui traînait derrière lui les quatre petits poneys de la pension.
« Je peux mettre la bande des affreux avec Kim ? » « Oui vas-y, il est sociable. » « Merci ! »
L'éleveur poursuivit sa route avec les poneys trottinant derrière lui et le coréen prit le chemin de la sellerie. Il prit toutes les affaires d'Orcanta avant d'aller jusqu'à son box. La palomino releva les nez quand il se présenta à la porte et attendit au fond de son box qu'il n'ouvre la porte et la rejoigne. Son ventre commençait à s'arrondir mais ne gênait pas encore la monte. Elle avait déjà eu un poulain et prenait facilement du poids sur ce second pouliage mais ce n'était pas alarmant pour le moment. Le cavalier commence par un pansage complet avant de seller et brider la jument et lui poser ses bandes de polo et ses cloches. Il sort enfin dans l'allée et enfile ses chaps, le temps de laisser passer Ale et Izikel devant lui. Dehors, Liam est déjà là avec sa jument ainsi que Maël et Leota. Quand il sort, Liam lui tend les rênes de Volantae, le temps d'équiper Maël. Le coréen tient la jument sans broncher. Ale a hérité de la turbulente Katy à garder à Izikel, alors il ne se plaint pas. La jument bai ronfle des naseaux, la tête haute, piétine, inquiète de ce qu'il va se passer. A côté d'elle, Lady Butternut reste stoïque, les oreilles légèrement en arrière dès que Katynka bouge un peu trop. Liam équipe Maël d'un gilet airbag qu'il attache aux crins de Leota qu'Izikel tresse et lui enfonce son casque sur le crâne avant de le hisser sur le dos de la grullo. Izikel lui tend la cordelette que la jument a autour de l'encolure et lui donne quelques consignes avant d'aller chercher sa jument. Liam fait de même et tous re-sanglent avant de se mettre plus ou moins souplement en selle. Le coréen constate avec un certain amusement qu'aucun d'entre ne porte de bombe. Bien mauvaise habitude qu'ils ont prit, tous autant qu'ils sont... Ils ne se protègent qu'en saut et en cross. Les filles se montrent un peu plus sérieuses qu'eux, et bien heureusement. Izikel a tout de même seller sa jument du jour. Sans doute plus pour soulager son dos qu'autre chose.
Une fois tout le monde prêt, Liam prend la tête. Izikel alla de front avec lui sur sa jument bouillonnante. Maël les suit et Ale et Kwaïgon ferment la marche, eux aussi de front. Mise à part Katynka qui avait tendance à faire des écarts intempestifs, le reste des juments restait calme. Ils décidèrent de faire le tour de la vaste piste de galop. Liam sentait Maël plus en sécurité sur cette fameuse piste. Malgré les protestations du petit homme, toute l'équipe se dirigea vers la fameuse piste. Ils restèrent calmes et silencieux jusqu'à l'arrivée sur la piste. Là, Ale prit la parole, brisant le silence qui les enveloppait jusque là.
« Quand est-ce qu'on fait le repas de noël de la Team ? »
Liam se retourna sur sa selle alors que Kwaïgon haussait des épaules. Izikel encaissa un nouvel écart de la jument bai et retrouva sa place. Volantae à côté d'elle baissa rageusement les oreilles : visiblement, elle n'aimait pas les réactions de sa voisine. Maël, tout sourire sur la grullo, balançait doucement les pieds au fil des pas de sa jument. A l'arrière, ils marchaient rênes longues sans aucune difficulté.
« A la rentrée, quand tout le monde sera revenu... Je crois que les derniers à revenir sont Lou et Siobhan, le cinq janvier. Donc après... »
Le coach acquiesça et se tourna vers le coréen, baissant d'un ton, il l'interrogea sur la personne qu'il avait tiré au sort pour les cadeaux de noël. Cette année, au vu du nombre croissant de membres dans l'équipe, l'éleveur avait décidé de faire un tirage au sort. Chacun offrirait à la personne qu'il avait tirer au sort un cadeau. Rien ne les empêchait de faire plusieurs cadeaux, mais ils devaient choisir en priorité le nom qu'ils avait tiré au sort.
« T'as eu qui toi ? » « Walig. Et toi ? » « Ezra... J'ai pas d'idées... T'en as toi ? »
Le coréen soupira. Il avait une idée. Une sacrée idée même. Mais il doutait de l'effet qu'elle produirait.
« Oui. Mais inutile de me demander, je ne partagerais pas. »
Autant être clair tout de suite. Ale commença à râler mais il fini par sourire. Il finirait bien par trouver une idée pour le métis, quitte à interroger Izikel sur la chose. Après tout, son meilleur ami devait bien avoir une idée de ce qui lui plairait...
« T'as pioché qui Liam ? »
Encore une fois le cavalier se retourna sur sa selle.
« Neyla ! Et toi ? » « Ezra ! Et toi Izikel ? » « Oh ! Tu veux pas... »
L'irlandais fut couper par un arrêt brusque de Katy. Elle secoua énergiquement la tête et le cavalier attendit quelques minutes avant de la remettre en avant. Elle ronfla fortement mais se remit en marche. Le cavalier ne prit pas le risque de se retourner sur sa selle, il se contenta de tourner un peu la tête pour que le coach puisse l'entendre.
« Tu veux pas échanger avec moi ? J'ai Louna... »
Le coréen fit une grimace. Même si les choses semblaient aller un peu mieux entre l'éthologue et l'éleveuse, ils n'en étaient pas encore au point de se faire des cadeaux. Il lança un regard appuyé au coach, une façon de l'inciter à accepter silencieusement.
« On a le droit de changer chef ? » « Je vous autorise pour le coup. » « Ça marche Walig ! Je prends Louna. » « Merci ! »
Ils échangèrent un sourire avant de poursuivre leur route au pas. Katy continuait de faire des misères à son cavalier mais Izikel encaissait bien ses écarts intempestifs. Après une bonne vingtaine de minutes au pas, les cavaliers passèrent au petit trot. Maël ne semblait avoir aucun mal à suivre la cadence de sa jument, rigolant même de la lenteur de ses gestes comparé à ses poneys, dont les rythmes étaient bien plus rapides. Avec l'allure plus rapide, Katy se calma un peu, ce qui permit à l'éthologue de respirer un peu. Les garçons poursuivirent leur conversation en parlant des chevaux et de leur programme des vacances. Les autres cavaliers de l'équipe reviendraient après le changement de pays. Ils avaient donc pas mal de choses à faire mais Liam avait prit beaucoup de recul depuis quelque temps et stressait moins. Ce qui convenait à tout le monde. Ils reprirent le pas après une autre vingtaine de minutes au petit trot et reprirent le chemin du Haras, rênes longues. Les juments semblaient plus calmes, même Katy acceptait de rester rênes longues sans paniquer. Une fois de retour à la pension, ils mirent pied à terre et s'occupèrent chacun de leur jument...
***
Le coréen regardait d'un air pensif par la fenêtre de sa chambre. Il avait reçu une nouvelle atypique. Une nouvelle à laquelle il ne s'attendait pas. Il se retrouvait une fois encore face à un dilemme. Devait-il le faire ? Devait-il accéder à sa demande ? Une fois encore ? Trahir les siens ? Il s'en sentait incapable... Son cadeau de noël risquait de faire des étincelles... Trop d'étincelles. Il ne lui restait qu'un chose à décider : s'il était prêt à prendre le risque ou non...
Banlieue d'Osaka - 10:00 am } « Et tu crois vraiment que c'est possible ? » « Oui. Bien sûr. »
Le coréen jeta un coup d’œil furtif au rouquin en gardant son sérieux au possible. Installé en tailleur l'un en face de l'autre au dessus du Kotatsu de la maison, les deux homme démontaient, nettoyaient et remontaient tout un arsenal d'armes à feu assez diverses. Ils avaient été chercher une cantine complète que Calum conservait « en cas de force majeure ». Et d'après le britannique, s'attaquer aux frères Iakimov était un cas de force majeure. Dans le milieu, ils n'étaient pas apprécié. Aux yeux des gouvernements des grandes nations du monde, ils n'étaient pas apprécié. Pour une fois que toutes les grandes nations étaient du même avis sur quelque chose, il ne fallait pas s'en priver. Le coréen avait le soutien de bien du monde dans cette affaire. Mais étrangement, personne ne voulait se porter volontaire pour l'accompagner le jour J. Personne à part Calum et Moïra. Mais il ne voulait pas de Moïra avec lui. Il ne lui faisait plus confiance. Il n'avait pas demander à Nobu. Il connaissait déjà sa réponse et il ne voulait pas l'avoir avec lui non plus. Pas qu'il le pense trop vieux ou quelque chose comme ça, loin de là. Son maître restait une référence pour lui comme pour bien d'autres. Mais il avait un empire entre ses mains. Et cela signifiait également qu'il avait des vies entres ses mains. Outre les trafics illicites auxquels il s'adonnait, il permettait à de nombreuses familles de vivre et il se comportait comme un chef d'entreprise au sein de ce commerce. Rares étaient ceux qui faisait attention à leur « employés » dans cette branche. Lui si. Encore une chose pour laquelle le coréen l'admirait. Et si Nobu mourrait, toutes ces familles se retrouveraient sans travail. Et il en était hors de question.
« Tu me charries... Me dis pas que tu pense qu'un jour on pourra aller en vacances sur Jupiter. »
Cette fois le coréen ne put se retenir et explosa de rire, provoquant un rougissement de la part de Calum qui commença à râler dans sa barbe en frottant avec plus d'ardeur encore le canon qu'il nettoyait. Le britannique n'avait jamais été assez longtemps à l'école pour y apprendre ce genre de chose. D'un père alcoolique et violent et d'une mère droguée disparue trop tôt, il s'était élevé tout seul et c'était une chance qu'il ne soit pas mort plus tôt que cela. Il avait rencontré un des dealer du réseau européen de Nobu et était entré dans cette grande famille... Par il ne savait quel processus, il avait gravi les échelon et apprit le japonais -seule langue qu'il connaissait avec l'anglais- et était devenu l'un des hommes de la garde rapprochée de Nobu. Son « assurance-vie » comme il le disait souvent, bien que Nobu soit tout à fait capable de se défendre seul, et bien mieux que quiconque. Le coréen mit un moment avant de se reprendre et se concentrer de nouveau sur les balles qu'il rangeait dans leur magasin.
« Jupiter c'est une planète gazeuse. On ne pourra jamais se poser dessus... » « Je savais que tu te foutais de moi. »
Encore une fois le coréen ne répondit rien, se contentant de sourire. Mais Calum ne put s'empêcher de sourire à son tour, et les deux hommes partirent en fou rire incontrôlé. Fou rire rapidement stoppé par l'entrée de Moïra dans la pièce. Le regard de Kwaïgon se fit immédiatement plus froid et amer. Ce qui fit hésiter la jeune femme dans son geste. Mais elle poursuivie quand même, bien que sa détermination soit moins grande, ce qui se traduisait par sa démarche moins assurée. Avec les soins de l'équipe médicale de Tanaka, elle reprenait très vite pied. Trop vite selon le coréen d'ailleurs. Mais le traumatisme psychologique était encore trop bien présent. Même si ce n'était que de la culpabilité et du remord qui la rongeait, en plus de la peur viscérale que lui inspirait sa situation actuelle, plus que précaire, et le coréen. Elle s'arrêta à quelques pas de la table et s'éclaircit la gorge. Il y eu un instant de flottement durant lequel Calum ne prit pas garde, chantonnant doucement en nettoyant son arme. Il fallu au coréen de le fixer intensément et de croiser les bras sur son torse de très longues minutes avant que Calum ne comprenne ce qu'il se passait. Il suspendit son geste et fit les yeux ronds au coréen.
« Je peux vraiment pas rester ? » « Et tu veux du pop-corn aussi peut-être ? »
Le coréen allait faire une réplique cinglante au britannique mais la voix sarcastique de la tueuse à gage le stoppa net. Elle n'avait aucun droit de parler ainsi à son ami. A ses yeux, elle n'avait de toute façon plus aucun droit, mise à part celui de mourir. Et si possible sous ses yeux, voir même de sa propre main...
« Tu as bien évidemment le droit de rester Calum. »
Le coréen avait insisté sur le « bien évidemment » sans quitter des yeux une seule fois la demoiselle de son regard froid et colérique. Moïra leva un instant les yeux au ciel, repoussant ses larmes naissantes d'une grande inspiration. Elle croisa rageusement les bras sous sa poitrine et soutint le regard du coréen, qui se remit à sa tâche sans lui prêter plus d'attention.
« Très bien. Dans ce cas... J'ai une demande à te faire Kwaïgon. Je voudrais aller au Haras pour voir Izikel. » « Non. » « Je pense qu'il a le droit de savoir... » « Tu pense ? Tu pense qu'il a le droit de savoir que tu es en vie, c'est ça ? »
Le coréen eu un rire nerveux et posa l'arme qu'il tenait dans les mains devant lui.
« Il en est hors de question. » « Mais... Je suis en train de te dire que tu avais raison ! Je... » « J'AI DIS NON ! »
la surprise glaça Moïra et Calum d'un seul coup. L'américaine, le regard fuyant, chercha un instant ses mots avant de faire demi-tour et quitter la pièce à grands pas. Calum soupira et secoua négativement de la tête doucement, suspendant son geste pour regarder au dessus de l'épaule du coréen. Une voix familière retentit dans le dos de Kwaïgon.
« Ne sois pas trop dur avec elle. Nous avons tous commis des erreurs dont nous portons le poids chaque seconde de nos vies. » « Comme nous nous attachons sans cesse à de vaines illusions. » « Je sais... Mais ne la déteste pas. Elle se hait déjà bien assez elle même. Laisse là trouver le chemin de la rédemption. Et accueille la à bras ouverts lorsqu'elle aura fait amende honorable. » « Ce n'est pas si difficile que cela d'avouer ses tords. » « Nous ne sommes pas tous toi, Kwaïgon. »
La main de Nobu se posa amicalement sur l'épaule du coréen et il suivit Moïra, sans doute dans le but d'aller consoler la jeune femme. Il prenait une grande part dans sa guérison... Les deux amis échangèrent un regard et reprirent leur nettoyage en silence...
Banlieue d'Osaka - 10:23 pm } Le coréen fixait avec une grande attention l'écran de l'ordinateur qu'il avait devant lui. Son petit programme avait trouvé d'autres informations sur les frères Iakimov et il étudiait les différentes options qui se présentaient à lui. Elles étaient bien peu nombreuses, un peu trop même à son goût. L'emploi du temps des deux frères était toujours changeant, rendant les actions sur leurs routines impossibles. Autant Alexei que Serguei étaient entouré à toute heure du jour ou de la nuit par une horde de cinq à dix gardes du corps, selon les endroits dans lesquels ils se rendaient. Une troupe d'homme et de femmes sur-entrainée qui tournait sans arrêt pour que toutes les équipes restent fraîches et disponibles sans aucune interruption. Et depuis la petite sauterie d'Izikel et Moïra au printemps sur la famille des deux hommes, ils avaient doublé leurs effectifs de protection. Autant dire qu'il était absolument impossible de les atteindre d'une façon ou d'une autre. La tâche serait loin d'être simple... Et c'était de loin la plus dangereuse de ses missions, face aux deux hommes les plus dangereux de la terre... Ou presque...
/!\ Ce résumé comporte des scènes violentes qui ne sont pas forcément sous spoiler et ce, dès le début. Jeunes âmes, abstenez vous. Moins jeunes âmes sensibles : abstenez vous. Vous êtes cependant prévenus, si vous souhaitez lire, c'est à votre entière responsabilité.
Maison de Nobu - 03:14 pm } La vie est si fragile mais pourtant si tenace. Elle s'était toujours accrochée à lui, sans jamais lui faire défaut. Jusqu'à ce jour. Il avait toujours gardé espoir. C'est ce qui le maintenait en vie. Il se disait toujours qu'une cause n'était jamais perdu, qu'elle pouvait toujours être sauvée. Quoi qu'en disent les autres, quoi qu'ils en pensent, quoi qu'ils fassent, il n'abandonnait jamais. Sa ténacité était légendaire. Et elle le précédait, même là où il ne l'imaginait pas. Accompagnée de son nom, de ses capacités. Il ne se vantait pas de connaître les autres, se serait dévoiler ses secrets, mais tous n'avaient pas son silence. Tous n'avaient pas sa discrétion. En ce glacial matin de novembre, un petit garçon se présenta à la demeure de Nobu. Il ne savait pas où il était, il ne savait pas vraiment qui ils étaient, mais il avait un message à délivrer de leur part. De la part des frères Iakimov. Ce frêle enfant dont les joues sales étaient striées des sillons de ses larmes ne savait pas que sa vie était si fragile. Qu'elle ne tenait qu'à un doigt ; celui qui s'était posé sur la détente de l'arme qu'il avait contre la tempe. Il était trop jeune. Il n'imaginait pas ce qu'était la vie. Mais il connaissait la signification d'une chose : celle de la peur. La peur de la douleur, de la solitude. La menace était monnaie courante chez les frères ukrainiens, le sadisme aussi. Debout dans le grand salon de la maison, Kwaïgon attendait, impassible, bras croisés. A côté de lui se tenait Nobu, les bras dans le dos, se tenant les mains. Calum, une arme de poing à la main, tenait le garçon en joue, alors que Moïra était assise sur un pouf. Il y avait plusieurs gardes autour d'eux, tenant le garçonnet en joue, dont un qui le guidait, canon sur la tempe, main ferme sur l'épaule. Il ne portait qu'un pantalon et on lui avait vraisemblablement fait enlever ses chaussures à l'entrée de la maison. Il était sale et transi de froid. Mais il ne pleurait plus, ses joues étaient sèches. Il se tenait très droit, légèrement cambré. Une posture anormale. Le garde le fit s'arrêter à quelques mètres du maître de maison et le silence plana un moment au dessus d'eux. Le petit garçon, qui ne devait pas avoir plus de sept ans, les toisa un à un, mais son regard passait de Kwaïgon à Nobu sans savoir sur lequel se poser vraiment. Il ignorait qui était Jeong et qui était Tanaka. Le garde cependant brisa le silence le premier.
« Il a dit avoir un message à délivrer à Maître Jeong. »
La voix du garde trahissait un léger effroi. Ou un léger dégoût. Le coréen et le japonais échangèrent un regard et il ne suffit que d'un léger signe de tête de Tanaka pour que le garde ordonne au garçon de délivrer son message. Résigné, le garçonnet hocha de la tête et commença à lentement se retourner. Ce n'était pas un message oral qu'il devait délivré mais écrit, gravé à même la peau de son dos au fer rouge. Les gardes eurent un léger mouvement de recul commun. Calum fit une grimace et baissa le regard un instant. Moïra eu un haut le corps et eu à peine de temps de rejoindre la terrasse voisine pour rendre son déjeuner. Seuls Nobu et Kwaïgon n'eurent aucune réaction. Le message donnait rendez-vous au coréen. Seul, tard le soir, dans la banlieue de Tokyo. A nouveau, le maître et son ancien élève échangèrent un regard. Kwaïgon prit la petite seringue que lui tendait son maître et s'approcha du garçon. Il posa une main douce sur son épaule nue, pressant un ongle sur sa peau endolorie, alors que le garde s'éloignait et il lui demanda, en japonais, la langue natale du garçon :
« Tu as encore de la famille ? »
Les larmes recommencèrent à couler le long des joues du petit garçon et il secoua négativement de la tête. La peur par l'exemple. Jamais il ne pourrait se remettre de ce qu'il avait vécu. Il était d'ores et déjà perdu. Quoi qu'ils fassent pour lui, il était déjà mort. Il souffrait, il n'avait plus personne et il avait sans doute vu toute sa famille se faire torturer et tuer. Il n'y avait plus d'espoir pour lui. Ses épaules tremblaient sous l'assaut de ses sanglots silencieux. Le coréen serra les dents un instant avant de lui souffler, d'un ton calme et rassurant :
« Fermes les yeux. Imagines toi dans le plus merveilleux des endroits, avec toute ta famille et tout ceux que tu aime. Et surtout, ne pense à rien d'autre que cela... Tout ira bien maintenant. Tu n'as plus à avoir peur. »
D'un geste précis et rapide, il piqua l'aiguille là où son ongle avait pressé la peau du garçon. Il ne sentit pas la morsure de l'aiguille, la peau était préparée à la pression. Il injecta le contenu de l'aiguille et sorti la seringue, qu'il glissa dans sa poche d'un geste leste. Il suffit d'à peine quelques secondes pour que le garçonnet ne s'effondre sur lui-même, sans un bruit. Il le soutint et l'allongea doucement sur le sol, repliant délicatement ses bras sur sa maigre poitrine, murmurant une prière. Nobu le rejoignit et posa en douceur une pièce sur chacune des paupières clauses du garçon, répétant la prière murmurée par le coréen. La vie est si fragile... Il suffit d'un rien pour la perdre. Jusque là, l'espoir lui avait toujours étreint le corps, mais devant le bûcher funéraire du petit garçon, tout l'espoir qu'il y avait en lui s'envolait...
Okiya de Misako - 09:48 pm } Il avait fait un stop à Fuji pour admirer le mont du même nom dans la lumière déclinante du soir. C'est une vision dont il ne se lassait pas, quoi qu'il arrive. Il avait ensuite reprit la route pour faire les dernières heures de trajet qui le séparait de Tokyo. Il passerait la nuit chez une vieille amie : Misako. Misako était une Okâsan : elle tenait une maison de Geisha, encore en activité aujourd'hui. Les hommes autorisés à pénétrer dans les okiya étaient traditionnellement peu nombreux. Ceux qui pouvaient y passer une nuit encore plus. Cependant, Kwaïgon faisait parti de ceux qui pouvait passer une nuit dans l'okiya de Misako sans soulever aucune objection de la part de quiconque. D'une part parce qu'il était le plus généreux donateur de la maison, mais également parce qu'il était venu à de nombreuses reprises en aide des Geisha et Maiko de la maison, les sauvant de la disgrâce ou de la mort. Misako estimait qu'elles avaient contracté une dette envers lui et elle la lui remboursait au fil du temps, à sa manière. Lorsque le jeune homme était encore au Japon, au service de Tanaka, il passait souvent ses soirées dans diverses maisons de thé encore traditionnelles. Il y rencontrait les Geishas et apprenties de l'okiya de Misako, et à ce moment là, parfois encore Misako elle-même, lors de grands événements. Au fil des années, malgré le jeune âge du garçon à cette époque, il faisait preuve d'une maturité qui avait plu à Misako. Lorsqu'il l'avait pu, il avait commencé à soutenir financièrement son okiya. Auprès de l'Okâsan prédécesseur de Misako, puis de Misako elle-même. Une amitié s'était très vite tissée entre eux, teintée d'une relation plus maternelle à son égard. Il était orphelin et Misako était une des rares personnes de Tokyo à connaître toute son histoire. Si Tanaka était sa figure paternelle, Misako était la figure maternelle qu'il lui avait cruellement manqué durant le début de son adolescence.
Lorsqu'il se présenta à la porte de bois et de papier de l'okiya, la nuit était tombé depuis longtemps. Il fit sonné la clochette de l'entrée et peut de temps après, la voix d'une jeune fille retentit de l'autre côté de pan opaque.
« Qui est là ? »
C'était une voix d'enfant, de jeune fille. Sans doute une Maiko, ou plutôt, une future Maiko de la maison, étant donné que les jeunes filles n'avaient plus le droit de commencer leur formation avant l'âge de dix-huit ans dans les okiya de Tokyo. Le coréen émit un léger sourire et répondit clairement.
« Maître Jeong. Je suis attendu par Misako-san. » « Oh ! »
Aussitôt, le panneau coulissa et il se retrouva face à une jeune fille d'une douzaine d'années, emmitouflée dans une peignoir de coton. Elle s'inclina devant lui et l'invita à entrer d'un geste gracieux. Le coréen se déchaussa et entra, lui rendant son salut.
La jeune fille détala à petites foulées et disparu dans le dédale des pièces de la grande maison traditionnelle. Il entendit Misako la houspiller dans les étages et quelques secondes plus tard, l'Okâsan le rejoignait. Elle le salua en s'inclinant, ce à quoi il répondit par la même chose puis l'invita à le suivre dans l'une des salles communes. Plusieurs femmes, plus ou moins jeunes, étaient rassemblées autour d'un kotatsu et discutaient joyeusement en jouant aux cartes. Dès qu'il pénétra dans la pièce, le silence se fit. Il y avait parmi ces femmes des visages qu'il connaissait et d'autres encore inconnus. Une bonne chose pour la maison, elle avait encore de nouvelles Maiko à former, ce qui n'était pas chose facile de nos jours. Les présentations et les salutations passées, Misako entraîna le jeune homme dans une pièce attenante, plus petite, pour qu'ils soient plus tranquille. Une fois installé, elle se mit à la préparation du thé, chose dans laquelle elle excellait.
« Alors comme ça tu es de retour à Tokyo ? »
Elle tenta de garder un regard innocent, mais au fond, elle savait. Tanaka avait dû la mettre au courant. Avant qu'il ne prenne la route pour Tokyo, il avait tout essayer pour le persuadé de rester à Osaka. De ne pas aller à ce rendez-vous. En vain, puisqu'il était désormais à Tokyo.
« Je ne changerais pas d'avis Misako-san. Inutile d'essayer de me convaincre. »
Elle lui lança un regard réprobateur. Il avait touché juste, comme toujours avec elle. Elle n'avait jamais su lui cacher la moindre petite chose, malgré tout ses efforts.
« Alors tu cours à ta mort. » « Peut-être oui. » « Ne t'attends pas à ce que cette idée me plaise. » « Ce n'est pas ce que je demande. »
Elle soupira et déposa avec délicatesse sa théière sur son support plongeant un regard dur dans le sien.
« Tu te bats encore pour les autres. Quand te battra tu pour toi même ? » « Je croyais que cette fois, c'était pour ma propre survie. Je suis étonné de savoir que ce n'est pas le cas. » « Tu te bats pour cette femme que tu déteste. Pourquoi prends-tu sa place si elle ne le mérite pas ? » « Parce que la vie de bien d'autres gens, dont la tienne, en dépend et que je ne supporterais pas de vous mettre tous plus longtemps en danger. Que se soit à cause d'elle au départ ou non. »
Son ton avait été sec et dur. Misako lui lança d'ailleurs un regard mauvais pour cela. Jamais il n'avait usé d'un tel ton avec elle. Il se passa un moment durant lequel ils gardèrent le silence, sirotant leurs thés respectifs. Ils pouvaient entendre les habitantes de la maison glousser dans la pièce voisine, jouant toujours aux cartes. Finalement, le coréen soupira et reposa son thé avant de prendre la parole d'un ton plus léger.
« Je viens également pour te demander un service, et je comprendrais que tu le refuse. Je n'insisterais d'ailleurs pas, si c'est le cas. » « Je crois deviner ce que tu attends de moi... » « Je le pense aussi... » « Tu veux que je prenne cette femme sous mon toit. » « Seulement de façon temporaire. Maître Tanaka a bien d'autres choses à faire que garder un œil sur elle. Je ne voudrais pas le déranger avec cela. Et j'ai peur que si elle ne reste pas sous surveillance étroite, elle ne s'échappe et commette d'autres erreurs. » « Tanaka-sensei m'a raconté un peu son histoire. Elle te cause bien des tracas... » « Plus qu'il ne m'en faut en effet. »
Misako mit quelques minutes avant de répondre, pesant une dernière fois le pour et le contre d'un tel service. Finalement elle soupira et répondit, non sans une certaine pointe de menace.
« Très bien. Je la prendrais avec moi. Mais je le fais pour toi et uniquement pour toi. Nous sommes bien clairs ? » « Nous le sommes. Merci Misako-san. »
Il inclina légèrement de la tête et leur conversation se fit plus légère. Misako lui raconta le quotidien de son okiya, ainsi que les progrès de ses Maikos. L'une de ses Geisha avait prit sa retraite pour se marier avec son danna, un riche homme d'affaire jusque là célibataire. Mais une de ses Maikos était passée confirmée, elle avait donc toujours le même nombre de Geisha et de Maiko. Mais elle ne s'était pas encore décidé sur laquelle de ces jeunes femmes elle allait adopté pour en faire son héritière... Un récit qui permit au coréen de s'échapper un peu de son propre quotidien, bien plus sombre que le sien...
Banlieue de Tokyo - 03:17 am } Il avait quitté l'okiya au tout petit matin, alors que toutes les femmes étaient encore endormies, afin de se rendre au point de rendez-vous sans que personne ne le voit. Il y été aller armer, mais sans espoir qu'il ne puisse garder aucune de ses armes. L'impasse dans laquelle il s'engagea à pied n'était pas très large. Elle était fermée par un haut mur de brique et bordé d'un côté par une usine désaffectée et de l'autre par un immeuble d'habitation délabré. Un coin éloigné du centre ville, proche de l'abandon. Le lieu parfait pour commettre un meurtre et y laisser le corps, sans laisser aucune trace. Le coréen s'arrêta au coin de la rue pour observer le fond de l'impasse et les bâtiments, allumant une cigarette pour passer le temps. Il fumait très rarement, mais cette occasion-ci était la bonne. Il n'y avait pas un mouvement ni un bruit dans l'impasse ni alentour. Il patienta une longue heure au coin de la ruelle étroite avant de s'engager de quelques pas à l'intérieur. A peine eut-il fait cela qu'un léger frottement lui parvint, dans l'usine. Il fit mine de n'avoir rien entendu et poursuivie sa marche, ressortant de l'allée, comme s'il faisait les cent pas. Il refit son petit manège plusieurs fois, pour être certain de ce qu'il pensait. Hors de l'impasse, il était hors de portée de tir. Le tireur devait donc se trouver dans l'angle au dessus de lui. Une position idéale qui permettait au tireur de ne pas être vu depuis la grand rue ni l'angle et de pouvoir tirer sur sa cible dans le dos quand celle-ci avancerait dans l'allée, sans être vue par elle. Il était sans doute équipé d'un silencieux, et à une aussi courte portée, une fusil peu encombrant, facile et rapide à cacher pour s'échapper en vitesse. Mais c'était sans compter sur l'expérience du coréen. Il n'était pas né de la dernière pluie, et les frères Iakimov aurait dû le savoir. Il jeta sa cigarette et abandonna ses chaussures et sa veste avant de faire le tour de bâtiment en toute discrétion. Il fallait qu'il soit rapide et silencieux. C'est ce qu'il fit. Moins de cinq minutes après il était de retour en bas du bâtiment et enfilait de nouveau ses chaussures et sa veste. Il dû patienter une bonne heure avant qu'une voiture ne passe devant lui en repérage. Il lui fit un signe amical et quelques minutes plus tard, elle se garait devant lui après avoir fait un tour de quartier. Deux armoires à glace s'extirpèrent de l'habitacle et sans un mot, le prière de monter. Il le fit, non sans avoir terminé la cigarette qu'il avait rallumé...
Repère des Iakimov - 08:06 am } « Je crois que tu ne saisis pas bien les choses Jeong. »
Il s'était fait surprendre. Ou plutôt, il s'était fait submergé. Après un long trajet en voiture qu'il avait passer avec un sac sur la tête, on l'avait débarqué dans un sous-sol et une quinzaine d'hommes lui était tombé dessus. Il s'était battu, mais il avait été submergé par le nombre. Une balle dans le flanc l'avait assez ralenti pour se faire assommer par une barre de fer. Il s'était effondré. Le réveil avait été rude, au seau d'eau froide. Un mal de crâne lancinait, une plaie qui saignait à petit feu et les mains attachées dans le dos l'avaient accueilli à son réveil. Il était toujours dans un sous-sol, à en juger par l'humidité sur les murs et l'absence de fenêtre, ainsi que la taille de la pièce, relativement modeste. Les deux frères Iakimov étaient là, ainsi que deux hommes d'armes. Parfait. Tout simplement parfait.
« Je croyais pourtant qu'on avait été assez clairs dans nos intentions. »
Le coréen ne répondit pas. Il ignora même les paroles emplie de colère d'Alexei. Il poursuivait son étude de la pièce et de son état. Il était blessé, affaibli, mais il n'avait rien de cassé. Peut-être seulement une côte fêlée. Il portait des menottes en métal qu'il était facile d'enlever, à condition que l'on sache comment. Un liquide avait coulé le long de son bras mais avait plus ou moins séché : une plaie qui avait cessé de saigner. Il y voyait clair, et pouvait bouger toutes ses extrémités. La pièce ne comportait qu'une seule porte, au fond, en métal oxydé. Elle était gardée par deux hommes armé d'AK-47. Il n'y avait rien, à part lui et les frères Iakimov, rien d'autre dans cette salle. Pas de meubles, pas d'objets. Seulement sa chaise. Par contre, Alexei avait dans la main un Beretta, et Serguei une batte de base-ball. Lui n'était plus qu'en t-shirt, jean et chaussettes. Le reste s'était évaporé.
« Tu parle dans le vide Alexei. Il ne t'écoute pas. »
La réaction de l'ukrainien ne se fit pas attendre. Une violente secousse sur sa tempe le projeta au sol, lui et sa chaise. La douleur se fit plus vive et il vit quelques étoiles danser devant ses yeux. Serguei le releva d'une poigne de fer et le remit à sa place initiale.
« T'écoute maintenant ? »
Il hocha simplement faiblement de la tête, ce qui parut satisfaire Alexei.
« Je voulais que tu me livre cette pétasse. Pourquoi tu ne l'as pas fait ? On l'aurai tué, et tu serais rester sagement dans ton petit monde japonais avec tes petites geisha. Et tu ne serais pas là à souffrir le martyr à sa place. »
CQFD. Kwaïgon en venait presque à douter de sa décision. En effet, il se serait évité bien des tracas s'il avait livré Moïra... Mais il s'était prit d'affection pour elle avant qu'elle ne l'oblige à mentir et c'était en souvenir de cette allégeance là qu'il se battait pour elle. Alexei se tourna vers son frère, comme soudain prit d'un doute.
« Tu crois qu'il l'aime ? » « Je pense pas non. »
Alexei s'était alors de nouveau tourné vers le coréen.
« Mais si toi aussi tu ne peux pas la voir, pourquoi tu ne la livre pas ? »
Le coréen fut prit d'un rire nerveux. C'était une excellente question. Cependant, il lui fallait gagner du temps. Il cessa de rire à la seconde frappe sur la même tempe. Cette fois, sa chaise vacilla mais ne tomba pas. Alexei poursuivait ses spéculations et Serguei commença à se déplacer. Il profita de ce déplacement pour se déboîter un pouce et enlever une menotte, la gauche, sa main la plus faible. Il remit le pouce en place, ignorant la nouvelle douleur, et attendit le moment propice. Il avait deux choix : cela se passerait vite et il vivrait. Ou il se loupait et il mourrait. Simple. Il fallait qu'il amène Alexei à le frapper de nouveau, c'était sa meilleure chance.
« Tu ne veux pas lui délié la langue un peu ? On ne l'entend pas assez je trouve. » « Je veux pas me salir les mains. »
A la bonne heure ! Alexei s'approcha et arma son bras. Il n'aurait même pas besoin de le provoquer. Il attendit que le bras de l'ukrainien ne soit plus qu'à quelques centimètres de sa tempe pour réagir. Il frappait avec le dos de la main qui tenait le Beretta, pour avoir plus d'effet. Le coréen leva son propre bras pour enserrer le poignet qui allait frappait et retint le tout, Il entendit les hommes d'armes braquer leurs pistolets sur lui mais il gardait Alexei en bouclier. D'un cou sec il se releva et brisa le coude de l'ukrainien avec son autre main, d'une torsion sèche. Cette fracture eu pour effet de libérer la tension de la main sur le Beretta. Il lâcha le poignet et retourna l'arme, pressant la détente une première fois. La balle traversa littéralement la tête de l'ukrainien. Serguei poussa un hurlement et chargea, batte en l'air. Le coréen garda non sans mal Alexei debout et logea une seconde balle dans le crâne de son frère. Il lâcha Alexei et se glissa derrière le corps en chute de Serguei pour se protéger des tirs nourri des deux hommes d'armes. Ils ne visaient pas si mal que cela. Il tira une troisième balle qui toucha le premier garde dans l’œil et fit stopper les tirs du second. Ils se tinrent mutuellement en joue alors que le coréen ouvrait la bouche rapidement.
« Tes patrons sont morts. Soit tu suis leur chemin, soit tu me fais sortir d'ici. »
Il hésita une seconde de trop, qui permit au coréen de l'abattre. Maintenant, il fallait qu'il sorte, mais avant, il fallait qu'il s'équipe. Il prit un gilet par balle sur le corps d'un des gardes, ses chaussures et s'arma autant qu'il put, avant de sortir. Il avançait avec précaution essayant d'abattre le plus d'homme possible de façon discrète. C'était sa meilleure chance de s'en sortir. Il ne survivrait pas au sur-nombre. Il avait cependant progressé de deux étages quand les premiers coups de feu retentirent, au dessus de sa tête. Calum. Ce fut ensuite le chaos. Lui à l'arrière et les hommes de Calum et lui même de front, il ne resta rien des hommes des Iakimov. Calum prit quand même la précaution de sceller et faire brûler le bâtiment entier. Il se tenait devant le brasier, les mains dans les poches de son jean, à côté de Calum quand ce dernier hocha doucement de la tête de satisfaction.
« Simple précaution. »
Le coréen sourit et attrapa l'épaule de son ami pour s'en faire un appui avant de se diriger en clopinant vers la jeep de ce dernier...
Il déposa Moïra chez Misako quelques jours après être revenu du repère réduit en cendre des frères Iakimov. La tueuse à gage semblait plus sereine, ou disons, soulagée suite à la mort des frères Iakimov, mais elle supportait toujours le poids de ses choix et Kwaïgon ne ferait rien pour les lui enlever. Pour l'instant, il ne fléchirait pas et lui interdirait toujours de venir au Haras ou de prendre contact avec Izikel, de quelque façon que se soit. Il ne savait pas dans quel état émotionnel il allait retrouver le jeune homme et il ne voulait pas risquer de briser cet état, quel qu'il soit. La trahison que constituait son acte le briserait et il ne le voulait pas. Plus tard, avec le temps, quand il se serait reconstruit, il comprendrait. Mais ce jour n'était pas encore arrivé et il ne le serait pas avant un bon moment. Pour l'instant, il comptait profiter de la relative paix dans laquelle il allait se trouver en rentrant au Haras. Il n'y aurait personne à leur trousses et il n'y aurait plus de secret à garder pour personne, hormis celui-là. Mais il était le seul à connaître la vérité. Personne ne risquait de la divulguer.
Moïra se remettait bien de ses blessures physiques. Elle continuerait cependant les soins chez Misako. En attendant, elle ne comptait pas désobéir au coréen quand à son « exil ». Elle ne comptait pas non plus reprendre son travail. Ou tout du moins, pas avant un long moment. Elle n'était pas en état physiquement et encore moins moralement. Elle aussi devait se reconstruire en quelque sorte. Elle devait réfléchir à tout ce qui s'était passer et prendre du recul. Malgré tout, elle essayait de se faire pardonner auprès du coréen, mais il lui tenait encore trop rigueur de ce qu'elle lui avait fait faire. Il n'était pas de nature rancunière, tant qu'on ne lui faisait pas outrepasser ses principes et aller à l'encontre de ce qu'il était, de ses convictions, de ses règles. Ce qu'elle avait fait.
Quand à lui, il devait rentrer au Haras. Il avait prévenu Liam de son état, de sa vendetta. Il avait prit Naïg à parti, expliquant qu'elle avait fui pour venger sa sœur. Il était tout naturellement parti à sa poursuite, et comme sa grande sœur avait entraînée Izikel, il se laissait entraîner dans cette dangereuse vendetta. La jeune femme en question avait également été mise dans la confidence, mais elle restait aux côtés de Pierce, en Amérique du sud. Par sécurité, elle avait été mise au courant des impers de sa sœur, du mensonge qu'ils devaient maintenir à l'égard d'Izikel. Elle avait accepté de rester dans la confidence, en voulant à sa sœur pour ce qu'il lui faisait subir. Le coréen pensait -à raison- qu'elle en pinçait pour l'irlandais. Ce qui ne l'étonnait guère... Les deux sœurs avaient les même goûts en matière d'homme.
Il fit une halte dans son appartement de Tokyo, histoire de le faire vivre un peu et soigner ses plus grosses blessures. Il ne cicatriserait pas totalement avant son retour au Haras mais il serait au moins un peu plus présentable. Il passa également dire au revoir à Misako et il reprit la route pour rejoindre le demeure principale de Nobu. Une dernière soirée en sa compagnie avant de rentrer au Haras. Bien évidemment, ils se retrouvaient autour d'un bon repas.
Nobu était plus que ravi de la disparition des frères Iakimov. Il allait pouvoir récupérer leur trafic et peut-être même une partie de ses hommes, ce qui n'était pas sans lui déplaire. La nouvelle de la mort des deux frères avait eu tôt fait de faire le tour de leur monde et ils avaient reçu beaucoup de remerciements déguisés pour cet acte apparenté à de la bravoure. Pour lui, ça n'en était pas, mais ce n'est pas ce que les autres semblaient croire. Calum Heredit les rejoint pour le dîner. Avec le semi-sauvetage de Kwaïgon, il montait encore en galon au sein de la hiérarchie Tanakienne, et il avait désormais gagné une place à la table du Maître. Un privilège appartenant à des hommes pouvant se compter sur les doigts d'une seule main. Ils rirent. Ils rirent du temps d'avant, ils rirent de leurs actes, ils rirent d'eux même. Ils rirent pour oublier qu'ils n'étaient pas loin d'être des monstres. Et que même si leurs intentions étaient louables, qu'elles étaient les meilleures, il n'en restait pas moins qu'ils ôtaient des vies... Et cela faisait d'eux des monstres, d'une certaine manière.
Sur le vol de retour au Haras, le coréen eut tout loisir de penser à cette semaine plus que mouvementée. Il avait jusque là espéré que ce genre de choses ne se reproduirait plus en intégrant le Haras. Qu'à Full Horse, il aurait une vie bien rangée, plus humble, plus tranquille. Mais il se rendait compte maintenant que se serait impossible. On ne pouvait pas changer ce que l'on était au fond. On ne pouvait effacer d'un simple geste notre passé. C'est ce qu'il avait essayer de faire, mais le passé vous rattrape toujours que se soit le sien ou celui des autres. Alejandro n'avait pas quitté son métier sans dommage et un jour cela le rattraperait. Izikel avait traquer des personnages et rencontrer des gens douteux puis les avait quitter, mais cela le rattraperait. Sans parler de Moïra, qui avait encore après elle la moitié de ce monde... Et Ezra, dont les ennemis étaient légions... Un jour aussi, son passé viendrait physiquement le hanter... Pour certains, c'était déjà fait, comme Louna. Mais pour d'autres, tout était à venir... Tout attendait de se passer... Mais il serait là. Il serait toujours là...
Sauf qu'il omettait une chose essentielle : même lui n'était pas immortel...
Nous avons 780 Lignes J'utilise un Résumé x2 de Louna Un grand merci à Yennefer avec qui il faut partager les points ! ^^ Merci pour la correction ! =)
Son regard se perdait dans l'obscurité de la chambre, silencieuse. Elle observait un instant les contours des meubles, de ses affaires qui occupaient la petite pièce. Elle s'était installée chez Jeffrey, transformant son bureau en seconde chambre. Elle était beaucoup moins spacieuse qu'une véritable chambre, mais beaucoup plus tranquille que sa chambre attitrée par l'administration de l'académie. Yennefer poussa un profond soupir en se tournant presque rageusement dans son lit, posant ainsi son regard sur son réveil. Le sommeil ne viendrait pas cette nuit.
Elle s'était glissée à l'extérieur de la chambre, attrapant un peu au hasard ses vêtements ainsi que son manteau à l'aveuglette. Vu l'heure, elle risquait de croiser personne dans les couloirs ni dans les salles communes du Pavillon Nord.
« BORDEL SA PUTE ! J'aurais dû embarquer ma couette... C'est quoi ce pays de merde, où tu te gèles le cul ! » S'exclama-t-elle avec spontanéité à peine dehors.
Elle courut littéralement vers le pavillon, continuant à cracher ses mots pour maudire les températures hivernales de la nuit. Il fallait dire qu'elle avait oublié de prendre un pull, que malgré son manteau son T-shirt était fortement léger sur sa peau. Le soulagement se dessina sur les traits de son visage quand elle entra dans le bâtiment, accueillant avec joie la chaleur de celui-ci. Yennefer se dirigea vers la cuisine, lieu où elle allait rarement seule. Elle chercha un instant l'interrupteur de la pièce avant de se jeter sur les placards.
« Espérons qu'il y a de quoi cuisiner... que je ne sois pas sortie pour rien, cela me ferait bien chier en plus de ne pas dormir. »
Un sourire ne tarda pas à s'installer sur ses lippes, elle allait pouvoir préparer son plat, la spécialité polonaise de sa mère. Ce n'était pas de la gourmandise, mais ce plat était l'unique remède qu'elle possédait à ce jour pour calmer ses tourments, pour faire taire ses pensées. Et ce soir, elle avait besoin de ça. Ainsi, elle entreprit de sortir les ustensiles dont elle avait besoin, ainsi que les ingrédients. Naturellement, se pensant seule dans le bâtiment, elle se mit à chantonner des comptines de son enfance, se replongeant dans ses vieux souvenirs. Le coréen regarda sa montre avec une certaine absence dans le regard. Il aperçu l'heure qu'elle affichait sans la voir mais ne replongea pas pour autant son regard sur elle. Il soupira, répondant au mail de Calum en essayant de ne pas s'énerver. Le garçon ne le verrait pas à travers ses lignes mais il ne voulait pas paraître trop dur dans le choix de ses mots. La page Iakimov était tournée, mais ce n'était pas pour autant que ses tourments avaient disparus eux aussi. Ils étaient en sourdine, pour un temps. Un jour, les problèmes reviendraient. Mais ce jour n'était pas encore arrivé. Quand il termina de taper sa réponse, il posa de nouveau les yeux sur l'horloge de son ordinateur : presque une heure du matin. Qu'allait-il faire ? Se coucher ? Non... Jamais aussi tôt. Mais à cette heure-ci, le Haras entier devait l'être. Ou alors, ceux qui n'étaient pas coucher étaient en ville et donc, pas ici. Il pouvait rejoindre la salle de sport du sous-sol du Manoir en toute tranquillité. Il troqua donc son jean contre un pantalon ample noir et passa un sweat par dessus son t-shirt noir. Une paire de chaussette et il enfila prestement ses baskets avant de fourrer dans la poche de son sweat le minimum vital : ses clés et son téléphone. Il n'avait besoin de rien d'autre. Il sortit ensuite, prenant la direction du Manoir d'un pas vif.
Prague était presque sous la neige. L'air glacial de la nuit sentait la neige, même si elle n'était pas encore tombée. Se serait pour peu de temps. Quelques jours sans doute... A la prochaine tempête. Une perspective qui ne l'enchantait guère : sa corvette n'aimerait pas la neige, il le savait. Et bien qu'il sache parfaitement conduire sur la neige et le verglas, il préférait s'abstenir au possible. Cette constatation lui arracha un soupir et lui fit presser le pas. Il n'avait pas envie de rester dans ce froid glacial plus longtemps. En entrant dans le hall cependant, il fut surprit de voir de la lumière émaner de la cuisine. Il fronça un instant les sourcils et écouta. Un chantonnement accompagnait des bruits de cuisine. Qui pouvait bien s'activer à une pareille heure de la nuit ? A part lui, peu de cavaliers au Haras se montrait insomniaques. Il s'avança donc à pas de loup jusqu'à l'embrasure de la porte ouverte et s'arrêta sur le seuil, jetant un oeil discret. Un fin sourire se plaqua sur ses lèvres quand il la reconnu et il glissa les mains dans la poche centrale de son sweat en silence. Il resta ainsi, sans bouger, durant un long moment, observant la jeune femme sans rien dire. Elle avait quelque chose d’intrigant. Quelque chose qui l'attirait sans qu'il ne sache vraiment ce que c'était. Il n'avait pas l'habitude de ce genre d'attirance pour quelqu'un. Il faisait rarement confiance aux gens. Mais elle avait su gagner sans trop le savoir sa confiance, ou du moins une bonne partie. Elle était assez franche pour lui dire les choses, ne pas les lui cacher, et c'est sans doute une part de ce qui faisait qu'il sentait qu'il pouvait compter sur elle... Dans une certaine mesure bien sûr. On ne perd pas ses habitudes aussi facilement... Surtout lui...
« Oignon... Oignon... Comme s'il n'allait pas assez me faire chialer en le coupant, je vais mettre dix minutes à en trouver un... »
Elle claqua légèrement la porte d'un placard avant d'ouvrir le suivant, où elle en trouva un finalement derrière le sac à pomme de terre. Elle marmonna vaguement quelque chose en polonais dont la sonorité ne pouvait signifier que son contentement de l'avoir trouver. Elle le posa sur le plan de travail, pour s'armer ensuite d'un couteau. Ses gestes n'avaient rien d'expert dans les mouvements, elle découpait de manière assez grossière l'oignon. Cependant, son regard était concentré à sa tâche, elle mettait du cœur à l'ouvrage. Yennefer renifla bruyamment en tentant de retenir ses larmes, des injures ne tardèrent pas à se manifester pendant qu'elle s'activait pour terminer rapidement.
« Tâche ingrate faite ! La suite... »
Elle reprit sa mélodie en mettant de l'huile dans une poêle avant d'y jeter l'oignon ciselé pour le faire suer. Le crépitement ne tarda pas à chantonner à son tour, dans son élan elle continua à s'activer dans la préparation de la farce. Le sourire ne quittait pas le visage du coréen, franchement amusé par le comportement de la jeune femme. Elle se pensait seule. Pas l'ombre d'un instant elle n'avait sentit sa présence. Cependant, il resta concentré, immobile, dans l'attente. Il ne savait pas s'il devait intervenir ou pas. S'il intervenait, il brisait ce petit spectacle, jusqu'à ce qu'elle le repère. S'il brisait sa bulle, il perdait également la possibilité de s'éclipser aussi silencieusement qu'il était arrivé. S'il partait maintenant, jamais elle ne saurait qu'il l'avait observé ainsi... Sauf s'il le lui avouait. Mais d'un autre côté, il ne pouvait s'empêcher de rester planter là. Spectateur silencieux d'un morceau de sa vie. Sans le regard des autres, les gens se comportaient différemment. La plupart en tout cas. Il ne faisait pas parti de ceux là. Il faisait toujours comme si un regard se posait sans cesse sur lui. Mais Yennefer n'en faisait manifestement pas parti. Bien qu'elle ne semble pas différente de tout les jours, il y avait quelques petits changements. Elle était toujours aussi franche, mais elle laissait aller ses colères, ses frustrations et ses doutes. Cela se voyait dans ses gestes, dans sa concentration. Venait-elle cuisiner pour occuper son esprit ? S'occuper les mains pour se vider la tête était courant. Certains faisait du ménage, d'autres du sport, d'autres encore cuisinaient, ou dessinaient sur une toile... Faisait-elle parti de ces gens là ? Qu'est-ce qui pouvait bien l'empêcher de dormir au point qu'elle vienne s'occuper les mains en plein milieu de la nuit ? Autant de questions qui resteraient sans réponses tant que le coréen ne les poserait pas. Et quand bien même, il n'était pas certain d'en connaître un jour le fond... Il avait beau savoir beaucoup de choses, il n'en était pas pour autant un Dieu ou un devin. Encore moins un télépathe. Malgré tout, pendant qu'il se posait toute ces questions et spéculait sur la demoiselle, elle poursuivait sa préparation et il restait immobile, dans l'encadrement sombre de la porte, à attendre, avec patience, grappillant, seconde après seconde, des informations, toujours un fin sourire sur les lèvres et le regard amusé. Jamais il n'avait été aussi expressif... Jamais il ne l'était plus qu'en sa compagnie...
Yennefer versa le contenu de la poêle dans un récipient qu'elle déposa sur le côté, avant de la jeter dans l'évier. Puis elle se dirigea vers le frigo, en ressortant deux œufs quand soudainement elle se figea nette. Une ombre, difficilement distincte dans l'encadrement de la porte, cela ne pouvait pas être le reflet de la lumière. Sa réaction fut immédiate, malgré le ton vibrant de sa voix.
« Sors rapidement de là ou je te balance un œuf dans la gueule ! Je te préviens je sais très bien visée ! »
Peut-être était-elle entrain de se faire des films toute seule. Peut-être qu'il y avait personne derrière cette porte. Dans le pire des cas, elle était entrain de parler toute seule et elle risquerait seulement de balancer un œuf sur le mur. Car aucun doute qu'elle allait balancer l'un de ses œufs dans pas longtemps. Le coréen retint un rire et s'avança d'un pas léger, laissant un filet de lumière tomber sur ses épaules. Elle avait mit un certain temps, mais elle avait finalement repéré sa présence. Il ne s'était pas caché à vrai dire. Il était simplement resté dans l'ombre. Elle poussa un soupir de soulagement quand elle le vit apparaître à la lumière, ne cherchant même pas à masquer sa réaction. De toute façon, la légère panique quand elle avait vu l'ombre s'était inscrite sur les traits de son visage. Elle n'allait pas nier qu'elle a eu peur sur le moment, même si elle n'avait pas hurlé comme la plupart des gens.
« Ne gâche pas tes œufs pour moi. Se serait dommage. » « Bordel... J'ai vraiment manqué de te le balancer cet œuf... »
Il lui adressa un fin sourire et attendit quelques secondes de jauger sa réaction. En d'autres termes, allait-il être congédié ? Ou invité à rester... Elle les déposa sur la table, avant de se tourner pour récupérer un saladier.
« Il y a vraiment que toi pour te fondre ainsi dans l'ombre. Marmonna-t-elle avec un sourire. » « Je n'en doute pas un instant. »
Il répondit à son sourire et s'avança plus avant dans la cuisine. Il attrapa un tabouret haut et s'assit à califourchon dessus, pour pouvoir faire reposer ses bras sur le dossier de ce dernier. Elle ouvrit un paquet de farine qu'elle versa dans le récipient, jaugeant vaguement son contenu avant de reposer son attention sur Kwai. Elle prit le temps de l'observer, notamment sa tenue qui l'avait agréablement surprise au début. L'avait-elle vue une seule fois vêtue ainsi ? Elle s'était doutée qu'il devait pratiquer un sport au vu de sa carrure, mais elle s'était souvent posé la question. Quand le faisait-il ?
« Tu fais ton sport la nuit habituellement ? » « Cela dépend des nuits... Mais oui. Plus habituellement un peu plus tard, entre trois et quatre heures. » « Mais... tu dors quand ! jura-t-elle d'étonnement. Je suis entourée d'oiseau des nuits... »
Il sourit mais ne répondit rien. Cependant, il n'allait pas lui mentir. Il passait la plupart de ses journées en jean ou en culotte de cheval. Il était rarement en public en tenu de sport et encore moins en costume. Et il dormait peu. Travailler son corps la nuit entretenait aussi la légende... Le mythe... Le mystère qui l'entourait. Et c'était ce qui faisait non seulement sa renommé mais aussi une part de sa protection, alors il n'allait pas changer ce fait. Quelques uns le connaissaient vraiment et Yennefer était en train d'en faire parti, jour après jour. Jusqu'à quel point ? Il ne le savait pas encore. Elle avait eu la décence de ne poser aucune question, de n'émettre aucun jugement quand à son sale état de leur première rencontre alors il la laissait entrer peu à peu dans son monde, pousser par la curiosité ; où cela allait-il le mener ? Pas à sa perte... Ou tout du moins, il l'espérait...
« Et toi, tu cuisine toujours aux alentours de minuit ? »
Un sourire en coin, moqueur, se dessina sur ses lèvres, rapidement, avant de laisser place à sa neutralité habituelle. Des filets d'expressions qu'il s'autorisait, en sa présence seule, en de rares occasions... Elle éclata de rire avant de lui répondre tout en cassant les œufs qu'elle verra dans le saladier.
« Non, moi j'aime dormir et faire ma putain de marmotte dans mon lit généralement. Dit-elle amusée. »
Il pouvait lui arriver de traîner dans son lit lors des matinées où son planning lui permettait de le faire. Ce n'était pas vraiment de la paresse, vu qu'elle ronchonnait rarement pour se lever, du moins de manière sérieuse et sincère. Car, il lui arrivait régulièrement et depuis sa jeunesse de faire chier son entourage avec ça. Elle n'avait pas honte d'aimer glandouiller dans son lit, ni même de faire partir des gens qui dorment un bon quota d'heure chaque nuit. Le coréen écoutait en silence, attentif à ses gestes et à ses paroles, entrant dans cette bulle de lumière au cœur de la nuit avec tout le naturel dont il était capable.
« Tiens, tu veux bien me couper le beurre en morceau ? »
Elle lui glissa une plaquette de beurre ainsi qu'un couteau avant d'aller récupérer un verre d'eau. Il acquiesça et se mit à l'ouvrage en silence, concentré plus sur ses paroles que sur sa tâche. Mais en un rien de temps, il avait débité le beurre en petites cubes réguliers. Une fois sa tâche accomplie, il reposa le couteau à côté du beurre et repoussa tout doucement la plaquette vers elle.
« Morphée n'avait pas envie de m'amener avec lui au pays des rêves cette nuit... C'était soit cuisiner, soit proposer un jeu de cartes à Jeffrey... Mais je pense qu'il m'aurait assommé direct si je l'avais réveillé... »
Il l'aurait surtout assommer de questions, et certaines périodes de sa vie elle ne pouvait pas les lui dévoiler. Pas qu'il ne pouvait pas les entendre ou les comprendre, mais parce qu'elle n'avait pas envie qu'il sache à quel point sa jeunesse n'a pas été facile. Il n'était pas naïf, il savait des choses de par sa mère, et elle souhaitait que cela en reste-là.
« A esprit préoccupé l'on trouve quelque chose à faire... »
Il avait murmuré cette phrase, mais assez fort pour que la jeune femme l'entende. Il fixa son regard sur son visage, tentant d'y lire ses secrets, en vain. Comme presque toujours. Elle lui répondit d'un sourire qui en disait long sur ses pensées. Elle n'avait pas besoin de détailler pour le moment, il avait compris l'essentiel.
« Et qu'as-tu décidé de cuisiner pour oublier tes tourments ? » « Quelque chose que tu as probablement jamais mangé... Dit-elle avec un regard amusé avant de poursuivre. Des Pierogi ! »
Une pointe de curiosité dans le regard. Pas de sourire, pas d'amusement. Il restait impassible, comme il l'était toujours, comme elle ne le connaissait que peu. Avec elle, il avait dès le début était bien plus expressif qu'avec les autres. Une dureté qu'elle ne lui connaissait pas encore. Mais une facette de sa personnalité qu'elle devrait bien apprivoisé un jour... Si elle le voulait. Elle ne semblait pas perturbée par son manque d'expression soudainement, gardant elle-même un sourire aux lèvres en commençant son explication.
« C'est un plat typique Polonais, c'est en fait l'unique plat que ma mère a su m'apprendre à cuisiner. Le reste, il faut généralement avoir la dalle pour les manger dans sa totalité. »
Yennefer n'avait jamais eu la patience pour la cuisine, ce n'était pas quelque chose qui l'intéresse réellement. Elle aime bien mangé, n'est pas très difficile à contenter, mais elle a tendance à laisser la lourde tâche de la réalisation des plats à quelqu'un d'autre. Limite, elle peut donner un coup de main, mais sans être la chef des fourneaux. Le coréen sourit et la laisse poursuivre ses explications, attentif.
« C'est une sorte de ravioli à la viande ou à la purée de pommes de terre... En fait, ma mère a tendance à les mettre à toutes les sauces. »
Elle commençait à mélanger la farine après avoir versé les derniers ingrédients dans le saladier. Son regard avait tendance à se poser vers Kwaï', faisant machinalement les gestes pour pétrir la pâte qui se formait doucement entre ses doigts. Le jeune homme la laisse faire un moment avant de hausser doucement des épaules.
« En fait, c'est comme des gyosa mais avec une pâte à base de blé au lieu d'une pâte à riz. » « J'en ai jamais mangé donc je ne pourrais pas te dire. Il faudra que je goûte à l'occasion. »
Il pose sur elle un regard attentif mais sans pour autant y faire passer une émotion. Cependant, la regarder faire ainsi commence à lui donner faim. Il a dîné il y a quelques heures maintenant et quelque chose à se mettre sous la dent ne lui serait pas de refus.
« Et tu pense que t'en as encore pour longtemps ? Ou se sera vite prêt ? »
Un regard plein d'espoir se pose dans celui de Yen, qu'il croise régulièrement durant sa préparation. Elle semble concentré sur sa tâche mais attendre quelque chose de lui, à le regarder si souvent... A moins qu'il ne se trompe. C'est d'ailleurs ce qu'il choisi comme option et ignore ces regards réguliers. Elle éclata de rire, vibrant d'un amusement sincère et spontané.
« Toi, tu as faim ! Dit-elle encore sous l'éclat de son rire. » « Oh non ! Je suis découvert... »
Il mima un geste offusqué mais sourit en réponse à son rire, avant de reprendre son observation. Elle devait bien avouer que le regard qu'il lui avait lancé avait quelque chose de touchant. Et que sa gourmandise avait parlé pour lui, un détail qu'elle venait à l'instant de découvrir, elle n'aurait pas cru. Elle venait de terminer avec la pâte, récupérant un rouleau pour l'étaler sur le plan de travail.
« Si tu m'aides à les mettre en forme, il manque plus qu'à les faire cuire et c'est prêt. » « Ok. Va pour le coup de main. »
Son sourire ne semblait pas vouloir quitter ses lèvres, elle lui tendit l'emporte pièce qui ne devait pas lui être inconnu vu qu'il permettait de faire des raviolis. Elle ne serait pas étonnée que ce type de moule à l'identique soit utilisé pour différente recette. Il se leva et prit place à côté d'elle, se mettant rapidement au travail pour découper la pâte en disques réguliers qui seraient garni de farce et refermés.
« Moi qui me demandait comment j'allais pouvoir tous les manger... Finalement, tu tombes à pic, malgré la mini-crise cardiaque que j'ai manqué de faire à cause de toi ! » Plaisanta-t-elle. « Moi ? Je t'ai fait peur ? Non... » « Tsss ! »
Il secoua négativement de la tête, faisant mine de ne pas y croire. Il retrouvait un peu d'expression qu'elle lui connaissait mieux. La faim sans doute, le poussait à cela. Elle lui montra vaguement comment s'y prendre, mais comme avec le beurre sa gestuelle des doigts était beaucoup plus professionnelle que ses propres gestes à elle. Faisait-il régulièrement la cuisine ? Quel genre de plat... Elle était curieuse de savoir, et c'était une question qu'elle lui poserait un jour. Il la laissa le guider, non sans un fin sourire amusé qu'il cacha bien vite derrière son masque de sérieux et de concentration.
« Tu veux un accompagnement avec ou seulement tes Pierogi ? » « Avec de la salade, cela passe bien ! Puis vu la farce qu'on met dedans, cela te tient bien le bide. » « Parfait. »
Ou alors une sauce ? Mais cela dépendait de la cuisson, qui les rendrait plus ou moins sec... Se serait aux talents de sa cuisinière du jour ! Et il allait bientôt les découvrir, ces talents... Elle était en train d'allumer la gazinière, mettant une casserole remplie d'huile sur le feu avant de les faire cuire.
« Tu auras le droit de recracher si ce n'est pas bon hein ! »
Il eu un petit rire. Comme s'il allait réellement recraché son plat... Il en doutait très franchement. Mais il ne se permit aucun commentaire, se contentant d'un très léger haussement d'épaule. Il attendait de voir en somme. Elle était curieuse d'avoir son avis sur sa cuisine, même si elle appréhendait un peu. L'unique personne qui avait eu le privilège de goûter à ses plats était sa mère. Et elle ne pouvait pas vraiment dire que son point de vue était sincère.
« Ne dit jamais à Jeffrey que tu as goûté mes Pierogi... J'ai jusqu'à présent réussi à esquiver à chaque fois. »
« Je serais une tombe. » Dit-il avec plus de sérieux qu'il ne le fallait.
Elle ne pouvait pas s'empêcher de se moquer d'elle-même face à ses pensées, mais sa mère avait tendance à prendre la cuisine au sérieux. Et surtout à lui rabâcher les oreilles que celle-ci doit être faite avec envie et avec le cœur. C'était peut-être pour cette raison qu'elle était nulle à ça... Elle y arrivait uniquement lors de ses moments où elle a besoin de s'évader, généralement seule. Elle se surprenait à accepter le laisser partager ce moment avec elle, à goûter son plat. Probablement parce qu'il est si différent des autres, malgré ses nombreux regards elle arrivait toujours pas à le déchirer totalement. Il était un véritable mystère, et sa présence avait un côté apaisant. Elle avait tendance à mettre cette sensation sur sa facette de neutralité, il ne la jugera pas. En attendant qu'elle fasse cuire ses gros raviolis, le coréen sorti deux assiettes d'un placard, des couverts, et une boîte en plastique estampillée à son nom du frigo. Il posa le tout au bout de la table bar et fouilla un peu dans les placards avant de trouver deux verres à vin et dénicha une bouteille de vin qu'il savait cachée là. C'était un vin rouge français, venant tout droit de la région bordelaise.
« Une verre ? »
Il leva la bouteille en direction de la demoiselle, le regard interrogateur. Il l'avait réservé pour une autre occasion mais cela irait parfaitement avec ce petit repas improvisé. Tout comme la salade de choux rouge et rave qu'il avait mit à mariner le midi dans sa mystérieuse boîte. Elle était destinée au déjeuner du lendemain mais il ferait autre chose à manger.
« Avec plaisir, ce n'est pas souvent que j'en ai l'occasion d'en boire ! »
Elle lui lança un sourire avant de terminer de faire cuire les Pierogi restants, qu'elle déposa dans une assiette avec du papier absorbant. Elle aimait le vin, comme l'alcool sans pour autant en boire à l'excès. Déjà parce que financièrement, elle ne pouvait pas se permettre d'abus, puis sa première expérience où elle s'était retrouvée totalement bourrée l'avait suffit largement. Elle n'était pas une sainte, des conneries de jeunesse elle en possédait une très longue liste. Elle avait simplement appris de ses erreurs, du moins pour certaines plus que d'autres.
« Tu as des talents culinaires. Dit-elle en regardant la boîte qu'il avait sortir du frigo. Ta gestuelle des doigts est moins bordélique que la mienne ! » « Merci. Ce n'est pas grand chose, qu'une salade de choux marinés. »
Il déboucha et servit deux verres de vin, non sans vérifier que la bouteille était buvable au préalable. Yennefer l'avait observé lorsqu'il avait découpé le beurre, de simple détail le concernant, mais qui lui permettait d'en découvrir plus sur lui. Elle déposa le plat sur la table, avant de commencer à servir dans les assiettes pour finalement s'installer à table. Elle attrapa son verre, le regardant dans les yeux en souriant.
« A la tienne ! » « A la tienne ! »
Il répondit à son sourire avant de prendre une gorgée de vin. Ne jamais reposer son verre avant d'avoir bu au moins une gorgée lorsque l'on a trinqué. Il ne savait pas d'où il tenait cette superstition mais c'était bien une des seules qu'il exécutait. Il posa ensuite son verre et s'attaqua à son premier Pierogi. Il resta un instant impassible, à mâcher sa bouchée, avant de laisser filtrer un léger sourire. Elle avait savouré la gorgée de vin, se disant qu'elle en avait encore bu des aussi bons que celui-ci. Son attention resta posée sur le jeune homme, voulant le voir goûter et avoir son avis avant de commencer son assiette.
« C'est très bon. Ta mère peut être fière de toi ! » « Ouf, j'ai passé le test ! Dit-elle en plaisantant avant de poursuivre plus sérieusement. Merci. »
De nouveau un léger sourire avant de prendre une autre bouchée, avec une gourmandise certaine... Elle prit elle aussi une bouchée, son plaisir se dessina sur les traits de son visage. A cet instant, elle avait l'impression d'être la petite fille de sa jeunesse qui mangeait pour la première fois ce plat préparait avec tellement d'amour par sa mère. Il était pourtant simple, mais riche d'émotion pour elle.
« Cela ressemble aux gyosa alors ? Demanda-t-elle en prenant une bouchée de choux marinés. Putain c'est bon ça aussi ! »
Le jeune homme ne peut s'empêcher un sourire avant de répondre, calme et posé.
« En effet ça ressemble. Il n'y a que l'enrobage qui diffère vraiment. Et un peu la façon de préparer. Les asiatiques font beaucoup mariner les choses avant de les cuire, pour qu'elles prennent vraiment le goût. »
Elle n’avait jamais mangé de choux cuisinés de cette façon-là. Elle s'empressa de prendre une seconde fourchette en souriant.
« Toutes les nuits, tu les passes à vadrouiller dans les pavillons endormis ? Tu me diras, au moins on te fait pas chier comme ça... Un peu de silence, c'est ce qui manque dans la journée par ici... »
Yennefer avait encore du mal à s'y faire, surtout après ses quelques mois dans le Ranch de Jeffrey où l'agitation de la ville, de la population n'arrive jamais jusqu'à eux. Et pourtant, toute sa jeunesse elle a vécu dans le bruit agressant des grandes villes, des quartiers pauvres et sordides. Elle était habituée à ça, mais dès son plus jeune âge elle s'était aussi créé ses moments d'isolement, de silence pour ne pas exploser. L'académie pouvait ressembler à une immense fourmilière. Le coréen lui glissa un regard en coin et attendit quelques secondes pour répondre. De terminer sa bouchée d'une part mais aussi de rassembler ses idées et ses mots. S'il n'était qu'à la recherche d'un peu de silence, le monde entier ne saurait plus où le trouver, il se serait isolé au fin fond d'un désert tel un ermite pour le trouver, ce silence. Mais cela, la jeune femme ne pouvait pas le savoir.
« Plus ou moins... Je bosse, je fais du sport... Je m'occupe. » « Mais tu dors quand sérieux ! » « Avant, ou après. Je n'ai besoin que de quelques heures par tranche de vingt-quatre... »
Elle plissa légèrement les yeux, ses pupilles brillaient d'une grande curiosité autant que la sonorité de sa voix. Malgré que sa question avant un côté amusant par le sens qu'elle dégageait, presque enfantin vu l'importance que dormir représente pour elle. Il haussa les épaules et eu un semblant de sourire avant de boire une gorgée de vin, prenant le temps d'en apprécier le goût.
« Et toi qui dort d'habitude, qu'est-ce qui te tourmente pour que tu reste éveillé ? Peut-être que je pourrais t'être d'une aide quelconque, qui sait ! -il hausse des épaules Après tout, je t'en dois une. Tu as rattrapé mes points. »
Il garde son verre à la main et fixe son regard dans le sien après avoir gardé les yeux sur son verre pendant toute sa petite tirade. Il reste dans l'attente, calme, sans ne laisser paraître une once de curiosité ou quoi que se soit d'apparent. Il n'en éprouve pas vraiment en fait. De la bonté d'âme, prêt à donner son aide, oui, mais pas réellement de la curiosité. Après tout, elle pourrait refuser son aide et il respecterait ce choix. Elle avait gardé un instant le silence, terminant sa bouchée, mais lui lança un regard avant de se reposer sur son assiette.
« Quand on est jeune, on est con... J'en ai fait des conneries, plus ou moins grave, c'est bien pour ça que ma mère a déjà des cheveux blancs qui sont apparu... Et pourtant, elle est jeune ma mère. Sauf que forcément, avec certains personnes il est plus compliqué de couper définitivement les liens... »
Il ne pouvait que la comprendre, même s'il ne pouvait pas avouer ses propres délits. Il reposa son verre et attrapa de nouveau ses couverts, attendant la suite sans l’interrompre, de peur qu'elle ne change d'avis. Elle attrapa son verre, le terminant d'une traite comme si elle en avait besoin pour continuer son explication. Elle ne se forçait pas à parler, pourtant ce secret-là personne dans son entourage en avait conscience. Du moins, dans les détails... Quoi qu'elle ne savait pas si elle osait tout lui dire, demander de l'aider était une chose compliquée pour elle.
« J'ai fait l'autruche, pensant naïvement qu'une telle personne lâcherait l'affaire. Il ne comprend pas la définition du mot non. Donc, il s'amuse à faire pression. » « Un maître chanteur... »
Il avait murmuré, plus pour lui que pour elle, perdu un instant dans ses pensées. Une fraction de secondes tout au plus. Cependant, il la regarda avec sérieux et calme, cherchant à apaisé son âme à elle. Oserait-il cependant faire des recherches sur elle ? Plus approfondies que le peu qu'il savait déjà ? Pour l'instant, il ne s'y était pas autorisé. Par respect. Mais si quelqu'un était à ses trousses... La donne n'était plus vraiment la même... Un sourire se dessina sur ses lèvres, il se voulait rassurant, plus vis-à-vis d'elle-même que de lui. Elle minimisait les risques, parce que les accepter voudrait dire qu'elle allait trouver une solution, solution qu'elle savait qu'elle serait compliquée à trouver pour le moment.
« J'aurai du suivre le guide pour devenir une princesse, règle numéro un tu évites le grand-méchant loup. Plaisanta-t-elle en reprenant une bouchée de son assiette. » « Les contes de fées n'apprennent pas aux petites filles à devenir des princesses. Ils leur apprennent que les monstres peuvent mourir. »
Et d'ailleurs, récemment, que c'était elle-même qui pouvait les tuer...
« Tu veux que je le tue ? »
Si cela pouvait l'aider... Après les frères Iakimov, il doutait de se retrouver face à pire ennemi... Il avait cependant poser sa question avec tout le sérieux dont il faisait preuve depuis le début, comme si c'était le court normal de la conversation. A vrai dire, ne l'était-ce pas un peu pour lui ? Malheureusement. Elle s'étouffa avec sa nourriture face à sa question, surprise autant par ses mots que par le sérieux qui en ressortait derrière. Elle ne douta pas un seul instant qu'il était capable de mettre à exécution sa proposition. Elle se servit rapidement un verre de vin qu'elle avala aussitôt pour passer sa toux.
« Tu vas vraiment me faire passer par toutes les émotions possible ce soir... marmonna-t-elle en plongeant son regard dans le sien. Il n'en vaut pas la peine, c'est un mec perdu qui est tellement misérable. Cela serait du gachi de perdre une balle pour ça... » « Il y a d'autres moy... »
Il suspendit sa phrase au milieu, se rappelant qu'elle avait failli s'étouffer. Inutile d'en rajouter et de lui faire définitivement peur. Il ne se le pardonnerait jamais.
« Excuses-moi. C'était juste une idée. »
Il haussa légèrement des épaules et reprit une gorgée de vin, la gardant un peu en bouche pour profiter de ses arômes avant de ré-attaquer son plat. Mentalement, elle ne pourrait jamais accepter une telle proposition, pas parce qu'elle se souciait réellement de la vie de son harceleur, mais parce qu'elle ne voulait pas que Kwaï' se salisse les mains. Des mains qui visiblement étaient déjà bien entachées de sang, bien que les détails elle ne pourrait jamais les imaginer. Était-elle choquée d'apprendre ça ? Est-ce que son regard envers lui avait à jamais changé maintenant qu'elle savait ça ? Non... Non, car elle a déjà connu des gens qui avaient des morts sur la conscience. Et que lui, malgré ça dégageait autre chose...
« Il ne peut pas m'atteindre physiquement, il va juste m'attaquer mentalement. Je dois juste prévenir ma mère, car c'est pour elle que je m'inquiète. Il possédait des images, je crois même une vidéo qui va forcément lui envoyer. Je préfère qu'elle soit préparée et qu'elle sache avant... »
Elle s'arrêta dans sa phrase, avalant difficilement sa salive pour finalement reprendre son repas. Il hocha doucement de la tête, la considérant un instant avec sérieux avant d'enfourner une bouchée.
« Très bien. Mais promets moi une chose : si ça tourne mal, promets moi de me tenir informé. » « Promis » Dit-elle à bout de lèvres sérieusement.
Si les choses dégénéraient, il serait bien capable de faire le déplacement. De traquer et éliminer cet indésirable... Où qu'il soit dans le monde... Peu de gens arrivaient à lui échapper. Si ce n'était aucun... Mais cela, il se garda de lui dire, reprenant son plat en silence. Elle termina son assiette, qu'elle poussa légèrement en déposant ses couverts dessus. Son regard se tourna vers l'horloge murale, il était bientôt quatre heures.
« Cela va être compliqué de faire ton sport après ce repas-là... »
Il sourit doucement en terminant son plat et son verre. Ce n'était jamais compliqué pour lui de s'astreindre à sa gymnastique quotidienne. Et elle, maintenant qu'allait-elle pouvoir faire ? Si elle retournait dans son lit, le sommeil arrivera-t-il maintenant ? Elle sentait une légère fatigue, mais elle n'était pas totalement apaisée pour autant. Malgré qu'elle devait reconnaître une chose, ce repas, la présence de Kwaï' et cette discussion l'avait soulagée d'un poids. Pour le reste, elle avait la conviction qu'il partirait quand elle aura réglé cette affaire.
« Il y a quoi dans le coin pour s'occuper... » « Et bien... »
Il réfléchit un instant, alors qu'elle se levait, récupérant les assiettes pour les glisser dans le lave-vaisselle. Sa question était à demi ton, elle ne savait pas s'il comptait rester ou s'il allait reprendre le cours de sa nuit. Autant elle n'avait pas un planning, mais lui il ne manquait pas d'occupation, voir des choses importantes à faire. Avait-elle le droit de manifester son envie qu'il reste ? Avait-elle le droit de lui imposer de rester... Il ne pouvait ignorer le ton dans sa voix ni sa gestuelle toute en retenue. Un fin sourire passa sur ses lèvres alors qu'il rebouchait la bouteille de vin et lui apportait les verres, à ajouter au lave-vaisselle.
« Je te laisse deux choix en ma compagnie : soit tu viens avec moi à la salle de sport -parce que je compte bien ne pas louper ma séance du jour, même si je dois la reportée- soit tu te laisse faire et on essaie mon remède pour trouver le sommeil sur toi. Je n'ai pas d'autres propositions. »
C'était désormais à elle se faire son choix, il s'adapterait en conséquence... Il haussa légèrement des épaules et lui servit un sourire en coin. Cette fois, la curiosité piquait son regard, parce qu'il n'avait aucune idée du choix qu'elle allait faire. Un sourire s'afficha sur ses lèvres face à ses deux propositions, il l'avait piqué net dans sa curiosité.
« Si on va dans la salle de sport, j'ai la sensation que je ne pourrais pas uniquement faire ma larve dans un coin en te regardant... Tu vas vouloir voir à l’œuvre mon talent sportif ! » « C'est certain. »
Elle lui lança un regard amusé avant de poursuivre.
« Et là, tu m'intrigues avec ton remède ! Je prends l'option deux ! » Dit-elle en souriant. « Très bien ! Dans ce cas, on a une petite étape ici avant de monter au premier. »
Il haussa des sourcils, appuyant le mystère et se dirigea vers le placard de nourriture. Il sorti une petite bouteille de lait, qu'il versa dans une casserole. Il mit le tout sur le feu, et farfouilla pour trouver une boule à thé et des clous de girofle. Il mit quelques clous dans la boule avec un brin de thym et laissa le tout infuser dans le lait encore froid. Il sorti deux tasses en attendant et une tablette de chocolat qu'il réduisit rapidement en petits carrés. Une fois le lait chaud, il jeta le chocolat dedans et tendit une cuillère en bois à la jeune femme.
« Touilles. Pour ne pas que le lait brûle. »
Il la laissa faire, mettant une généreuse cuillère de miel au fond de chaque tasse ainsi qu'un bouchon de brandy. Une fois le chocolat entièrement fondu, il ajouta un peu de crème épaisse et remua encore le tout avec délicatesse avant de remplir chaque tasse. Il jeta le contenu de la boule à thé et mit le tout au lave-vaisselle. Une cuillère dans chaque tasse et il emporta le tout.
« Aller viens. Tu éteins derrière nous ? » « Oui ! »
Il grimpa dans la relative pénombre du hall les grandes marches de pierre pour entrer dans le salon à pas feutrés. Elle s'empressa de le suivre de près, évitant de justesse de s'agripper à son vêtement, car elle avait du mal à se déplacer dans cette pénombre. A cette heure là et comme toujours au beau milieu de la nuit -il en savait quelque chose- il n'y avait personne dans la grande salle chaleureuse. Il confia les tasses à la demoiselle non sans omettre de lui recommandé d'y faire attention d'un sourire moqueur et entreprit de déplacer la table basse et tourner un canapé face à l'âtre de la cheminée. Il ajouta une petite console de chaque côté du canapé pour qu'ils puissent poser leurs tasses et mit la table basse hors d'atteinte des braises sautillantes mais sans pour autant leur empêcher de poser les pieds dessus. Le feu de la veille était presque éteind, quelques braises subsistaient. Il aurait moins de mal à le rallumer.
« Installe toi. Tu vas voir, c'est presque divin. »
Elle était restée silencieuse, l'observant faire avec curiosité, mais surtout étonnement au fur et à mesure. Elle ne s'était pas attendue à ça, à voir cette facette qui se dessinait petit à petit devant elle. Quelques minutes avant, il lui proposait de tuer quelqu'un, dans la normalité la plus totale. Et maintenant, un côté plus doux s'exprimait devant elle. Il était une énigme vivante. Elle s'était tranquillement installée sur la canapé, soupirant légèrement d'un plaisir certains. Il sorti un grand plaid pelucheux d'un coffre et s'attaqua à faire reprendre le feu de la cheminée, laissant la jeune femme s'installer dans le canapé confortable. Une fois le feu reparti, il prit place à côté d'elle, s'installant sous le plaid chaud et prenant sa tasse pour en goûter une gorgée. C'était sucré et parfumé. Parfait pour son problème de sommeil. Bien qu'il ne sache pas si cela allait fonctionner sur elle. Cependant, lui-même avait toujours un peu de mal à lutter face à la combinaison du chocolat chaud et du feu hypnotisant, bien installé dans un canapé aussi moelleux. Elle avala une gorgée du breuvage, qui était affreusement bon et elle ne s'empêcha pas de le manifester par un son sonore.
« Et voilà... Tu n'as plus qu'à te laisser bercer par le ronronnement du feu, la chaleur qu'il dégage, le lait chaud dans ton estomac et si tu le souhaite, je peux même te raconter une histoire... »
Oserait-il jouer le rôle d'oreiller humain ? Il n'avait pas encore assez de cran pour le proposer, aussi il s'abstient, sans pour autant écarter cette possibilité... Son regard se posa sur lui, l'observant avec attention. Il lui jeta un bref regard avant de poser celui-ci sur les flammes vacillantes en buvant son chocolat chaud.
« Tu es... indescriptible. Je n’ai jamais rencontré un mec comme toi. Dit-elle avec une sincérité absolue et empreint d'un compliment. Et putain que j'aime ton remède ! » « Merci. C'est un beau compliment. »
Son regard se tourna vers la cheminée, observant les flammes qui dansaient en crépitant. Elle replongea un instant ses lèvres dans la tasse avant de marmonner.
« J'aimerais bien entendre une histoire... »
Un petit sourire passa sur ses lèvres et il bu une longue gorgée de son chocolat avant de l'abandonner sur la console à côté de lui. Il s'enfonça un peu plus dans le molleton des coussins et prit une légère inspiration.
« Très bien. Dans ce cas, je vais te raconter celle que je connais le mieux. »
La mienne... pensa-t-il sans le lui avouer. Il prit une voix grave et monotone, et parlait juste assez fort pour couvrir les craquements du bois dans le feu. Dans le silence qui régnait autour d'eux, c'était largement suffisant. Il gardait le regard fixé sur le feu dansant, adaptant également ses phrases aux murmures de ce dernier, pour qu'il ponctue son histoire plus qu'il ne la dérange. Il parlait lentement, en prenant son temps...
« Il était une fois, il y a de cela quelques années maintenant, naissait, au cœur de Séoul, un petit garçon. Bien que ses parents eurent un modeste foyer à la campagne, il était très attendu au sein de cette petite famille. Son père travaillait dans le centre de Séoul. Il travaillait dur et tard, mais c'était un homme aimant et d'une grande gentillesse. Il avait cependant un défaut : il était passionné. Passionné à son extrême. Passionné par les courses de chevaux... Mais ses moyens très peu élevé ne lui permettaient pas de jouer autant qu'il le désirait, ce qui lui donnait un air quelque peu frustré lors des jours de courses. Cependant, il éleva son fils avec justesse et droiture. S'attachant à lui transmettre de nombreuses valeurs indispensables pour un gentleman. Sa mère elle, d'une santé fragile, ne travaillait pas et restait à la maison pour s'occuper de son fils. Elle était souvent accablée de fatigue, mais elle faisait de son mieux pour ne pas le montrer. Alors que le petit garçon eu trois ans, vint au monde sa petite sœur. Elle aussi était très attendu par la famille, et elle fut très aimé. »
Il fit une légère pause, comme s'il arrivait à la fin d'un chapitre et tournait la page...
« Les deux enfants grandirent dans la simplicité mais entouré de l'amour de leurs parents. Quelques années passèrent dans une relative tranquillité. Leur mère allait mieux et avait même décidé de travailler quelques jours par semaine afin de soutenir leur famille. En échange de quoi les deux enfants avaient un comportement exemplaire à l'école. On ne pouvait rien leur reprocher. Un jour de printemps, alors qu'il rentrait d'une longue balade avec sa sœur, le petit garçon trouva sa mère emplie de désespoir, assise à la table de la cuisine. Son père en revanche, rayonnait de bonheur. Il s'avérait qu'il avait gagné une jument de course en jouant aux cartes et il avait ramené la jument à la maison. Elle était très belle et très jeune, mais elle était taillée pour la course. Ils trouvèrent un champs à louer et lui construisirent un abri. Durant une année entière, le père et le fils se consacrèrent au débourrage de la petite jument. Le père transmettait à son fils toutes ses techniques, toute sa passion. Avoir son propre cheval de course était l'un de ses plus grands rêves et le voilà qui se réalisait. Il ne pouvait espérer mieux, malgré les difficultés financières qui vinrent s'ajouter à leurs soucis. Mais qu'importe, il tenait entre ses mains le rêve de toute sa vie... »
De nouveau il fit une légère pause et jeta un œil discret à la demoiselle, pour voir dans quel état elle était. Elle était attentive, captivée, buvant avec lenteur son chocolat chaud pendant que son regard contemplait les flammes dans la cheminée. Il poursuivit ensuite avec la même douceur.
« Arriva le moment crucial où il fallait monter la jument. Le père ne le pouvait pas, il était trop grand et trop lourd. Mais son jeune fils avait tout du jockey de course. Il était assez léger et assez petit pour ne pas faire de mal au dos de la jument et la faire courir. Le garçon monta donc la jument, apprenant en même temps les rudiments de l'équitation. Il s'entraîna chaque soir en revenant de l'école et après avoir fait ses devoirs, ainsi que chaque week-end. Qu'il pleuve qu'il vente ou qu'il neige, il était à cheval. Sa mère s'inquiétait pour lui et sa santé fragile en pâtissait également. Mais elle tenait bon et continuait de s'occuper de son foyer et de ses enfants, comme elle l'avait toujours fait. Ainsi, le garçon couru sa première course. Il la perdit, provoquant le déception de son père, mais autant l'un que l'autre ne lâcheraient l'affaire. Ils continuèrent l’entraînement et les courses. Ils arrivaient souvent sur le podium et les gains que leur rapportaient la jument lui permettait de s'entretenir seule. Mais pour leur mère, ce n'était pas suffisant. D'autant plus que le garçon commençait à devenir trop grand pour courir. Trop lourd... Ils enchaînaient les défaites quand un éleveur se présenta à eux. Il souhaitait racheter la jument. Cela fendit le cœur du père, mais ils n'avaient plus le choix. Ils ne pouvaient continuer ainsi plus longtemps. Il vendit la jument à bas prix, en échange d'une promesse : celle qu'on lui donne le premier né de la jument bai, issu d'un croisement pure race avec un cheval de course. L'éleveur accepta le marché, trop content de cette transaction dont il était l'unique gagnant. Ils attendirent une longue année avant que l'éleveur ne les recontacte : la jument allait donner naissance à son premier poulain, issu d'un étalon de course. Il leur livrerait au sevrage. Le père sautait de joie et retrouvait du baume au cœur, ce qui ravi toute la famille. Ainsi, ils patientèrent six longs mois, avant que n'arrive le tout jeune poulain... »
De nouveau il fit une légère pause, avant de reprendre un ton plus bas.
« Comme ils l'avaient fait avec la jument, ils débourrèrent le jeune étalon fougueux dont ils avaient hérité. Cette fois, le père laissa faire le fils, pour qu'il prenne de l'expérience. C'est également lui qui débourra l'étalon à la selle et qui lui fit courir ses premières courses. Le jeune étalon se montrait bien plus prometteur que sa mère : plus combatif, plus vif, plus rapide. Il gagna sa première course à deux ans, mais rapidement, ils durent se rendre à l'évidence, le garçon était trop lourd pour lui, malgré son jeune âge. Par contre, sa petite sœur elle, avait le gabarit parfait. Malgré le refus premier de leur mère, la petite fille monta sur le fougueux étalon et, sous les conseils avisés de son frère et de son père, elle s'entraîna avec le grand étalon bai. Elle su tout de suite montrer au grand jour tout le potentiel de l'étalon et elle commença les courses rapidement. Elle enchaînait les victoires sur des distances de plus en plus longue... Elle était tellement douée que le père décida de l'inscrire sur des courses de haie. Plus dangereuses certes, mais avec plus de gains. Le couple se montra tout aussi efficace, si ce n'est plus, sur les haies que sur le plat, enchaînant les victoires... Le père fut approcher de nombreuses fois par des éleveurs ou de riches marchands, pour racheté l'étalon ou e serait-ce qu'avoir une saillie. Mais il refusait toujours, préférant attendre que l'étalon prenne sa retraite sportive... De la valeur... »
Sa voix avait progressivement baissé, n'étant presque plus qu'un murmure à la fin. Le feu ne crépitait plus mais ronronnait doucement, distillant une chaleur agréable. Il était presque sur le point de s'endormir, bercé par ce tout apaisant. Il arrivait également au point de l'histoire qui tournait à la tragédie... Il se garda donc de lui raconter cette partie, et maquilla le reste de l'histoire pour la rendre plus heureuse.
« Et c'est ce qu'il fit. Plus il courrait, plus il prenait de valeur, donnant à toute la famille l'espoir qu'un jour, ils n'auraient plus à s'inquiéter du lendemain, et de ce qu'ils allaient devenir... »
Ce qui était en parti vrai... Ils n'avaient plus à se soucier de ce qu'ils allaient devenir désormais... Elle pencha doucement la tête sur le côté, la posant sur l'épaule de Kwai en s’emmitouflant davantage dans le plaid et le canapé. La chaleur avait alourdie ses paupières.
« Merci... » Murmura-t-elle à bout de lèvres avec émotion.
Son remerciement, pourtant simple possédait de nombreuses significations forte pour elle. Au fond, ces nuits-là elle les avait toujours appréhendées sans jamais se l'avouer. Sa présence, son écoute l'avait apaisé bien plus qu'elle ne l'aurait cru. Et cet instant risquerait de laisser des traces, surtout son histoire qui sonnait comme un écho du passé... De son passé probablement, bien qu'elle ne pouvait pas tirer de conclusion trop hâtive. Comme de la fin... Avait-elle réellement été heureuse ? Des questions qu'elle ne poserait pas ce soir, le moment était trop serein, magique pour ça. Elle finit par s'endormir contre lui. Le coréen resta éveillé, veillant sur son sommeil, espérant éloigner, par sa présence, les ombres menaçantes de sa nuit. Il attendit avec patience un cycle complet de sommeil, pour ne pas risquer de déranger son sommeil profond, avant de s'extirper le plus délicatement possible et prendre la jeune femme dans ses bras, emmitouflée dans le plaid. Le ciel commençait à s'éclaircir à l'est, il ne devait plus être très loin de six heures... Peu importait. Ne sachant pas où était sa chambre, il la déposa avec délicatesse sur son lit, veillant à ce qu'elle soit bien recouverte par le plaid. Quant à lui, il prit place sur le fauteuil molletonné de sa chambre. Les bras sur les accoudoirs, les jambes croisées devant lui, la tête appuyée sur le dossier, il se laissa aller à quelques courtes heures de sommeil, observant la lente progression de la lumière dans le ciel encore sombre. Voilà bien longtemps qu'il n'avait pas agit de la sorte. L'avait-il simplement déjà fait ? Oui... Pour sa petite sœur, quand il n'était encore qu'un gamin... Mais depuis, il en doutait. Il distillait peu de marques d'affection. Les autres savaient qu'il les aimait grâce aux services qu'il leur rendait, à sa présence dans les moments les plus durs de leurs vies, à ses brèves attentions. Futiles pour eux, extravagantes pour lui... Que lui arrivait-il donc ? Son esprit tourmenter par ces dizaines de questions l'éveilla puis avant le réveil. Il jeta un dernier regard à la demoiselle endormie, attendrie par cette confiance qu'elle lui accordait. Elle ne le devait pas. Il était trop dangereux pour elle. En témoignait ses réactions ce soir, sur diverses questions... Non... C'était trop dangereux. Pour elle. Il prit une difficile inspiration, la gorge nouée et griffonna un mot à son intention. Il la remerciait pour son plat et lui souhaitait une excellente journée, lui rappelant, à demi-mot, la promesse qu'elle lui avait faite de le prévenir en cas de difficulté. Ce après quoi il s'éclipsa au moment où le soleil perçait au dessus des arbres. Il décida que c'était un bon matin pour courir et s'élança à petites foulées sur les chemins entourant le Haras, se vidant la tête au possible, sans vraiment y parvenir...
Nous avons 718 Lignes J'utilise un Résumé x2 de Louna Un grand merci à Yennefer avec qui il faut partager les points ! ^^ Pas de points cheval, mettez tout en PHS ^^ Merci pour la correction ! =)
Froid matin de la fin janvier. Après un mois entier de calme dédié à l'équitation, Kwaïgon retrouve enfin un peu de la sérénité dont il fait preuve habituellement. Même s'il arrive parfaitement bien à cacher aux autres ses états d'âme, il n'empêche qu'il déteste devoir faire l'effort de cacher ses tourments. Maintenant que le temps a passé, il a réussi a enfouir au plus profond de lui ses affres de novembre. Le temps efface toutes les blessures... Ou du moins, il nous aide à les apprivoiser pour mieux les enfermer. En attendant, c'est avec une certaine clarté d'esprit qu'il rejoint l'équipe au petit déjeuner ce matin là. Equipe assez réduite à cause de leur emploi du temps : le vendredi matin est normalement une demi-journée de repos pour les cavaliers. Malgré tout, il est là et pour une raison un peu particulière... Neyla, la plus jeune cavalière de l'équipe, a eu pour attribution le tout jeune -dans sa tête- également Wig'One. Mais la mésentente se fait de plus en plus rude et la blonde enchaine les chutes lors des entrainements. Izikel prend souvent le relais en selle, mais ce n'est pas une solution viable à long terme. Le coréen doit donc essayer le pie pour décider d'un changement de monture, ou non. Il se retrouve donc en compagnie de Liam et Izikel pour ce petit déjeuner matinal et accompagne les deux hommes à l'élevage par la suite...
***
En selle sur le pie, le coréen n'est pas tranquille. Kim, malgré son jeune âge, est moins turbulent que Wig, qui ne cesse de bouillir sous sa selle. Eurodisney quand à lui est bien plus difficile et imprévisible, mais il reste, pour le coréen, un cas bien à part : on sait qu'avec lui, on va chuter. Il fait tout pour cela. Wig par contre, est plus difficilement appréhendable. On ne sait pas quand viendra la chute, involontaire de la part de l'équidé. Il est content et le montre : c'est ensuite à son cavalier de rester en selle, c'est son job, par celui du pie de l'épargner. En tout cas, il n'est pas conscient des difficultés que peut rencontrer son cavalier en étant sur sa selle, et c'est cela le plus difficile à gérer.
« Ok, reste bien comme ça sur le cercle et joue dans tes doigts. Il est presque sur le point d'accepter le contact. »
Le coréen acquiesce doucement et applique les consignes de son moniteur du jour. Izikel quand à lui, assit sur la barrière blanche qui enserre la carrière, regarde faire. Ce matin là, il est plutôt de bonne humeur, le regard léger. Il y a des jours où il est encore un peu sombre, mais il arrive de plus en plus à faire la part des choses et retrouver la joie de vivre qui le caractérisait tant bien des mois auparavant maintenant. Il redevient l'homme qu'Ezra a connu : insouscient et intrépide, empli de joie de vivre. Quelques jours par semaine. Un grand pas en avant et le coréen ne veut surtout pas briser cet état, encore trop fragile selon lui.
« Ne regarde pas ses oreilles sans arrêt. Tu n'y liras pas sa prochaine connerie. Regarde devant toi. »
De nouveau, le coréen applique les conseils et poursuit l'exercice. Assez simple pour cette prise de contact : mise sur la main, réponse à la jambe et contrôle de l'allure. Jusque là, après une détente un peu éparse, tout se passe bien. Mais le jeune homme appréhende un peu la suite : la partie saut de la séance. Le pie ne cesse de regarder la croix que Liam a installé un peu plus tôt à chaque fois qu'ils passent près d'elle et le coréen en a un mauvais pressentiment...
Elles revenaient du centre de soin, où elles avaient organisé les prochaines visites des chevaux de Stalles, mais aussi de quelques propriétaires. Cette tâche qui pourrait se révéler pénible et ennuyante ne l'était jamais en compagnie de Myriam. Elle commençait de plus en plus à prendre ses marques, à apprécier ce rythme qui s'installait dans son quotidien. Elle aimait cette formation aux côtés de Myriam. Son attention se posa vers la carrière, reconnaissant rapidement des silhouettes familières, surtout une. Son regard s'illumina de curiosité en continuant de regarder le cavalier qui évoluait sur le sable.
« Cela ne te dérange pas qu'on regarde un peu la séance, c'est la première fois que je vois Kwai à cheval. »
Myriam lui répondit d'un sourire avant de se diriger vers la barrière où se trouvait Izikel. Yennefer croisa les bras sur celle-ci afin d'y poser sa tête en continuant d'admirer le cavalier, il était presque surprenant de le voir à cheval. Il possédait un très bon niveau, le tableau était plus qu'agréable à regarder. Elle avait déjà entendu parler de ce cheval...
« Ils sont un peu barjos les deux pies fraichement débarquées... Olympia elle a aussi un grain. Marmonna-t-elle à l'intention de Izikel et Myriam. » « Carrément... Je me demande même ce qu'on va faire de celui-là... »
Myriam acquiesça. Pour l'instant, ils testaient des cavaliers différents sur sa selle, mais si seul Izikel convenait, se serait difficile pour lui de le gérer avec la masse de travail qu'il avait déjà. Le niveau de Yen en équitation n'était pas assez expert pour remarquer les détails importants sur sa manière de monter l'étalon, et ce n'était pas l'expression de Kwai qui pourrait la renseigner sur ça. Selon elle, pour le moment il semblait correctement le maitriser sans trop de difficulté.
L'exercice devenait ennuyeux pour le pie et il fit son premier écart : un bond sur le côté inattendu suivi d'un saut de mouton tout aussi inattendu. Le coréen, malgré tout, arriva à suivre le rythme et resta calme, remettant le pie sur son cercle de départ comme si rien ne venait de se produire.
« Bien ! Continue ! et dès qu'il est sur la main, tu relâche et tu le laisse s'étendre. »
Ce que le coréen fit à la lettre. Mais Wig ne voyait pas les choses de la même manière. Ce que le cavalier voyait pour une récompense lui le voyait comme une occasion de tout lâcher. Dès que le coréen laissa filer ses rênes aux prémices d'une extension d'encolure, le pie fit du nouveau un saut de mouton, levant les épaules, tête en bas. Et sans ses rênes, le coréen n'avait plus vraiment de moyen de le relever pour qu'il cesse. Malgré tout, il réccupéra ses rênes et reprit le travail, se faisant moins permissif sur les extensions d'encolure. Liam rejoignit le petit groupe de spectateurs en gardant un oeil sur Kwaïgon, qui luttait toujours plus ou moins pour rester en selle.
« J'ai l'impression qu'il a été fait à l'envers ce cheval et qu'il a de grosses lacunes... » « Oui... Il va y avoir du boulot avec lui... C'est Peter qui te l'a envoyé ? » « Oui... Mais pourtant d'habitude Peter envoie de bons chevaux... Je ne sais pas ce qu'il s'est passé avec celui-là mais c'est pas terrible... »
Myriam acquiesça, grimaçant doucement à une nouvelle tentative du pie de mettre le coréen par terre... Yen écoutait attentivement la discussion, son regard fixant attentivement Kwaïgon. Ce cheval semblait avoir le diable au corps. Un faible sourire se dessina sur ses lèvres, admirant plus le cavalier que les caprices de la monture. Elle devait bien avouer que c'était assez surprenant de voir Kwaïgon à cheval, car physiquement il était assez hors-norme, un peu comme elle sur d'autres points.
« Vous allez vous amuser avec lui... » « C'est clair ! »
Ils regardèrent le coréen travaillé en silence un moment, jusqu'à ce qu'il retrouve le calme du pie et reprit la parole.
« Ok, quand tu le sens, tu vas sur la croix au trot. Attention à ce qu'il n'embarque pas. Dans ce cas là, arrête le de suite, empêche le d'aller dessus. »
Le coréen acquiesça sans les regarder et fit quelques huit de chiffre avant de se diriger vers la croix. Dès que le pie comprit qu'ils allaient sauter, il releva le nez et se tendit. Son allure s'allongea mais il n'embarqua pas son cavalier pour autant. Il passa la croix avec une bonne marge et dès que ses pieds se reprosèrent par terre, il parti en coup de cul. Le coréen suivit le mouvement avec quelques difficultés et se remit sur un cercle pour revenir au calme. Une fois ceci fait, il recommença, mais cette fois, il n'eut pas autant de chance : le saut en cloche et le violent écart que Wig'One fit à sa réception eurent raison de l'équilibre du cavalier. Il se retrouva éjecté de sa selle et tomba à plat dos. Le choc fut violent. Un bruit sourd et mat, qui n'augurait rien de bon. La réaction des spectateurs ne se fit pas attendre. A peine le cavalier était éjecté que l'irlandais sautait de sa barrière et courrait vers le coréen. Il avait réagi en un quart de seconde. Liam lui, s'occupa de coincer l'étalon dans un coin pour l'attraper alors que Myriam passait sous la barrière pour se diriger à petites foulées vers le coréen à terre qu'Izikel avait pratiquement rejoint... Yennefer dans sa spontanéité lança un juron en se précipitant aussi vers Kwaïgon, le choc avait été violent et elle ne pouvait pas s'empêcher de s'inquiéter pour lui. Pourquoi était-elle en train de s'imaginer les pires scénarios possible ? Elle avait envie d'écouter cette petite voix qui lui indiquait que le coréen était un coriace de nature, qu'il ne pouvait rien lui arriver de grave. Ne l'avait-elle pas vu avec une vilaine blessure dans le dos ? Il avait probablement connu des situations plus mortelles qu'une chute de cheval... Le coréen mit une bonne minute à retrouver un souffle, celui-ci s'étant retrouvé coupé net quand il avait touché le sol. Izikel avait posé un genou à terre et le cavalier avait difficilement levé la main vers lui pour lui signifier qu'il avait simplement besoin de temps.
« Kwai, tu es pas mort hein ! S'exclama-t-elle un peu bruyamment en arrivant à ses côtés, en posant un regard vers son visage. »
Elle ne tarda pas à lâcher un soupir de soulagement, se moquant bien de n'avoir pas retenu son inquiétude et ses émotions. Aura-t-elle réagir de la même manière pour quelqu'un d'autre ? Peut-être... Elle ne pouvait pas le dire, c'était la première fois qu'elle assistait à une telle chute violente. Le coréen leva un pouce en l'air en tentant de faire un sourire à la jeune femme sans grand succès.
« Rien de cassé ? Dit-elle avec un légèr sourire, malgré son regard toujours inquiet. »
Elle était presque convaincue qu'il allègerait sa réponse, minimisant sa douleur, comme il l'avait probablement fait lors de leur rencontre la première fois. Mais elle comptait bien avoir une réponse. Il se releva doucement et toussa avant de répondre d'une voix légèrement enrouée.
« Non... Rien de cassé... »
Il avait encore du mal à respirer, son souffle saccadé le prouvait. Yen se pinça légèrement les lèvres en entendant sa respiration, ce n'était pas bien jolie. Mais elle se contenterait de cette réponse pour le moment.
« Tu veux qu'on appelle Ezra ? » « Non ça va aller... » « Tu devrais aller t'allonger quand même... Tu t'es peut-être déplacé quelque chose... »
L'ostéopathe grimaça doucement. Elle n'osait pas trop toucher au coréen, préférant attendre de voir comment il allait après le choc premier... Liam de son côté avait récupéré le pie et le faisait marcher tant bien que mal sur un large cercle autour d'eux.
« Franchement, quelle drôle d'idée que de vouloir imiter un oiseau en plein vol... marmonna-t-elle pour évacuer son inquiétude. »
La dérision faisait partie de sa personnalité, de son mode de vie. C'était comme une carapace, une solution pour éviter d'exploser tout souvent. Le coréen rit mais s'arrêta bien vite, posant une main sur son torse.
« Ne me fais pas rire... C'est douloureux... »
Il grimaça et elle reprit cependant très rapidement un ton plus sérieux, bien qu'à sa façon, rejoignant ainsi les paroles de Myriam.
« Tu penses que tu es capable de te trainer jusqu'à ta chambre ? Ou on traine ta carcasse ? »
Son sourire regagna ses lèvres, pendant que son regard glissait un peu partout sur son corps. Elle semblait rechercher le moindre signe, une tâche de sang peut-être ?
« Je pense que je vais pouvoir m'y trainer... »
Il sourit faiblement et tendit une main à Izikel qui l'aida à se remettre sur pied. Il fit un pas chancelant se plia en deux, posant les mains sur ses genoux. Izikel posa une main délicate sur son épaule.
« Prends ton temps. »
Liam leur jetèrent un coup d'oeil et s'approcha avec prudence.
« Ca va aller ? » « Oui... Mais il vaut mieux qu'il aille s'allonger... » « Séance d'ostéo ? » « Il vaudrait mieux mais là... Je vais pas pouvoir je dois aller chercher Maël. »
Les regards des deux éleveurs et de l'ostéo se tournèrent vers Yennefer, d'un seul mouvement. La jeune femme leur lança un regard tour à tour avant de poser son attention sur le coréen.
« La chute ne l'a pas tué, il devrait survivre à ma séance... » Lança-t-elle en souriant.
Cependant, elle devait bien s'avouer qu'elle aurait pu difficilement reprendre ses occupations sans être sure et de savoir les dégâts causés par la chute. Elle l'aurait forcément raccompagné dans sa chambre, même en présence des autres membres de l'équipe. Seule, elle pourrait plus facilement avoir ses réponses à ses questions. Elle s'approcha de lui, afin de lui offrir un léger appuie avec son bras.
« Je te laisserai le temps de préparer ton testament avant de te manipuler. » « Merci, c'est gentil. » « Merci Yen. » « Faites attention ! » « Et si besoin appelez Ezra ! Il est médecin pour rappel ! »
Il se redressa quelque peu et refusa gentiment le bras de la demoiselle avant d'enlever son casque et de faire quelques pas chancelant vers la sortie, levant une main pour remercier les autres. Il restait légèrement penché en avant et avançait lentement. Le chemin jusqu'à sa chambre sera un calvaire... Elle ne savait pas exactement où la douleur était la plus forte, mais elle avait une idée qui pourrait le soulager, sans pour autant faire des miracles selon la gravité de ses blessures. Même si cela devrait lui dévoiler une facette d'elle-même, elle n'était finalement pas très réticente à lui exposer. Ce qui la surprenait elle-même. Il fit tout le chemin jusqu'à sa chambre en silence, serrant les dents pour réprimer les élancements de douleur. Son dos entier était douloureux, ainsi que sa cage thoracique. Il avait l'impression qu'un étau lui enserrait le corps en l'empêchant de respirer. Elle respecta son silence, marchant à ses côtés en posant toujours son regard vers lui. Bien qu'il masqua une grande partie de sa douleur, elle savait qu'elle était présence. Et probablement plus forte qu'elle ne pouvait l'imaginer. Il tendit les clés de sa chambre à Yen une fois devant celle-ci et entrerit d'enlever sa veste en attendant mais ce fut en vain et il abandonna l'affaire, attendant d'être à l'intérieur pour quémander son aide. Elle ouvrit rapidement la porte de sa chambre, s'effaçant pour le laisser entrer avant de refermer derrière elle.
« J'ai un peu de mal à enlever ma veste... »
C'était la seconde fois qu'elle l'aidait pour raison médicale et ce n'était pas vraiment un fait que le coréen appréciait. Mais pour le coup, il n'avait pas vraiment le choix, et il n'avait pas toutes ses idées claires. Il ferait avec pour l'instant ! Elle posa les clés sur le bureau avant de l'aider à retirer sa veste en faisant le plus doucement possible. Il se laissa faire, sagement.
« Tu as mal où ? Il va falloir que je vois si tu as des marques sur ton corps... »
Il voulut répondre mais un élancement lui coupa net la parole. Il se contenta de lever les yeux au ciel en serrant le dossier de son fauteuil de lecture pour se concentrer et tenter d'échapper à cette douleur cuisante.
« J'ai mal dans tout le dos... J'ai l'impression d'être ... d'être dans un étau, de ne plus puvoir respirer. »
Ce qui était partiellement faux, puisqu'il respirait toujours, mais il avait encore quelques difficultés pour cela. Yennefer avait l'intuition que cette situation n'était pas agréable pour le coréen, qu'il ne l'appréciait pas. Et elle ne voulait pas rendre le moment plus désagréable pour lui.
« Tu as une idée des blessures que la chute a causées... »
Pourquoi avait-elle l'impression qu'il avait déjà vécu pire... Probablement parce qu'elle ne pouvait pas oublier leur rencontre. Des blessures, il en avait connu. S'était-il cassé quelque chose, déboiter ou alors fêler ? Peut-être serait-il préférable d'appeler Ezra... Mais elle rejeta rapidement l'idée, préférant vérifier avant et voir si elle ne pouvait réellement rien faire avec ses compétences. Il haussa vaguement des épaules et enleva en douceur une première manche de son pull avant de faire l'autre dans le même mouvement, retenant son souffle.
« Je ne sais pas... C'est moins douloureux que la dernière fois que je me suis cassé une côte... Mais c'est plus handicapant... » « On va voir ça... »
Il se laissa aider pour terminer d'enlever son pull et recommença avec son sous-pull. Il se laissa ensuite lourdement tomber sur son lit, assit et enleva avec quelques difficulté ses chaps et ses boots. Il les laissa choir au pied de son lit et reprit son souffle pendant quelques secondes avant de relever les yeux vers la jeune femme.
« Je suis tout à toi... Comment tu veux qu'on fasse ? » « Je vais commencer par te manipuler assis, sauf si la douleur te lance trop... »
Pour une fois, il eu du mal à masquer la douleur que laissait transparaitre son regard... Elle plongea son regard dans le sien, il était difficile de faire abstraction de sa souffrance.
« J'ai vraiment besoin de savoir quand tu ressens une douleur à mes palpations. »
Il hocha de la tête, pinçant les lèvres sans pour autant dire un mot. Il essayerait, c'était une certitude. Mais la communication et lui, ce n'était pas vraiment ça... Elle avait remonté légèrement les manches de son pull après avoir déposé sa veste sur la chaise du bureau avec le reste des affaires du coréen. Elle posa ses mains au niveau de son cou, testant une à une chaque vertebre avec délicatesse. Mais elle n'était pas vraiment inquiéte à ce niveau-là, contrairement à ses côtes. Une marque était apparue sur sa peau, elle ne savait pas quelle côte il s'était cassé, ni quand... Mais au fur et à mesure qu'elle avançait dans ses palpations, des questions se bousculèrent dans sa tête. C'était douloureux mais supportable pour le jeune homme, alors il prit sur lui et laissa faire la jeune femme, essayant de ne pas se crisper plus que nécessaire et fausser son jugement.
« Tu t'es déplacé quelques vertèbres, rien de grave... mais cela pourrait expliquer la douleur dans le dos... » « D'accord... »
Yennefer glissa par la suite délicatement ses mains vers les côtes de Kwaïgon, il était temps de confirmer ses doutes sur l'état de ses côtes.
« Je pense que tu t'es fêlé une côte... Tu me permets de vérifier ? Cela ne va pas être agréable... »
Avant toute manipulation, elle devait être sûre. Son attention se posa sur le visage du coréen, elle espérait que bientôt elle pourrait le soulager de sa douleur. Il avait baissé les yeux sur ses pieds et releva simplement une main, index en l'air, pour demander quelques secondes de répis à la jeune femme. Il puisa dans les dernières sources de son sang-froid et hocha de la tête, le regard déterminé.
« Vas-y. Je suis prêt. »
Elle hocha la tête avant de palper la zone avec précision, son verdict tomba rapidement. La côte n'était pas cassée, mais elle était bien fêlée. Elle se pinça les lèvres avant de se diriger rapidement vers le tiroir où la dernière fois elle avait trouvé de quoi recoudre ses points. Pour une côte fêlée, il n'y avait pas grand-chose à faire à part attendre... Mais elle pouvait toujours lui mettre un bandage pour éviter certains mouvements. La douleur avait été à la limite du supportable pour le coréen. Mais il avait serré les dents et les poings puis attendu le verdict avec raideur.
« Tu vas ressembler à une momie un certain temps. Je vais te mettre un bandage, un peu serré qui va contenir tout ça. Mais à part ça... Au moins, elle n'est pas cassée. » « Ok... Merci... »
La jeune femme lui fit un léger sourire avant de commencer à enrouler autour de son torse une large bande en serrant juste assez pour maintenir les côtes. Il leva les bras autant qu'il pu pour lui facilité la tâche en essayant de se relâcher. Faire corps avec la douleur pour l'apprivoisée et la faire taire... En vain. Un exercice qu'il n'arriverait pas à appliquer tant qu'elle n'aurait pas terminé.
« On va pouvoir passer au dos... J'aurai peut-être dû te proposer de l'alcool pour faire passer tout ça... » « Ok... Et non, je préfère autant être à jeun... »
Ce n'était pas un très gros buveur, bien qu'il ai une tenu à l'alcool impressionante malgré tout. En tout cas, dans des moments comme celui là, il préférait éviter ce genre de déboire. Il voulait rester entier maître de son corps et de son esprit et cela passait par aucune distraction... Bien que pour aujourd'hui, c'était loupé : Yennefer faisait une distraction à elle toute seule.
« Tu veux que je reste assis ou que je change de place ? » « Reste comme ça, de toute façon tant que je t'aurai pas remis tes vertèbres en place. Tu auras mal en t'allongeant. On va faire cela de manière pas académique... »
Il acquiesça pour montrer son accord et tenta une fois de plus de se détendre. Il était encore dans la retenue quand il parlait, hachant ses mots. Sa respiration restait un peu saccadée mais il tenait le coup. Elle lui lança un regard souriant avant de grimper sur le lit pour se mettre derrière son dos. Elle profita pour revérifier les vertèbres qui s'étaient déplacées avant de positionner ses mains. Avec sa côte fêlée, elle adopta une posture différence, mais qui serait tout aussi efficace, bien que cela imposait une proximité avec le coréen.
« Heureusement que Myriam n'est pas là... Bon... Tu me fais assez confiance ? murmura-t-elle proche de son oreille. »
Il sourit, ce qui lui arracha aussitôt une grimace de douleur. Il ferma les yeux, concentré. Il ne fallait pas qu'il bouge et qu'il se relâche pour que l'action de la demoiselle soit efficace. Sinon, cela pourrait être pire...
« Vas-y. Je te fais confiance. »
Elle prit une inspiration avant de faire un mouvement net pour redresser correctement la colonne vertébrale du coréen tout en basculant légèrement sur un côté afin de remettre l'ensemble dans le bon alignement. Elle espérait qu'une partie de sa douleur se soit atténuée par son action. Sachant, qu'elle ne pourrait pas faire grand chose pour sa côte... Il suivit le mouvement, étouffant un grognement entre ses dents. C'était loin d'être le meilleur moment de sa vie.
« Toujours vivant ? »
Il hocha de la tête, incapable de parler. Malgré tout, la douleur dorsale s'était atténuée, c'était déjà une bonne chose. Yennefer se remit face à lui, étudiant les traits de son visage dans l'espoir de le voir moins douloureux. Il lui fallu quelques minutes pour retrouver un peu de contenance. Il était un peu plus pâle, mais les traits un peu plus posés et il respirait un peu mieux.
« La douleur s'est atténuée ? » « Oui c'est mieux... Je crois que c'est ma côte fragile qui s'est de nouveau fêlée... »
Lui, impatient ? Sans doute beaucoup... Elle lui lança un regard qui en disait long sur ses pensées, malgré le sourire qui s'était affiché au coin de ses lèvres.
« Pourquoi je ne suis pas surprise d'apprendre ça... Combien de jours tu vas tenir avant de vadrouiller, malgré ta côte fêlée hein ! » « Autant que le minimum nécessaire. »
Ce n'était pas un reproche, elle savait que ce trait de caractère faisait partie de sa personnalité. Et cela faisait son charme, bien qu'elle risquerait de s'inquiéter sur son état de santé. Elle pourrait difficilement l'attacher à son lit. Il avait répondu d'un ton neutre. Autant ne pas lui mentir, de toute façon, il ne savait pas s'il en serait véritablement capable avec elle. Comme avec quiconque. Il prit une demi inspiration, lente, avant de tout relâcher en fermant les yeux. Apprivoiser la douleur, la faire sienne. Cette fois, l'effet rechercher fut trouvé.
« Dit, je suppose que tu as rien contre les aiguilles ? Je connais quelque chose qui pourrait te soulager encore, même si cela ne va pas faire des miracles... Cela stimulera ta guérison. »
Il rouvrit les yeux et posa un regard presque curieux dans le sien. Des aiguilles ? Un demi sourire s'accrocha au coin de ses lèvres alors qu'il haussait rapidement un sourcil.
« Non rien... Avec le tatouage que j'ai dans le dos, se serait te mentir que de te dire que j'ai quelque chose contre les aiguilles... Qu'est-ce que tu veux me faire ? »
Il était curieux de savoir ce qu'elle pouvait lui proposer, même s'il avait une vague idée en tête... Elle lui lança un grand sourire avant de recupérer sa veste.
« Je te laisse le temps de décider si tu acceptes ou pas pour tester mon remède contre la douleur pendant que je récupère le necessaire pour ça ! » Fit-elle avec amusement. « Parfait. » fit-il avec un sourire amusé.
Ses paroles faisaient écho à sa proposition lors d'une nuit où le sommeil l'avait quitté. Elle quitta sa chambre pour se diriger rapidement vers son pavillon, elle était retournée dans son dortoir après le retour de Neele dont Jeff avait installé dans le bureau et accessoirement sa chambre privative. Elle comprenait parfaitement sa décision. Pendant le trajet jusqu'à sa chambre, des questions se bousculèrent dans sa tête. Allait-elle pouvoir faire sa séance d'acupuncture ? Ou serait-elle bloquée comme à chaque fois où elle avait tenté... Elle respira un bon coup, après avoir vérifié qu'elle avait tout son matériel, elle fit le chemin inverse.
« Alors, quel est ton choix ? » Dit-elle en refermant la porte derrière elle.
Pendant l'absence de la demoiselle, le coréen avait enlevé son pantalon d'équitation pour enfiler -non sans mal- un jogging ample gris. Il s'était ensuite assit sur son lit, s'appuyant sur ses oreillers cette fois. Sa côte fêlée le lançait s'il bougeait trop vite, lui rappellant sa mésaventure toute récente amèrement. Il tourna doucement la tête vers la demoiselle quand elle entra de nouveau dans sa chambre.
« J'accepte ta proposition ! On sera quitte comme ça. »
Il lui adressa un fin sourire. Au fond, il ne savait pas s'il avait vraiment envie q'ils soient quitte. Il aimait bien cette idée de dette qui lui donnait une "excuse" pour la revoir... Peu importait désormais, la curiosité était plus grande que le reste.
« Alors, qu'est-ce que c'est que ce remède contre la douleur ? »
Un sourire en coin et une pointe de curiosité dans le regard... Elle s'approcha du lit, ouvrant sa petite mallette afin de dévoiler ses aiguilles d'acupunctures qu'elle posa sur la table de chevet. Son sourire était dessiné sur ses lèvres en plongeant son regard dans le sien.
« Je suis sûre que tu avais trouvé bien avant que j'ouvre la mallette. Est-ce que tu es confortablement installé ? Il faut que tu sois le plus détendu possible. »
Il sourit doucement et se rassit un peu mieux sur ses oreillers.
« Oui, j'avais deviné. Et ça devrait aller. »
Elle commençait à préparer quelques aiguilles dans ses gestes précis, elle avait repété tellement de fois les mêmes gestes. C'était pour elle aussi simple que respirer, sauf que ses gestes avaient toujours eu une signification particulière pour elle. Le coréen la regarda faire avec attention, se relâchant pour être le plus détendu possible. Il l'écouta également, attentif à ses paroles, se laissant bercé par ses mots.
« Ma mère a accouché de moi à seize ans, c'était encore une adolescente. Elle m'a toujours dit que j'ai été la meilleure chose qu'elle a eue dans sa vie, elle ne m'a jamais regretté, malgré les conséquences de mon arrivée. Sa famille n'a jamais accepté son choix de me garder... Quand à mon père... »
Elle marqua un silence, son attention posé sur l'une des aiguilles qu'elle faisait rouler entre ses doigts. Pourquoi parlait-elle, pourquoi lui disait-elle tout ça ? Car il devait comprendre pourquoi elle n'arriverait pas à terminer sa séance si cela arriverait... Bien qu'au fond, elle ne ressentait pas cette aversion qu'elle avait déjà ressenti dans le passé.
« Elle ne m'a jamais parlé de lui, je pense qu'il était au courant de sa grossesse... L'unique chose que je sais, c'est que physiquement je tiens de lui. »
Elle lui lança un faible sourire auquel il répondit légèrement avant de reprendre son discours.
« Elle s'est retrouvée seule pour m'élever, elle a accepté des boulots difficiles où elle était payée bien souvent une misère. Et forcément, elle s'est usée la santé pour que je ne manque jamais à manger. Elle a toujours été quelqu'un de fort, il ne faut pas la prendre en pitié pour la vie qu'elle a eu. Elle a jamais eu honte de sa situation. »
Yennefer admirait sa mère, elle était fière d'être sa fille. Cependant, elle ne pouvait pas s'empêcher de se dire qu'elle avait été une source de problème pour elle, que la vie aurait été plus simple.
« Elle a eu des soucis de santé, surtout au niveau de son dos. Elle a commencé à faire de l'arthose à trente cinq ans. C'est pour elle que j'ai appris l'acupuncture, je ne peux pas faire disparaitre les dégats de la vie, mais je pouvais la soulager de cette manière. Et comme c'était pour elle que j'ai appris ces techniques, je n'ai jamais pu le pratiquer sur des inconnus ni même des proches pour être honnête. »
Le coréen la regarda gravement. Dans ce cas, il était réellement un cas particulier et il se sentait honnoré par une telle marque d'affection si cela en était bien une. Il ne fit cependant aucune remarque, et se laissa faire. Attentif, la laissant se concentrer sur ses aiguilles et ses gestes. Elle lui attrapa l'une de ses mains, palpant du bout des doigts avant d'y planter l'une des aiguilles. Elle ciblait les zones pour atténuer la douleur, pour stimuler certains organes afin que son organisme circule avec fluidité. La première aiguille fut difficile à poser, elle ne pouvait pas décrire ce qu'elle ressentait, mais cette sensation disparut rapidement. Elle ne tarda pas à glisser ses doigts sur son torse, là où le bandage ne masquait pas sa peau. Yennefer se plongea dans sa tâche, maintenant qu'elle s'était libérée de ses paroles.
« Est-ce que tu commences à ressentir les effets ? »
Son regard était interrogateur, elle espérait que cela fonctionnerait, qu'il serait réceptif à ça. Le coréen, en regardant la demoiselle faire, s'était complètement vidé la tête. Il ne pensait à rien d'autre que ce qu'elle faisait, ce qui était un véritable exploit. Mis à part lors de ses séances de méditation, il n'avait jamais été dans cette situation où il pouvait ne penser à rien. Il plongea son regard sombre dans le sien et hocha doucement de la tête. Il était vrai qu'il se sentait un peu mieux... Comme plus apaisé.
« Oui... Je me sens un peu mieux... » « Tant mieux, je n'étais pas certaine. » Dit-elle en souriant.
Elle récupéra une aiguille qui était différente des autres, un peu plus longue avec surtout une sorte de mèche au sommet. Elle prit son temps pour cibler la zone, puis attrapa un briquet pour allumer la mèche.
« Tu devrais à peine ressentir la chaleur que l'aiguille va dégager, contrairement à ce qu'on peut ressentir en faisant des tatouages. »
Son regard glissa sur ceux qu'elle possédait sur ses bras, lequel avait-il était le plus douloureux ? Elle n'avait pas fait une pièce aussi grande que Kwaïgon, mais mis bout à bout l'encre avait gravé beaucoup zone de son corps. Elle se concentra de nouveau dans sa tâche. Le coréen acquiesça doucement, se laissant faire. En tout cas, elle n'avait pas menti, il ressentit à peine la pointe de chaleur. Mais elle passait plutôt inaperçue par rapport au reste.
« La chaleur permet de stimuler plus en profondeur certaines zones. C'est plus précis que les pressions de shiatsu, même si on utilise les mêmes méridiens. » « En tout cas c'est intéressant... Je n'avais jamais essayé cette technique... Et je suis touché que tu me fasse cette séance. »
Son regard sombre chercha furtivement le sien l'espace d'un instant, avant de repasser à l'observation de ses mains lestes. Il devait lui donner son ressentit. Cela avait une importance. Pour lui en tout cas... Elle avait croisé brièvement son regard avant de plonger son attention sur l'aiguille qu'elle mettait en place.
« Interdiction de tenter de voler comme un oiseau de nouveau dans l'espoir d'une nouvelle séance. Dit-elle en souriant avant de prendre un regard franc. J'ai vraiment eu peur... Bordel de cheval fou ! » « Promis, je le referais plus... »
Même s'il n'était pas certain de pouvoir tenir une telle promesse face à un Eurodisney pire que Wig... Elle revoyait encore la scène se déroulait devant ses yeux, alors qu'un peu plus tôt elle l'admirait sur sa selle, la seconde d'après mille scénarios dramatiques avaient débarqué dans sa tête. Aussi dingue que cela pouvait paraitre, alors qu'elle ne le connaissait que depuis quelques mois, sa présence était déjà devenue importante pour elle. Parce qu'il n’était pas comme les autres, parce qu'elle se sentait rassurée en sa présence et parce qu'elle pouvait être elle-même sans le moindre jugement.
« Ne t'inquiète pas pour moi. Cela n'en vaut pas la peine... » « Ah ça, c'est à moi de le decider ! »
Il eut un sourire léger, bien qu'un peu cynique avant d'inspirer profondément. La douleur s'atténuait, mais il appréhendait un peu la suite. Que se passerait-il quand elle s'éclipserait ? Il préférait ne pas y penser. En tout cas, c'était la seconde fois en quelques mois qu'elle le voyait à moitié nu. Et c'était bien exceptionnel cela aussi...
« Et je vais devoir rester combien de temps avec toutes ces aiguilles ? C'est la seconde fois que tu me vois dans cet état quand même... »
Un sourire se dessina sur ses lèvres, observant l'ensemble des aiguilles qu'elle avait installé dans différents endroits de son corps.
« Hm... Je me dis que tant que tu as des aiguilles plantées dans ta peau, tu ne risques pas de bouger... Et donc quitter ton lit pour vadrouiller. Donc, je me tâte à les laisser ainsi pendant environ une semaine. » Dit-elle en plaisantant avant de plonger son regard dans le sien.
Il laissa sa phrase en suspend, attendant de voir ce qu'elle y trouverait à redire avant de la clôturer ou non... Où voulait-il venir avec sa dernière phrase, elle se pinça légèrement les lèvres.
« Et cela te dérange ? Tu es mal à l'aise... Bordel tu es pudique c'est ça ! »
Elle tentait de comprendre ses pensées, de savoir ce qu'il tentait d'exprimer avec cette phrase inachevée, mais comme toujours il ne semblait rien laisser y paraitre sur son visage. Alors, elle réagit à sa manière pour masquer les choses, parce qu'il est plus facile d'exprimer la dérision dans certains cas. Il eu un petit rire, bien vite bloqué par la douleur. Toutes ses aiguilles avaient tremblées, ce qui était encore plus risible, mais il se retint, reprenant bien vite une expression neutre.
« Non, du tout. C'était une plaisanterie mais dans mon état ce n'est pas facile apparemment. En tout cas si tu me laisse une semaine d'aiguille, il va falloir me ramener des Pierogi tous les jours. Sinon je mourrai de faim ! » « Je savais bien que mes Pierogi t'ont conquis ! » Dit-elle en rigolant.
Cette fois il sourit avant de laisser retomber sa tête sur ses oreillers. Il faisait son possible pour ne pas bouger, mais ce n'était pas forcément très simple. En tout cas, moins qu'il ne le paraissait. Yennefer lança un regard vers sa montre, elle allait devoir commencer à enlever les premières aiguilles qu'elle avait planté.
« Malgré ta chute, j'ai été surprise de voir ton niveau d'équitation. J'avais pas encore eu l'occasion de te voir en selle... On se serait croisé ailleurs qu'à l'académie, j'aurai eu du mal à t'imaginer cavalier en fait. » « Je n'en doute pas... C'est fait exprès. »
Se fondre dans la masse, partout, tout le temps, pour sa propre survie. Elle lui lança un regard avant de reposer son attention sur les aiguilles qu'elle tournait légèrement pour les enlever.
« Tu es vraiment plein de surprise, puis... »
Elle enleva la dernière aiguille qu'il restait, refermant la malette avant de plonger son regard dans le sien.
« Impossible de deviner tes pensées ! » Dit-elle en souriant.
Ce n'était pas un reproche, juste une évidence qui faisait partie de sa personnalité. Et qu'elle appréciait. Cependant, elle ne pouvait pas nier que par moment, elle était assez curieuse de savoir le fond de ses pensées, de pouvoir plus facilement décrire l'émotion sur les traits de son visage. Il se contenta de sourire à sa remarque et se laissa faire, observant encore une fois ses gestes avec attention. La neutralité de ses traits, il l'avait longuement travailler et avait mit des années à apprendre à ne pas réagir, à ne rien montrer et à maîtriser son corps jusqu'au rougissement intempestif de ses joues. Un apprentissage qu'il regrettait parfois, mais qui lui était vital... Il en avait eu l'expérience à plusieurs reprises... Ses nombreuses cicatrices en témoignaient pour lui.
« Mon remède a-t-il été à la hauteur ? Comment est la douleur maintenant... »
Avait-il encore envie de compagnie ? Peut-être avait-il envie de se reposer...
« Toujours là mais plus aussi lancinantes. Merci. Merci beaucoup. »
Son regard était grave, laissant passé juste ce qu'il fallait de sollennité et d'émotion pour faire comprendre à la jeune femme à quel point il lui était reconnaissant. Il ne savait que faire de plus... Malgré le fait qu'il arrive à cerner assez facilement le genre humain, il avait encore quelques lacunes concernant les relations humaines...
« De rien. Je suis contente d'avoir pu légèrement atténuer ta douleur. »
A ce stade-là, elle ne pouvait plus rien faire d'autres. Il y aurait bien l'utilisation de médicament, mais elle n'était pas certaine qu'il accepte d'en prendre. Il est plus du genre à supporter la douleur patiemment. Puis elle laissait cette tâche à Ezra plus tard.
« Vu que tu vas rester bloquer pour la fin de la journée sur ton lit... Est-ce que tu as besoin de quelque chose ? Il ne faudrait pas que tu en viennes à mourir d'ennui ! »
Elle jeta un coup d'oeil à sa montre, Myriam n'allait probablement pas lui en vouloir de trainer... Le planning n'était pas très chargé, son absence n'était donc pas trop grave non plus.
« Déjà, je compte sur toi pour me rendre visite ! Ensuite, mis à part mon pc qui traine sur mon bureau, je n'ai rien d'autre pour m'occuper... Surtout si je suis complètement privé de sortie... » « Je viendrais te rendre visite avec des Pierogi ! »
Il eut un sourire ironique. Lui qui voulait reprendre le cours de son existence au Haras, il était freiné net dans son élan ! Il venait de lui donner une bonne raison pour venir le voir, et elle n'allait pas s'en priver. De toute façon, avec ou sans sa demande, elle serait venue lui rendre visite. Elle n'aurait simplement pas à se creuser la tête pour trouver une excuse pour venir.
« Au fait ton maître chanteur ? Des nouvelles ? »
Il ne voulait pas se montrer trop intrusif, mais il se demandait bien comment tournait cette histoire, et si ses nuits étaient toujours hantés par ce mystérieux inconnu à ses yeux... Elle posa un court instant son regard vers lui avant d'observer la fenêtre. Elle ne s'était pas attendue à une telle question, bien qu'il était rassurant de savoir qu'il l'avait réellement écouté cette nuit-là. Elle pouvait difficilement en parler à quelqu'un de ce léger soucis.
« Ma mère a bien reçu ce que je redoutais de sa part... »
Elles en avaient vaguement discuté, il y avait des choses dont elles ne pouvaient pas en parler par téléphone. Et puis, Yennefer voulait savoir exactement le contenu qu'elle avait reçu...
« Je crains de devoir me déplacer, il ne comprendrait pas par téléphone. »
Encore fait-il qu'elle ose lui répondre de vive voix. La prochaine fois, elle l'affronterait. Cela déterminera peut-être la date de son départ. Le coréen se redressa légèrement à ses paroles et pinça les lèvres. Il n'aimait pas trop tout cela.
« Je viendrais avec toi. » « J'ai pas envie de te faire perdre ton temps avec ça, puis tu dois avoir autre chose de plus importante à faire que venir botter le cul à un mec qui ne comprend pas la définition de non. »
Son ton était sans appel et il était même un peu étonné de sa proposition. Mais il ne ferait pas demi-tour. Sa parole valait pour une promesse, un engagement formel et jamais il n'était revenu sur sa parole. Alors ce n'est pas maintenant qu'il commencerait... Elle était flattée de son attention, mais elle était inquiète de le mêler à cette histoire. Elle savait qu'il pourrait se défendre, n'avait-il pas proposé de tuer son maitre-chanteur. Et de ça,elle savait qu'il en était parfaitement capable. Non, elle avait peur de dévoiler son passé, car s'il venait avec elle... Il découvrirait des choses pas glorieuses sur ses choix, ses actes. Pour une fois, il eu une réaction approprié, ou du moins, c'est ce qu'il en pensa, même si elle était issu d'un élan de spontanéité qu'il ne se connaissait pas -ou trop peu. Il serra brièvement la main de la jeune femme avant de plonger son regard dans le sien.
« Laisse moi décidé de ce qui me ferait perdre mon temps ou non. »
Sa voix avait un ton doux, mais son regard restait inplacable. Elle ne le ferait pas flancher et il voulait être certain qu'elle en ai parfaitement conscience. Après tout, c'était la moindre des choses, après ce qu'elle avait fait pour lui...
Lorsque Liam entra dans l'élevage aux alentours de dix heures, le coréen y était déjà. Il avait nourri les chevaux et attendu que les rations soient terminées en balayant l'allée pour sortir certains des équidés. Il avait également été nourrir les juments de la poulinière et ouvrir les paddocks attenant aux box. Il était un peu fatigué mais cela ne se voyait en rien dans son comportement. La veille, il avait dîner avec Liam et s'en était suivi une longue conversation entre eux concernant Moïra. Il lui avait raconté tout ce qu'il s'était passé à l'automne, la situation dans laquelle Moïra l'avait obligé à se mettre, sa haine envers elle, et enfin son point de vue concernant Izikel. Une chose le rassurait : Liam était de son avis. Mieux valait ne rien dire à Izikel tant que ce dernier ne serait pas apte à digérer la nouvelle et que Moïra avait également retrouvé la raison. Elle ne cessait de harceler le coréen pour qu'il cède en sa faveur mais il tenait bon. Ils convinrent également que le mieux était de garder le reste du groupe dans l'ignorance. Ils étaient encore en weekend prolongé au ski et quand ils étaient au Haras, ils étaient préoccupés par le quotidien. Les chevaux, les concours, la relation tumultueuse entre Lou et Siobhan... Après tout ce qu'ils avaient traversé, ils avaient regagner une certaine innocence et ni Liam ni Kwaïgon ne voulaient briser cela. Liam lui avait demander à plusieurs reprise comment il faisait pour ne pas devenir fou, mais le coréen était resté patient, répondant à ses questions avec le plus de justesse possible, sans pour autant lui en dire trop. La discussion avait durer une très grande partie de la nuit et le coréen avait fini par y mettre un terme pour aller dormir au moins une paire d'heure... Liam, ivre de fatigue, n'avait rien à y redire et était parti se coucher. C'était pour cette raison que le coréen s'était retrouvé seul au petit matin, Liam dormant encore.
« Salut... » « Bonjour ! Pas trop mal dormi ? » « Ça va... Et toi ? » dit-il en baillant.
Le coréen haussa des épaules, avec un fin sourire.
« Un peu courte mais ça va aller. »
L'éleveur hocha de la tête et regarda autour de lui. Plusieurs portes de box étaient grandes ouvertes.
« Tu vas faire quoi alors aujourd'hui ? » « Je comptais d'abord longer Kim puis commencer à apprendre à Triss à marcher en main... Et si je peux, l'amener jusqu'au centre de soin. »
L'éleveur eu un hochement de tête satisfait.
« Parfait ça... Nickel... » « Et toi ? » « Je pense que je vais partir en trotting avec les poneys ce matin et cette après-midi, se sera longe à la pelle... J'aimerais faire tourner Wig un peu... Voir comment il répond. » « Je te souhaite bien du courage alors avec lui... »
Liam sourit. Le coréen n'allait certainement pas se remettre en selle de suite avec le pie... La chute qu'il en avait faite restait encore empreinte dans son corps...
« Dommage que tu ne puisses toujours pas monté... T'as encore mal ? » « Un peu... Je t'accompagnerais bien en trotting mais si je n'attends pas guérisons totale cette fois, ce sera encore pire et bien plus long à se remettre... » « Oui ! Et il est hors de question que je te perde trop longtemps ! »
Ils échangèrent un sourire et entrèrent dans la sellerie. Liam prit les filets de Manny, Yoda, Diego et Sid avant d'aller leur enfiler. Il avait une façon bien à lui de faire faire un trotting à tout les poneys en même temps... Il les attachait à une golfette -deux à l'arrière et un de chaque côté à des barres métalliques qu'il avait fait monter sur les ailes d'une petite voiturette- et partait sur la large piste de l'hippodrome les faire trotter à sa guise. Cette technique faisait soit grincer des dents soit arrachait des sourires. Les poneys cependant étaient habitués désormais et Kwaïgon en souriait. Il n'y avait aucun risque pour les poneys alors... Par contre, Liam ne se risquait pas à cela avec un cheval... Le coréen prit le filet de Kim ainsi que son seau de pansage pour aller déposer le tout devant son box et revenir chercher les affaires de longe.
Le pur-sang avait passé la tête par dessus la porte de son box et regardait son propriétaire faire ses aller et retour avec une certaine curiosité. Le coréen lui sourit, restant un instant devant le box, immobile, jusqu'à ce que le jeune étalon -plus si jeune désormais- ne ronfle des naseaux et ne recule doucement. Le bicolore était d'une constitution agréable, ce qui avait grandement aider le coréen dans son débourrage et dans la relation qu'ils avaient tissés. Il était toujours très discret dans son comportement avec le pur-sang, mais on sentait qu'ils étaient très attaché l'un à l'autre. Et c'est sans doute l'attachement sans limite du coréen pour son pur-sang qui faisait que l'étalon le lui rendait avec autant d'intensité.
Après avoir salué l'isabelle sabino d'une longue séance de grattouilles affectueuses, le coréen entreprit un bon pansage. L'étalon se laissait faire, restant immobile à côté de son cavalier. Une fois le pansage terminé, le coréen l'équipa de cloches et de bandes de polo noires, avant de lui mettre son tapis -noir également- le surfaix auquel était accroché des élastiques pirelli, et son filet, auquel il enleva les rênes. Il enfila ensuite une paire de gant, accrocha une alliance de longe, sa longe, puis, chambrière d'une main et cheval de l'autre, il entraîna son protéger jusqu'au premier espace de travail disponible. Cette fois, c'était une carrière. Ce n'était pas plus mal, il pourrait jouer avec plus de facilité sur le diamètre de son cercle... Il se plaça donc bien au milieu de la carrière et lança l'étalon sur un cercle d'un peu moins de vingt mètres, au pas.
Il laissait toujours, en début de séance de longe, cinq minutes de « liberté » au cheval qu'il longeait, ne lui demandant rien d'autre que de marcher sur son cercle, sans le tronquer et sans changer d'allure. Cela permettait au cheval de se dérouiller un peu et de chauffer en douceur les muscles. Kim, depuis le temps, était rompu à ce genre de séance et savait parfaitement ce qu'il pouvait faire ou non. C'était un moment où le coréen, si le cheval était habitué, pensait à autre chose, sans faire attention à son cheval. La chambrière coincée sous le bras, il avait d'ailleurs son téléphone à la main et consultait sa messagerie. Un nouveau message de Moïra lui arracha un soupir. Il devrait y répondre, mais pas maintenant. Quand il releva la tête cinq minutes plus tard après avoir glissé son téléphone dans sa poche, Kim mâchait son mors et avait commencer à baisser le nez, se mettant presque dans une position de travail. Son pas était cependant légèrement traînant. Le coréen prit sa chambrière en main et donna un claquement de langue à l'intention du cheval, qui activa automatiquement son pas. Le coréen le laissa tourner quelques minutes dans cette allure un peu plus active avant de lui demander le trot. Kim s'exécuta sans broncher, prenant un trot de travail assez régulier. Le coréen ne lui demanda rien d'autre pendant un moment, le laissant s'échauffer tranquillement, avant de lui demander le galop. Kim ne se fit pas prier et passa à l'allure supérieure en s'ébrouant un peu avant de revenir à un galop cadencé. Le coréen le laissa tourner ainsi quelques tours avant de reprendre le trot et demander cette fois des variations d'allures. Le bicolore s'exécutait sagement, concentré sur son cavalier. Une fois satisfait, le coréen le changea de main, pour recommencer le même procédé. Il aimait bien permettre au cheval de galoper un peu au milieu de la détente, avant de commencer le vrai travail d'échauffement. Il avait tendance à faire la même chose en selle, remarquant que les chevaux étaient un peu plus déliés et fluides dans leurs allures après cette courte intermède galopante. Ils s’étendaient mieux.
Une fois sa détente terminée, le coréen se rapprocha du pur-sang pour mettre en place ses élastiques de chaque côté de lui. Un côté plus court que l'autre pour travailler sur l'incurvation du cheval. Il le mit ensuite sur un cercle un peu plus grand que lors de la détente et commença le véritable travail du jour. Il demandait à Kim de changer d'allure tout les deux ou trois tours, ainsi qu'un changement de cercle à l'intérieur de chaque allure. Il agrandissait le cercle, changeait d'allure, puis le rapetissait ou l'agrandissait encore, changeait à nouveau d'allure et recommençait. Il augmenta la difficulté au fur et à mesure de la séance, changeant de main toutes les cinq ou six minutes. Il demandait à Kim de tenir un rythme assez soutenu, c'est pourquoi il ne fit pas durer l'exercice plus de quinze minutes. Au bout de dix minutes déjà, le pur sang était trempé et écumant. Une fois satisfait cependant, le coréen détacha l'enrênement et laissa l'étalon marcher, tête basse, sur un très large cercle. Il patienta ainsi une dizaine de minutes avant de retourner à l'écurie. L'allée comportait une douche d'eau tiède et un solarium et au vue de l'état de transpiration dans lequel se trouvait le pur sang, il n'hésita pas une seconde à le doucher entièrement et le mettre sous le solarium pour le sécher.
Pendant ce temps là, il prépara un seau d'argile qu'il appliqua sur les membres de l'étalon avant de les enrouler dans du papier journal et de faire tenir le tout avec des bandes de repos. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas demandé à Kim un effort aussi soutenu et il savait que tout ces soins ne seraient pas superflus pour l'aider à récupérer. Une fois sa pose argileuse terminée, il s'installa sur un tabouret, dos appuyé contre le mur et prit son téléphone pour y ouvrir l'une de ses applications favorites : sa bibliothèque d'e-book. Plongé dans la lecture de son roman du moment, il ne fit pas attention au retour de Liam, quatre filets à la main.
« C'était bien ta séance ? » « Nickel et toi ? » « Bien. Diego a trouvé sympa de faire des sauts de mouton une bonne partie de la balade mais sympa. »
Le coréen sourit et alla chercher un tabouret pour se mettre à côté du coréen.
« On va déjeuner dès que t'as fini avec Kim ? » « Oui. Remarque je pense qu'il est sec là... Une imper sur le dos et il peut aller au paddock... » « Je vais te chercher son imper. » « Merci ! »
L'éleveur se leva et disparu dans la sellerie pendant que le coréen vérifiait que l'étalon était bien sec. Il était encore à peine humide, il choisi donc de lui mettre une séchante en microfibre sous l'imperméable avant de le laisser dans son paddock. Il finirait de sécher seul et quand il le rentrerait, il lui remettrait sa couverture de box...
***
Après le déjeuner en compagnie de Liam, ils se séparèrent. Le coréen se dirigea tranquillement vers la nurserie. Presque tous les poulains et leurs mères étaient dehors. Mais le binôme qui intéressait le coréen, c'était celui d'Orcanta et sa pouliche, Triss'Opium. Il se dirigea donc vers le box de la palomino, prenant au passage un licol taille foal pour Triss. Il entra doucement dans le box de la jument et referma la porte derrière lui.
« Salut les beautés... »
La jument palomino releva la tête sur lui avant de vite se reconcentré sur son foin. Le coréen tourna la tête vers Triss, cachée derrière sa mère et l'observant avec curiosité. Il s'accroupit et tendit une main vers la petite pouliche noire. Il ne fallu pas plus de quelques secondes pour qu'elle fasse le tour de sa mère et qu'elle vienne sentir la main du coréen. Il profita de cette proximité pour commencer à caresser la petite jument sur tout le corps. Elle fut un peu surprise au début, ses oreilles s'agitant partout. Orcanta leva le nez pour venir souffler sur sa pouliche et elle se calma, laissant le coréen faire. Il caressa la pouliche sur tout le corps et commença à lui prendre les pieds. Il força un peu à la prise de chacun, associant un « Donne » à chacune de ses prises, mais la pouliche fini par s'y habituer, bien qu'elle ne soit pas encore très rassuré. C'est en s'y prenant tôt que la pouliche deviendrait aguerrie dans ce genre d'exercice très vite et serait plus tranquille pendant les soins après.
Il félicita la pouliche de grattouille à la base de l'encolure, lui parlant d'une voix douce. Il n'avait pas pour habitude de parler aux chevaux mais la pouliche avait besoin d'être rassurée... Il lui présenta le licol pour qu'elle le sente, le présentant aussi à Orcanta qui le renifla brièvement avant de souffler et se remettre à son foin. Le coréen savait qu'elle le surveillait du coin de l’œil mais elle lui faisait confiance. Il passa ensuite le licol sur tout le corps de la pouliche avant de lui présenter la muserolle. La pouliche renifla le tout avec curiosité et quand elle fut convaincu que ça ne mordait pas, le coréen lui passa autour du nez. Voyant qu'elle ne réagissait pas, il boucla le licol autour de la tête de la pouliche et attendit. La noire releva la tête et la secoua plusieurs fois avant de lancer un léger coup de cul et secouer de nouveau la tête à plusieurs reprises avant de finalement se calmer. Quand elle retrouva son immobilité, le coréen la félicita grandement, lui grattouillant l'encolure avec une certaine vigueur. La pouliche paru surprise par les sensations que cette récompense provoquait chez elle : elle arqua l'encolure en babillant des lèvres, les oreilles en avant et les yeux brillants. La scène fit rire le coréen et il s'arrêta tranquillement.
Il passa ensuite à l'étape suivante, la sensibilisé à la pression du licol. Il attrapa donc le licol d'une main au niveau de la muserolle et tira doucement sur celle-ci. La pouliche résista mais le coréen accentua son emprise, jusqu'à ce qu'elle cède. Ceci fait, il lâcha à son tour et reprit ses grattouilles de récompenses. Il travailla ainsi avec la jument une bonne vingtaine de minutes, prenant son temps, la tiraillant dans tout les sens en restant immobile avant de recommencer mais en l'incitant à avancer cette fois. Ils firent quelques pas jusqu'au paddock, le coréen commençant à lui inculquer le « Marche » et le « Stop ». Il recommencerait bien sûr, mais il avait déjà bien avancé pour une première session. Finalement, il ne pourrait pas emmener la pouliche voir Siobhan pour une visite vétérinaire. Tant pis, se serait pour son retour au Haras. Il partait le lendemain avec Yennefer et il ne savait pas vraiment pour combien de temps... Il enleva en douceur le licol à la pouliche et lui fit une dernière séance de grattouilles avant de quitter le box, glissant au passage une friandise à Orcanta, qui l'avala goulûment...
***
Il se dirigeait vers son pavillon pour terminer de préparer le voyage de la veille quand il la vit. Une ombre dans son champs de vision. Il se figea, attendant, feintant de regarder quelque chose sur son téléphone pour observer les alentours avec attention. Et de nouveau, il la vit. Mais l'ombre n'en était pas une... C'était Moïra. Son sang se glaça. En un éclair il fondit sur la jeune femme et lui empoignait le bras, l'emportant loin des regards, s'enfonçant dans le bosquet non loin. Il la plaqua à un arbre avec violence, lui mettant dans le même temps son arme -qu'il gardait toujours dans son dos- sous la gorge. La haine emplissait son regard et tendait ses muscles, l'adrénaline lui permettait d'ignorer la morsure de la douleur qui lui envahissait les côtes. Sa voix n'était qu'un sifflement, mais elle contenait toute la rage et la colère qu'il ressentait à se moment là.
« Qu'est-ce que tu fous là ? »
La peur, brute, se lisait dans le regard de la jeune femme. Elle touchait à peine le sol et se tortillait pour essayer de trouver un appui, en vain. Le coréen, un genou entre ses jambes et un bras en travers de sa gorge, ne lui laissait aucune chance, sans compter le canon de son semi-automatique enfoncé dans sa joue.
« Kwaïgon... » « Dis moi, qu'est-ce qui m'empêche de te tuer, là, maintenant, tout de suite ? » « Kwaï... Je... »
Elle cherchait son souffle, visiblement en train de s'étouffer. Le coréen resta là, tremblant de rage, le doigt sur la détente. Il dévia le canon juste à temps. La balle alla se ficher dans un arbre et il lâcha la jeune femme qui s'écroula au sol en toussant, la respiration sifflante.
« La prochaine fois que je te vois entre ces murs Moïra, je ne dévierais pas ma balle. »
La voix du coréen était sans appel, vibrante de colère. La jeune femme hocha de la tête, une main sur la gorge et acquiesça. Elle se releva avec difficulté, trébuchant une première fois avant que le coréen ne la rattrape.
« Je t'accompagne à l'aéroport. Et j'espère que je ne te verrais plus jamais au Haras. Ni même de ma vie. Clair ? » « Comme... de l'eau de roche... »
Il l'attrapa par le bras et la traîna jusqu'au parking, avant de prendre sa voiture pour aller rapidement jusqu'à l'aéroport. Si d'ordinaire il conduisait vite en faisant tout de même attention, la rage qu'il ressentait à ce moment là lui faisait perdre une bonne partie de sa lucidité et de sa prudence. Ce n'est qu'au premier coup de klaxon bien senti qu'il retrouva un peu de son attention habituelle. Moïra serrait la poignée de soutien et son siège avec force. Tant mieux, si elle avait peur. Il ne voulait pas qu'elle remette les pieds au Haras. Tout s'était passé très vite mais en une heure, il avait jeté la jeune femme dans le premier vol privé au départ du Japon qu'il avait pu obtenir et il avait contacté Calum pour qu'il la récupère à l'arrivée.
Ce n'est que de retour au Haras et la voiture de nouveau à sa place de parking qu'il lâcha un hurlement de rage mêlée à la douleur, mordant sa manche et plié en deux... Il était hors de question que quiconque le voit dans cet état. Il réussi à se calmer et prévint Liam qu'il rejoignait un ami de passage, même si c'était faux. Il se traîna ensuite jusqu'à sa chambre et avala deux comprimés qu'Ezra lui avait donné, avant de s'effondrer sur son lit et de sombrer, seulement pour quelques heures... Il avait un cheval à rentrer et un voyage à terminer de préparer...
Le retour au Haras signifiait également une chose pour le coréen : qu'il avait une promesse à tenir. Une mission à terminé. Jonah avait beau avoir été réduit en cendre, il n'en restait pas moins que le contenu de l'enveloppe qu'il avait transmit à Daria, la mère de Yennefer, était toujours en libre service dans les méandres du net. Depuis leur retour au Haras, le coréen attendait patiemment que la jeune femme ne s'endorme pour travailler sur le sujet, chaque nuit. Il comptait mettre un point un programme lui permettant de traquer et lister les vidéos puis un second lui permettant d'aller les supprimer, par tout les moyens possibles à sa disposition. Mais le net, bien qu'il en connaisse désormais toutes les subtilités, restait un labyrinthe un peu trop bien fourni désormais. Les nuits s'enchaînaient sans qu'il ne trouve un moyen efficace de tout couvrir. Il avait réussi son premier objectif, mais les résultats qu'il obtenait étaient trop nombreux. D'autres vidéos étaient sous le même format, pesaient le même poids, avaient les même caractéristiques. La fatigue dût à l'accumulation des nuits trop courtes et des journées trop longues commençait à le rendre moins patient.
Il avait du mal à se rendre à l'évidence et insistait, encore et toujours, pour trouver une solution sans avoir à visionner ce contenu vidéo. Mais cette nuit là, face à un nouvel échec, il fini par accepter l'inévitable. Ce n'était pas une tâche qu'il pourrait confier à quelqu'un, même à Calum. Il y avait des limites dans ce qu'il acceptait de faire faire aux autres. Il eu un soupir et posa les yeux sur l'horloge du pc : presque quatre heures du matin. Il devait être le seul à être encore debout dans le Haras... Il jeta un œil à Yennefer, endormie sur son lit. Elle ne pouvait pas voir ce qu'il faisait depuis son lit, si jamais elle s'éveillait. Mais elle devait se douter, à chacune de ses absences nocturnes -même s'il restait toujours dans la chambre ou pas loin- de ce qu'il faisait. Cependant, d'un accord tacite, ils n'en avaient jamais parlé. Il faisait en sorte de se glisser sous les draps une heure ou deux avant la sonnerie du réveil pour finir la nuit avec elle...
Il ne savait pas vraiment s'il redoutait ce visionnage des vidéos ou non. La vision qu'il avait d'elle ne changerait pas, c'était une évidence, mais il ne savait pas ce qu'il ressentirait. C'était déjà assez désagréable de l'imaginer dans les bras d'un autre, alors le voir en image -sans, de surcroît, avoir une idée précise de ce que pouvait être le genre de soirée durant lesquelles elle avait été filmé- restait une épreuve qu'il avait considéré jusque là comme insurmontable. Il prit une grande inspiration et coupa le son du pc -l'image serait déjà assez désagréable, il n'avait pas besoin du son en plus- avant de finalement mettre la première vidéo en lecture, essayant d'occulter le fait que Yennefer figurerait dedans. S'il arrivait à se persuader que c'était une inconnue, peut-être que le visionnage lui serait plus supportable ? Les premières minutes de film, il y parvint. La qualité de l'image laissait à désiré, et malgré l'état pitoyable de ses acteurs, ce fut d'abord la curiosité qui le poussa à continuer son visionnage. Pour l'instant, Yennefer n'apparaissait même pas à l'écran. Il se demandait où cette vidéo allait le mener...
Mais il déchanta très vite. Les bras croisés sur son torse, son rythme cardiaque s'accélérait à chaque seconde de plus qu'il voyait et il sentait un étau lui enserrer la poitrine. Un goût amer envahit sa bouche en même temps que la colère et la rage le submergeait. Il serra les poings, jusqu'à ce que la vidéo lui fut insupportable à regarder. Il referma l'écran avec violence, et le craquement que produisit la dalle au contact du clavier n'augurait rien de bon pour l'intégrité du pc... Mais il était sourd au bruit qu'il avait pu faire. Il se leva d'un bond, ignorant également la chute du téléphone sur le parquet de sa chambre et fit les cent pas, un main se pinçant l'arrête du nez, l'autre sur la hanche. Il était hors de lui et essayait -en vain- de se calmer. Mais il n'arrivait pas à se sortir de l'esprit les images qu'il venait de voir. Il n'arrivait pas à calmer les battements de son coeur, ni sa respiration chaotique et encore moins les tremblements qui secouaient son corps. Il n'arrivait pas à prendre le recul nécessaire à la poursuite de sa tâche. Il perdait son sang-froid. Une folie meurtrière commençait à doucement l'envahir. S'il rouvrait son pc à cet instant là, ce ne serait que pour une chose : isoler les visages de ces hommes et les traquer, l'un après l'autre, pour leur faire payer... Il perdait rarement son sang froid de la sorte. Cela faisait bien longtemps qu'une telle rage ne l'avait pas envahit au point d'empêcher tout raisonnement logique. Même Moïra, qu'il avait bien failli tuer avant son départ pour le ranch des Marshall n'avait pas réussi à le mettre dans un tel état. Et pourtant... C'était bien une des seules qui aurait pu... Ou du moins c'est ce qu'il pensait.
Il fini par lever les yeux au ciel, les deux mains sur les hanches, mais sans parvenir à se calmer pour autant. Il serrait les dents, ruminait sa rage, essayant d'organiser ses pensées autrement qu'avec le seul et unique but de tuer. Une petite part de lucidité le faisait hésiter, et c'est bien grâce à elle, et seulement grâce à elle, qu'il n'était pas déjà en train de fourrer des affaires dans un sac de voyage. Dans le cheminement archaïque de ses pas autour de sa chambre, il se retrouva face au lit, et à Yennefer. Il se figea, la regardant, sans parvenir à se calmer ni à changer l'image qu'il présentait : le regard noir de rage, mâchoire serrée, respiration chaotique et poings serrés sur ses hanches. Les tremblements ne devaient sans doute pas se voir tellement le reste de son être était tendu... Il ne dit rien, incapable de sortir un mot rassurant ou même intelligible. Il resta figé à la regarder, ruminant ses envie de meurtre avec de plus en plus de force...
Elle fut réveillé par l'agitation de ses pas, ainsi que le bruit du portable. Elle mit cependant quelques secondes avant de réellement ouvrir les yeux, se tournant vers le côté en cherchant du regard le coréen. Elle se figea légèrement en le voyant, en voyant cette noirceur dans son regard. Il pulsait dans ses veines une rage qu'elle n'avait jamais eu l'occasion de voir chez lui, et qui lui coupa le souffle. Elle se redressa, se mettant sur les genoux avant de venir lui toucher très prudemment le bras.
« Kwai... » murmura-t-elle du bout des lèvres.
Il s'était passée quelque chose... Elle jeta un bref regard vers l'ordinateur, sachant qu'à cette heure-ci il devait bosser... Mais elle ne savait pas sur quoi exactement. Son attention se reposa très rapidement sur lui, inquiète. Il détourna les yeux d'elle, au prix d'un grand effort, n'arrivant tout de même pas à articuler un mot. Il l'avait entendu, mais il ne parvenait pas à faire la part des chose, à se détaché de ce qu'il venait de voir. Il n'arrivait presque pas à réfléchir. Il n'avait même pas senti sa main sur son bras. Il fini par prendre une inspiration, difficile, hachée et tenter de prendre la parole. Mais ses paroles se retrouvèrent bloquée dans sa gorge.
« Comment... »
Il secoua la tête, posant son regard toujours aussi sombre sur elle. Il essayant d'organiser ses mots mais c'était en vain. Le souffle court, il s'éloigna d'elle, allant vers la fenêtre, avant de revenir. S'il ne bougeait pas il finirait par taper sur quelque chose... Elle resta un moment immobile, paralysée par son inquiétude face à cette colère, qui bien qu'elle ne semblait pas être dirigée vers elle, était d'une telle intensité. Elle se força à respirer calmement avant de se lever doucement du lit, s'approchant de lui pour venir enrouler ses bras autour de son corps, posant sa tête sur son dos.
« Je suis là... »
Sa voix avait été qu'un murmure, ses mots spontanés... Elle ne voulait pas lui dire de se calmer, sachant qu'il ne pourrait probablement pas dans son état actuel. Et elle voulait juste qu'il sache une chose, qu'elle était là... Rongée par l'inquiétude. Il s'immobilisa quand elle passa ses bras autour de lui mais fut incapable de se détendre. Il se força à rester immobile, mais il restait sourd à ses paroles. Il ne put rester que quelques secondes ainsi, avant de se dégager de l'emprise de la jeune femme et lui faire face. Sa voix rauque, étouffer par l'étau qui lui serrait toujours la gorge, semblait venir d'outre-tombe.
« J'ai dû regardé les vidéos de l'enveloppe. »
Il détourna les yeux, sentant une nouvelle vague de rage l'envahir. Elle se figea, sentant sa respiration se bloquait au travers de sa gorge... Elle avait redouté ce moment, bien qu'elle n'aurait jamais pu imaginer que cela le plongerait dans une telle rage.
« Enfin les... Je n'ai même pas pu aller au bout d'une seule ! C'est... Yen ! Comment ont-ils pu ? Je... »
Il secoua négativement de la tête et se détourna à nouveau, posant brièvement son visage entre ses mains avant de reposer les poings sur ses hanches. Il n'arrivait pas à rester immobile, faisant sans arrêt quelques pas, de droite à gauche.
« Il y a des choses que je comprends. Je comprends qu'on puisse tuer des gens. Je comprends même qu'on puisse tuer des enfants ! J'arrive à comprendre qu'on puisse kidnapper, voler, se droguer ou harceler. Je suis même... »
Il eu un léger rire cynique.
« Je suis même partisan de la torture dans certains cas. Je ne crois pas être quelqu'un de très regardant. Et je pense même que pour nombre de gens, je ne suis pas respectable ! Et je les comprends... Oh oui je les comprends ! Mais ça !! »
Au fil de ses paroles, son ton montait, criant presque sur la fin, mais restant dans la limite. Il tendit un bras rageur dans le vide, la main tremblante de rage. Quand il reprit la parole, il avait reprit sa voix d'outre-tombe, tremblante d'une rage profonde.
« Le viol, Yennefer, sous toute ses formes, je ne comprends pas. Et je ne cautionne certainement pas. »
Elle l'avait écouté silencieusement, sentant de plus en plus l'horreur battre dans ses veines. Elle s'était toujours voilé la face au sujet de ses soirées, elle avait préféré les oublier sans jamais y mettre un terme dessus... Parce que c'était plus facile à vivre ainsi qu'accepter cette affreuse vérité. Cependant, ce mot qu'elle n'avait jamais osé prononcer, il le prononça pour elle. Son regard se détourna vers le sol, crispant ses mains avec douleur avant de venir s'asseoir sur le rebord du lit en sentant ses jambes tremblées de plus en plus.
« Je veux juste... que ses vidéos disparaissent... et ne plus en entendre parler... On ne peut pas changer ce qui s'est passé... »
Elle avait murmuré ses mots du bout des lèvres, avant de soupirer lourdement.
« Je suis désolée... que tu as du voir ça... Je... »
Elle ne termina même pas sa phrase, la gorge soudainement nouée. Il soupira fortement, difficilement mais il n'arriva tout de même pas à évacuer la rage qu'il ressentait, ni les tremblement.
« Ne sois pas désolée. Ce n'est pas de ta faute. Tu n'as certainement pas à t'en vouloir pour ce qu'il s'est passé. »
Il reprit ses cent pas, les mains toujours sur les hanches. Des larmes de rage plein les yeux.
« Tu es seulement tombé sur une bande de putain de connards qui ne perd rien pour attendre... »
De nouveau il serra les dents. Il fallait qu'il se calme. Et pour cela, il fallait qu'il cesse de marcher. Il s'assit à côté de la jeune femme, les mains serrées sur ses genoux. Il fixait ses pieds, essayant de calmer les tremblements et sa respiration. Rassembler ses pensées. Mais il avait beaucoup de mal... Peu lui importait que cela fasse parti du passé. Ils l'avaient fait souffrir et il ne voyait rien d'autre que ce fait. Il fini par se tourner vers la jeune femme après de longues minutes à tenter de retrouver son calme. Il y était quelque peu parvenu. Quelques larmes colériques avaient laisser des sillons salés sur ses joues. Il posa avec un peu de brusquerie une main sur le menton de la jeune femme, l'obligeant à croiser son regard et susurrant plus que murmurant entre ses dents.
« Ne sois jamais. Jamais Yen. Désolée pour ça. Est-ce que c'est clair ? »
Il lâcha son menton, une vague de tremblement envahissant ses mains et serra de nouveau son genou, sans pour autant la quitter des yeux, de son regard sombre... Elle hocha la tête pour lui répondre positivement à ses mots, puis elle posa sa main sur la sienne avec douceur.
« Tu ne peux pas tuer tous les connards de cette terre... »
Elle marqua une légère pause avant de poursuivre dans un murmure.
« Je ne veux pas ça... Je veux juste que tu restes avec moi... »
Elle avait réellement peur que cette rage le pousse à une vengeance destructrice, qui pouvait avoir des conséquences et mettre sa vie en danger... Et cette inquiétude, elle brillait dans l'iris de ses yeux... Elle avait besoin de lui, de sa présence et c'était tout ce qu'elle lui demandait. Il eu un sourire cynique et détourna les yeux pour regarder ailleurs, secouant doucement la tête.
« Je ne veux pas tous les tuer... Je veux seulement les tuer eux. »
Il leva les yeux vers le plafond et ferma les yeux, essayant de calmer sa respiration, sans y parvenir. Le flot de ses pensées était encore trop vif. Mais une partie de lui avait entendu les paroles de la jeune femme et il restait là. Il fini par se lever, avec une certaine brusquerie et marcher un peu. Cela l'aida à réorganiser ses pensées. Quand il reprit la parole, son ton était un peu plus calme, bien qu'empreint d'un fond de colère.
« Excuses moi. Je ne voulais pas te réveiller. »
Il le pensait, même si cela était difficile à voir dans le ton de sa voix : colérique, un peu lointain. Il posa de nouveau les poings sur ses hanches, s'arrêta et leva la tête, les yeux clos, cherchant au fond de lui la ressource pour revenir au calme. Mais c'était bien loin en lui... Elle lui lança un léger sourire en secouant la tête, il n'avait pas besoin de s'excuser pour ça... Elle était même soulagée, car il aurait pu très bien partir en silence accomplir un véritable massacre dans sa rage sans qu'elle ne le sache. Elle se leva, se dirigeant vers lui avant de venir se blottir contre lui. Elle le serra un peu fort, fermant les yeux en posant sa tête contre son torse... Elle aussi avait du mal à faire le tri dans ses pensées. Cela lui prit quelques minutes. De longues minutes. Mais il fini par se calmer, et refermer ses bras autour d'elle, baissant la tête pour poser le nez dans ses cheveux. Le moyen le plus efficace pour le calmer, finalement. Petit à petit, il reprit une respiraton plus calme et les tremblements cessèrent. Il serait toujours en colère contre ceux qui lui avait fait du mal. Mais peut-être que cette première vaue destructrice était passée, il pourrait plus facilement faire la part des choses. Il eu un soupir haché avant de finalement prendre la parole en douceur.
« Je suis désolé que tu m’ait vu dans cet état... Ça ne m'arrive pas souvent... Pratiquement jamais même... »
Mais cette fois, il n'avait pas pu s'en empêcher, et le contrôle avait été bien difficile à retrouver... Elle releva la tête vers son visage, plongeant son regard dans le sien avant de venir poser ses mains sur ses joues.
« Je préfère te voir dans cet état, que savoir que tu gardes tout ça pour toi... au point que cela va finir par te détruire... »
Elle déposa un chaste baiser sur ses lèvres avant de poursuivre avec une douce sincérité.
« Je t'aime avec tes qualités, tes défauts... Que tu sois de bonne humeur, taquin ou dans une colère comme celle-ci... J'accepte ton passé, tes valeurs... Ne t'excuse pas pour ça... Je t'aime tel que tu es, alors reste-toi même... Tu peux perdre le contrôle avec moi, il m'arrivera probablement d'exploser un jour ou l'autre... Dans toutes les situations, je serais là. »
Il se contenta de hocher positivement de la tête avant d'enfouir son visage au creux de son cou. Il soupira, restant un instant dans ses bras avant de finalement l'entraîner jusqu'à son lit, pour s'y installer. Il attendit la jeune femme, collant son torse contre son dos, l'enserrant contre lui avec une certaine force, enfouissant le visage dans ses cheveux emmêlé... La tension s'évacuait peu à peu, le secouant de spasmes involontaire par moment, mais à son contact, il retrouvait peu à peu son état normal. Il fini par déposer un long baiser sur sa nuque après un léger soupir.
« Je t'aime aussi Yen... »
Mais il ne pouvait pas lui promettre qu'il serait toujours là, cela, il se l'interdisait encore... Elle posa ses mains sur ses bras, appréciant d'être ainsi blottie contre lui. Elle ferma les yeux, écoutant sa respiration et tâchant de chasser ses dernières pensées. Et si elle ne lui avait jamais donné le contenu de cette enveloppe... Par moment, elle en venait à regretter son geste, à regretter sa demande. Elle aurait peut-être pu se contenter qu'il supprime juste la menace que représenter Jonah, laissant ainsi le passé au passé.
***
La courte nuit du coréen avait été agité et il avait eu bien du mal à se sortir de la tête les images qu'il avait vu dans la nuit. Malgré tout, la relative chaleur des rayons solaires avait eu le don de calmer ses angoisses et sa rage pour faire de lui le Kwaïgon que tout le monde connaissait à l'heure du petit déjeuner. Il descendit avec Yennefer, tenant distraitement sa main. Ce matin là, la table du petit déjeuner sembla bien vide au coréen. Il prit place à coté de Liam, qui semblait désespéré. Il n'était d'ailleurs pas très en forme apparemment... Ah peine s'étaient-ils assit que Liam poussait un soupir, joignait les mains en prière et regardait Yen d'un regard suppliant.
« Yen, je t'en supplie... Sauve moi la vie... » « La note risque d'être salée à force. » dit-elle en plaisantant avec de continuer. « Tu as besoin d'aide pour quoi ? »
Elle s'était servi une tasse de café bien chaude, en déposant aussi une devant le coréen en souriant. Puis elle commença à préparer des tranches de brioches, en restant attentivement à la réponse de l'éleveur. Le coréen laissa faire Yennefer, observant avec une légère grimace son téléphone, trouvé par terre, qui présentait quelques éraflures. Il n'avait pas vraiment aimé l'animation nocturne... L'éleveur gardait les mains jointes et les yeux plongé dans ceux de la polonaise, secouant ses mains pour appuyé ses paroles.
« Cathy est malade donc Izikel ne sera pas là aujourd'hui. Myriam est en sortie scolaire. Siobhan a bossé toute la nuit. Neyla s'est foulé le poignet en tombant hier, elle a passé la nuit aux urgences avec Logan. Donc j'ai quatre cavaliers en moins... Mais toujours quatre chevaux à travailler ! Monte avec nous aujourd'hui. Je t'en supplie à genoux ! »
L'éleveur fit une grimace, espérant de tout cœur que la demoiselle accepte sa proposition... Sinon, il manquait de solutions... Elle but une gorgée de son café, avant de le regarder un instant silencieusement avec un sourire amusée sur ses lèvres. C'était amusant de voir Liam la supplier ainsi, presque tentant de le voir se mettre à genoux.
« Je vais avoir le droit à une monture complètement dingue ? » dit-elle en souriant.
Elle ne possédait pas un grand niveau en équitation classique, contrairement en western où Jeffrey se faisait un plaisir de la coacher très régulièrement. Cependant, depuis quelque temps elle s’entraînait avec Aliénor afin de progresser dans sa pratique. Mais, c'était toujours des séances en duo... Jamais avec le reste de l'équipe, jamais dans un cours collectif sous la direction de Liam. Si encore, c'était de l'attelage... L'éleveur jeta un coup d’œil à Kwaïgon avant de revenir à Yennefer. Puis de nouveau à Kwaïgon, qui retint un soupir, comprenant parfaitement où il voulait en venir. Il hocha vaguement de la tête en portant sa tasse à ses lèvres alors que Liam adressait un grand sourire à Yennefer.
« Je te propose Kim ! Il est gentil. Adorable même. Encore plus gentil et attentionné que son propriétaire. Et contrairement à lui, pas fou. Vendu ? »
Il fit de nouveau un sorte de grimace, à mi chemin entre le sourire et le serrage de dent, les mains toujours jointes. Elle se figea légèrement avant de poser son regard vers le coréen.
« Tu es d'accord... Non parce que finalement un fou m'irait aussi... » marmonna-t-elle dans sa tasse.
Elle n'avait pas été à l'aise de montrer Drink Up la première fois devant Aliénor, ne voulant pas faire de grosses erreurs impardonnables. Mais avec Kim, la pression serait encore plus importante. Elle savait l'importance qu'il représentait pour le coréen, elle n'était pas certaine que son niveau soit à la hauteur de ce cheval... Aussi gentil et adorable pouvait-il être. Le coréen avala sa gorgée de café en hochant de la tête en la tournant vers la jeune femme.
« Oui ! Je préfère te voir sur Kim que sur Wig' ! »
Il lui sourit doucement avant de reprendre en fronçant doucement des sourcils.
« Tu ne veux pas monter Kim ? »
Il devait bien avoué qu'il se demandait pourquoi... Son côté rationnel le poussait à penser que parmi les chevaux de la Team qu'il pourrait confier les yeux fermé à la jeune femme, seuls Kim et Unfor' figureraient sur sa liste. Mais Liam le savait également et s'il n'avait pas proposé l'étalon grullo, c'est qu'il était déjà prit... L'éleveur suivait leur conversation, les mains toujours jointes, accroché à leurs lèvres. Ezra les rejoint tranquillement, observant à son tour le spectacle sans trop comprendre ce qu'il se passait. Elle termina sa tasse de café, jetant un regard vers Ezra en guise de bonjour muet pour reposer son attention sur Kwaïgon en soupirant légèrement.
« Non, c'est surtout que je ne veux pas faire des bêtises avec lui. Je m'en voudrais si de l'agneau il passe au diable à cause mes maladresses de débutante. »
Elle récupéra un morceau de brioche, y rajoutant une bonne quantité de confiture avant d'y croquer un bout.
« J'ai l'impression que le classique est plus technique que le western, alors que je sais que non... Mais cela me stresse plus, j'avoue ! Puis, si je fais du mal à ton fils tu vas demander le divorcer ! » dit-elle en plaisantant.
L'humour, toujours sa solution pour évacuer ses émotions... Au fond, elle était très honorée de cette opportunité de faire une séance avec Kim. Et cela se lisait dans son regard, elle voulait juste bien faire par respect pour lui. Le coréen sourit, et Liam et Ezra également. Liam fini même par séparer ses mains pour prendre son café et en boire une longue gorgée. Kwaïgon se risqua à poser brièvement une main sur la joue de la jeune femme, lui caressant doucement la joue du pouce avant de reprendre sa tasse de café.
« Non, ne t'inquiète pas. Tu ne peux pas faire de bêtise avec lui. » « Attends de me voir monter alors... » « Et puis au pire si c'est le cas, il rattrapera ça en deux deux. »
Le métis sourit en avalant son café et piqua un morceau de brioche à la jeune femme, supportant sans broncher le regard noir du coréen en retour. Liam lui, est tout sourire, véritablement ravi que la jeune femme accepte de resté avec eux. Elle lança un regard à Ezra avant de répliquer spontanément à son geste.
« Hé dit ! La prochaine fois tu vas me piquer mon manger directement dans ma bouche ou quoi ! » ronchonna-t-elle malgré le ton amusé de sa voix. « Ohla non ! Je laisse ça à Kwai. Sans t'offenser. »
Le métis sourit alors que le coréen soupirait de désespoir. Sa franchise était par moment à tous les niveaux, que ce soit sérieux ou non. Ses pensées par moment, elle devait les laisser s'échapper. Et là, elle devait évacuer au maximum ses émotions, surtout en pensant au futur cours collectif avec la team.
« Du coup, on sera combien à cheval ? » « Ezra qui sera sur Chuwbaka, Dean avec Dux, Lou avec Unfor', Ale avec Invictus et Kwai sur Wig'One. Et c'est une séance de plat. Barre au sol. »
Liam sourit, plutôt fier de son idée apparemment. Kwaïgon soupira fortement à l’énoncé de sa monture du jour mais il ne broncha pas.La séance risquait d'être sportive pour lui mais bon... Neyla enchaînait les chutes avec lui et commençait à avoir peur de le monter... Il fallait bien que quelqu'un prenne le relais... Et Ale autant qu'Ezra étaient déjà pas mal servi avec les leur... Il ne restait donc plus que lui...
« Je vous laisse terminer le petit dej et on se retrouve à l'élevage ? » « Oui chef ! »
Kwai se contenta d'acquiescer et faire un léger signe de la main à l'éleveur qui disparu rapidement, les laissant tout les trois, Ezra un grand sourire aux lèvres, essayait de piquer un autre morceau de brioche à la jeune femme, aussi discrètement que possible... Elle leva les yeux au ciel avant de lui donner un morceau de brioche en souriant, pendant que son regard se posa sur le coréen.
« Merci !! »
Le métis englouti son morceau de brioche, les yeux brillants de malice.
« Je t'aide à mettre de la colle superglue sur ta selle... Car je présume qu'il n'a pas changé depuis la dernière fois ce fou... »
Elle ne remettait pas en cause le niveau du coréen, qui était impressionnant... Mais face à une telle monture, même un cavalier professionnel de son niveau en voyait des verts et des pas mûres. Et la nuit avait été courte... Son éclat de rage n'avait pas arrangé son état de fatigue, c'était surtout ça qui l'inquiétait un peu... Le coréen sourit doucement et termina sa tasse de café avant de répondre.
« Non ça va aller. J'arriverais à m'en sortir si on saute pas. »
Après tout, c'était surtout en saut qu'il était le plus dissipé... Le métis se leva, débarrassant la table en vitesse sans demander l'avis de ses compères. Il ne leur restait plus qu'une chose à faire, rejoindre l'allée et se mettre en selle !
***
L'allée était plutôt calme. Alejandro avait sorti tout les chevaux qu'ils ne montaient pas et Liam s'était occuper de mettre les poneys dans un pré communautaire avec Dom, qui était normalement chez Louna. Sans les poulinières, l'élevage était également plus calme. Il ne restait presque plus que des étalons. Lou était déjà en train de panser Unfor, le bel étalon lusitanien de Myriam, qui, attaché dans l'allée, regardait fièrement au dehors, la tête bien haute. Kim, comme à son habitude, ronfla à l'arrivée de son cavalier et le coréen ne se priva pas d'aller le saluer d'une grattouille derrière l'oreille.
« Salut gamin... C'est pas moi aujourd'hui. C'est maman Yen. T'as intérêt à être sage avec elle. » « Sinon, privé des caresses de papa ! » dit-elle en rigolant.
Il servit au pur sang une regard sévère, mais l'étalon garda son regard doux et attentionné, observant son propriétaire avec curiosité. Le coréen entraîna la jeune femme dans la sellerie, pour lui présenter le matériel de l'étalon et de prendre également celles de Wig. Elle l'avait suivi jusqu'à la sellerie, pour le moment elle n'était pas encore stressée. Mais elle savait qu'une fois en selle, les premières secondes vont être fatalement une épreuve pour elle. Le temps qu'elle s'enferme dans sa bulle avec sa monture, oubliant ainsi la présence des autres cavaliers...
« Est-ce qu'il y a des choses que je dois savoir sur son fonctionnement en selle ? Ou tu me laisses la surprise de découvrir par moi-même ses secrets ? »
Elle ne savait pas si elle préférait savoir ou non... Mais s'il y avait un truc important à savoir, elle aimerait peut-être en connaître l'existence. Le coréen attrapa la selle de Wig et haussa doucement des épaules.
« Non... Pas vraiment... Il manque un peu de souplesse, il faut insister pour qu'il s'incurve, mais sinon... Il a de l'énergie mais il est facile à canalisé. Il va peut-être te tester un peu au début mais ça n'exède pas cinq minutes. Pour le coup, c'est vraiment une crème. Très à l'écoute et très appliqué. Il n'y a absolument aucune raison pour que vous ne vous entendiez pas. »
Le coréen sourit et attrapa le filet de sa monture du jour, qu'il passa sur son épaule, se penchant ensuite pour attraper son seau de pansage. En sortant, il croisa Liam, qui leur annonça le lieu du cours -une carrière de dressage- et qu'il les attendait dans une demi heure. Ils avaient intérêt à se dépêcher s'ils voulaient être à l'heure... Le coréen sourit à Yen et se dirigea vers le box de Wig, prêt à en découdre...
Une demi heure plus tard, ils étaient dans la carrière. Lou et Dean étaient déjà là et discutaient, marchant côte à côte, rênes longues. Erza se mettait en selle, Ale resanglait. Le coréen adressa un sourire rassurant à la jeune femme avant de se mettre en selle. Il avait perdu un peu en souplesse mais il devrait s'en sortir pour la séance du jour... Dès qu'il fut en selle, Wig'One prit un pas actif, l'oeil vif, aux aguets. Le coréen remonta sur ses rênes d'une main légère, chaussant ses étriers en même temps. Il n'aurait pas vraiment le loisir de porter attention à Yen durant cette séance... Si Wig se montrait aussi vif tout au long de la séance...
« Ok les enfants ! Détente individuelle. Variez beaucoup à l'intérieur de vos allures, soignez vos incurvations. Le thème du jour, c'est la rectitude. Autant en ligne droite qu'en courbe. Je ne veux pas voir des chevaux anguilles ! C'est surtout valable pour toi Ale et pour toi Kwaïgon. Yennefer, Kim a tendance à rechigner sur l'incurvation à gauche. S'il ne veut pas répondre à ta jambe, on mettra des éperons. Lou, si je t'ai mit Unfor', c'est pour que tu travaille ta position. Tes demandes ne sont pas assez précises et avec Unfor, ça ne pardonne pas, il est ultrasensible à l'assiette et aux touchettes. Dean, lui en demande pas trop, il a encore des courbatures de la séance d'hier. Si vous avez des questions je suis là ! »
Après avoir donné ses consignes, l'éleveur entreprit d'installer des séries de barres au sol formant de jolis motifs géométriques sur le sol de la carrière. Ses cavaliers étaient plutôt studieux. Dean continuait de marcher rênes longues, observant les autres d'un air un peu fatigué. Lou et Ezra s'était mit au travail dans un pas actif et Ale était déjà aux prises avec son étalon un peu récalcitrant. Le coréen pour sa part, tentait de canalisé l'énergie du bicolore à bon escient et le concentré sur des exercices simples mais rapides, changeant souvent de sens et de demande...
Elle avait écouté attentivement les consignes de Liam, en ruminant pour la forme sur le thème du cours. Puis après un bref regard vers les autres cavaliers, elle se plongea petit à petit dans sa bulle. L'étalon lui avait dévoilé pendant le pansage quelques facettes de sa personnalité, identique à la description qu'on avait pu lui faire le concernant. Et maintenant, qu'elle était sur son dos... Elle allait en découvrir des nouvelles. Les premières minutes, elle fut assez hésitante, maladroite dans ses demandes. Et Kim en profita pour la tester. Cependant, Kwaïgon avait raison... Il se calma rapidement quand elle reprit confiance en posant ses limites et en le recadrant correctement. Yennefer avait une équitation fine, jouant beaucoup avec le poids de son corps... Une équitation à l'instinct comme avait tendance à décrire Jeffrey. Elle prit son temps pendant la détente de faire connaissance avec l'étalon, beaucoup de transition afin de trouver la meilleure façon de communiquer avec lui dans ses ordres. Elle remarqua très rapidement que le côté gauche était sa bête noir pour l'incurvation, la poussant à jouer plus finement. Et elle devait bien avouer une chose, Kim était vraiment une crème, car il acceptait ses erreurs de débutant, mettant même du sien dans le travail.
Liam gardait un oeil sur ses cavaliers, corrigeant certaines choses, donnant des conseils pour d'autres. Quand il jugea la détente accomplie pour tout le monde, il rassembla ses élèves du jour, sauf Kwaïgon, pour leur expliquer l'exercice de la leçon. Le coréen, pendant ce temps là, lâchait un peu la bride au bicolore et le laissait galoper sur de larges cercles, l'autorisant à lâcher un peu de jus.
« On va commencer par la ligne centrale, au trot. Arrivé au bout vous passez par la pointe du V et vous continuez tout droit. On augmentera la difficulté au fur et à mesure. A la suite du V; départ au galop sur quelques foulées, puis retour au trot, vous revenez sur le dispositif, départ au galop à l'autre main etc. Attention à ne pas les laisser s'emballer. A avoir un bon trot en entrant sur les barres sinon ils feront des faux pas à l'intérieur des barres. Si vous ralentissez ou que le cheval part au galop au dessus des barres, c'est que votre trot était mauvais. Et c'est pas une fois sur les barres qu'il faut demander un trot de travail et de l'engagement, c'est avant. Une à deux foulées avant la première barre, on cesse de demander et on laisse le cheval y aller, sans pour autant perdre le contact. Si pas de question, c'est parti. »
Il se posta à côté des barres alignées et colorées et attendit le passage du premier cavalier. En grands habitués, les cavaliers laissèrent pas mal de distance entre eux et se mirent doucement en route. Dean passa le premier. Dux fit quelques touchettes paresseuses mais il fini par lever les pieds. Unfor y alla avec entrain mais se stoppa net en plein milieu, la faute à une erreur d'assiette de sa cavalière. Ezra n'eu aucun problème, il fit même le meilleur passage. Ale étant en difficulté et devant se mettre sur un cercle au galop avec son bai qui cherchait à carrément refuser le passage des barres, il laissa courtoisement Yennefer y aller. Kwaïgon marchant un peu un Wig One en sueur... Yennefer avait observé attentivement les passages des autres cavaliers, se rassurant ainsi qu'elle avait bien compris l'exercice demandé. Puis, elle tacha de faire le vide, n'osant même pas jeter un regard vers le coréen en sachant qu'elle risquerait de se mettre trop de pression ensuite. Elle joua avec ses doigts délicatement, cherchant à obtenir ce fameux trot de travail avec un bon engagement avant d'aller sur les barres. Son passage n'était pas parfait, mais elle n'était mise sérieusement à la pratique que depuis son arrivée au Haras...
« C'était pas mal ça Yen ! Reste un peu plus à ta place et se sera mieux. Kwai ! A toi ! »
Le coréen acquiesça et se reconcentra sur son cheval, prenant le trot, et quittant Yennefer et Kim du regard. L'étalon bicolore fit un passage assez sautillant, levant haut ses pieds pour être sûr de ne rien toucher et lâcha une belle ruade sur le passage au galop. Le coréen ne put pas le remettre de suite au trot mais c'était déjà ça.
« Bien ! Caresse ! Ale c'est quand tu veux. Les autres on enchaîne à l'autre main hein ! »
Ale tenta un passage, mais Invictus se planta devant les barres en secouant la tête et en se cabrant pour faire demi tour. Le cavalier n'abandonna pas pour autant, reprenant un exercice d'assouplissement en attendant de pouvoir faire un second essai. Dean enchaîna tout aussi bien que la première fois. Lou ne s'arrêta pas en plein milieu et Ezra manquait de rectitude.
« Regardes loin Ezra ! C'est un chewing-gum ton cheval là ! Encadres le ! »
Yennefer se décontractait de plus en plus, laissant apparaître un sourire au bord de ses lèvres. Le contact avec l'étalon était plus harmonieux, corrigeant les maladresses de début de séance, bien qu'il en aurait toujours certaines. Elle devait bien avouer qu'elle prenait beaucoup de plaisir à être sur sa selle. Alors quand son tour arriva, en tentant de respecter l'aide de Liam, elle fit son passage à l'autre main. Elle sentit une légère différence dans ce passage-là...
« C'était super ça Yen ! »
Le coréen enchaîna derrière Yen et Kim, avec un passage similaire au premier. Derrière lui, Ale retenta, et essuya un nouvel échec. Liam lui conseilla de passer au pas, pendant qu'il expliquait la suite aux autres... Une fois ses cavaliers autour de lui, il prit la parole d'un ton calme.
« Bon, cette fois, on va faire la ligne centrale, plus l'un des deux demi-cercle. Au lieu de poursuivre sur le second demi-cercle, vous continuez tout droit et vous gagnez la piste. Là encore, en gagnant la piste, un départ au galop sur quelques foulées avant de revenir au trot et revenir de suite pour faire la même chose à l'autre main. Des questions ? »
Tout le monde secoua négativement de la tête et se remit au travail. Le virage rendait l'exercice un peu plus difficile. Malgré tout, Dux semblait toujours un peu blasé. Lou avait un peu trop fait dévié Unfor à l'intérieur du cercle et Ezra avait un cheval un peu plus réactif étrangement. Comme s'il se réveillait enfin après tout ces passages. Ale s'intercala entre Yen et Ezra pour effectuer un passage un peu chaotique, reprenant l'exercice au même point qu'eux. Mais on voyait bien qu'Invictus s'énervait. Il secoua d'ailleurs la tête avec force tout au long de son passage... Yennefer se pinça les lèvres face à l'exercice qui se complexifiait, étudiant toujours les passages des autres cavaliers pour confirmer ses pensées. Elle se lança avec la motivation de bien faire, mais surtout dans le but de se faire plaisir avec Kim. Elle osait être plus discrête avec ses aides, utilisant beaucoup le poids de son corps, en gardant en tête les paroles de Liam. Kim manifesta sa joie lors du départ au galop, joie que la cavalière ressentait aussi à cet instant... Mais elle put reprendre le trot sans grande difficulté.
« Bien Yen ! Caresse. »
Le coréen sourit à l'image que lui offrait ses deux aimés mais se reconcentra vite sur sa tâche. Wig'One eu plus de difficulté, faisant un écart pour s'échapper des barres. Le coréen encaissa et repassa tout de suite sur le dispositif, avant que les autres cavaliers ne reviennent pour le faire à l'autre main. Liam réclama ensuite un second passage pour tout le monde, afin d'être sûr que c'était bon pour tous, avant de déclaré une petite pause. Le coréen en profita pour s'approcher de Yen, un léger sourire aux lèvres.
« Alors ? Ça se passe bien pour l'instant ! » « Le fiston est sage ! » dit-elle amusée avant de reprendre. « Il est vraiment gentil, pardonnant mes erreurs. C'est vraiment plaisant de le monter. » « Je t'avais dit que c'était une crème ! » répondit-il en souriant.
Elle lui lança un regard en souriant sincèrement, pendant qu'elle caressait affectueusement l'encolure de l'étalon. Elle ne serait pas contre de le monter de temps en temps... Et du coup, elle comprendrait mieux la demande de Liam pour le débourrage de Triss. Le coréen avait fait un travail incroyable avec Kim.
« Il te fait suer le tien par contre... C'est à se demander si un jour, il se calmera. » « Oui... Mais ça va... Je compte pas tomber aujourd'hui ! Mais c'est vrai qu'il est casse-couille... » « J'espère bien que tu comptes pas tomber aujourd'hui ! »
Et c'était peu de le dire. Le coréen soupira et lança un regard peu amical aux oreilles du bicolore. Lou les rejoignit au petit trot, un grand sourire aux lèvres. Elle repassa au pas à la hauteur de Yen. La polonaise posa son regard sur Lou, bien qu'elle jeta toujours des coups d'oeil au coréen.
« Coucou les amoureux ! C'est cool que tu monte avec nous Yen ! Tu viendras plus souvent alors ? » « Je ne sais pas... Car j'en connais un qui va ronchonner, déjà qu'il aimerait bien m'avoir à plein temps avec lui. Et puis, je ne suis vraiment pas à votre niveau. »
Elle ne connaissait pas beaucoup Lou, comme un peu l'ensemble de l'équipe qu'elle apprenait de plus en plus à connaître depuis sa relation avec le coréen, sauf Liam. Mais elle semblait être d'une grande curiosité... Et elle se demandait si par moment, elle n'était pas du genre à franchir quelques limites. La rouquine fronça un instant des sourcils, en proie à la réflexion avant de faire une moue un peu déçue...
« Oh... Jeff c'est ça ? Il est terrible ce mec, il nous pique tout le monde... »
Elle secoua la tête négativement, sans pour autant perdre de sa fraîcheur et de sa joie de vivre. Le coréen la savait loin d'être innocente mais elle jouait très bien la fille naïve et innocente du groupe. Ce n'était pas si gênant que ça au final, sauf quand elle venait lire par dessus votre épaule... Ce dont le coréen avait fait les frais lorsqu'il prospectait pour l'achat de Kim... Heureusement, elle avait gardé sa langue à ce moment là, mais depuis, il faisait toujours un peu attention à ce qu'il avait dans les mains quand elle était dans les parages... Elle avait un sens du privé assez peu développer... Yennefer ne put s'empêcher de rire à ses paroles.
« C'est bien lui ! Il aime bien avoir un harem à ses pieds. » dit-elle en rigolant.
Il y a toujours de l'agitation dans l'élevage, entre ses élèves à sa charge, son équipe et surtout son troupeau de chevaux qui ont tendance à le faire tourner en bourrique. Une ambiance différente que dans les écuries de la team, pas qu'elle était meilleure... Elle était juste atypique, à l'image de son propriétaire.
« Et je pensais qu'il ne vous piquait que Izikel moi ! » « Izikel... Toi... Ça commence à faire pas mal ! »
La rouquine sourit de nouveau alors que Liam les sommait de se remettre en route. Le coréen eu un soupir en tournant la tête vers les filles.
« La récré est terminée... »
Ils reprirent le trot, studieux, pour refaire le dispositif mais dans sa totalité cette fois, avec le passage des cavaletti au galop. Dux et Unfor furent exemplaires. Invictus tenta de mettre son cavalier par terre. Ezra avait un peu plus de mal avec son bicolore. L'équidé ne comprenant pas trop comment sauter les cavaletti. Mais après plusieurs passages isolés sur les trois petits obstacles, les choses se firent mieux. Le coréen devait sans arrêt faire des cercles après ses passages des cavaletti, Wig'One s'obstinant à vouloir en sauter deux d'un coup et rester au galop ensuite. Yennefer avait repris l'exercice dans la bonne humeur, bien que son premier passage après la pause n'a pas été parfait. C'était le temps de relancer la machine, je retrouvais la bonne cadence de trot et sa bonne position en selle.
Liam les fit enchaîner les passages, jusqu'à ce que Lou commence à râler dans sa barbe qu'elle avait mal aux fesses. D'autant plus que les chevaux commençaient à être trempés. Wig'One avait le poitrail entièrement recouvert d'écume, mais il était enfin calme et le coréen réussi un enchaînement complet du dispositif sans faire de cercle. Jugeant qu'ils avaient bien bosser malgré quelques erreurs persistantes, l'éleveur les laissa marcher rênes longues, le temps de ranger ses barres. S'ensuivit un concert de caresses ! Dean et Lou décidèrent d'aller marcher dehors. Ale et Ezra restèrent un peu pour faire quelques assouplissements. Le coréen se rapprocha doucement de Yen, un sourire aux lèvres.
« Je ne sais pas qui est le plus sadique... Liam ou Jeff lors des entraînements... » « Ah ça... »
Elle avait posé un regard amusé vers le coréen. Elle devait bien avouer que la séance, bien qu'avec Kim elle n'avait pas eu à batailler comme certains cavaliers, n'avait pas été de tout repos surtout en fin de séance où le rythme s'était enchaîné.
« Et je vais peut-être te piquer Kim et demander la garde alternée. » dit-elle en rigolant. « Tu peux le prendre quand tu veux. »
Le coréen sourit et se pencha un instant sur l'encolure de Wig'One pour la lui flatter. Il avait quand même bien bosser sur cette séance !
« Par contre il va falloir doucher Kim... Et lui mettre de l'argile. Tu l'as déjà fait ? » « Oh oui... Des milliers de fois, autant dans la clinique où je bossais qu'avec les chevaux de Jeff ! »
Il sourit en réponse à la jeune femme. Que pouvait-il demander de plus ? C'était parfait... Il portait une grande attention aux tendons de son petit protégé, qu'il ne voulait pas voir s’abîmer, comme au reste de ses chevaux de toute façon. Wig aurait droit au même traitement, d'autant plus qu'il était encore plus transpirant que Kim... Elle était attendrie par sa demande, qui ne pouvait signifier qu'une seule chose. Il faisait très attention à la santé de son cheval, elle comptait en prendre grand soin. Elle lui flatta l'encolure, gratouillant légèrement proche du garrot, bien qu'avec la selle elle ne pouvait pas viser la zone sensible chez lui.
« Il a déjà eu le droit à une séance de Shiatsu ? » « Non jamais... Il connaît l'ostéo bien sûr mais pas le shiatsu... » « Et oui, maman Yen lui en fera une dans la semaine. » dit-elle en souriant.
Et lui même serait curieux de voir une séance entière... Il s'arrêta à l'entrée de la carrière, ne voulant pas prendre le risque de déambuler dans les allées avec Wig, préférant être à pied, et se dirigea vers l'allée de l'élevage avec la jeune femme. Première étape, débarrasser l'étalon de son matériel. Ensuite douche, argile, et séchage... Une bonne heure de soins en perspective, voir plus...
***
Après s'être assuré que Wig était bien, il se dirigea vers Kim et Yennefer, passant machinalement la main sur le chanfrein de son étalon, qui tendait le nez vers lui, les oreilles en avait. Il avait l'air calme, tranquille... Comme à son habitude en fait.
« Ça va ? »
Elle avait pris son temps dans les soins de l'étalon, appréciant son caractère. Elle tourna sa tête vers le coréen en entendant sa voix, ne pouvant pas s'empêcher de sourire.
« Très bien, je commence à connaître ses zones de grattouilles préférées ! »
Le jeune homme rit doucement, poursuivant ses caresses sur le chanfrein de l'étalon. Elle flatta l'encolure de l'étalon en se rapprochant de Kwaïgon, afin de déposer un chaste baiser sur ses lèvres. C'était plus fort qu'elle... Elle en avait tout simplement envie. Il se laissa faire, passant doucement une main sur sa hanche à ce contact.
« Tu n'es pas trop fatigué ? »
Son regard observait les traits de son visage, un faible lueur inquiète dans son regard. Cette nuit-là allait être difficile à chasser pour le moment.
« Si... Je vais faire une pause dans... Dans ma recherche. Je vais éviter de m'y pencher cette nuit... Je reprendrais demain ou après-demain. » « Tu peux même prendre une semaine... »
Il avait besoin de prendre un peu de recul et de sommeil. Son rythme devenait un peu trop chaotique pour qu'il le supporte correctement... Elle pouvait même accepter qu'il arrête tout simplement ses recherches, surtout si celles-ci le blesse. Il soupira et jeta un oeil à Kim qui commençait à somnoler doucement sous les caresses avant de revenir à la jeune femme avec un léger sourire.
« C'est quoi ton programme de l'après-midi alors ? » « Hm... Très bonne question. J'ai un peu oublié de regarder ce matin, si cela se trouve Jeffrey m'attends comme un tigre en cage. Et toi ? »
L'éleveur avait l'habitude, elle n'était pas vraiment tête en l'air, mais les choses banales elle pouvait les oublier. Soudainement, un sourire malicieux s'était dessiné sur ses lèvres en attendant sa réponse.
« C'est notre après-midi de repos... Je pensais aller faire un tour en ville, j'ai quelques courses à faire. Sinon pas grand chose... J'hésite à rester traîner dans le Haras, je suis un peu fatigué. »
Il adressa à la jeune femme un doux sourire, s'autorisant un regard un peu las. Si elle avait une proposition cependant, il changerait ses plans... Mais... Sinon... Il avait bien une idée en tête et cela concernait même la jeune femme...
« Une petite sieste peut-être ? » dit-elle avec malice.
Elle ne serait pas contre de rester avec lui, les journées lui semblaient de temps en temps bien longues sans sa présence à ses côtés. Bien qu'ils passaient une grande partie de leur soirée ensemble, ce n'était pas toujours suffisant pour elle. Ce manque avait tendance à lui serrer la gorge. Il prit une légère inspiration à la proposition de la jeune femme, réfléchissant un peu, pesant le pour et le contre.
« Mmh... Je ne sais pas. J'ai peur de ne pas dormir cette nuit si je dors maintenant... Et puis j'aimerais vraiment aller voir un truc et je ne sais pas si j'aurais une autre occasion aussi vite... »
Il haussa doucement des épaules avant de reprendre, toujours un peu indécis au fond. Sa proposition lui faisait vraiment envie...
« Mais si Jeff te laisse libre cette après-midi, tu pourrais peut-être venir... Après tout ça te concerne... Et si je m'endors tu pourras prendre le volant à ma place comme ça ! »
Il sourit doucement, attendant de voir sa réaction avec une certaine malice. Elle fronça légèrement les sourcils à ses paroles, laissant apparaître une lueur curieuse dans son regard.
« Ça me concerne ? C'est à dire ? Tu veux aller voir quoi... » « Si je te le dis c'est plus une surprise. »
Et se serait forcément moins drôle. Il avait piqué à vif sa curiosité, Jeffrey allait forcément devoir se passer d'elle pour la journée.
« Par contre, non je ne prendrais pas le volant de un parce que ta voiture est un monstre ! Et de deux parce que je n'ai pas le permis. » dit-elle en souriant. « J'allais dire que le permis ce n'est qu'accessoire mais en fait... Ça l'est pas quand il s'agit de ma voiture en effet. »
Il fit une légère grimace et déposa un baiser léger sur le front de la jeune femme et sorti du box en passant une dernière fois la main sur son chanfrein.
« Tu veux aller voir Jeff ? Enfin, ça dépend si tu veux m'accompagner ou pas aussi... »
Il n'y avait pas que l'avis de Jeffrey au final. Le sien comptait aussi. Même s'il ne doutait pas trop de sa réponse à la vue de la lueur curieuse qui avait illuminé ses traits.
« Je vais lui envoyer un message, c'est plus sûr... Si non, il pourrait nous capturer tous les deux ! Et oui, je t'accompagne ! »
Elle l'avait suivi pour sortir du box, soudainement impatiente de connaître la surprise. Surtout qu'elle n'avait pas la moindre idée de ce que cela pouvait bien être... Quand on sait que son cadeau d'anniversaire était un appartement... La démesure du coréen avait tendance à la mettre sur le cul.
« Parfait alors ! J'espère que Jeff ne m'en voudra pas trop... J'aime pas trop l'idée de me mettre tout ton entourage à dos... Je crois que juste ta mère c'est suffisant... »
Il servit un léger sourire à la jeune femme avant de fermer la porte du box et l’entraîner vers son pavillon. Il avait des clés et un portefeuille à récupérer avant de rejoindre le parking... Ce qu'ils firent dans la droite lignée !
Le jeune homme conduit moins vite qu'à son habitude et avec un peu moins de fluidité, ce qui trahissait sans mal sa fatigue du jour. Cependant, ils arrivèrent à bon port sans mal et il fini par garer la voiture devant une boutique pas très grande au premier abord, la façade peinte en noire et qui ne donnait pas forcément envie, ni même qu'elle était ouverte... Quelques notes de musiques avaient été peinte avec soin sur la vitrine mais elle semblait un peu écaillée. Un grand morceau de papier jauni par le temps couvrait la moitié de la vitrine, empêchant de voir à l'intérieur. Le jeune homme resta un instant assit, les mains posées sur son volant et attendit la réaction de la jeune femme, sans rien dire. Elle observa la vitrine, dont elle n'arrivait pas à apercevoir l'intérieur, un détail qui fit ronger sa curiosité. Puis elle braqua son regard vers lui en fronçant les sourcils.
« Ne me dit pas que tu as acheté une nouvelle boutique ! »
Elle devait bien avouée qu'elle n'arrive pas encore à comprendre la raison de leur présence ici, bien que les notes de musiques fit germer quelques idées dans ses pensées... Le jeune homme laissa échappé et rire réellement amusé avant de répondre à la jeune femme, son sourire ne quittant pas ses lèvres.
« Non ! Non, non... C'est... C'est une boutique de musique... Je sais qu'elle paye pas de mine comme ça mais bon... Je venais voir ce qu'ils avaient en terme de pianos... »
De nouveau, il posa un regard doux sur la jeune femme, sans se départir de son sourire et sans pour autant changer de position... Elle avait maintenant la confirmation de leur raison ici...
« Tu prends de l'avance pour mon prochain cadeau d'anniversaire c'est ça ? » dit-elle amusée.
Elle connaissait déjà la réponse à sa question... Avait-il besoin de prétexte pour offrir quelque chose ? Elle n'avait tellement pas l'habitude d'être à ce point gâtée, d'avoir un pied dans le luxe... Elle avait peur d'être dépassée avec le temps.
« Non mais... Si ça peut te faire plaisir de le croire... »
Il haussa des épaules enleva les clés du contact. Un sourire s'afficha sur ses lèvres à ses mots, ainsi qu'une vague d'affection pour lui. Sa franchise, sa manière d'être ne la laissait jamais indifférente.
« On va voir ? » « Allons voir ça ! »
Avec un nouveau sourire il ouvrit sa portière pour sortir, attendant la jeune femme pour entrer dans la boutique... L'intérieur était plus attrayant. Rempli d'instruments, sentant le bois et d'autres choses que le jeune homme n'identifiait pas. Il parcourait des yeux les instruments, distraitement, laissant finalement faire la jeune femme. Ce n'était pas plus mal qu'elle soit venu finalement ! Elle pourrait plus judicieusement faire un choix que lui... Il s'approcha d'elle et lui souffla quelques mots dans le silence de la boutique... Elle l'avait suivi avec la même curiosité du début, son attention avait rapidement balayé la boutique avant de se poser vers l'un des piano au fond de la pièce. Elle s'était approchée lentement, faisant rapidement le tour avant d'admirer les touches.
« Qu'est-ce que t'en pense ? » « Cette marque de piano est très réputée... »
Elle s'était renseignée un jour sur les modèles, mais surtout les prix. Et bien que cela pouvait varier d'une boutique à une autre, voir d'un pays à un autre... Ils restaient toujours dans une fourchette assez petite et une somme exorbitante pour elle. Elle finit par s'installer sur le tabouret, glissant délicatement ses doigts sur les touches... Et ne tarda pas à entamer une mélodie. Quand elle termina de jouer la dernière note, elle tourna son regard vers lui, répondant enfin à sa question.
« Il est à la hauteur de sa réputation. »
Le jeune homme l'avait laissé faire et écouta la mélodie avec attention, fermant même les yeux quelques secondes... La musique eu le même effet sur lui que la dernière fois que la jeune femme avait joué, le laissant un peu fébrile... Mais un froissement attira son attention et il tourna la tête. Une femme d'une soixantaine d'année se tenait là, un fin sourire aux lèvres. Le coréen la salua d'un geste de la main, en révérence et elle fit de même, lui souriant largement, laissant découvrir des dents manquantes...
Il n'avait pas choisi cette boutique au hasard. Il connaissait cette femme pour avoir travailler avec elle à une certaine époque. A ce moment là, elle vivait du côté de Vladivostok et elle hébergeait les passeurs... Elle tenait déjà un magasin de musique et c'était une vraie passionnée. Ils écoutèrent la jeune femme en silence jusqu'à ce qu'elle se retourne. Le coréen lui sourit, légèrement chamboulé au fond de lui...
« Je vois ça... »
Il inspira de façon un peu chaotique et sourit à Yennefer.
« Il te plaît ? » « Oui... »
Elle ne pouvait pas lui mentir, ce piano était une merveille. Et quel pianiste ne rêverait pas d'en posséder un ? Mais elle se demandait si elle méritait d'en avoir un, elle n'était qu'une pianiste débutante selon elle. La tenancière de la boutique attendait, ne semblant pas vraiment les comprendre... Et pour cause, elle ne parlait que russe et polonais. Il allait forcément y avoir un moment dans la conversation où l'un d'eux ne comprendrait pas les autres.
« Je te présente Natalia. Elle parle russe et polonais... Donc si tu veux lui poser des questions, n'hésite pas... »
Il sourit gentiment, glissant les mains dans ses poches, curieux de voir ce qui allait se passer... Elle remarqua enfin la présence de la gérante, se levant du tabouret en lui adressant un sourire. Son regard s'était illuminée en apprenant que celle-ci parlait le polonais.
« Bonjour Natalia, je me présente Yennefer. J'espère que vous ne m'en voulez pas d'avoir utilisé votre piano. J'aurais dû vous demander l'autorisation avant, mais j'avais jamais eu la chance de voir un tel piano... »
La tentation avait été trop forte, elle avait eu envie de jouer... Et encore maintenant, elle sentait ses doigts légèrement picotés. Natalia lui sourit, plein de chaleur dans le regard et une pointe d'admiration.
« Non, non... Vous avez eu raison. Ils sont là pour ça ! Essayez-en d'autres si vous le souhaitez ! Le ressenti et le poids des touches diffère d'une marque à l'autre. Tout comme le son. Alors n'hésitez surtout pas. » « Je vous remercie. » dit-elle en souriant.
De nouveau elle sourit et adressa quelques mots à Kwaïgon en russe, auquel il répondit d'un bref hochement de tête et d'un sourire. De nouveau elle sourit à Yennefer et lui fit un geste de la main, lui signifiant d'aller en tester d'autre et de se faire une meilleure opinion de tout ce qu'elle pouvait offrir... Elle se dirigea vers les autres piano de la boutique, prenant le temps de jouer quelques assortiments de notes, revenant par moment en refaire d'autres de nouveau. Elle cherchait à trouver le piano où le toucher et le son la faisait la plus frissonner.
« Vous avez un choix de piano incroyable... »
Elle lança un regard au coréen, un sourire s'était gravé sur ses lèvres depuis quelques minutes. Elle se dirigea vers le premier piano, qui restait son coup de cœur...
« Je crois que j'aime bien celui-ci... »
Le coréen l'avait laissé faire, souriant à ses paroles et à ses gestes. Quand elle était revenu vers le premier piano, son sourire s'était agrandi. Il s'approcha doucement de jeune femme, passant une main dans son dos, au creux de ses reins, pour finalement venir souffler à son oreille.
« On prend celui-là alors ? » « Est-ce que tu as conscience que tu me gâtes trop... »
Un sourire passa sur ses lèvres, malicieux. S'il disait que c'était son cadeau d'anniversaire pour lui-même, peut-être que la chose passerait mieux ? Avec un peu de chance... Elle tourna la tête vers lui, plongeant son regard dans le sien.
« Je n'ai pas besoin de tout ça pour t'aimer. » « Je le sais. »
Elle lui avait déjà dit, mais elle risquerait de lui dire à chaque fois, sans probablement changer quelque chose. Elle posa une main sur sa joue, la caressant délicatement avant de reprendre parole.
« Est-ce que cela te fait plaisir de me gâter aussi ? Qu'est-ce qui te motive autant à me rendre dingue de la fortune que tu dépenses... »
Elle lui lança un sourire amusée, malgré le sérieux de ses questions... Il sourit face à sa question et acquiesça vivement.
« Oui ça me fait plaisir. Si je te dis que cette fois c'est mon cadau d'anniversaire à moi-même tu me crois ? »
Elle éclata de rire face à sa réponse, secouant la tête en fronçant légèrement les sourcils.
« Oh tu vas te mettre au piano, j'ai hâte de t'entendre jouer du coup ! » Dit-elle malicieusement. « Exactement ! Mais tu vas très vite te rendre compte qu'il vaut mieux que tu joue toi. » répondit-il en souriant.
Il fit une légère grimace. Il savait que c'était perdu d'avance mais au moins il aurait essayer. Il sourit de nouveau avant de se tourner vers Natalia et lui expliquer ce qu'il voulait et où faire livrer le piano. Après quoi, il s'arma de sa carte bancaire, la lui tendant avec sérieux. Une bonne chose de faite ! Elle ne s'était pas révoltée, sachant qu'il était aussi, voire plus, têtu qu'elle. Et qu'il avait finalement gagné la partie depuis leur arrivée devant la boutique. Il remercia chaleureusement Natalia avant de lancer un sourire malicieux à la jeune femme.
« Il sera livré demain au Haras... On rentre ? Ou tu veux faire autre chose, tant qu'on est encore en ville ? » « Hm... »
Quitte à en profiter si elle avait un achat à faire... Le Haras étant exentré, ils ne venaient pas tout les jours dans le centre de Prague... Elle avait bien des achats à faire, mais sans la présence du coréen, sauf peut-être un. Elle lui lança un regard amusée avant de lui répondre.
« Il me faut du papier cadeau ! »
Elle avait mis longtemps à faire son choix sur son cadeau, des bricoles en comparaison à un appartement de luxe. Mais elle espérait qu'il puisse lui plaire quand même. Le coréen sourit, amusé.
« Très bien... Essayons de trouver ça alors. »
Il sourit de nouveau et entraîna Yennefer jusqu'à la voiture, reprenant la route un peu au hasard. Étrangement, ils trouvèrent du papier cadeau dans une boutique de souvenir. Il laissa choisir et faire la jeune femme, curieux avant de la ramener au Haras. La fatigue commençait à l'envahir et il s'allongerait bien quelques minutes avant le dîner...
Dans chaque personne saine d'esprit, il y a un fou qui cherche à sortir. Personne ne devient fou aussi vite qu'une personne parfaitement saine d'esprit. - Terry Pratchett
Certaines actions, pour leur réalisations, demandent du temps. C'est ce qui rend ce temps si précieux. On court après sans arrêt pour en avoir plus, là où certains cherchent justement à s'en débarrasser. Le coréen avait toujours laisser le temps au temps. Faire les choses au rythme qu'elles l'exigent. Mais depuis quelques temps, il commençait à s'impatienter et pour une fois, il cherchait à ne pas attendre. Pour la sécurité de Yennefer, il avait décidé que pour reprendre la traque et la suppression des vidéos la concernant, il quitterait la chambre. S'il devait replonger dans l'état de colère dans lequel il s'était trouvé, il préférait que ce ne soit pas devant elle. Il avait attendu une bonne semaine avant de reprendre ses recherches nocturnes. Mais maintenant qu'il savait à quoi s'attendre, il arrivait à contrôler sa rage. Ce n'est qu'au bout de deux longues autres semaines qu'il réussi à enfin arriver à ses fins. Recenser tout les sites pornographiques, puis trouver les vidéos correspondantes et pirater le système pour les supprimer, entre autre réjouissances, n'avait pas été une tâche aussi facile qu'il ne l'avait cru. Cependant, un jour, peu avant l'aube, il avait enfin eu la confirmation après trois vérifications que plus aucune des vidéos de la jeune femme n'était disponible, en libre service ou non. Il ne pouvait rien pour ceux qui avaient potentiellement téléchargé les images chez eux, mais il avait laisser des traceurs un peu partout, au cas où l'une des vidéos referait surface. Quand il ne resta plus que le contenu de la clé usb, il s'autorisa un soupir, rejetant la tête en arrière et fermant les yeux quelques secondes. C'était fini. Un mois après, c'était enfin terminé. Du moins, pour Yennefer, c'était terminé. Mais pas pour lui. Il visionna une dernière fois les vidéos, isola les visages des hommes et lança une reconnaissance faciale avant de formater plusieurs fois la clé usb et profiter du Haras encore endormi pour aller la passer dans l'un des mixeur de la cuisine. Quand il revint devant son pc, dans la bibliothèque, sa recherche avait aboutie. Certains étaient déjà mort. Pour les autres, il contacta un homme de confiance. Il avait dit à Yennefer qu'il resterait au Haras et il le ferait. Mais cela ne l'empêchait pas d'agir malgré tout...
***
Sans Neyla et Logan, tout le planning avait été revu. Logan avait emporté ses chevaux avec lui, mais il restait ceux dont Neyla s'occupait. Sheïtan fut rendu aux bons soins de son propriétaire, mais il restait toujours la question de Wig'One. Pour l'instant, il était monté par Kwaïgon, mais le coréen ne trouvait pas cette solution extraordinaire. Un cheval en plus lui prenait du temps. Heureusement, une cavalière fraîchement arrivée au Haras avait prit l'étalon bicolore en demi-pension. Cela leur faisait gagné du temps. Malgré tout, le coréen dû vite se rendre à l'évidence : il ne pouvait plus assumer sa propre demi-pension. Il rendit donc le contrat d'Eurodisney, bien qu'à contrecœur. Il aimait bien cette moitié d'étalon, même si personne ne comprenait pourquoi.
Il y eu aussi du changement parmi les animaux de compagnie de l'équipe. Lou avait laissé Ome chez elle depuis les dernières fêtes de fin d'année. Logan était parti avec Legolas. Mais l'état de Caïpi, la lynx rousse de Louna, inquiétait toujours. Elle perdait du poids et son poil se faisait terne. L'éleveuse dût se rendre à l'évidence malgré la douleur que cela lui provoquait. Mais le verdict de Siobhan tomba rapidement : elle était malade, elle souffrait, et il ne pouvait rien faire qui puisse la soigner. Douloureuse décision, mais elle fut prise et le vétérinaire euthanasia la lynx... Il ne restait donc plus que Sherlock, le chat des forêts norvégiennes de Liam, avec son pelage tricolore. Il restait dans l'allée de la pension ou alentour, se risquant parfois à aller chez Louna pour voir Dom, mais guère plus. Un chat très casanier, ce qui arrangeait bien l'éleveur...
Carter prenait doucement ses marques dans l'équipe. Le coréen n'avait pas encore vraiment eu l'occasion d'apprendre à le connaître, mais cela viendrait. Il avait l'air d'apprécier l'équipe et les autres et c'est bien ce qui comptait le plus pour l'instant. Entre son absence et son planning quotidien qui incluait Yennefer une grande partie de son temps, il avait un peu de mal à passer du temps avec les membres de l'équipe en dehors des heures de travail. Personne ne lui en tenait rigueur, mise à part Liam. Non pas qu'il jalousait Yen mais... Ezra et Ale taquinaient pas mal l'éleveur là dessus, dès qu'il râlait dans sa barbe quand le coréen lui refusait un repas ou une entrevue. Ale avait même prit sa défense, alors qu'il était l'un de ceux qui le taquinait le plus, en lui servant un « Oh aller Liam ! Fais pas comme si ça changeait de d'habitude ! C'est juste que maintenant, on sait ce qu'il va faire. » avec un sourire amusé. L'éleveur n'avait plus rien dit derrière cela, ce qui avait tout de même arraché un sourire au coréen. Une chose était certaine en tout cas, tous s'accordaient à dire que sa relation avec Yennefer avait un effet plus que bénéfique sur lui. Et ils en étaient plus ou moins tous reconnaissant envers la polonaise...
Un autre membre de l'équipe dont le sourire revenait de plus en plus était Izikel. Il ne posait plus de questions et redevenait, au contact de sa fille, l'homme qu'il était. C'était, en soit, une bonne chose qu'il arrive à tourner la page. Mais depuis le retour du coréen, il ne cessait de lui lancer, lors de certains sujets un peu sensibles, des regards en biais, que le coréen ne pouvait pas ignoré. Il avait parfaitement comprit qu'à un moment ou un autre, il faudrait qu'ils aient une conversation à ce sujet. Mais Kwaïgon était certain d'une chose, il ne viendrait le voir que lorsqu'il serait prêt. Et pas avant.
Il en avait profité cependant pour rassurer Liam ; Il ne garderait pas le secret bien longtemps. L'éleveur avait été soulagé de l'apprendre... Ces mois hivernaux avaient été riches en émotions, autant pour l'équipe que pour le coréen, malgré son absence et d'un côté, ils étaient assez content de voir la fin du trimestre approcher. Pour fêter la fin de leur premier complet de l'année et l'arrivée des beaux jours, Liam organisa un barbecue à l'élevage. Tout le monde était là, Yennefer bien sûr, mais également Aliénor, future co-éleveuse avec Liam. L'éleveur, de coeur généreux, avait également proposé à Jeffrey de se joindre à eux, ainsi qu'à Tom et Reanna. Une façon également de rassembler tous ses témoins... Le coréen se prêta au jeu et rit avec les autres, lâchant prise pour une fois. La soirée se déroula merveilleusement bien... Et passé minuit, chacun commença à regagner son chez soi. Ils rangèrent les tables et les chaises... Bientôt, il ne resta plus que Yennefer, Izikel et Kwaïgon. Le coréen comptait s'éclipser avec Yen mais... Un petit quelque chose dans le regard de l'irlandais le retint. Il murmura à Yen qu'il la rejoignait très vite et s'assit à côté de l'éthologue, dans l'herbe, le long du mur de l'écurie. L'irlandais le remercia d'un sourire et sorti deux bouteilles de bière de la glacière qui était resté là. Seul vestige de leur repas...
Il décapsula les bouteilles et en tendit une à Kwaïgon, qui la prit avec un léger sourire. Ils restèrent longtemps silencieux, chacun sirotant sa bière. C'est finalement Izikel qui brisa le silence d'une voix légère.
« Elle est encore en vie, n'est-ce pas ? »
Il n'y avait aucun reproche dans sa voix, ni remords ou regrets. Seulement une pointe de curiosité sincère, que son regard partageait. Le coréen plongea les yeux dans les siens en restant silencieux un moment avant de répondre d'un murmure, en tournant la tête.
« Oui. »
L'éthologue hocha doucement de la tête en baissant les yeux sur sa bouteille.
« Comment est-ce qu'elle va ? » « Mal. Elle fait une grave dépression... » « Ça se comprend... » « Oui... Je sais. » « Mais ? »
Ils échangèrent un regard. L'irlandais restait serein, ce qui était déjà une bonne chose.
« Mais je ne lui pardonne tout de même pas. » « Ce qu'elle t'a obligé à faire ? » « Non, ce qu'elle t'a fait à toi. »
L'irlandais acquiesça avec un pincement de lèvres et prit une gorgée de sa bière, laissant le silence les envelopper un instant. Il reprit finalement la parole après une brève inspiration. Ce qu'il allait dire lui coûtait beaucoup, mais sa décision était prise. Et tout comme celles que prenaient Kwaïgon, elle était irrévocable.
« Je ne veux pas la revoir. Je me doutais qu'elle était encore vivante et j'ai eu pas mal de temps pour réfléchir et me demander ce que j'aimerais... Quelle direction je voulais que ma vie prenne et... Je me suis rendu compte que c'était sans elle. Et... Je me battrais pour garder Cathy si elle la réclame. »
Le coréen eu un bref hochement de tête. Cela avait dû être une décision difficile. Mais il l'avait prise. Et le coréen préférait d'autant plus que se soit dans ce sens là.
« Elle ne réclamera pas Cathleen. D'après... Les gens chez qui je l'ai placé, elle a des tendances à perdre l'esprit. Elle est dans une spirale destructrice et tant qu'elle n'aura pas remonter la pente et retrouver un équilibre mental lui permettant de penser et agir par elle même, ils ne la laisseront pas faire ce que sa folie lui dicte. » « D'accord. Mais je ne veux tout de même pas la revoir. » « Ce ne sera pas le cas si tu ne le souhaite pas, même après sa guérison. »
De nouveau, le silence les enveloppa et on n'entendit plus que le bruit des chevaux et de la bière dans leur bouteille en verre, au fur et à mesure de leurs gorgées. L'irlandais termina sa bouteille et tourna la tête vers le coréen, le regard grave, sincère. Kwaïgon plongea son regard dans le sien, à l'écoute.
« Merci d'avoir prit les choses en charge. De nous avoir protégé, Cathleen et moi, autant que possible. Et pour tout ce que tu feras à l'avenir, tant que toute cette histoire n'est pas complètement derrière nous... » « Tu n'as pas besoin de me remercier... » « Si Kwaï... -il rit un peu- Tu ne te rend pas compte de tout ce que tu fais pour nous tous... »
L'irlandais se releva et lui tendit une main pour l'aider. Le coréen s'en saisi et se retrouva prit dans une accolade légère, mais brève. L'irlandais se détacha du jeune homme et sourit.
« Bonne nuit tombeur ! Ne fais pas trop attendre Yennefer, elle va m'en vouloir après. » « T'en fais pas pour ça va... »
Ils échangèrent un sourire et chacun reprit le chemin de son pavillon. « Tu ne te rend pas compte de tout ce que tu fais pour nous tous... » Non... Il ne se rendait pas compte. Et malgré le fait que tout le monde le lui dise, il ne s'en rendait toujours pas compte... Avant de rejoindre sa chambre il prit quelques minutes pour terminer sa bière, assit sur les marches du perron de son pavillon. L'annonce de l'état de Moïra ferait bientôt le tour de l'équipe. Mais... Il prenait les problèmes les uns après les autres. Pour l'instant, il venait d'en clôturer un, celui de Yen. Et malgré les mails inquiétant de Calum au sujet de Moïra, c'était un autre problème qu'il gérerait plus tard. Pour l'instant, il avait seulement besoin de sommeil après sa nuit blanche de la veille... Et s'il voulait avoir les idées claires pour faire face aux nouveaux problèmes, il devait s'accorder du temps et du repos... Deux choses contre lesquelles Yen ne serait pas contre, il en était certain...